THE LIBRARY The Ontario Institute for Studies in Education Toronto, Canada L [ B R A R Y APR 1 5 1969 THEONTARK.iu^uTUTE FOR STUDISS IN EDUCATION 1 RAPPORT SUR UN VOYAGE D'ÉTUDE A CONSTANTINOPLE EN EGYPTE ET EN TURQUIE D'ASIE LIBRARY FEB 3 1969 THE ONTARIO INSTITUTE FOR STUDIES IN EDUCATION Comité de défense des Intérêts français en Orient RAPPORT SUR UN VOYAGE D'ÉTUDE A COISSTANTINOPLE EN EGYPTE ET EN TURQUIE D'ASIE (JANVIER-AOUT 1912) PAR MAURICE PERNOT PARIS TYPOGRAPHIE FIRMIN-DIDOT ET C 56, RUE JACOB Le Comité des Intérêts français en Orient, fondé à Paris, il y a trois ans, avait adressé à la Presse la note suivante : « Les hommes qui composent le Comité n'ont qu'une pensée, celle de travailler sans distinction de parti et dans l'esprit le plus large à maintenir et à développer notre situation morale, politique et économique en Orient. Notre empire heureuse- ment agrandi dans le bassin occidental de la Méditerranée, ne doit pas nous faire oublier que la France a toujours en Orient des intérêts de premier ordre et qu'elle y a gardé des privi- lèges auxquels correspondent des devoirs qu'elle ne peut pas abandonner. « Le Comité se propose de faire appel à l'opinion et de secon- der la politique française en employant ses ressources et sa propagande à soutenir toutes les Œuvres qui font honneur à la France dans les pays d'Orient et contribuent à y étendre son action. » Le Comité reçut aussitôt quelques dons, notamment de la Chambre de commerce de Paris, du Crédit Lyonnais, de la Banque ottomane ; et une large et généreuse offrande des Arméniens vivant à Paris. Les fonds dont il disposait furent consacrés à quelques subventions, et aux frais d'une mission dans le Levant. Cette mission fut confiée à M. Maurice Pernot, rédac- teur au Journal des Débats. Cet écrivain distingué voulut bien se charger, à la demande du Comité, de présenter, Il sur la situation des établissements laïques ou religieux, protégés par la France dans le Levant, un rapport impar- tial et complet. Ce rapport est contenu dans le présent volume. Cette œuvre achevée, le Comité des Intérêts français en Orient, ne voulant pas disperser des efforts qui doivent tendre au même but, s'est dissous, et la plupart de ses membres ont fait adhésion au Comité de l'Asie française. Le Comité des Intérêts français en Orient avait été, au moment de sa fondation, constitué comme il suit : Président : M. A. RIBOT, de rAcadémie française, Sénateur, ancien Président du Conseil. Vice-Présidents : M. Léon BOURGEOIS, Sénateur, Ministre du Travail, ancien Président du Conseil. MM. Paul DESCHANEL, de l'Académie française, Député. LAVISSE, de l'Académie française, Directeur de l'École Normale supérieure. Marquis de RÉVERSEAUX, ancien Ambassadeur de France. Secrétaire général : M. Denys GOCHIN, de rAcadémie française, Député. Secrétaire : M. DE CAIX DE SAINT-AYMOUR. Trésorier : M. DAVILLIER, Régent de la Banque de France, Adminis- trateur de la C'^ des chemins de fer de l'Est. m Membres du Comité : MM. AYNARD, de l'Institut, Député, Régent de la Banque de France. BARTHOU, Député, ancien Ministre. BAUDIN (Pierre), Sénateur, ancien Ministre. BLANGHIER, ancien Sénateur. CHAILLEY, Député. Marquis de CHAMBRUN, Député. CHARLES-ROUX, Président du Conseil d'administration de la Compagnie générale transatlantique. CHARMES (Francfs)j de l'Académie française. Directeur de la Revue des Deux- Mondes. COCHIN (Henri), Député. DEVELLE, Sénateur, ancien Ministre. DUPUY (Charles), Sénateur, ancien Président du Conseil et de la Chambre des Députés. DUPUY (Jean), Sénateur, Ministre des Travaux publics. Baron d'ESTOURNELLES de CONSTANT, Sénateur, Mi- nistre plénipotentiaire. ETIENNE, t)éputé, ancien Ministre, Vice-Président de la Chambre des Députés. FONCIN (Pierre), Inspecteur général de l'Instruction publique, Président de l'Alliance française. DE FREYCINET, de 1 Académie française, de l'Académie des Sciences, Sénateur, ancien Président du Conseil. GOYAU. HANOTAUX, de l'Académie française, ancien Ministre. Comte d'HAUSSONVILLE, de l'Académie française et de l'Académie des Sciences morales et politiques. JONNART, Député, ancien Gouverneur général de l'Al- gérie. LAUDET (Fernand), premier Secrétaire d'ambassade h'■^ LEGRAND (Charles), Président de la Chambre de Com- merce de Paris. LEROY-BEAULIEU (Anatole), de l'Académie des Sciences morales et politiques, Directeur de l'École des Sciences politiques. LOZÉ, Sénateur, ancien Ambassadeur de France. IV MM. Comte de LUDRE, Député. MÉLINE, Sénateur, ancien Président du Conseil. MÉZIÈRES, de l'Académie française, Sénateur. DE MONBEL, Ambassadeur h'^^ Comte Bertrand de M UN, Membre de la Chambre de Commerce de Reims. Comte de NALÈCHE, Directeur du Journal des Débats. NISARD, ancien Ambassadeur de France. PICHON (Stéphane), Sénateur, ancien Ministre. POINCARÉ. (Raymond), de l'Académie française, Prési- dent de la République française. Marquis de POLIGNAC. RAIBERTI, Député. REINACH (Joseph), Député. REVOIL, Ambassadeur de France. SCHNEIDER, Député. THIERRY, Député. Marquis de VOGUÉ, de l'Académie française et de l'Aca- démie des inscriptions et belles-lettres. INTRODUCTION Le (( Comité de défense des intérêts français en Orient », constitué à Paris au mois de décembre 1911 sous la pré- sidence de M. Ribot, s'est proposé de soutenir et de déve- lopper, par tous les moyens qui seraient en son pouvoir, les intérêts de la France dans le Levant. Avant d'agir, il a voulu reconnaître le terrain sur lequel son action doit s'exercer, se renseigner sur l'état actuel de l'influence et des intérêts français en Orient, sur Timportance et la valeur des œuvres qui contribuent à répandre cette influence et à servir ces intérêts. C'est pourquoi le Comité m'a donné mission d'aller étu- dier sur place les œuvres françaises d'Orient, de visiter les établissements d'instruction et d'assistance adminis- trés par la France ou placés sous sa protection, et de me rendre compte de la situation et des besoins de ces établis- sements, afin de lui signaler les points où son interven- tion serait le plus nécessaire et pourrait être le plus efficace. Subsidiairement le Comité me demandait de recueillir quelques informations sur les principales entre- prises financières, industrielles, commerciales et agri- coles créées ou dirigées par nos nationaux dans le Levant. Je devais enfin, au cours de mes visites, chercher à VI INTRODUCTION. établir des liens utiles entre le Comité et toutes les per- sonnes qui représentent en Orient les traditions et l'in- fluence de notre pays. Une pareille enquête, pour être complète et approfon- die, eût nécessité un séjour prolongé dans chacune des régions où la France entretient des établissements et possède des intérêts. Toutefois, au cours d'un voyage de sept mois, j'ai pu rassembler de nombreux éléments d'in- formation. Parti de Paris le 11 janvier 1912, je me suis rendu directement à Gonstantinople, où j'ai séjourné pendant quelques semaines (4 janvier — A février). Tout en y visitant nos établissements et en y étudiant l'orga- nisation de nos œuvres, je me suis mis au courant des questions relatives aux intérêts français et étrangers dans les diverses régions de l'empire ottoman, et j'ai réuni les renseignements généraux qui pouvaient m'être utiles au cours de mon voyage. J'ai passé de là en Egypte; j'ai employé un mois à visiter Alexandrie, Tantah, Man- sourah. Le Caire, Suez, Port-Tewfik, Ismaïlia, Port-Saïd, et à recueillir des informations sur la Haute-Egypte, qui restait en dehors de mon itinéraire (4 février — 4 mars). Le 4 mars, je m'embarquais à Port-Saïd pour Jaflii. J'ai consacré quatre semaines à Jérusalem et à la Palestine (Jaffa, Bethléem, Naplouse, Nazareth, Saint- Jean-d'Acre et Gaïff.i : o mars — 5 avril). La visite de nos établisse- ments en Mésopotamie m'a retenu pendant environ deux mois (Orfa, Diarbékir, Mossoul, Bagdad : 10 avril — 10 juin). J'ai employé cinq semaiiies à visiter la Syrie : Alep, Homs, Damas, le Liban, Beyrouth, Tripoli, Latta- quiéh, Alexandrette, Antioche, etc : 10 juin — 17 juillet. D'Alexandrette j'ai passé à Adana, à Tarsous et à Mersina. INTRODUCTION. VII J'ai achevé ma tournée par la visite de nos établisse- ments en Asie Mineure et particulièrement à Smyrne. J'étais de retour à Constantinople le 5 août et à Paris quelques jours après. J'ai trouvé à notre Ambassade de Constantinople, à notre Agence diplomatique du Caire, et dans tous nos consulats d'Egypte et de Turquie un très bienveillant accueil et un concours très précieux. Partout où j'ai passé, j'ai pu visiter en détail, non seulement tous nos établissements d'instruction et d'assistance, mais encore les principaux établissements étrangers. Les directeurs de nos institutions, les consuls français et étrangers, les auto- rités locales, les présidents de nos Chambres de Com- merce, les agents de la Banque Impériale Ottomane et de la Dette publique Ottomane, les ingénieurs des Compagnies de chemins de fer et de la Société française des Routes, les représentants des Compagnies de navigation, les direc- teurs de maisons de commerce, d'entreprises indus- trielles et d'exploitations agricoles m'ont fourni partout des renseignements abondants, que j'ai pu souvent contrôler les uns par les autres, les éléments des statistiques qui sont jointes à ce rapport, parfois aussi des cartes, des photographies, des brochures et des notes que le Comité pourra consulter utilement. Les statistiques sont à peu près complètes pour l'année 1911-1912. J'ai demandé aux directeurs de nos principaux établissements de vou- loir bien faire parvenir au Comité, à la fin de l'année suivante, des informations analogues à celles qu'ils m'a- vaient fournies précédemment. Dans chaque région, j'ai assuré au Comité des correspondants, qui se sont offerts à répondre aussi complètement que possible aux demandes VIII INTRODUCTION. de renseignements qui leur seraient adressées. Tous les Français notables résidant en Orient que j'ai eu Tocca- sion de rencontrer ont marqué le plus vif intérêt pour la nouvelle organisation, dont ils sentaient depuis long- temps l'opportunité, et se sont déclarés prêts à faire tout ce qui dépendrait d'eux pour en favoriser Faction. Quelque attention qu'on accorde généralement en France à tout ce qui concerne l'expansion de nos idées et de notre influence dans les pays étrangers, ces mots si souvent entendus, si souvent répétés : a les intérêts français en Orient », prennent un tout autre sens pour quiconque a parcouru^ fût-ce rapidement, l'immense région sur laquelle depuis plus de trois siècles la France n'a cessé de répandre son action civilisatrice et bienfai- sante. On s'était fait par les livres, par les journaux, une idée théorique et vague des résultats obtenus au prix de si longs efforts; on situait machinalement l'influence française en quelques lieux dont les noms sont plus fami- liers : Constantinople, Jérusalem, Beyrouth, le Liban, la Syrie. Et voilà que l'on se trouve en présence de faits presque innombrables, qui traduisent tous, de diverses manières, l'action profonde et salutaire que les Français ont depuis longtemps exercée et qu'ils exercent encore d'un bout à l'autre de l'Orient, non seulement en Tur- quie d'Europe, en Egypte ou en Syrie, mais encore en Asie Mineure et dans l'Archipel, en Palestine et en Méso- potamie. Toutes les échelles du Levant sont peuplées de nos écoles et nos établissements d'assistance : hôpitaux, asiles INTRODUCTION. IX de vieillards, crèches et orphelinats. On pénètre dans l'intérieur du pays : dans toutes les villes, dans les vil- lages importants, le long de toutes les voies ferrées en exploitation ou en construction, que ce soient les chemins de fer de Syrie ou la 'ligne du a. Bagdad », on voit des instituteurs français enseigner aux enfants notre nom, notre langue et notre histoire, des religieuses françaises soigner les malades, secourir les infirmes, élever les orphelins, recueillir les enfants abandonnés. On s'écarte des routes battues, on s'aventure dans les montagnes d'Arménie, vers les plateaux qui s'étendent entre le cours du Tigre et la frontière de Perse, dans les plaines de Mésopotamie, et jusqu'aux limites du désert; dans quelque pauvre village arménien, kurde ou arabe, on découvre encore une maison française. Les enfants vien- nent y apprendre à Hre et à écrire dans leur propre lan- gue et à retenir quelques mots de la nôtre. Presque tou- jours, à côté de la salle d'école, se trouve un dispensaire, où les malades et les blessés, privés de tout autre secours médical, accourent souvent de très loin; on les soigne, on les panse, on leur distribue des remèdes gratuitement, au nom de la France. Partout la France est connue, par- tout elle est bénie; auprès des habitants de ces pays, à quelque race, à quelque religion qu'ils appartiennent, il n'est pas pour le voyageur de meilleure garantie et de recommandation plus efficace que d'être Français. Cette étonnante expansion de notre langue, de notre influence et de notre prestige n'est évidemment pas l'œu- vre d'un jour. Les premiers missionnaires français qui furent envoyés dans le Levant s'y présentèrent comme des créateurs d'œuvres bienfaisantes et civilisatrices. Le X INTRODUCTION. premier soin des Capucins installés à Péra fut d'ouvrir une petite école française à côté de TAmbassade. Plus tard, Golbert envoyait de jeunes Français apprendre les langues orientales au Collège de Péra et faisait venir les jeunes Orientaux au Collège Louis-lé-Grand, à Paris, pour être initiés à notre langue et à nos mœurs et retourner ensuite dans leur pays. Les Filles de la Charité, appelées à Constantinople par les Lazaristes, s'empressèrent d^y fonder, en même temps que des écoles, un hôpital et une crèche. Jamais, depuis lors, ce magnifique élan des Fran- çais vers les Orientaux pauvres, malheureux ou ignorants ne s'est ralenti. Dans toutes les régions de l'empire otto- man, notre influence et notre prestige ont grandi à mesure que nos œuvres se multipliaient. A l'origine de ce grand mouvement, il y a les « capi- tulations )) et le (( Protectorat », qui réservent à la France une situation privilégiée dans le Levant : les navires de toutes les nations d'Europe, pour faire le commerce dans les mers orientales, s'abritent sous notre pavillon; la France est instituée la protectrice des Lieux-Saints, les pèlerins d'Occident viennent visiter les sanctuaires de Palestine sous la protection du nom français; les reli- gieux de Jérusalem, de Bethléem « et autres lieux de Tobéissance du Grand Seigneur » exercent leur minis- tère et desservent leurs églises sous la garantie des enga- gements que le Sultan a contractés envers la France. Lorsque les chrétiens d'Orient sont inquiétés ou persécu- tés par les infidèles, c'est à nos ambassadeurs et à nos consuls qu'ils demandent de les protéger et de leur faire rendre justice. Ces traditions d'un passé glorieux ne sont pas encore efl'acées. Des privilèges que nous possédions INTRODUCTION. XI autrefois, quelques-uns, n'ayant plus aujourd'hui leur raison d'être, ont été abolis; d'autres nous restent, et notre intérêt, aussi bien que notre honneur, nous com- mande de veiller soigneusement à ce qu'ils ne soufifrent aucune atteinte, Mais à côté des privilèges et des droits inscrits dans les traités, reconnus par les gouvernements, il y a les faits, il y a Teffort patiemment et généreusement pour- suivi pendant des siècles, il y a l'œuvre de civiHsation et de charité que la France a accomplie en Orient, et qu'elle étend et perfectionne chaque jour. Nos instituts, nos écoles, nos asiles, nos hôpitaux ont groupé autour de nous une clientèle immense. Ce ne sont pas seulement nos protégés officiels qui reçoivent de nous les bienfaits de l'instruction ou de l'assistance; les catholiques, les chrétiens des divers rites orientaux, attirés par notre vieux renom et confiants dans notre générosité, sont venus en grand nombre à nous; les musulmans eux- mêmes ont envoyé leurs enfants dans nos écoles et leurs malades dans nos hôpitaux. Aujourd'hui les écoles fran- çaises sont fréquentées annuellement en Orient par plus de cent mille élèves; et si l'on pouvait faire un compte exact des malades, infirmes, enfants et vieillards soignés dans les hôpitaux et dans les dispensaires, assistés dans les asiles que la France a multipliés sur toute l'étendue du territoire ottoman, le chiffre en atteindrait plusieurs centaines de milliers. Au sein de Técole française, qu'elle soit laïque ou con- gréganiste, toutes les confessions, tous les rites se ren- contrent sans se heurter; la diversité des religions n'y étonne pas plus que la multiplicité des races. On y enseigne XII INTRODUCTION. aux enfants, avec Tamour de leur propre pays, avec le respect des croyances et des traditions qui sont celles de leurs familles, le respect et Tamour de la France, de ses idées et de son esprit. Le patriotisme le plus incontesta- ble inspire les leçons des maîtres et soutient leurs efforts; qu'ils appartiennent aux congrégations catholiques ou à la mission laïque, tous sont français avant tout, et tous ont pour premier souci, dans ces pays où le prosélytisme serait inefficace et dangereux, de contribuer, pour leur part, à l'œuvre de civilisation que la France a entreprise. Quand on a vécu quelque temps dans le Levant, quand on a reconnu par quels moyens notre influence y a pénétré et s'y exerce encore aujourd'hui, on ne peut s'empêcher de penser que certaines discussions sont bien vaines et certains malentendus bien dangereux. Le protectorat de la France en Orient est un privilège qui appartient à la France et que nul ne peut ni lui enlever, ni lui contester. Ce protectorat a été pour notre politique un instrument puissant; il est encore en ce moment pour notre action un moyen efficace, et la France ne doit pas renoncer à s'en servir. Mais, lorsqu'on parle de défendre les intérêts français en Orient, ce n'est pas seulement du protectorat qu'il s'agit; la question est bien plus large et bien plus haute, et voici en quels termes elle se pose : L'œuvre de bienfaisance et de civilisation que la France a entreprise dans le Levant il y a plus de trois siècles, qu'elle n'a pas cessé de poursuivre au prix d'admirables efforts et sur laquelle repose toute son action future, l'œuvre que les Français catholiques ont commencée et à laquelle colla- borent aujourd'hui, dans une parfaite communauté d'ef- forl et d'intention, des Français de toutes les croyances INTRODUCTION. Xlll et de tous les partis, doit-elle être interrompue, abandon- née, ou simplement négligée, à T heure où des puissances rivales, s'inspirant de notre exemple et profitant de nos longs travaux, viennent nous combattre sur le terrain où nous les avons précédées, contrarient notre action et imposent des limites à notre influence? Le Comité a répondu à cette question, lorsqu'il a déclaré, dans une note publique, les intentions qui ont inspiré son action : « Les hommes qui composent le Comité n'ont qu'une pensée : celle de travailler sans dis- tinction de parti et dans l'esprit le plus large à maintenir et à développer notre situation morale, politique et écono- mique en Orient. Notre empire heureusement agrandi dans le bassin occidental de la Méditerranée ne doit pas nous faire oublier que la France a toujours en Orient des intérêts de premier ordre et qu'elle y a gardé des privi- lèges auxquels correspondent des devoirs qu'elle ne peut abandonner. Le Comité se propose de faire appel à l'opi- nion et de seconder la politique française, en employant ses ressources et sa propagande à soutenir toutes les œuvres qui font honneur à la France dans les pays d'O- rient et contribuent à y répandre son action. » Les gouvernements ne peuvent pas tout faire : c'est à l'initiative des particuliers qu'il appartient souvent de les seconder. Nos rivaux et nos adversaires en Orient l'ont fort bien compris. Au cours de ces dernières années, on a vu se multiplier dans le monde les associations et les comités qui ont pour but de répandre dans le Levant, avec les bienfaits de l'instruction et de l'assistance, les idées, l'esprit et l'influence de telle ou telle nation. Les eflbrts de ces sociétés privées sont considérables, et les résultats XIV INTRODUCTION. qu'elles obtiennent, sans être toujours proportionnés aux efforts, sont pourtant de nature à nous suggérer certaines réflexions. A voir avec quelle ardeur les sociétés alle- mandes, italiennes, anglaises, russes et américaines pour- suivent en Orient leur œuvre de pénétration méthodique et de lente conquête, et avec quel empressement les gou- vernements étrangers encouragent le zèle des particuliers et les invitent à seconder par des entreprises privées leur action officielle, on comprend mieux la valeur des intérêts et de l'influence que nous possédons et que d'autres nous envient, et Ton devine l'importance des services que pour- raient rendre à la politique française des institutions ana- logues à celles que nos rivaux ont créées pour nous com- battre. Notre situation en Orient n'est point compromise, elle reste prépondérante; mais il importe de la défendre et même de la développer si nous ne voulons pas la voir décroître et lentement disparaître. Nous possédons sur nos rivaux des avantages dont il ne tient qu'à nous de tirer parti. Nous sommes venus en Orient avant eux, nous n'avons jamais cessé d'y étendre notre influence civilisatrice et notre action bienfaisante. Que de fois, au cours de mon voyage, j'ai entendu ces paroles, qui consa- crent peut-être la meilleure de nos supériorités : « Les étrangers des autres nations, me disait-on, viennent ici pour leur propre intérêt; vous y êtes venus pour nous. r> J'ai suivi, dans ce rapport, l'ordre de mon itinéraire. Certaines divisions, qui, au point de vue géographique, pourraient sembler arbitraires, s'expliquent par la néces- INTRODUCTION. XV site de ne point séparer, dans un travail du genre de celui-ci, les localités qui ressortissent à un même centre d'influence ou forment un même groupe de mission. Ainsi les capucins français (Je Mésopotamie, dont le siège prin- cipal est à Orfa, étendent leur action jusqu'aux régions méridionales de rArménie; je n'en ai pas moins réuni toutes leurs œuvres dans le même chapitre. A propos de chaque région ou de chaque centre impor- tant, on trouvera successivement, toujours dans le même ordre, les renseignements concernant les établissements français d'instruction et d'assistance, les établissements étrangers, et quelques observations sur des questions rela- tives à nos œuvres ou à nos intérêts dans ce centre ou dans cette région. J'ai présenté, en manière de conclu- sion, les observations d'ordre plus général qui s'appli- quent à l'ensemble de nos œuvres ou de nos intérêts en Orient. Les chitfres les plus caractéristiques sont cités au cours de l'exposition; on trouvera les autres dans les tableaux statistiques réunis à la fin du volume. CHAPITRE PREMIER CONSTANTIx\OPLE INTÉRÊTS EN OIUENT. ÉTABLISSEMENTS FRANÇAIS' ÉTABLISSEMENTS DMNSTRUCTION Lycée français J. Faure, à Péra. — Cet établis- sement a été fondé par M. J. Faure en 1886. A l'origine, les cours avaient été organisés à peu près suivant le programme de l'enseignement secondaire français. On y a ajouté, d'abord des cours de grec moderne, puis, en 1910, un cours complet d'enseignement turc. Ainsi adaptée aux besoins du pays, cette institution est devenue une sorte de lycée franco-turc; elle n'en est que plus appréciée des Ottomans. Sur 245 élèves, le lycée Faure compte 166 Ottomans, 36 Hellènes, 18 Italiens et 15 Français. La langue turque, obligatoire pour tous les élèves, est enseignée par des professeurs indigènes, mais selon les méthodes imposées par le directeur. Il en est de même pour les langues arabe et arménienne, qui sont facultatives. Les élèves parlent et écrivent correctement le français. Leurs connaissances en histoire de France et en histoire littéraire sont généralement faibles. Les élèves, très nom- 1. On comprend sous ce titre, avec les établissements proprement français, ceux que la France protège ou subventionne. RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 3 breux dans les classes inférieures, sont plus rares dans les hautes classes; la plupart ne suivent pas le cours des (Hudes jusqu'au bout. Néanmoins plusieurs sont reçus chaque année aux examens du baccalauréat français, à Gonstantinople. Les locaux sont insuffisants, de médiocre apparence, et peu convenables à leur destination. M. Faure exprime le désir que, soit le gouvernement français, soit quelque société française privée, prenne en considération les efforts qu'il a accomplis et les résultats qu'il a obtenus et « donne à son établissement une consé- cration définitive en lui édifiant un local convenable » (extrait d'une lettre que M. Faure m'a adressée à la suite de ma visite). La question d'un « lycée français » à Gonstantinople a été posée à plusieurs reprises : elle n'est pas facile à ré- soudre. Les chances de succès seraient médiocres pour un lycée organisé à Tinsfar des nôtres, avec des professeurs français et des programmes analogues à ceux de eos établissements d'enseignement secondaire. D'autre part, le gouvernement ottoman verrait sans doute d'un mauvais œil la création d'un établissement français nouveau, qui ferait concurrence au Lycée de Galata-Seraï, dont il a quelque raison d'être fier. La meilleure solution consis- terait peut-être à ne rien créer de nouveau et à reprendre le lycée de M. Faure, en le dévelopant, mais en lui conser- vant son caractère et ses programmes de lycée franco-turc. Tel qu'il est aujourd'hui, le lycée Faure rend des servi- ces, sans faire directement concurrence aux établissements congréganistes du même genre. Si l'on voulait développer l'enseignement secondaire français à Gonstantinople, il- y aurait, semble-t-il, quelque avantage à prendre pour base un établissement qui est connu et qui a déjà fait ses 4 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE preuves, plutôt que de créer de toutes pièces, sur le modèle de nos lycées français, une institution qui coûterait fort cher et répondrait mal aux besoins locaux. Lycée français J. Faure : succursale de Moda (côte d'Asie). C'est une succursale de l'établis- sement de Péra. La maison reçoit des internes, des demi- pensionnaires et des externes. Elle est située au bord de la mer, dans une position agréable. Mais ici encore Tespace manque et il faut écarter chaque année de nombreuses demandes d'admission. Les cours de français (enseignement secondaire), de turc, de grec, sont organisés comme au lycée de Péra, si ce n'est que le cours supérieur manque; les élèves qui désirent le suivre sont envoyés à la maison de Constantinople. Des 103 élèves de Moda, 85 sont Ottomans, 7 sont Hellènes et 5 sont Français. Cours de commerce J. Faure. — Ce cours, gratuit, est donné le soir dans les locaux du lycée Faure à Péra. Il comprend des leçons de comptabilité élémentaire et financière et des leçons de commerce pratique. Professé en français, il est actuellement suivi par une trentaine d'étudiants. Lycée gréco-français Vatelot. — On y donne l'enseignement classique, l'enseignement moderne et l'en- seignement commercial. Les cours sont professés en grec le matin (4 heures de classe) et en français l'après-midi (3 heures). Le latin et les sciences sont toujours enseignés en grec. Les élèves, presque tous grecs de langue ou même de nationalité, parlent assez correctement le français. L'enseignement de l'histoire et de la littérature est médio- cre, les hautes classes sont très peu nombreuses. L'Uni- versilé d'Athènes reconnaît les diplômes de fin d'études délivrés par le directeur du lycée. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 5 Il y a cette année 92 élèves, tous orthodoxes sauf un ; 53 sont ottomans, 32 sont hellènes, les autres appartiennent à diverses nationalités européennes. Lycée impérial de Galata-Seraï. — Cet éta- blissement est placé sous la dépendance du ministère ottoman de Tlnstruction publique, mais un certain nom- bre des professeurs qui y enseignent sont français. L'en- seignement est donné le matin en français, l'après-midi en turc. Les cours de grammaire, de littérature euro- péenne, de sciences sont donnés en français, ceux d'his- toire ottomane, de littérature turque, de géographie, d'économie politique sont professés en turc. Les élèves s'expriment aisément en français et écrivent convenable- ment notre langue. L'établissement a subi dans ces dernières années une crise assez grave. Les directeurs sont très désireux de le relever; ils souhaitent que le gouvernement français s'y intéresse davantage, qu'il y délègue des professeurs plus nombreux, de manière à assurer la prédominance de notre langue, de notre esprit et de nos méthodes. Les Ottomans sont très attachés à ce lycée, dont sont sortis beaucoup des hommes qui comptent aujourd'hui en Tur- quie dans la politique et dans l'administration. Mieux vaudrait sans doute le développer dans le sens de nos intérêts que lui susciter une concurrence. Les bâtiments du lycée, récemment détruits par un incendie, ont été reconstruits à grands frais. On y a amé- nagé une salle de théâtre, où des représentations et des conférences fraùçaises sont données fréquemment, et une petite bibliothèque qu'il nous serait facile et expé- dient d'enrichir par Iç don d'ouvrages français. Cours gratuits du soir à StambouL — Cette très belle institution est due à l'initiative de quelques 6 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE jeunes Français : MM. Clavaud, professeur à Fécole des ingénieurs, Prost et Hugues, professeurs au lycée de Ga- lata-Seraï, etc., etc. Les cours gratuits, fondés en décembre 1909, ont été transportés, au mois d'avril 1911, à l'Uni- versité Impériale, qui fournit gracieusement le local, le chauffage et l'éclaiiage. Divisés en trois classes, selon le degré d'instruction des auditeurs, ils sont fréquentés chaque soir par environ 350 jeunes gens, dont l'âge varie entre 15 et 35 ans. J'y ai remarqué, lors de ma visite, un grand nombre d'étudiants en théologie et de religieux musulmans. Plusieurs officiers, un grand nombre de petits fonction- naires fréquentent assidûment les cours du soir de Stam- boul. La subvention accordée en 1911 par le gouvernement français a permis d'acheter des livres et des tableaux Del- mas. Les professeurs donnent gratuitement leur temps et leur travail. Dans les milieux ottomans, l'initiative de nos compa- triotes a été accueillie avec une sympathie marquée. Onze cents élèves ont assisté plus ou moins régulièrement aux cours du soir pendant l'année 1911. Cette institution mé- rite qu'on la favorise et parait appelée à nous rendre de grands services. Séminaire oriental des Capucins français de Saint-Louis, à Péra. — Cet établissement com- prend un collège d'enseignement secondaire et un grand séminaire. Le collège reçoit des externes qui payent un écolage et des internes qui sont entretenus aux frais de la mission. Les cours sont ceux de l'enseignement secondaire clas- sique. Les études sont excellentes, la connaissance du français est parfaite. Le turc est obligatoire, l'arménien et •DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 7 l'arabe facultatifs. Parmi les anciens élèves du collège, plusieurs fréquentent aujourd'hui nos grandes écoles de France, en particulier l'École de Droit de Paris. Eu 191 J- 1912, le collège compte 25 externes et 32 internes. Le grand sémirmire se recrute parmi les internes du collège. Les élèves y reçoivent l'enseignement complet de la philosophie et de la théologie. Tous parlent notre langue, sont instruits selon nos méthodes et imbus de notre esprit; ils sont tous exercés à la prédication en fran- çais. Devenus prêtres, ils retournent dans leur pays d'ori- gine pour y exercer le ministère et constituent ainsi d'ex- cellents intruments de l'influence française dans les diverses régions de l'Orient. Plusieurs ont installé dans leurs paroisses lointaines des écoles où le français est enseigné. Depuis sa fondation (1881) le Séminaire orien- tal a fourni plus de 60 prêtres, qui exercent leur minis- tère et répandent notre influence et notre langue en Tur- quie, en Grèce, en Bulgarie. Les recettes de l'externat et les subventions du gou- vernement français, des Écoles d'Orient et de la Propaga- tion de la P'oi couvrent les frais de l'internat, du collège et ceux du grand séminaire, mais ne permettent pas à cette utile institution de se développer autant qu'il serait désirable. Collèges des Lazaristes : Collège Saint-Be- noît, à Galata. — Il comprend un cours complet d'en- seignement secondaire (préparation au baccalauréat fran- çais), et un cours d'enseignement commercial. Le turc est obligatoire , l'arabe et l'arménien sont facultatifs. Les études sont bonnes, l'enseignement des sciences est parti- culièrement développé. On a institué pour les enfants qui ignorent complètement le français une « classe d'arrié- rés » , où un système d'exercices spéciaux : traduction 8 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE orale, lecture expliquée, donne de rapides résultats. — 226 élèves en 1911-1912. Collège Sainte-Pulchérie, à Péra. — Il sert au collège de Galata d'institution préparatoire. L'enseigne- ment élémentaire y est donné selon de bonnes méthodes. — 150 élèves. Collège de Bébek (Bosphore). — Même but, même enseignement. — 154 élèves. Les Lazaristes donnent ainsi l'instruction française à 530 élèves, dont 328 sont ottomans, et dont 134 sont musulmans. Collège arménien catholique de Saint-Gré- goire rilluminateur. — Ce collège, que notre gou- vernement subventionne, peut être intéressant au point de vue du développement de l'influence française en Arménie, mais il ne mérite pas grand éloge pour l'ins- truction qui y est donnée. C'est un établissement d'ensei- gnement secondaire classique. Les professeurs sont in- suffisants, les méthodes défectueuses. L'enseignement, passable dans les classes élémentaires, est très médiocre dans les classes supérieures. Le patriarche arménien catholique, M^'^ Terzian, se propose de réformer ce collège et d'y perfectionner l'enseignement du français. Le Pa- triarche a formulé d'autre part les demandes suivantes : l'' Que les titulaires des quatre bourses attribuées an- nuellement aux anciens élèves du collège pour l'Université de Paris soient dispensés des droits d^inscription et d'exa- mens; 2" Que quelques bourses soient fondées en faveur des Arméniens à la Faculté française de médecine à Bey- routh. Établissements des Frères de la Doctrine chrétienne. — Institution Saint Joseph, à Cadi- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 9 Keuï (côte d'Asie). — L'établissement comprend : une école d'enseignement primaire (3 années préparatoires), un collège d'enseignement secondaire, et un institut com- mercial. Les locaux sont spacieux et confortablement organisés. La réputation de cet établissement est extraordinaire dans tout l'empire ottoman. Les musulmans y placent volontiers leurs enfants, même comme pensionnaires. Cette confiance s'explique en partie par la garantie d'une neutralité confessionnelle strictement observée. Les élè- ves appartenant aux diverses religions pratiquent libre- ment leur culte. Parmi les jeunes musulmans, un petit nombre demandent à accomplir leurs devoirs religieux; mais les familles exigent l'observance des fêtes islami- ques, et des congés sont accordés en conséquence. Les enfants qui ont fait leurs premières études dans des écoles ottomanes et qui ignorent le français sont spéciale- ment instruits dans des « classes d'arriérés » selon des méthodes fort ingénieuses. L'enseignement, excellent dans les classes inférieures du cours secondaire, est un peu démodé dans les hautes classes. Une réforme sur ce point serait utile, mais facile à réaliser, étant donné l'ex- périence et l'habileté pédagogique du personnel ensei- gnant. Les Frères obtiennent d'ailleurs de bons résultats aux examens du baccalauréat français. Le turc, obligatoire dans toutes les classes, est enseigné par des professeurs indigènes laïques. Les autres langues sont facultatives. Tout renseignement, sauf celui des langues étrangères, est donné en français. L'école commerciale est parfaite, et bien supérieure aux institutions grecques du même genre. C'est au direc- teur de FÉcole commerciale des Frères, que le ministère ottoman du Commerce a demandé des informations et des 10 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE conseils, lorsqu'il a entrepris de créer à Gonstantinople un institut commercial d'État. Les programmes et l'orga- nisation de cet institut ont été copiés, à quelques détails près, sur ceux de l'école commerciale de Cadi-Keuï. L'établissement de Cadi-Keuï, qui comptait 22i élèves en 1904, en a aujourd'hui 693, dont 269 musulmans, 188 grecs orthodoxes ou arméniens grégoriens et 68 Israé- lites. École Saint-Jean-Chrysostome, à Feri-Keuï. — Elle est établie dans un quartier de Gonstantinople nouvellement construit, et qui a pris rapidement un déve- loppement considérable. L'école comprend sept classes; on y donne l'enseigûemeut primaire, primaire-supérieur, et commercial élémentaire. Le turc est obligatoire dans toutes les classes. Les élèves sont très familiarisés ayec le français parlé, et connaissent les éléments des sciences : géométrie, arithmétique, etc. Un enseignement religieux général est donné à tous les enfants en commun ; l'ensei- gnement religieux « spécial », confié à un prêtre de la paroisse, n'est donné qu'aux catholiques. L'école est pleine d'enfants, et les Frères sont assaillis de demandes. Ils possèdent le terrain suffisant pour une nouvelle construction et voudraient bâtir. La dépense pré- vue serait de 150.000 francs. Dans ce quartier, ils auront, disent-ils, autant d'élèves qu'ils en voudront. Sauf quel- ques exceptions, l'école est payante. Elle compte, en 1912, 180 élèves dont 30 musulmans. École gratuite du Saint-Esprit, à Pancaldi (Gonstantinople). — C'est une école paroissiale : à ce titre, elle ne reçoit que des enfants catholiques. J'y trouve réunis plus de 200 garçons de toute race et de toute nationalité : Ottomans, Hellènes, Italiens, Allemands. J'assiste à la leçon de morale qui est en même temps DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 11 une très habile leçon de français. Tous les enfants savent s'exprimer dans notre langue et possèdent quelque no- tion de l'histoire et de la géographie de notre pays. La leçon de turc, donnée par un professeur laïque, est obli- gatoire. Cette école gratuite est très populaire dans le quartier de Pancaldi. École Saint-Michel, à Péra. — C'est une école primaire supérieure, avec un externat payant. On y fait une large place à l'enseignement des langues. Le turc est obligatoire, l'anglais et l'allemand sont facultatifs. Tous les cours, sauf les cours de langues étrangères, sont faits en français. Les élèves parlent couramment notre langue; ils connaissent les éléments de la grammaire, de l'arithmétique, de l'histoire et de la géographie. L'école, établie en plein quartier grec, compte un cer- tain nombre d'Hellènes, quelques enfants turcs de bonne famille et des Européens de toute nationalité : au total, 252 élèves, dont 27 musulmans. Toutes les classes sont combles. Les Frères, qui ne peu- vent répondre aux demandes des parents, souhaitent de s'agrandir et de faire une nouvelle construction. Leur école a un grand succès. École primaire de Haydar-Pacha (côte d'A- sie). — Haydar-Pacha, tête de ligne du chemin de fer de Bagdad, est devenu dès à présent un centre allemand fort important. La Société des chemins de fer d'Anatolie y subventionne des écoles allemandes. Les Frères des Écoles chrétiennes y ont construit récemment une école spacieuse et de belle apparence. Cette école primaire ne reçoit que des externes; les prix y sont beaucoup moins élevés que ceux de l'établissement de Cadi-Keuï. De nombreux élèves, qui désirent poursuivre leurs études, sont ensuite envoyés au Collège ou à l'École commerciale des Frères, 12 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Les débuts de l'école de Haydar-Pacha ont été fort difficiles : les écoles allemandes avaient accaparé tous les enfants du pays. Aujourd'hui les élèves ont déserté en grand nombre l'école allemande pour venir à celle des Frères français. Les élèves font eux-mêmes, spontanément, une propagande très active en faveur de l'école française. Les Frères de Haydar-Pacha entretiennent les meilleurs rapports avec les directeurs et professeurs de l'école turque et de l'école Israélite. Ils sont très appréciés de la population. Pour construire l'école de Haydar-Pacha, de manière qu'elle pût faire concurrence à l'école allemande, les Frères ont dû recourir à un emprunt. — 143 élèves, dont 30 musulmans. École gratuite de Ghalcédoine à Cadi- Keuï (côte d'Asie). — Elle se rattache à l'établissement de Cadi-Keuï. Les Frères y donnent gratuitement à des élèves externes l'instruction élémentaire. — 71 élèves. École des Augustins de l'Assomption, à Koum-Kapou (Gonstantinople). — Elle comprend : 1° un petit séminaire. L'enseignement secondaire y est donné en français à quelques jeunes gens de rite grec- catholique, qui se destinent au sacerdoce. C'est un utile instrument de propagande française. Les élèves (envi- ron 25) tous reçus gratuitement, sont recrutés, soit à Gons- tantinople, soit dans l'Archipel ; 2*^ un externat, où l'on donne l'enseignement primaire français et quelques notions de commerce. Le turc est obligatoire, le grec et l'arménien sont également en- seignés. 132 élèves, dont 6i musulmans. École des Frères Maristes, à Scutari (cote d'Asie). — Fondée en 1894, l'école s'est ouverte avec 30 élèves. Les Frères ont construit eux-mêmes leur mai- son. Hs ont aujourd'hui plus de 200 élèves. Les programmes DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 13 sont, à quelques détails près, ceux de l'enseignement secondaire français ; une large place est faite à l'étude des sciences et à celle des langues. Le turc est obligatoire : on y consacre deux heures par jour dans toutes les classes. On enseigne aussi l'arménien, l'arabe et le grec. Les élèves parlent bien le français; ceux des classes supérieures l'écri- vent correctement. L'histoire et la géographie de la France sont généralement connues. Plusieurs élèves passent chaque année avec succès les examens du baccalauréat français. Les élèves, tous externes, paient une rétribution très modique (5 à 6 fr. par mois). La congrégation des Frères Maristes pourvoit, pour le surplus, aux frais de l'établissement. Après les massacres, le nombre des élèves arméniens s'est considérablement accru. Les Turcs étaient venus très nombreux au lendemain de la Constitution; ils tendent aujourd'hui à abandonner l'école des Maristes et donnent la préférence aux écoles du gouvernement. Les Grecs et les Israélites forment une partie importante de la popula- tion scolaire. Une parfaite neutralité confessionnelle est observée à l'école. Écoles de l'Alliance Israélite ^ — L'Alliance israélite possède à Constantinople 14 écoles, où plus de 4.500 enfants, garçons et filles, sont instruits en fran- çais. En moins de 60 ans, grâce à ces écoles, le français a presque entièrement remplacé, comme langue usuelle, le jargon espagnol dans la population israélite de Constan- tinople. Les maîtres et maîtresses s'abstiennent de toute 1. L'Alliance israélite universelle est, comme on le sait, une société in- ternationale, dont le siège social est à Paris. La langue ofiicielle de ï Alliance est le français et les écoles qu'elle entrelient en Orient contribuent puis- samment à répandre noire influence. Je n'ai pas manqué de les visiter par- tout où j'ai passé, et, bien qu'elles ne soient pas, à parler exactement, des écoles françaises, je les range sans hésiter parmi celles où le français est le mieux enseigné et qui nous rendent en Orient les meilleurs services. 14 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE propagande religieuse, et cette neutralité n'est pas la moindre cause de leur succès. J'ai visité le groupe scolahe de Galata, qui comprend : Une école cie garçons, école primaire supérieure : tous les élèves paient une rétribution, mais l'écolage est peu élevé. Le français est la langue de l'enseignement; tous les enfants sont tenus de le parler entre eux. Le turc et l'hébreu sont enseignés comme langues vivantes. Les mé- thodes sont excellentes, surtout celles de l'enseignement élémentaire ; Une école de filles : l'instruction, dans les classes supé- rieures, est plus étendue, plus complète que chez les garçons ; Un asile .'j'ai assisté successivement à la leçon de fran- çais et à la leçon de turc; j'ai admiré l'ingéniosité des méthodes et l'excellence des résultats obtenus. Lycée français de jeunes filles de M'*"® De- vaux, à Péra. — Le « Lycée national français de jeunes filles », médiocrement installé, a néanmoins une clientèle nombreuse et jouit d'une excellente réputation. Il com- porte un cours complet d'enseignement secondaire, des cours de turc, d'arménien, d'anglais, d'allemand, de grec et d'italien. Pour tout ce qui concerne l'instruction élémen- taire, les méthodes suivies sont heureusement accommo- dées au milieu et donnent de bons résultats. En histoire, en littérature, les connaissances des élèves sont un peu som- maires. Mais l'essentiel, ici comme partout ailleurs, est que la langue française soit bien enseignée. — 146 élèves. M'"*" Devaux a formé le projet d'organiser un lycée de jeunes filles franco-turc, avec la collaboration des ora- ganes officiels de l'Instruction publique ottomane. Autant que j'en puisse juger, ce projet ne me parait pas destiné à aboutir. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 15 École de jeunes filles de M. Magnus, à Ghichli. — Le programme est celui des écoles primaires françaises, adapté aux besoins du pays. On prépare les élèves au certificat d'études primaires, et même au brevet élémentaire. La langue française est bien enseignée, sur- tout dans les classes inférieures; dans les hautes classes, l'enseignement est moins bon, et conçu dans un esprit un peu étroit. La tenue des élèves est médiocre. Le directeur et les professeurs témoignent de beau- coup d'activité et de zèle. L'établissement est fréquenté par un certain nombre de jeunes musulmanes (41 sur 130 élèves). Œuvres d'éducation des religieuses de N.-D. de Sion, à Pancaldi. — l'' Pensionnat, payant. On y reçoit des jeunes filles de toutes religions. Le cours d'en- seignement secondaire est parfaitement organisé et com- prend la préparation aux brevets. Les élèves parlent un français excellent, connaissent bien la grammaire, la litté- rature et l'histoire générale. Le turc, enseigné par une religieuse arménienne, est obligatoire. — 271 élèves, dont 3i musulmanes. 2*^ École gratuite. — C'est une école paroissiale : selon les conditions imposées par le délégué apostolique, elle ne peut recevoir que des catholiques. C'est une des meilleures écoles primaires que j'aie visitées à Constantinople. Dans les classes enfantines, des fillettes de 5 à 6 ans lisent du français et le traduisent immédiament dans leur langue maternelle (grec, italien, etc.) pour montrer qu'elles ont compris. Dans la classe supérieure, les enfants parlent couramment le français et connaissent la grammaire. Plu- sieurs préparent l'examen du certificat. — lil élèves. 3" Ouvroir. — Il est installé dans les locaux de l'école. On s'est proposé de soustraire les jeunes filles pauvres du 16 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE quartier aux ateliers de Constantinople, qui ont une mé- diocre réputation. A l'ouvroir aussi on enseigne le fran- çais, et les ouvrières s'exercent à le parler entre elles Œuvres d'éducation des religieuses de N.-D. de Sion, à Moda (côte d'Asie). — 1"" Pensionnat payant. — On y reçoit des jeunes filles de toutes nationa- lités et de toutes religions. La supérieure me montre des enfants qui sont les petites-filles de ses anciennes élèves : la clientèle de l'institution lui reste très fidèle. Les cours sont ceux de l'enseignement secondaire français, y com- pris la préparation aux brevets. Les élèves parlent correc- tement notre langue et connaissent bien les principales matières du programme. â"" École gratuite. — On y donne une instruction élé- mentaire, en français, aux petites filles pauvres du fau- bourg. Les enfants non catholiques y sont admises. Écoles des Filles de la Charité, à Galata. — Maison de la Providence. — 1" École payante. — Elle comporte un cours complet d'enseignement secondaire très bien organisé. L'étude du turc est obligatoire. 2^ École gratuite, ou quasi gratuite, pour les enfants pauvres. On y donne une instruction élémentaire très soignée. Les plus petites lisent déjà couramment le français. Ces deux écoles ont ensemble 204 élèves dont 100 non catholiques. 3** Asile enfantin, gratuit. C'est une sorte de u jardin d'enfants ». Le français y est enseigné par des chansons, par des récitations au tableau, par des leçons de choses. La plupart des enfants de l'asile sont nourris gratuitement. — 30V enfants dont 110 non catholiques. On trouvera plus loin quelques détails sur les œuvres d'assistance installées dans la même maison. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 17 Les Filles de la Charité dirigent en outre à Constantinople : Les écoles de la Maison Saint-Vincent : 442 élèves, dont 166 non catholiques; Les écoles de la Maison Saint- Joseph (Bébek) : 118 élèves, dont 71 non catholiques; Les écoles de la Maison de Scutari : 176 élèves, dont 155 non catholiques; V asile enfantin de Scutari : 35 en- fants, dont 26 non catholiques. École des Oblates de l'Assomption, à Hay- dar-Pacha (côte d'Asie). — J'ai dit plus haut l'impor- tance particulière de Haydar-Pacha. Les Oblates de l'As- somption y avaient installé une école. En 1911, un in- cendie a détruit leur maison. Elles en ont aussitôt reconstruit une autre, aidées par les parents de leurs élèves, favorisées par les autorités locales et par le gou- vernement ottoman. Leurs cours n'ont pas été interrompus. Afin de pouvoir conserver leurs pensionnaires, elles avaient loué deux maisons privées. Les élèves musulmanes sont très nombreuses. Le turc, l'arménien, le grec sont enseignés très soigneusement par des indigènes, et cette grande place faite à l'étude des langues du pays contribue fort à la popularité de Técole. Les parents y envoient leurs enfants des villages de l'in- térieur, souvent très éloignés. Les élèves parlent bien notre langue, connaissent la grammaire, l'histoire et la géographie. Des jeunes filles turques et persanes racontent avec aisance l'histoire de Jeanne d'Arc, les grands faits de la guerre de Cent Ans et récitent de mémoire une scène du Cid. Tout m'a paru très remarquable dans cet établissement, aussi bien l'instruction que l'organisation intérieure. Il serait de notre intérêt d'en favoriser le développement. — 429 élèves, dont 324 ottomanes (107 musulmanes). INTÉRÊTS EN ORIENT, 2 18 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE École des Oblates de l'Assomption, à Koum- Kapou. — Elle est installée dans un des quartiers les plus populaires et les plus pauvres de Constantinople. Sur les 300 élèves qui la fréquentent, 80 sont reçues gratuitement. Les cours sont ceux de l'enseignement secon- daire français. Le turc (obligatoire), le grec et l'arménien sont enseignés par des professeurs indigènes. Parmi les élèves, 75 sont musulmanes, 90 sont arméniennes-grégo- riennes. ŒUVRES D'ASSISTANCE Hôpital français du Taxim. — L'immeuble est la propriété de l'État français. Le Consul de France pré- side de droit le Conseil d'administration de l'hôpital. La direction de l'établissement est confiée aux Filles de la Charité. Dans les 90 lits que compte l'hôpital français, i.S^k malades ont passé en 1911. Les Ottomans viennent très volontiers se faire soigner chez nous. L'installation est très moderne et ne Jaisse rien à désirer. Mais notre hôpital semble petit, si on le compare aux établissements étrangers du même genre, et, en par- ticulier, à l'hôpital allemand. Il n'a pas de jardins, il manque de pavillons d'isolement. Comme il est situé à Fintérieur de la ville et entouré de constructions, on ne peut pas songer à Fagrandir; il faudrait le transporter ailleurs. A Fhôpital est annexé un dispensah^e gratuit bien amé- nagé. Des consultations gratuites y ont lieu tous les jours, données alternativement par un médecin et par un chirur- gien. En 1911, 8.9V0 malades pauvres y ont reçu des soins. Asile de vieillards des Petites Sœurs des DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 19 Pauvres. — Cet établissement, fondé en 1893, est situé un peu en dehors de la ville, bien exposé et bien organisé. Il reçoit surtout des Arméniens, des Grecs, des Italiens et des Français : les Turcs vont de préférence à l'asile du gouvernement ottoman. Notre Asile de Vieillards jouit d'un grand prestige à Constantinople ; les Petites Sœurs françaises reçoivent partout Taccueil le plus sympathique et se plaisent à reconnaître la générosité des Ottomans. — 230 vieillards hospitalisés. Œuvre des Filles de la Charité, à Galata. — Maison de la Providence. — 1° Orphelinat, Asile d'en- fants trouvés ; 41 orphelines et 160 enfants trouvées sont recueillies et instruites. On leur fait la classe en fran- çais, on leur enseigne la couture, la broderie, les travaux du ménage et on les place à leur sortie de la maison. Toutes ces jeunes filles savent lire et écrire en français. .* Nous sommes Françaises^ » répondent-elles, lorsqu'on leur demande à quelle nation elles appartiennent. Les orphelines sont très recherchées à Constantinople comme gouvernantes pour les enfants. T Ouvroir : il est destiné aux anciennes pensionnaires, qui le fréquentent fidèlement. Le travail qu'elles exécutent leur est payé et les aide à vivre honnêtement. S** OEuvre de la Bonne Garde : elle abrite annuellement 80 jeunes filles dépourvues de place et de travail. k"" OEuvre des Jeunes Économes et Bibliothèque des Jeunes Filles (œuvres post-scolaires). 5° Dispensaire : il est ouvert tous les jours aux pauvres de Galata. Les consultations et les petites opérations (yeux, dents, etc..) sont gratuites. Les médicaments sont fournis, suivant les ressources des malades, tantôt gratuitement, tantôt au prix coûtant. On y soigne annuel lement 30.000 pauvres, dont 9.000 musulmans. 20 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Des distributions de vivres sont faites plusieurs fois par semaine aux pauvres du quartier. Orphelinat de Tchoukour-Bostan (Filles de la Charité). — L'orphelinat est installé à côté de la grande école gratuite que dirigent les mêmes religieuses. On donne aux enfants une instruction élémentaire en français et on les emploie dans les ouvroirs. Toutes les orphelines parlent convenablement notre langue. — 180 orphelines. Ouvroir : il est ouvert aux anciennes élèves; 39 d'entre elles le fréquentent régulièrement. L'ouvroir crée à réta- blissement des ressources . assez importantes, qui sont employées à soutenir les autres œuvres. OEitvre de la Bonne Garde : elle est destinée à abriter les anciennes pensionnaires sans place. 38 jeunes filles s'y trouvent recueillies lors de ma visite. Une Bibliothèque y est annexée. Maison des Filles de la Charité, à Péra. — Dans le même établissement que l'école gratuite Saint- Vincent (v. plus haut) est installé un ouvroir externe, où 25 jeunes filles, anciennes élèves, trouvent le travail néces- saire pour assurer leur subsistance. OEuvre des Jeunes Économes. — 40 jeunes filles, an- ciennes élèves de la maison, procurent par leur travail le repas de midi à 50 enfants pauvres qui fréquentent l'école. Hôpital de la Paix, à Chichli. — Sur le terrain concédé par le gouvernement ottoman après la guerre de Crimée, un établissement français considérable a été édifié. Il abrite : un hôpital de 300 lits ; un asile d'aliénés, avec 459 pensionnaires; un orphelinat de garçons : 165 orphe- lins y reçoivent, en français, une instruction élémentaire; un petit externat : kl élèves ; un asile d'enfants : 54 enfants ; une crèche, où sont recueillis 25 enfants trouvés (garçons) ; DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 21 un dispensaire, ouvert tous les jours aux pauvres du quar- tier; 1.200 malades y ont été soignés en 1911. Depuis 1865, les Filles de la Charité françaises dirigent aussi riîopital municipal de Constantinople. Daines de la Charité. — • L'œuvre des Dames de la Charité de Constantinople est internationale ; mais l'initia- tive et la direction en sont toutes françaises. Les dames associées, au nombre de 376, sont réparties en 4 groupes, qui visitent et secourent les pauvres des différents quar- tiers. 60.000 francs sont ainsi distribués annuellement aux pauvres de Constantinople. En 1911, 390 familles ont été assistées. 11 y a quelques années, les dames italiennes décidèrent de se retirer de l'association. Le directeur de l'œuvre, un religieux français, leur laissa entendre qu'après leur départ Tœuvre n'aurait plus de raison de prendre à sa charge les pauvres italiens : et la scission fut ainsi conjurée. Les Dames de la Charité s'intéressent également aux Otto- mans et aux Européens. Cette œuvre, fondée en 1839, aussitôt après l'arrivée des Filles de la Charité à Constan- tinople, a beaucoup contribué à faire connaître et aimer la P>ance dans les milieux ottomans. D'autres colonies étran- gères se sont inspirées depuis lors de notre exemple, mais sans obtenir les mêmes résultats. INSTITUTIONS DIVERSES Alliance française. — La section de FAlliance fran- çaise subventionne à Constantinople et dans la région 26 écoles françaises, arméniennes, grecques et Israélites, sans distinction de nationalité ou de confession. Les sub- ventions consistent souvent en livres et fournitures sco- laires, tableaux de lecture, cartes géographiques, livres 22 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. de prix. Un tel exemple est d'autant plus recommandable que bien des écoles françaises ou protégées par la France, dépourvues du matériel indispensable, en sont réduites à accepter les tableaux et les cartes que des société étrangères leur offrent gratuitement, pour des fins de propagande. V Alliance française s'intéresse particulièrement aux écoles grecques et arméniennes où le français est enseigné. Les encouragements donnés par l'Alliance à ces écoles sont presque toujours très efficaces. Société française de secours mutuels. — Elle a été fondée en 1873, en même tenij)s qu'une Société française de bienfaisance qui, depuis 1900, s'est rendue indépendante de la première. Union française. — Fondée en 1824, cette associa- tion est installée dans un vaste et bel hôtel, où elle a ac- cueilli la plupart des sociétés françaises de Gonstantinople : la Société de Géographie, celle des membres de TEn- seignement, les Vétérans des Armées de terre et de mer, l'Alliance française y tiennent leurs réunions; la Chambre de commerce y a ses bureaux. Un restaurant économique fournit aux Français indigents des repas à bon marché ou même gratuits. V Union a ouvert un Bureau de renseigne- ments et un poste de Secours médicaux. Chambre de commerce française. — La Cham- bre de commerce française de Conslantinople, créée en 1883, est aujourd'hui très active et très prospère. Depuis 1887, elle publie un Bulletin mensuel ^ ou Revue commer- ciale du Levant, qui fournit aux commerçants français d'utiles renseignements. La Chambre a fondé deux comités (succursales) : l'un à Brousse, l'autre aux Dardanelles. C'est encore à son initia- tive qu'est due la création de l'Union permanente des Délégués du commerce étranger à Gonstantinople. ÉTABLISSEMENTS ÉTRANGERS Nous tenons encore le premier rang- à Constantinople, tant par nos institutions d'enseignement que par nos œuvres d'assistance. Mais nos rivaux nous envient cette prépondérance et font pour nous la disputer des efforts considérables. Leur activité, qui se traduit presque chaque année par des entreprises nouvelles, ne peut pas nous laisser indifférents. Je donnerai ici quelques détails sur les établissements étrangers de Constantinople qu'il m'a été possible de visiter. École allemande de garçons, à Péra [Ober- realschi(le). Elle comprend un cours d'enseignement se- condaire, un cours d'enseignement primaire supérieur et un cours de commerce. L'examen de sortie de l'école se- condaire correspond à Y Abiturient Examen et donne accès aux Universités. Le diplôme du cours de commerce est as- similé à celui des écoles commerciales d'Allemagne. Chaque année, un commissaire impérial vient inspecter l'établisse- ment et présider aux examens. La langue turque est facul- tative : dans la pratique, elle est fort peu enseignée. L'en- seignement du français est considéré comme nécessaire au succès de l'école; il est assuré dans des conditions satis- faisantes. Cette institution, au point de vue de l'enseignement, n'est pas supérieure aux nôtres; mais le matériel scolaire, livres, cartes, tableaux, collections, y est beaucoup plus perfectionné. 24 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE École allemande de filles, à Péra. — Elle est séparée de celle des garçons. Cependant quelques jeunes filles préparent avec les garçons Fexamen de sortie; les programmes sont exactement ceux des écoles d'Allemagne. Peu de musulmanes fréquentent l'école allemande de Péra. Kindergarten, très bien installé. Les méthodes employées pour instruire les enfants du premier âge sont excellentes : je n'en ai trouvé d'aussi bonnes que dans les écoles de l'Alliance Israélite. Le Kindergarten est fréquenté par un grand nombre d'enfants ottomans et européens. Aucun élève n'est admis gratuitement. Collège anglais de garçons, à Nichantage. — Cette institution est privée, mais le gouvernement britan- nique, lui attribue une subvention. On y donne l'enseigne- ment primaire supérieur et l'enseignement commercial. L'anglais et le français sont obligatoires dans toutes les classes. Les élèves parlent assez correctement ces deux langues. Le français est enseigné par deux professeurs français. Les cours de turc, facultatifs, sont en général peu suivis. Les examens de sortie du cours de commerce se passent par correspondance. La Banque de Londres propose et envoie les questions, reçoit les compositions des élèves, les fait apprécier et décerne les diplômes. Parmi les anciens élèves, plusieurs sont allés à Londres, soit pour achever leurs études, soit pour entrer dans des maisons de banque ou de commerce. Les élèves sont reçus comme externes ou comme pension- naires. Mais les parents, Turcs ou Grecs, qui tiennent à ce que leurs enfants se familiarisent avec les langues euro- péennes, préfèrent l'internat. Le collège compte (en 1911-12) 95 élèves dont 20 musul- mans; il ne peut guère en recevoir davantage. Fondé vers DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 25 1900, il s'est développé rapidement et les directeurs ont entrepris la construction d'un nouveau bâtiment. Collège anglais de jeunes filles, à Péra. — Ce collège, de fondation récente, est déjà contraint de refuser des élèves. Il en compte environ 200, internes ou externes, parmi lesquelles 35 musulmanes. L'enseignement est donné en anglais. Le français est obligatoire dans toutes les classes. Des « cours de retardataires » sont organisés pour les jeunes filles qui, ayant fait leurs études dans des écoles ottomanes, viennent apprendre à ce collège l'anglais et le français. Deux maitresses françaises sont chargées d'en- seigner notre langue. Aux récréations, pendant les pro- menades, les élèves sont tenues de parler entre elles tantôt l'anglais, tantôt le fiançais. L'installation du collège et du pensionnat est plus confortable que celle des établissements français du même genre. Au collège est annexé un Kin- dergarten . Robert Collège (Bosphore). — Ce collège améri- cain est sans doute l'établissement le plus vaste et le plus luxueux que les étrangers aient fondé à Gonstantinople. Créé en 1863, il s'est constamment agrandi et développé. On y trouve aujourd'hui réunies des écoles d'enseignement primaire supérieur et secondaire, une école profession- nelle d'arts et métiers, un institut commercial, etc. Les Ottomans apprécient le caractère pratique de l'enseigne- ment qu on donne à « Robert Collège ». Comme dans tous les établissements américains, une large place est faite à l'éducation physique et aux sports. Nos services d'assistances l'emportent de beaucoup, par le nombre et par la variété, sur les œuvres étrangères. Les établissement français des u Filles de la Charité » et 26 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. des (( Petites Sœurs des Pauvres » n'ont pas d'analogues à Gonstantinople. Les étrangers n'y ont guère créé que des hôpitaux. L'hôpital allemand de Péra est un vaste établis- sement doté de tous les perfectionnements modernes. Les Anglais et les Autrichiens ont leurs hôpitaux à Galata. Il y a un hôpital russe à Pancaldi et un hôpital italien à Top- Hané. OBSERVATIONS L'enseignement du français dans les écoles grecques. — L'enseignement du français occupe une large place dans les écoles grecques de Gonstantinople et de l'Empire ottoman. Au Gymnase Zographian, le français est obligatoire à partir de la quatrième année; les élèves y consacrent 6 heures par semaine, 8 heures dans les deux dernières années. A XÉcole 'patriarcale du Phanar, le français est obliga- toire dans toutes les classes, à raison de 5 heures par se- maine. Le Lycée national grec de Péra comporte une section française, qui est placée sous la direction d'un professeur français; dans les autres sections, les élèves étudient notre langue chaque jour pendant deux heures. La section de l'enseignement public du Patriarcat œcu- ménique a pris en considération la question du français et recommandé l'enseignement de notre langue dans toutes les écoles grecques de l'Empire. Elle a émis le vœu que cet enseignement fût confié, autant que possible, à des professeurs français. Cette préférence accordée à notre langue par les Grecs de l'Empire s'explique, en partie par des raisons de sympathie et d'attachement traditionnel, en partie par le fait que le français est encore aujourd'hui la langue commerciale du Levant. Or, depuis quelques années, s'il faut en croire les Grecs, 28 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE notre intérêt pour leurs écoles se serait un peu relâché. D'autre part, au lendemain de la Révolution, environ 5.000 Grecs ont déserté nos établissements congréganistes. L'Allemagne a profité de ces circonstances pour introduire l'enseignement de la langue allemande dans plusieurs écoles grecques, notamment dans V Ecole grecque de Com- merce qui a été fondée depuis lors. S'il y a quelques régions dans l'Empire où les écoles grecques font aux nôtres une concurrence directe, et où des questions d'amour-propre national ou de rivalité confessionnelle opposent les unes aux autres, il n'en est pas de même à Con^antinople. V Alliance française a donné un exemple excellent en accordant aux écoles grecques de Constantinople un appui matériel ou moral. Instituts de commerce, lycées, ou écoles primaires de quartier, les établissements grecs nous offrent un moyen de propagande que nous ne de- vons pas négliger. Aux grandes écoles on pourrait four- nir des professeurs français, on pourrait encourager les petites par l'envoi de livres, de cartes et de tableaux de lecture. En tous cas, il importe que nous ne perdions pas, sur ce point, la position avantageuse qui nous est acquise depuis longtemps. L'enseignement du français dans les écoles arméniennes. — Les écoles arméniennes sont nom- breuses à Constantinople. Plusieurs, établies dans des quartiers pauvres, sont dues à l'initiative privée. J'en ai visité deux à Nichantage, une école de garçons et une école de filles. J'y ai trouvé l'enseignement excellent : il est donné en arménien, en turc et en français. C'est en français qu'on enseigne l'histoire et les sciences. Les élèves parlent bien notre langue, connaissent un peu notre lit- térature et notre histoire. Dans les deux écoles que j'ai DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 29 visitées, le français est enseigné, pour le moins, aussi bien que dans un grand nombre d'écoles françaises de Cons- tantinople. Or ces écoles arméniennes ne reçoivent de nous aucune subvention, les élèves n'ont pas de livres français, quelques volumes en mauvais état servent à toute une classe. Je n'ai pu m'empêcher d'admirer le zèle et le désintéressement des directeurs et des maîtres de ces écoles, qui contribuent modestement à la propagation de notre langue et de notre influence, et auxquels un encou- ragement, même moral, témoignerait utilement notre reconnaissance. L'enseignement du français dans les écoles militaires de Gonstantinople. — A Técole mili- taire de Pancaldi, qui correspond à notre école de Saint- Cyr, l'étude du français est obligatoire pour tous les élèves. Mais, faute de professeurs français, l'enseignement est souvent très médiocre. A l'Académie de guerre de Yildiz (école de guerre), tous les élèves apprennent le français, comme première langue étrangère; la seconde est, à leur choix, l'allemand ou le russe. Les Allemands ont fait de nombreux efforts pour obtenir que ces règlements fussent modifiés en leur faveur : ils n'y sont pas encore parvenus. Les instructeurs de l'Aca- démie, qui sont des officiers allemands et qui ignorent le turc, sont souvent obligés de faire leurs cours en français afin d'être compris de leurs élèves, qui ne sont pas en état de suivre un cours fait en allemand. Cependant il est à craindre que les efforts allemands ne finissent par l'emporter. Il y à Yildiz un seul professeur français : il ne tiendrait qu'à nous qu'il y en eût plusieurs qui, au besoin, seraient mis gratuitement à la disposition du gouvernement ottoman. 30 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Les vitrines du petit Musée de l'École de guerre sont remplies de modèles et d'échantillons envoyés par les mai- sons allemandes : fusils, canons, munitions, matériel de campement, bateaux, appareils de topographie, cartes, etc. Par contre, on n'y voit pas un modèle, pas un échan- tillon qui provienne d'une maison française. Une telle lacune pourrait être aisément et utilement comblée. Écoles laïques et écoles congréganistes fran- çaises à Gonstantinople. — H y a place à Cons- tantinople pour les unes et pour les autres. De l'aveu même des hommes qui les dirigent, elles ne se font point tort les unes aux autres, parce qu'elles s'adressent à des clientèles différentes. En ce qui concerne les écoles de garçons, la création d'établissements laïques semble avoir eu pour conséquence une amélioration et un progrès dans les méthodes d'en- seignement et dans l'esprit général des institutions con- gréganistes. Ces méthodes sont devenues plus modernes, plus scientifiques, cet esprit s'est fait plus large et plus tolérant. Pour les écoles de filles, il n'en est pas tout à fait de même. La préférence des Ottomans, même musulmans, va très visiblement aux écoles religieuses. Mais sur ce terrain, il n'y a pas non plus concurrence entre les établissements français des deux genres : ils se recommandent à des catégories sociales différentes. On a essayé d'ouvrir à Stamboul, en plein quartier musulman, des écoles laïques de filles : ces tentatives ont eu un fort mauvais succès. Par contre, le lycée de M"'® Devaux, à Péra, se déve- loppe normalement et jouit d'une excellente réputation. On peut prévoir qu'à Gonstantinople écoles laïques et écoles religieuses françaises garderont leurs clientèles respectives. D'ailleurs, des deux côtés, directeurs et pro- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT- 31 fesseurs sont animés du meilleur esprit patriotique; tous ont conscience de collaborer à la même œuvre française : il n'y a pas entre eux rivalité, mais émulation. Enseignement primaire, enseignement se- condaire. — Dans toutes nos écoles, laïques ou congré- ganistes, l'enseignement primaire est mieux organisé que l'enseignement secondaire. Il est aussi, toutes proportions gardées, plus suivi et plus apprécié par le public auquel nous nous adressons. Dans un même établissement, les classes élémentaires sont nombreuses, vivantes; les classes supérieures sont mornes et désertes. Si l'on pose quelques questions sur les matières de l'enseignement primaire, les élèves s'em- pressent, c'est à qui répondra, et la plupart répondent bien. Sur les matières de l'enseignement secondaire, les réponses des élèves sont médiocres et rares. D'une manière générale, l'enseignement scientifique est meilleur et plus suivi que l'enseignement littéraire. Les cours de compta- bilité et de commerce sont des plus appréciés. Les parents et même les élèves semblent attacher d'autant plus de prix et d'intérêt à un enseignement qu'il est plus pratique et d'une application plus immédiate. Il conviendrait de tenir compte de cette disposition d'esprit très générale et de développer surtout dans nos écoles l'enseignement primaire, primaire supérieur et commercial. Par cette observation, on ne prétend aucunement rabaisser le mé- rite de quelques institutions, comme le Lycée Faure et le Collège des Lazaristes, où les études secondaires sont très justement en honneur. Enseignement et assistance. — Pour peu qu'on étudie les conditions dans lesquelles l'influence française s'exerce cà Constantinople, on se rend compte que nos œu- vres d'enseignement et nos œuvres d'assistance sont insé- 32 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE parables les unes des autres. Ce qui fait le. succès de l'école payante, c'est l'école gratuite qui y est adjointe, et où les enfants pauvres du quartier sont instruits, soi- gnés, souvent même nourris et vêtus. A ce point de vue, les œuvres créées à Constantinople par les Lazaristes, les Frères de la Doctrine chrétienne, les Filles de la Charité, les Oblates de l'Assomption, etc., etc.. sont assurément des modèles. On ne saurait croire combien les écoles gra- tuites, les asiles d'enfants, les cantines scolaires, les dis- pensaires ouverts par ces religieux à côté de leurs collèges et de leurs pensionnats ont contribué à les rendre popu- laires et à faire aimer notre pays. L'enseignement français, l'esprit français se sont développés avec la bienfaisance française, et souvent par elle. 11 faudrait tenir compte de cette réalité, le jour où l'on voudrait répartir équitable- ment entre les établissements français les subventions et les secours. La question arménienne catholique. — Des dissentiments fort graves ont éclaté à la fin de 1911 entre les communautés arméniennes catholiques et le patriarche, M^'" Terzian, au sujet des réformes centralisatrices que le Saint-Siège avait voulu introduire dans l'élection des évêques et dans l'administration des biens ecclésiastiques : M^'' Terzian s'était engagé' vis-à-vis de Home à soutenir les réformes; les communautés arméniennes refusaient de les accepter. Notre gouvernement crut devoir intervenir et prit assez vivement parti pour le patriarche et par consé- quent pour Rome, contre les communautés arméniennes. Rome accepta volontiers ce secours inattendu ; le gouver- nement ottoman garda une attitude indifférente; les Arméniens, qui se considèrent comme nos protégés, mani- festèrent un très vif mécontentement. Ce mécontentement devait encore augmenter par la suite. A la fin de jan- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 33 vier 1912, le ministre ottoman de la justice et des cultes parut donner raison au Patriarche contre les communautés arméniennes : le Délégué apostolique, M^' Sardi, s'empressa de faire savoir à Rome et de répandre à Constantinople la nouvelle que ce succès était dû à une intervention éuer- gique de la diplomatie française. C'était le meilleur moyen de nous desservir auprès de nos clients traditionnels. Depuis lors, les différends ont suivi leur cours, mais nous sommes heureusement revenus à une politique plus con- forme à nos intérêts. M^' Terzian en a été quitte pour implorer la protection du gouvernement autrichien. On sait que le « locum tenens » élu par les conseils arméniens a été excommunié par le Saint-Siège, et que les membres du comité laïque que l'assemblée nationale avait désignés pour régler provisoirement les questions d'administration ont été frappés de la même peine. Le point de vue du Vati- can sera difficilement admis par les Arméniens. Quant au gouvernement ottoman, s'il se désintéresse de la question purement religieuse, il a pris parti dans la question administrative, et refuse de reconnaître comme représen- tants de la nation arménienne les évêques que le Saint- Siège a nommés de sa propre autorité et en dehors de toute élection. Nous n'avions pas à intervenir dans cette querelle et la seule politique à suivre était celle que notre ambassade à Constantinople n'avait jamais cessé de recom- mander : une politique d'abstention. Il faut espérer que nous nous y tiendrons désormais. ♦ Le Délégué apostolique et les intérêts fran- çais. — Nous n'avons pas eu à nous louer, jusqu'à pré- sent, de l'attitude du Délégué apostolique à Constantinople, W Sardi. Il serait assez oiseux de rechercher si cette atti- tude peu favorable répond aux sentiments personnels de M^' Sardi ou aux instructions qu'il a reçues de la Secré- INTÉRÊTS EN ORIENT. 3 34 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE tairerie d'État du Saint-Siège. Rarement le Délégué apos- tolique a laissé passer une occasion de favoriser les établissements italiens aux dépens des nôtres. Aussi est-il plus que jamais nécessaire que nous gardions nous-mêmes de très près toutes nos positions, résistant à toute tenta- tive d'empiétement sur le terrain qui nous appartient et ne renonçant en aucun cas à nos droits traditionnels. Lorsqu'éclata le conflit entre les Arméniens catholiques et leur patriarche, le Vatican, qui souhaitait notre appui, nous donna à entendre qu'en retour du service rendu, nous pourrions obtenir la nomination d'un titulaire fran- çais à la Délégation apostolique de Constantinople. Je ne sais si l'on a jamais eu au Vatican l'intention de réaliser une telle promesse. Mais je pense que, si cette « faveur » nous était ofïerte, il conviendrait de la décli- ner. Un délégué français à Constantinople serait fort gêné pourexercer, sans prêter à la critique, une action conforme à nos intérêts; d'autre part, à un délégué français succé- derait nécessairement un délégué allemand ou autrichien. Nous ne saurions souhaiter rien de mieux que la nomina- tion d'un délégué italien impartial, qui ne fit à Constanti- nople que les affaires de l'Église^ sans se mêler de celles du gouvernement de Rome. Tel était M^'' Ronetti, tel fut encore M^*" Tacci Porcelli. Il est vrai que, étant donné l'es- prit qui règne actuellement au Vatican, Tespèce de ces fonctionnaires strictement « romains » tend à disparaître. Agents français et agents étrangers à Cons- tantinople. — En comparant nos méthodes d'action e4 celles de quelques gouvernements étrangers à Constanti- nople, j'ai été frappé de la grande liberté d'initiative que ceux-ci laissent à leurs agents, et de l'étroite sujétion où les nôtres sont tenus. Une affaire vient-elle à se présenter? y a-t-il quelque décision à prendre? ou voit les fonction- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 35 naires allemands et anglais prendre aussitôt position, discuter, et même traiter et conclure sous leur propre responsabilité. Pendant ce temps, les fonctionnaires fran- çais adressent des rapports à Paris. A Paris, on discute lon- guement sur des principes généraux, sans tenir grand compte des circonstances particulières, qu'on y ignore le plus souvent, et qui pourtant fourniraient peut-être les véritables éléments de la décision. A Gonstantinople, l'af- faire est conclue, la question est réglée, que les agents français en sont encore à attendre la réponse qu'ils ont sollicitée et sans laquelle ils ne sauraient point agir. Dans toutes les questions, politiques, financières, industrielles, on escompte visiblement à Gonstantinople notre « immo- bilité », dont les effets sont rendus plus fâcheux par l'ini- tiative aisée et rapide de nos concurrents. CHAPITRE II EGYPTE ALEXANDRIE ÉTABLISSEMENTS FRANÇAIS ÉTABLISSEMENTS D'INSTRUCTION Lycée français. — Fondé en 1909 par une société privée, le Lycée français d'iVlexandrie a été rétrocédé en 1910 à la Mission laïque française. L'ancien conseil d'administration n'a plus que le rôle d'un comité de patronage : il continue de s'intéresser à l'institution, mais il n'a aucune part à sa direction. L'établissement comprend : 1° Un lycée de garçons, organisé sur le modèle de nos lycées. L'anglais et l'arabe sont obligatoires dans toutes les classes; il y a des cours facultatifs d'allemand, d'ita- lien et de grec. Les cours d'allemand sont suivis par un grand nombre d'élèves, qui, grâce à la connaissance de cette langue, entrent plus facilement et à de meilleures conditions dans les grandes maisons de commerce d'Alexan- drie. A côté du cours d'enseignement secondaire, on a eu l'heureuse idée d'installer un cours d'enseignement com- mercial. Les élèves, nombreux dans les classes inférieures, RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 39 sont rares dans les hautes classes. Ce qui m'a paru être le mieux organisé dans ce lycée, c'est l'enseignement des langues. — 268 élèves. 2° Un lycée de filles. Les programmes sont ceux de l'enseignement secondaire; une grande place est faite à l'étude des langues (anglais, allemand, grec et italien). J'assiste à une leçon d'histoire moderne sur « les causes de la Révolution française » et à des interrogations sur le même sujet. La leçon du professeur est très intéressante, mais dépasse manifestement la portée des élèves. Le niveau des études est moyen. — 82 élèves, dont 1 musulmane. Institut français de commerce et de droit. — Il a été créé en 1911 par la « Ligue internationale de l'Enseignement laïque en Egypte ». Mais la direction de l'Institut est purement française et l'enseignement est donné en français. Les programmes comportent : un cours préparatoire de français, un cours d'enseignement com- mercial, un cours de droit égyptien. Ces cours sont faits le soir et suivis par un assez grand nombre d'auditeurs. On trouve parmi les professeurs un agrégé des sciences et deux anciens élèves de nos écoles supérieures de commerce. De la même « Ligue internationale » dépend à Alexan- drie une école primaire laïque, fréquentée par environ 125 élèves des deux sexes, en majorité i-taliens. Le fran- çais est la langue de l'enseignement; l'arabe et l'italien sont enseignés comme langues étrangères. Université populaire libre. — Dans cette insti- tution internationale, l'influence française est prépondé- rante. Les cours de français qu'on y a organisés sont très fréquentés. Université française de la Femme. — Elle a été fondée récemment sous le patronage de l'Alliance fran- 40 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE çaise. Une centaine de daines et de jeunes filles y sont inscrites et suivent les conférences, qui sont faites en fran- çais, sur des sujets de science, de philosophie et de litté- rature française. Collège des Jésuites. — Il comprend une école primaire préparatoire (lOi élèves), un cours complet d'en- seignement secondaire classique (108 élèves) et, depuis 1909, un cours d'enseignement commercial (103 élèves). L'anglais est obligatoire pour tous les élèves ; Farabe n'est obligatoire qu'en principe. De nombreux élèves suivent les cours de grec et d'italien. Le niveau des études classiques est très élevé, et, à ce point de vue, le collège d'Alexan- drie peut rivaliser avec les meilleurs collèges de France. Les autorités d'Alexandrie voient d'un bon œil le déve- loppement de ce collège, que le ministre égyptien de l'Instruction publique a visité à plusieurs reprises. L'ins- tallation matérielle et l'organisation intérieure de l'établis- sement sont excellentes. Établissements des Frères des Écoles chré- tiennes. — 1^ Collège Sainte-Catherine . — Les Frères y ont organisé un cours complet d'enseignement secondaire classique et moderne et un cours d'enseignement commer- cial. Les jeunes gens qui, ayant fait leurs études dans des institutions indigènes, désirent apprendre le français, sui- vent des cours spéciaux dans les « classes de retarda- taires ». L'arabe et l'anglais sont obligatoires dans toutes les classes. Les divers programmes et les méthodes d'ensei- gnement sont parfaitement adaptés aux besoins de la clien- tèle. — 566 élèves. A côté du collège, les Frères ont ouvert une école pri- maire gratuite, où les enfants pauvres du quartier reçoi- vent une instruction élémentaire en français. — 511 élèves. 2^ Ecoles primaires et primaires supérieures. — Les \ DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 41 Frères en ont créé six : trois à l'intérieur de la ville et trois dans les faubourgs. Les trois écoles de quartier, Saint-Joseph, Saint-Louis et Saint-Michel, comptent respectivement 225, 79 et 255 élèves. L'enseignement primaire supérieur y est donné en fran- çais ; il est complété par des cours obligatoires d'arabe et d'anglais. L'établissement de Ramleh comprend une école gratuite (122 élèves) et un collège payant (170 élèves). L'école primaire supérieure de Moharrem-Bey , payante, a 179 élèves; celle d'Ibrahimieh en compte 86. 3" École professionnelle d'arts et métiers. — Elle com- prend des ateliers de forge, de menuiserie, d'imprime- rie, etc. Sur les 87 élèves que compte cette école, 59 sont reçus gratuitement. Les apprentis reçoivent un bon ensei- gnement primaire qui leur est donné en français. Les Frères ont ouvert' dans la même maison une école gratuite, que fréquentent '23i enfants pauvres du quartier, dont 17 musulmans. Le total des élèves instruits dans les divers établissements des Frères à Alexandrie est, en 1912, de 2.541. Les anciens élèves des Frères sont fort recherchés par les directeurs des maisons de banque et de commerce et par les diverses administrations. Les Frères s'occtipent eux- mêmes du placement de leurs élèves, qui, le plus souvent, s'effectue sans difficulté et dans des conditions avanta- geuses. Les Frères ont dû ouvrir, à l'automne dernier, une école "pratique de banque et de commerce, organisée sur le modèle de certaines écoles américaines et comprenant une (( maison de banque » et une « maison de commerce », 011 les élèves sortant du cours commercial peuvent faire, s'ils le désirent, un premier apprentissage. Écoles de l' Alliance Israélite. — Elles ont été 42 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE fondées en 1898. V école de garçons compte 113 élèves répartis en 5 classes; V école de filles a 131 élèves. On y donne, selon d'excellentes méthodes, un enseignement primaire très complet. Les élèves parlent le français avec une pureté d'accent remarquable. Seuls les garçons sont tenus d'apprendre l'hébreu ; l'arabe et l'anglais sont obli- gatoires dans toutes les classes. Les écoles de l'i^lliance ont à lutter contre une concur- rence assez redoutable : celle des écoles de la communauté israélite d'Alexandrie, dont les tendances sont favorables à l'Italie et hostiles à la France. Institution Girard, pour les jeunes filles, à Ramleh (faubourg d'Alexandrie). — C'est la plus an- cienne école laïque française d'Alexandrie, et peut-être de l'Egypte. 120 jeunes fdles y reçoivent l'enseignement primaire ou secondaire. Les élèves parlent correctement le français. Institution Jacot, pour les jeunes filles. — Cet établissement, dirigé par un Suisse, est placé sous la protection française. Notre langue y est bien enseignée. — 200 élèves. Pensionnat de jeunes filles de la Mère de Dieu. — C'est une bonne institution d'enseignement secondaire. Dans toutes les classes, il y a des cours d'an- glais obligatoires, et des cours d'arabe facultatifs. Les Religieuses de la Mère de Dieu agrandissent leur maison, devenue trop petite par suite du nombre croissant des élèves. Beaucoup d'enfants sont reçues gratuitement ou semi-gratuitement. — 160 élèves, dont 16 musulmanes. Pensionnat de Notre-Dame de Sion, à Ram- leh. — On y trouve réunies : une école payante, recevant des pensionnaires et des externes : 194 élèves; et une école gratuite, où le français est enseigné aux enfants des DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 43 familles pauvres : 93 élèves. A cette école est annexé un oitvroir où les jeunes filles sont admises gratuitement. Écoles des Filles de la Charité. — La Maison de la Miséricoirle, fondée par les Filles de la Charité en 18H, offre un remarquable ensemble d'oeuvres d'éduca- tion et de bienfaisance. Elle est très populaire à Alexan- drie. La chapelle qui s'y trouve sert d'église à tous les Français catholiques, qui s'y rendent plus volontiers qu'à la paroisse latine, desservie par des religieux italiens. On trouvera plus loin l'énumération des œuvres d'assistance installées à la Miséricorde. Voici les institutions d'enseigne- ment que les Filles de la Charité y entretiennent : un pen- sionnat, 185 élèves; un orphelinat^ 150 orphelines; uh externat payant, 357; un externat gratuit, 670 élèves; un petit collège de garçons, pour les garçons au-dessous de sept ans : 123 élèves. On peut rattacher à ce groupe ï École annexe deVAttarine : 180 élèves. Tous ces enfants reçoivent une bonne instruction pri- maire. On prépare quelques jeunes filles aux brevets sim- ple et supérieur. Les élèves répondent aux interrogations avec une netteté et une décision frappantes. Tous ont une excellente prononciation. Écoles des Filles de la Charité. — Maison Saint'Vincent de Paul. — Elle comprend un orphelinat de garçons : 160 orphelins, et un externat de garçons : 120 élèves. Orphelins et externes reçoivent en français une instruction primaire complète. Le nombre des enfants qui reçoivent une instruction française parles soins des Filles de la Charité est, à Alexan- drie, en 1912, de 2.423. 44 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE ŒUVRES FRANÇAISES D ASSISTANCE Établissements des Filles de la Charité. — Maison de la Miséi^icorde. — Elle renferme, avec les écoles dont il a été fait mention plus haut, un excellent dispensaire, ouvert tous les jours. J'assiste à la consulta- tion. La salle d'attente est remplie. Devant la porte, dans la rue, un homme de police oblige les clients à prendre la file. Tous les jours, un médecin et un chirurgien viennent donner ici des consultations gratuites. Les petites opéra- tions urgentes sont faites séance tenante, dans une salle bien aménagée. Une religieuse procède aux pansements, une autre est préposée aux traitements des maladies des yeux, si fréquentes dans ce pays ; une troisième soigne - et arrache les dents. On reçoit de trois à quatre cents | malades par jour. La Pharmacie est ouverte toute la jour- née : les médicaments y sont distribués gratuitement aux indigents. Le Dispensaire de la Miséricorde est une des institutions qui ont le plus contribué à rendre la France populaire parmi le peuple d'Alexandrie. Un Fourneau économique est installé rue Abou-el-Darc- lar, dans la Maison Saint-Vincent de Paul. Œuvre des enfants abandonnés, à Mohar- rem-Bey. — L'établissement se compose d'une crèche, d'un asile et d'un externat. L'installation est précaire et insuffisante ; les Filles de la Charité manquent des ressources nécessaires pour l'amé- liorer. Mais, au point de vue de l'organisation intérieure, de la propreté et de l'hygiène, l'établissement ne laisse rien à désirer. Dans une maison d'apparence médiocre, on a aménagé avec le plus grand soin des dortoirs d'en- fants, des garderies, un réfectoire, une infirmerie. Une DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 45 vaste salle est occupée par les couveuses artificielles. Dans une étable fort propre, on me montre les vaches qui four- nissent le lait destiné aux enfants ; une religieuse est préposée au soin de l'étable. 65 petits abandonnés sont recueillis et élevés. De la Crèche, les enfants passent à l'Asile, où on leur donne l'instruction primaire, en français et en arabe. L'asile compte, lors de ma visite, 173 enfants. Puis les garçons et les filles sont séparés. On met les premiers en apprentissage; les secondes sont employées dans la maison à divers travaux, notamment à une biian- der ie-blanc hisser ie, que les religieuses ont installée elles- mêmes et qui leur procure quelques ressources. Les filles, en raison de l'instruction et de l'éducation qu'elles ont reçues, trouvent aisément à se placer; souvent elles sont demandées en mariage par les ouvriers du pays, qui les savent bonnes ménagères. Parmi les garçons, beaucoup s'engagent à la Légion étrangère. Les Filles de la Charité voudraient être en mesure de recueillir un plus grand nombre d'enfants, et de conser- ver leurs orphelins plus longtemps. Leur ambition serait, lorsque leurs enfants sont en apprentissage, de pouvoir au moins les réunir chez elles le dimanche : mais la place et les ressources leur font défaut. Parmi les établissements que j'ai visités, il en est peu qui méritent plus que celui-ci d'être secourus et pour lesquels le besoin d'une aide im- médiate se fasse plus vivement sentir. Dans la même maison, les Filles de la Charité ont ouvert un externat pour les enfants pauvres du quartier; elles leur donnent un enseignement élémentaire en arabe et en français. Hôpital européen. — Cet établissement a été fondé et est administré en commun par les colonies française, 46 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE autrichienne et italienne d'Alexandrie. Le chirurgien en chef est un Français, le médecin en chef est un Italien. La direction de l'hôpital est confiée aux Filles de la Charité, dont la grande majorité est française. L'hôpital est vaste, bien situé et convenablement amé- nagé; il est pourvu de pavillons d'isolement et d'une ins- tallation radiographique ; en raison des besoins locaux, on a donné un développement particulier à la clinique ophtalmologique. L'hôpital reçoit de nombreux indi- gènes, même dans le service des femmes. 1641 malades y avaient passé en 1910. Le budget de l'hôpital est d'environ 100.000 francs. Asile de vieillards. — Fondé et entretenu par les religieuses de Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, l'asile n'a pas de ressources fixes : il vit au jour le jour. Sept reli- gieuses, dont deux sont constamment occupées à recueillir les aumônes, soignent et pourvoient de tout le nécessaire 70 vieillards, français, grecs, italiens ou indigènes. Des quêtes, une fête annuelle de charité, les petites contri- butions fournies par les élèves des écoles françaises procu- rent les ressources indispensables. Les religieuses accueillent indistinctement tous les vieil- lards dans la mesure où elles peuvent les loger. Elles nour- rissent et secourent tous les misérables qui viennent frap- per à leur porte. Établissements des Sœurs de la Délivrande. — Les sœurs françaises de la Délivrande sont utilisées comme gardes-malades, dans les cliniques et chez les par- ticuliers. Elles soignent gratuitement les pauvres à domi- cile et donnent asile à des femmes indigentes. Œuvres de Saint- Vincent de Paul et des Jeunes Économes. — Ces œuvres de charité, dirigées par les Lazaristes et par les Filles de la Charité, ont pour DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 47 but la visite des pauvres à domicile. Elles sont interna- tionales, mais c'est le Consulat de France qui en assume le patronage. Société française de bienfaisance. — Elle a pour principal objet de secourir les Français tombés dans le besoin, d'entretenir les indigents français dans les hôpi- teaux et dans les asiles et de rapatrier les vagabonds, mal- heureusement trop nombreux en Egypte. ŒUVRES FRANÇAISES DIVERSES Alliance française. — La section de l'Alliance française exerce à Alexandrie, comme partout ailleurs, une action très profitable à notre influence. Elle distri- bue aux écoles où le français est enseigné des fournitures, des tableaux, des livres de classe et des livres de prix ; elle accorde une subvention à l'Université populaire libre pour des cours de français. Union artistique. — Cette société, récemment fon- dée, est internationale, mais le président en est français et imprime à l'œuvre une direction conforme à nos inté- rêts. L'Union artistique organise des représentations gra- tuites d'œuvres dramatiques françaises; ces spectacles sont très goûtés à Alexandrie. Chambre de commerce française. — La Cham- bre de commerce française fait preuve d'une grande acti- vité. Elle rend des services, et pourrait en rendre bien davantage, si les commerçants français se montraient plus disposés à tirer parti des renseignements qu'elle leur four- nit. La Chambre de commerce publie mensuellement un Bulletin et des statistiques. 48 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. CONCURRENCE ÉTRANGÈRE Parmi les nations étrangères, la France tient à Alexan- drie le premier rang par ses écoles et par ses œuvres d'as- sistance. Sur une population scolaire d'environ 28.000 enfants, 12.000 fréquentent les écoles du gouvernement égyptien; les écoles des communautés grecques, arméniennes et Israélites, les écoles hellènes, italiennes, allemandes et anglaises en réunissent toutes ensemble à peu près 9.000; nos écoles françaises en comptent à elles seules environ 7.000. Il faut observer de plus que le français est enseigné dans presque toutes les écoles non françaises. La concur- rence la plus active nous est faite par les Italiens; les An- glais viennent ensuite, puis les Allemands. Nos œuvres d'assistance sont pour ainsi dire sans rivales, et l'on ne saurait assez répéter combien des institu- tions comme les Enfants trouvés et Y Asile de vieillards rehaussent notre prestige et servent notre influence. A côté de l'Hôpital européen, il convient de men- tionner V Hôpital du Gouvernement, anglo-égyptien, et VHôpital des Diaconesses, établissement allemand de bonne réputation. TANTAH [delta du Nil) Collège Saint-Louis. — Il est dirigé par les Pères des Missions d'Afrique. A côté du collège payant (220 élèves) est ouverte une école gratuite, qui compte environ 100 élèves. La clientèle de cet établissement est eu grande partie syrienne; le français est la langue de l'enseigne- ment ; l'étude de l'anglais et celle de l'arabe sont obliga- toires pour les élèves du collège. École de jeunes filles Sainte -Marie. — Elle réunit environ 300 élèves, dont 60 musulmanes. Elle est dirigée par les religieuses françaises de Notre-Dame des Saints- Apôtre s. Écoles de l'Alliance Israélite. — Elles ont été fondées en 1907, avec le concours de la communauté Israélite de Tantah. V école de garçons est fréquentée par 92 élèves, dont 59 sont reçus gratuitement. V école des filles, à laquelle est réuni un asile enfantin, compte 116 élèves : 37 sont reçues gratuitement. Tous ces enfants reçoivent une bonne instruction primaire en français et en arabe. Ils parlent couramment notre langue. Il a été d'autant plus difficile aux écoles françaises de se créer une clientèle à Tantah, que la ville possède INTÉRÊTS EN ORIENT. 4 50 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE d'excellentes écoles arabes, où les parents envoient volontiers leurs enfants. MANSOURAH [delta du NU) Collège Saint-Louis (Frères de la Doctrine chré- tienne). — Les Frères y donnent à des élèves externes l'enseignement primaire, primaire supérieur, et commer- cial élémentaire. On prépare quelques jeunes gens aux épreuves du baccalauréat français d'Egypte. Les cours sont professés en français. L'anglais et l'arabe sont obligatoi- res. Le niveau des études est très satisfaisant. Le collège compte 275 élèves; il y en a 106 à l'école gratuite qui est attenante au collège. De ces 381 enfants, 87 sont musulmans. École de filles des Religieuses de la Sainte- Famille. — Jusqu'à ces dernières années, il n'y avait pas d'école française de filles à Mansourah. Les Religieuses de la Sainte-Famille sont venues s'y installer en novem- bre 1908. L'école qu'elles voulaient ouvrir ne pouvait manquer de faire concurrence à celle des sœurs francis- caines d'Egypte, qui sont italiennes et très protégées, comme telles, par la Délégation apostolique d'Alexandrie. Aussi les religieuses françaises n'obtinrent-elles l'autori- sation de la Propagande qu'au prix de bien des efforts. Leur école réunit aujourd'hui un grand nombre d'élèves. Mais elle est étroite et mal installée. Les reli- gieuses possèdent le terrain nécessaire pour une nouvelle construction : il ne leur manque que de l'argent pour bâtir. Leur œuvre est intéressante et très capable de développement. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 51 Une bonne instruction primaire est donnée aux élèves clans deux écoles, dont Tune est payante et l'autre gratuite : 182 élèves dont 29 petits garçons. ZAGAZTG [delta du Nil] École de garçons des Frères de la Doc- trine chrétienne. — C'est une école primaire, qui compte, répartis en 4 classes, environ 80 élèves, dont 60 non catholiques. LE CAIRE ÉTABLISSEMENTS FRANÇAIS D'INSTRUCTION École française de droit. — L'école française de droit du Caire dépend de la Faculté de droit de Paris, à laquelle les étudiants inscrits versent régulièrement, non seulement les droits d'examen, mais encore les droits de bibliothèque. Tous comptes faits, l'école de droit du Caire apporte à l'État français plus qu'elle ne reçoit de lui. Les cours sont divisés en deux sections : section de droit égyptien, section de droit français. Un certain nombre de cours sont communs aux deux sections. Les professeurs des facultés de France qui viennent présider aux examens de l'école du Caire reconnaissent que le niveau général des études y est très satisfaisant. On a récemment fait droit au vœu exprimé par le directeur et tendant à une légère augmentation du personnel enseignant. Le directeur n'a pas encore obtenu que l'École soit pourvue des droits que confère la person- nalité civile. L'École est bien installée; mais la biblio- thèque est fort pauvre, et ne consiste guère qu'en quelques collections de jurisprudence. Des 408 étudiants inscrits à l'École française en 1912, 217 suivent les cours de première année, 90 ceux de seconde année, 54 ceux de troisième, et 14 les cours de RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 53 doctorat; 28 sont inscrits à la section de droit égyptien. Nul ne conteste que notre école de droit, en même temps qu'elle répond aux besoins du pays, ne constitue pour nous un excellent moyen d'influence. Mais j'ai en- tendu plusieurs personnes compétentes, qui d'ailleurs re- connaissaient les avantages de cette création, en relever les inconvénients : les jeunes gens seraient trop exclusi- vement attirés vers le métier d'avocat, ou vers celui, plus commun, d'agent d'afîaires; ils délaisseraient, par suite, d'autres formes d'activité très nécessaires : l'admi- nistration, le commerce, l'agriculture seraient privés d'hommes de savoir et de talent. Le nombre, considérable en Egypte, des agents d'affaires indigènes et étrangers ne laisse pas que d'inquiéter certains observateurs soucieux de l'avenir de ce pays. J'exposerai cette question avec plus de détails dans les « observations » qu'on trouvera à la fin du chapitre. Institut archéologique français. — Je me borne à signaler ici l'importance de cet Institut, qui est appelé à rendre tant de services à la haute culture et à l'influence française en Egypte. Lycée français. — Créé par l'initiative d'une société privée, le Lycée français a été rétrocédé, en 1909, à la mission laïque. Il s'est développé très rapidement. Le lycée de garçons, qui comprend une section d'ensei- gnement moderne et une section d'enseignement classique, compte 178 élèves. On les prépare aux deux baccalau- réats, français et égyptien. L'instruction primaire est excellente ; l'enseignement secondaire est faible et, dans les hautes classes, fort peu suivi. L'arabe est obligatoire; l'anglais est facultatif. Le lycée de jeunes filles a 93 élèves ; seules les classes élémentaires sont fréquentées par quelques musulmanes. 54 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Ici, comme au lycée d'Alexandrie, la forme de rensei- gnement m'a paru dépasser de beaucoup la capacité moyenne des élèves. Collège Esnault. — C'est une bonne institution d'enseignement secondaire et primaire supérieur. Tous les élèves sont tenus de suivre les cours d'arabe et d'anglais. La langue française est enseignée avec le plus grand soin et selon d'excellentes méthodes. Il n'y a pas une place vide dans le collège. Le directeur, qui montre beaucoup d'intelligence et de zèle, pourrait aisément augmenter le nombre des élèves, si on lui donnait les moyens d'agrandir ses locaux. Il y aurait un réel intérêt à favoriser le développement de cette institu- tion, que fréquentent beaucoup d'indigènes. — 261 élèves, dont 144 égyptiens. Le collège Esnault a fait l'objet d'une interpellation de M. Barthou à la Chambre des Députés, le 30 novembre 1911. Cours de commerce. — 11 a été créé, il y a onze ans, par M. Chevalley. Le cours de commerce proprement dit est peu développé : dans l'intention même des direc- teurs, il n'est guère qu'un prétexte pour attirer les indi- gènes aux « cours préparatoires », qui sont consacrés à l'enseignement du français, et pour faire ainsi concur- rence aux institutions analogues que multiplient les An- glais et les Allemands. Les cours sont donnés le soir, dans les salles du lycée français, louées par les organisateurs. Les droits d'ins- cription sont minimes. J'observe que les auditeurs appar- tiennent aux classes sociales les plus diverses : il y a là des bourgeois, des ouvriers, des prêtres; les étudiants en théologie d'El-Azhar sont particulièrement nombreux. J'assiste à une leçon de lecture expliquée; les élèves lisent un texte français et le traduisent en arabe. Le pro- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 55 fesseur, un Syrien, qui parle fort bien notre langue, montre un souci remarquable de la précision et de la méthode. Ces cours du soir sont très appréciés et contribuent à répandre notre influence dans certains milieux qu'il serait difficile d'atteindre par d'autres moyens. Collège des Jésuites. — C'est un vaste et bel éta- blissement, dont les meilleures familles du Caire fournis- sent la clientèle. Chaque année, les autorités khédiviales assistent à la représentation d'une pièce arabe jouée, dans le texte, par les élèves. Le collège des Jésuites est très apprécié dans les milieux officiels du Caire. Les cours sont divisés en deux séries; l'une prépare au baccalauréat français, l'autre au baccalauréat égyptien. Les Pères Jésuites donnent eux-mêmes l'enseignement en français. Les cours d'arabe sont faits par des maîtres indigènes, que les Jésuites surveillent et qu'ils ont formés à leurs méthodes. — 338 élèves, dont 224 égyptiens de diverses religions. Établissements des Frères de la Doctrine chrétienne. — 1^ Collège Saint-Joseph. — Les Frères y donnent en français l'enseignement primaire, secon- daire et commercial; ils préparent les élèves au bacca- lauréat égyptien. L'arabe et l'anglais sont obligatoires dans toutes les classes. Le niveau des études m'a paru très satisfaisant. Lors des examens de sortie, on délivre aux élèves qui s'en sont montrés dignes un diplôme offi- cieux, qui facilite beaucoup leur enttée dans les maisons de commerce et dans les banques. Les Frères ne peuvent satisfaire à toutes les demandes d'admission qui leur sont adressées. — 350 élèves, dont 215 égyptiens, appartenant à différents cultes. 2° Collège Jean-Baptiste de la Salle. — C'est un excel- 56 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE lent établissement d'enseignement primaire. Tous les cours sont faits en français, sauf les cours de langues vivantes (arabe et anglais obligatoires). Les élèves par- lent et écrivent correctement le français. L'enseignement des sciences est particulièrement développé; par contre, celui de l'histoire est un peu négligé. — 869 élèves. Au collège est annexée : 3° Vécole Saint-Vincent, école primaire gratuite, avec 283 élèves, qui parlent bien notre langue. Les Frères dirigent en outre : k"" Un collège, à Ismailieh, 285 élèves; 5" Le collège Saint-Paul, 391 élèves; — ces deux éta- blissements sont payants ; 6° Vécole de la Sainte-Famille, 304 élèves; 7° Vécole Sainte-Marie, 117 élèves; 8° Vécole Saint- Antoine, 118 élèves; — ces trois écoles sont des écoles primaires de quartier, entièrement gratuites ; 9° Une école récemment ouverte à Héliopolis, et qui compte déjà 76 élèves. Au total, les Frères des Écoles chrétiennes donnent au Caire l'instruction et l'éducation françaises à 2.793 jeunes gens, dont 1.525 sont égyptiens et 223 sont musulmans. 11 faut encore ajouter à cette liste la petite école pri- maire supérieure, que les Frères ont créée à Choiibrah, à côté de la paroisse française; ouverte depuis peu, elle donne déjà de bons résultats. Collège grec catholique. — Cet établissement ne reçoit aucune subvention du gouvernement français. Il contribue pourtant à faire connaître notre langue et à répandre notre influence. H y a peu d'années encore, c'était un collège anglais. Le directeur actuel, ancien élève des Pères Blancs de Jérusalem, a repris la maison et l'a transformée en un excellent établissement français. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 57 Cette année (191*2) il a fait venir de France, à ses frais, un instituteur chargé du cours élémentaire; il désirerait pouvoir en faire venir plusieurs. Les professeurs sont pour la plupart d'anciens élèves de l'école des Pères Blancs de Jérusalem. Ils enseignent avec beaucoup de soin et de méthode le français, le grec, l'arabe, l'histoire, la géographie et les éléments des sciences. Cette institu- tion est digne d'intérêt. Collège du patriarcat maronite. — C'est une bonne école primaire, qui tend à devenir un collège se- condaire. Les professeurs sont des prêtres maronites, anciens élèves du séminaire des Jésuites à Beyrouth ou de l'École des Pères Blancs à Jérusalem. Les cours sont fails en français; l'arabe et l'anglais, obligatoires, sont enseignés comme langues vivantes. Les élèves lisent et parlent correctement notre langue. Ce collège, qui reçoit du gouvernement français une faible subvention, vit presque exclusivement des dons volontaires de la com- munauté maronite du Caire, laquelle est généralement assez pauvre. Il pourrait aisément se développer, si on lui en fournissait les moyens. Il compte actuellement 160 élèves. J'ai aperçu, dans les petites classes, quelques tableaux italiens, pour l'enseignement de la lecture et les leçons de choses : c'était un don gracieux de la Société Schiapparelli, dont il sera parlé plus loin. Écoles de l'Alliance israélite. — Une école pri- maire de garçons compte 322 élèves; une école primaire de filles en a 109. Les cours sont faits en français et en arabe. En outre, l'hébreu est enseigné aux garçons. Les deux écoles que l'Alliance israélite avait ouvertes à l'Abassieh, et qui réunissaient 151 garçons et 175 lilles, ont été provisoirement fermées. ^ Collège Jeanne-d'Arc,àFaggalah. (École laïque 58 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE de jeunes filles, dirigée par M™*" Thibaud.) — C'est un éta- blissement d'enseignement primaire et secondaire; il comprend, outre des cours de jeunes filles, une classe de petits garçons. On prépare les jeunes filles aux examens du brevet élémentaire et du brevet supérieur. Le fran- çais est la langue de l'enseignement; l'arabe et l'anglais sont obligatoires. L'instruction est généralement bonne. — 180 élèves externes, dont 115 égyptiennes. On a organisé depuis peu dans le même local un Ins- titut commercial français, qui a immédiatement recueilli 150 inscriptions, et des conférences populaires, faites en français par deux journalistes du Caire, MM. Doplfer et Tribier : elles attirent utilement un public de quartier. École Orlanducci (pour les jeunes filles). — Cette école réunit environ 100 élèves; la tenue y est médiocre, et l'enseignement peu méthodique. Au con- traire de ce que j'ai observé presque partout ailleurs, les classes inférieures sont ici les plus négligées ; les élèves des hautes classes ont quelque instruction et semblent profiter des leçons que leur fait une agrégée française, déléguée par notre gouvernement et rétribuée par l'institution. École Garrivier-Millerey (pour les jeunes fil- les). — C'est une école primaire et primaire supérieure. Faute de ressources, l'installation est médiocre; mais l'en- seignement, surtout dans les classes élémentaires, est cons- ciencieux et méthodique. — 200 élèves de toutes nationa- lités. Pensionnat des Dames du Sacré-Cœur. — Construit sur de vastes plans, entouré de beaux jardins, cet établissement, ouvert en 1905, ne compte encore que 65 pensionnaires. Une centaine d'enfants fréquentent Y école gratuite annexée au pensionnat. Les Dames du Sacré-Cœur ont eu et ont encore à lutter DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 59 contre le mauvais vouloir de la Délégation apostolique d'Alexandrie. Mille efforts ont été faits de ce côté pour les éloigner du Caire. On a fini par autoriser les religieuses françaises à ouvrir leur pensionnat, mais en leur inter- disant d'y recevoir les jeunes filles non catholiques. Cette mesure était fort habile. La haute société égyptienne du Caire n'a pas manqué d'attribuer à nos compatriotes elles-mêmes une exclusion désobligeante, et d'observer que les religieuses françaises, qui reçoivent en Egypte une large hospitalité, auraient pu la reconnaître mieux qu^en refusant d'instruire les enfants du pays. Les Dames du Sacré-Cœur ont installé depuis peu à Héliopolis un demi -pensionnat, où elles admettent les jeunes filles orthodoxes et musulmanes. Externat dé jeunes filles de la Mère de Dieu. — Il est nombreux et bien organisé. Les musul- manes le fréquentent volontiers. La supérieure de l'école observe que les Égyptiens qui, jusqu'à ces dernières années, négligeaient systématiquement l'instruction des filles, ont aujourd'hui une tendance à la pousser très loin. La plupart des élèves suivent régulièrement les cours jus- qu'à leur mariage; l'influence qu'on peut exercer sur elles n'en est que plus profonde et plus durable. A l'externat payant est annexée une école gratuite. Les religieuses de la Mère de Dieu ont à Gezireh un pensionnat très floris- sant. — 196 élèves, dont ki musulmanes à l'externat du Caire; 90 élèves à l'école gratuite; 78 élèves, dont 17 mu- sulmanes au pensionnat de Gezireh. École des Sœurs du Bon-Pasteur. — l*' Écoles de Choiibrah. — L'établissement comprend une école payante y primaire et secondaire : l'instruction élémentaire y est donnée soigneusement ; les langues française, arabe et anglaise sont bien enseignées. — 2V0 élèves; 60 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Une école primaire gratuite et un orphelinat : 154 élè- ves; un asile pour les filles repenties ^ auxquelles on en- seigne aussi un peu de français. 2** École primaire du Mouski : elle compte 392 élèves. École des Sœurs de la Charité de Besan- çon, à Faggalah. — C'est une très bonne école pri- maire, où le nombre des élèves augmente chaque année. 200 élèves, dont 120 égyptiennes de diverses religions. Ecoles de Notre-Dame de la Délivrande. — Les religieuses françaises de la Délivrande ont : 1" Une école payante à Faggalah, où l'instruction pri- maire est bonne. — 200 élèves, dont 8i non catholiques; 2** Une école gratuite à Balad, avec 130 élèves. Selon la condition imposée par la Délégation apostolique, elles ne peuvent recevoir à l'école gratuite que des catholiques. A l'école est annexée un dispensaire, où les religieuses soi- gnent gratuitement les indigènes pauvres, en particulier ceux qui sont atteints de maladies des yeux. Environ 30.000 malades ont été reçus en 1911. École de Notre-Dame des Apôtres. — Les sœurs de Notre-Dame des Apôtres ont ouvert en 1912 une petite école française à Choubrah. Elle compte environ 200 élèves, tous reçus gratuitement. On donne aux enfants une bonne instruction primaire en français et en arabe. En même temps que l'école, les religieuses ont créé un dispensaire, où un médecin vient donner chaque jour des consultations aux indigents; consultations, pansements et remèdes sont gratuits. On reçoit environ 400 malades par jour. ŒUVRES FRANÇAISES D'ASSISTANCE OEuvres d'enseignement et œuvres d'assistance voisi- nent dans les maisons des Filles de la Charité, au Caire, I DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 61 comme partout ailleurs. Ces religieuses françaises ne les séparent jamais les unes des autres; nous ne les sépare- rons pas non plus. La Miséricorde est une merveille de bonne admi- nistration et de zèle ingénieux. Les Filles de la Charité ont pris à loyer, moyennant '25.000 francs par an, l'ancienne demeure d'Ali Pacha Chérif. Dans cet immense édifice, elles ont installé des œuvres diverses qui se complètent et dont les unes font vivre les autres. V école payante, pour les jeunes filles, réunit 358 élèves. On y donne un enseignement primaire très complet, on y prépare au certificat d'études et au brevet élémentaire. L'arabe, l'anglais, l'italien sont enseignés; les jeunes filles suivent aussi des cours de ménage et de travail à l'aiguille. Toutes parlent le français correctement et avec une pureté d'accent remarquable. Ijécole gy^atuite reçoit les jeunes filles et, dans les classes élémentaires, les petits garçons. i05 élèves y sont instruits dans notre langue. Au dispensaire, k docteurs (un chirurgien, un oculiste et deux médecins) donnent gratuitement des consultations; une religieuse soigne et arrache les dents; la « sœur phar- macienne » est connue de tout le faubourg. — 36.000 vi- sites et pansements en 1911. Au fourneau économique, des repas valant 0 fr. 65 sont servis chaque jour aux indigents moyennant 0 fr. 25. On distribue annuellement 10.800 repas. La Bonne Garde héberge les jeunes filles sans place. Pour 3 ou *2 francs par jour, elles trouvent le logement, le linge et la nourriture; on veille sur leur conduite et on leur procure des places. Cent jeunes filles ont été reçues en 1911. Universellement connue et appréciée dans les milieux étrangers et indigènes du Caire, la Maison de la Miséri- 62 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE corde est un des établissements qui nous font le plus grand honneur. Nulle part l'enseig-nement pratique du français n'est donné selon de meilleures méthodes ; nulle part la bienfaisance française n'est exercée av«c plus d'in- géniosité, de bonne économie et de belle humeur. Orphelinat de garçons de l'Abassieh. — Les Filles de la Charité y reçoivent les enfants que leur con- fient les consulats, les sociétés de bienfaisance des com- munautés grecques, arméniennes, etc., et quelquefois les parents. On donne aux enfants une bonne instruction pri- maire en français; tous lisent et parlent notre langue; ils apprennent en outre l'arabe et l'anglais. L'établissement n'a que peu' de ressources et l'on sou- haiterait une installation plus convenable. Les religieuses seraient très reconnaissantes à la Société française qui distribue le gaz au Caire, si elle consentait à fournir gra- tuitement la lumière à leur orphelinat. Le placement des orphelins est souvent fort difficile. Quelques-uns entrent comme apprentis à l'École d'arts et métiers que les Frères dirigent à Alexandrie. Beaucoup restent longtemps sans place, et, malgré les démarches pressantes des religieuses, cette importante question n'a pas encore reçu une solution satisfaisante. — 61 orphelins de diverses nationalités et de diverses religions. Hôpital français. — Fondé en 1901, cet établis- sement est vaste, bien situé et pourvu de tout le néces- saire. Il est dirigé par les Filles de la Charité. Il comprend trois classes de chambres payantes. En principe, aucun service gratuit n'est prévu. Les malades ne sont reçus gratuitement qu'à titre exceptionnel. En 1911 , 815 malades y ont passé; 18 ont été soignés gratuitement. Les dépen- ses, pour cette même année, se sont élevées à 339.679 francs; les recettes, à V40.448 francs. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 63 Asile des enfants abandonnés. — L'œuvre a été créée en 1909 par les Filles de la Charité, qui l'ont installée dans un local insuffisant. Le manque de ressources les a déjà contraintes plusieurs fois à changer de logement. Les enfants, recueillis un peu partout, sont entourés de tous les soins requis. Un médecin les visite tous les jours. Il conviendrait de soutenir sans tarder celte œuvre, parti- culièrement intéressante. — 58 enfants ont été recueillis en 1911. Asile de vieillards de Ghoubrah. — Les Filles de Notre-Dame des Douleurs ont ouvert cet hospice en 1891 L'emprunt qu'elles ont contracté pour le construire n'est pas encore amorti. La maison est d'une propreté par- faite. 7 religieuses y soignent 90 vieillards. Les religieuses demandent que l'allocation qu'elles reçoivent du gouverne- ment français ne soit pas diminuée, ainsi qu'elles avaient, semble-t-il, quelque raison de le craindre, et que la Société française d'éclairage leur distribue la lumière gratuite- ment. Société française de bienfaisance et de se- cours mutuels. — Cette société assiste les Français indigents, entretient les malades pauvres à l'hôpital, sub- ventionne les œuvres de charité, et pourvoit au rapatrie- ment des Français sans ressources. Son budget est alimenté par les cotisations des membres, une loterie, un bal an- nuel, une allocation de notre gouvernement, et quelques dons. Il convient d'observer qu'en Egypte le nombre des vagabonds « professionnels » est considérable, et que nos sociétés de bienfaisance dépensent à les rapatrier beaucoup d'argent qui trouverait facilement un meilleur emploi. 64 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. CONCURRENCE ÉTRANGÈRE Au Caire, comme à Alexandrie, nos écoles sont de beau- coup les plus nombreuses, parmi les écoles étrangères : environ 12.000 enfants y sont instruits. Jusqu'à présent nos rivaux n'ont pas réussi à nous enlever cette prépondé- rance. Cependant les Italiens gagnent chaque année du terrain; les Allemands font aussi quelques progrès. Quant aux Anglais, ils ne s'opposent pas directement à la diffusion de notre langue, mais ils tendent nécessairement de plus en plus à imposer la leur. Les Allemands ont essayé récemment d'organiser au Caire des cours de commerce, avec des cours préparatoires de langue allemande. Il est intéressant d'observer que, pour assurer le succès de cette création, ils ont recherché l'appui des organisations syndicalistes. Nos écoles de filles ont à lutter, d'une part contre la concurrence des écoles italiennes, que protège la Déléga- tion apostolique, d'autre part contre celle de la Mission presbytéinenne américaine. Les écoles américaines sont luxueusement installées, et l'enseignement des langues étrangères y est donné avec un soin tout particulier. Parmi les hôpitaux étrangers, il faut nommer Vhôpital Victoria, dirigé par des diaconesses allemandes, Vhôpital Rodolphe, autrichien; l'hôpital italien, à l'Abbasiéh, et l'hôpital anglo-américain, à Geziréh. L'hôpital arabe de Kasr-el-Aïni est dirigé par un médecin anglais. SUEZ École des Frères de la Doctrine chrétienne. — Elle a été ouverte en 1904. Les cours sont ceux de l'en- seignement primaire français; Tétude de Farabe et de l'anglais est obligatoire pour tous les élèves. Les Frères, installés dans un local qui est devenu trop étroit, auraient grand besoin de s'agrandir. — 94 élèves de toutes nationa- lités et religions, dont 13 musulmans. Établissement des Sœurs du Bon-Pasteur. — Il comprend : un orphelinat, avec 42 petites filles; un externat : les élèves parlent bien le français, elles reçoivent une bonne instruction primaire et apprennent les travaux manuels : 60 élèves; un asile, où 45 petits enfants, reçus gratuitement, apprennent à lire et à parler français. Hôpital français. — Il est dirigé par les Sœurs du Bon-Pasteur. L'édifice est délabré au point de menacer ruine. L'installation est au-dessous du médiocre. Une pre- mière subvention a été accordée en 1912 par le gouverne- ment français, en vue de remédier à cette mauvaise situa- tion. Il m'a paru, au moment où j'ai passé à Suez (28 février 1912) qu'on hésitait entre deux solutions. La première consisterait à réparer tant bien que mal l'hôpital existant ; la seconde à abandonner cet hôpital et à en construire un nouveau à Port-Tewfik. Le terrain sur lequel est construit LNTÉHÊTS EN ORIENT. 5 66 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE rancien établissement pourrait être vendu, ou faire l'objet d'un échange. Plusieurs arguments peuvent être invoqués en faveur de cette seconde solution. La colonie française est beau- coup plus nombreuse à Port-Tewfik qu'à Suez. L'installa- tion de l'hôpital à Port-Tewfik faciliterait le transport de nos soldats malades qui reviennent d'Indo-Chine. Dans les conditions actuelles, ils doivent subir deux transborde- ments : débarqués à Port-Tewfik, ils sont amenés à Suez par chemin de fer ou en voiture; en été, ce transport est péniljle et mênae dangereux. Enfin, la Compagnie du canal de Suez, qui compte à Port-Tewfik un grand nombre d'employés et d'ouvriers, serait disposée à contribuer aux frais du nouvel hôpital, s'il était établi dans cette localité; l'hôpital situé à Suez l'intéresserait beaucoup moins, puis- que Suez reste en dehors de sa zone d'influence. Quelque parti que l'on préfère, il importe de mettre fin le plus tôt possible à une situation d'autant plus déplorable, qu'à quelques mètres de notre hôpital en ruines s'élève un magnifique hôpital anglo-égyptien, dont l'administra- tion s'est empressée de me faire les honneurs. PORT-TEWFIK École des Frères de la Doctrine chrétienne. — Appelés par la Compagnie du canal de Suez, les Frères ont ouvert leur école en 1888. Ils donnent aux enfants un bon enseignement primaire français, des leçons d'anglais et d'arabe, et quelques notions de commerce et de comp- tabilité. Les meilleurs élèves sont ensuite dirigés sur les écoles commerciales d'Alexandrie et du Caire. 76 élèves. Les Frères ont organisé quelques œuvres postscolaires très florissantes, un cercle de jeunes gens et une fanfare; ils DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 67 ont installé dans leur école un cinématographe qui, les dimanches et jours de fête, attire chez eux les élèves et leurs familles. École de filles des Soeurs de la Charité. — L'école comprend un coucs élémentaire pour les filles et une classe de petits garçons. Ces enfants connaissent bien notre langue ; ils apprennent en outre Tarabe et l'anglais. — 82 élèves. Un dispensaire gratuit est annexé à l'école, En 1911, les religieuses françaises y ont soigné plus de 8.000 malades. ISMAÏLIA Collège français Calas. — Il a été récemment fondé, par l'initiative de la Compagnie du canal de Suez, pour remédier à l'insuffisance de l'école que dirigent les Pères Franciscains de Terre Sainte. Le collège comprend quatre classes : les garçons de six à treize ans environ y trouvent une bonne instruction élémentaire. 30 élèves, qui parlent correctement notre langue et répondent fort bien aux interrogations. École des Franciscains de Terre Sainte. — Cette école paroissiale est très médiocre. Les maîtres, italiens pour la plupart, n'ont rien fait pour l'améliorer, malgré maintes remontrances. L'enseignement général est faible, celui du français est inexistant. Écoles de filles (Filles de la Charité). — A V école payante, les jeunes filles reçoivent l'enseignement primaire et même l'enseignement secondaire français; elles apprennent en outre un peu d'anglais. On prépare quelques élèves au brevet élémentaire. Les religieuses ont ouvert, à côté de l'école payante, une petite école gratuite. — 11*2 élèves pour les deux écoles. 68 RAPPORT AU COMITE DE DEFENSE Hôpital français (filles de la Charité). — Cet établissement, subventionné par la Compagnie du canal de Suez, est parfaitement installé. En 1911, il a reçu 877 malades; les journées de présence se sont élevées à 14..933; 25 indigènes et 9 Européens ont été admis gratui- tement. Un dispensaire est installé dans un petit bâtiment distinct de Thôpital. Les malades y viennent de fort loin. On y soigne surtout les affections des yeux. 10.4-15 malades, dont 8.535 indigènes,. ont été reçus gratuitenlent en 1911. Le nombre des consultations gratuites s'est élevé à 41.667. Société française de bienfaisance. — Le meil- leur de ses ressources passe à secourir ou à rapatrier des vagabonds professionnels, qui se promènent en Egypte, allant d'un consulat à l'autre, et vivant successivement aux frais de nos diverses sociétés de bienfaisance. Chaque année, on en voit passer un grand nombre le long du canal. Comme on ne les autorise pas à y séjourner, ils se rendent au Caire, poussent quelquefois jusqu'à Alexandrie, puis reparaissent à Port-Tewfik et à Ismaïlia. Les ressources de nos sociétés de bienfaisance pourraient être employées plus utilement. Dames de Charité. — Cette association, qui existe à Ismaïlia et à Port-Tewfik, a pour objet principal la visite des malades à domicile. Elle est internationale; mais ce sont des dames françaises qui la dirigent. PORT-SAÏD Lycée français. — Fondé en 1910 par la Société locale d'Enseignement français, le lycée, après des débuts modestes, est aujourd'hui installé dans un édifice spacieux et commode. La Compagnie du canal de Suez a consenti à DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 69 la Société un prêt de 220.000 francs à 2 1/2 % ^ rembour- sable en 25 annuités. On se propose de créer des classes nouvelles, au fur et à mesure des besoins des élèves. Le lycée ne dépend pas à proprement parler de la Mission laïque : cependant celle-ci intervient pour lui fournir des professeurs. Lijcée de garçons. — On y donne l'enseignement secon- daire moderne, jusqu'à la troisième. La Société est en ins- tance auprès du Ministère de Flnstruction-publique, pour obtenir la délégation de deux agrégés, l'un comme direc- teur, l'autre comme professeur de sciences. Provisoire- ment, la plupart des cours sont faits par des instituteurs. Le niveau des études est convenable. Les élèves sont tenus d'apprendre l'anglais. Je n'ai pas remarqué, en visitant le lycée, qu'il y eût des cours d'arabe. — 129 élèves, dont 29 suivent les cours de l'enseignement secondaire. Lycée de filles. — On y donne l'enseignement primaire et secondaire français; les élèves suivent toutes les cours d'anglais. 70 élèves, dont 15 reçoivent l'enseignement secondaire. Ces chiffres semblent conQrmer l'observation déjà faite, que les lycées et les collèges copiés exactement sur le modèle de ceux de France n'ont pas en Orient grande chance de succès. S'ils réussissent, c'est, pour ainsi dire, en tant qu'écoles primaires; leur caractère d'établissement d'enseignement secondaire nous est révélé surtout par le prix qu'ils coûtent. Collège des Frères de la Doctrine chré- tienne. — Ce collège comporte les cours de l'enseigne- ment primaire supérieur, ceux de l'enseignement secondaire jusqu'à la troisième et ceux de l'enseignement commercial. Lenseignement commercial est très élémentaire : les élèves qui le désirent vont compléter leurs études à Alexandrie. 70 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE On ne prépare pas au baccalauréat, faute d'élèves qui y aspirent. L'anglais et l'arabe sont facultatifs. Tous les élèves parlent couramment le français, sauf ceux de la « classe d'arriérés ». — 180 élèves de diverses nationalités et de diverses religions. École gratuite. — Elle comprend quatre classes, pleines d'élèves toutes les quatre. Les Frères sont obligés, faute de place, de repousser de nombreuses demandes. Le fran- çais est très bien enseigné. — 22i élèves. École paroissiale des Franciscains de Terre Sainte. — A l'école enfantine, on n'enseigne que l'ita- lien. Dans les autres classes, on donne la même impor- tance au français, à l'italien et à l'anglais. Parmi les maîtres, deux sont français, deux sont des étrangers parlant notre langue. Aucun élève n'est français. L'é- cole de Port-Saïd est un peu moins mauvaise que les autres écoles des Franciscains. — 132 élèves, tous catho- liques. Pensionnat du Bon-Pasteur. — Cet établissement comprend : Un pensionnat déjeunes filles, où les cours de l'enseigne- ment primaire et secondaire sont bien organisés. Les langues vivantes sont enseignées avec le plus grand soin. Toutes les élèves parlent et écrivent convenablement le français. — 143 élèves, dont 130 suivent les cours de l'en- seignement primaire; Une école gratuite, où le français est bien enseigné. — 167 élèves dont 52 égyptiennes; Une école arabe; une religieuse syrienne y fait en arabe la classe aux enfants pauvres. Cette heureuse initiative a été très appréciée par la population de Port-Saïd. — Envi- ron 60 enfants; Un orphelinat. Le matin, les orphelines ont une classe DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 71 de français; Taprès-midi, elles apprennent les travaux manuels, les soins du ménage, etc.. Les jeunes tilles qui sortent de l'orphelinat sont placées par l'entremise des reli- gieuses; elles sont ordinairement très recherchées. L'or- phelinat est dirigé avec une attention aussi minutieuse et aussi sympathique que le pensionnat payant : on n'en sau- rait pas dire autant de quelques œuvres analogues. — 81 orphelines, dont 3 seulement sont françaises. Les religieuses du Bon-Pasteur vinrent s'installer à Port- Saïd en 1863, sur la demande de M. deLesseps. Depuis lors, elles n'ont pas cessé de poursuivre leur œuvre d'éducation et de charité avec le plus grand dévouement. Toutes les religieuses qui se trouvent actuellement à Port-Saïd sont françaises ou ont fait leur éducation dans des établisse- ments français. La Maison du Bon-Pasteur mérite des félicitations et des encouragements. Asile Gouvreux. — Il est également confié aux reli- gieuses du Bon-Pasteur, qui y ont réuni différentes œuvres de bienfaisance : Un asile pour les domestiques sans place : on lesrecueille, on les entretient et on leur procure une condition; Une maison jioiir les jeunes filles; les religieuses sont correspondantes de trois sociétés « pour la protection de la jeune fille » : la société internationale, la société française, et la société créée par la communauté grecque de Port-Saïd; ' Un asile pour les filles ou femmes repenties : on les recueil'e, on les instruit et on les occupe à divers travaux. Repenties et orphelines sont instruites et entretenues gratuitement. Le Délégué apostolique d'Alexandrie a fait retirer récem- ment aux Sœurs du Bon-Pasteur de Port-Saïd la subven- tion qu'elles recevaient de la Propagation de la Foi. 72 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. Cependant ces religieuses font œuvre utile avec peu de ressources : il ne serait que juste de leur en savoir gré. Hôpital municipal égyptien. — Il est dirigé, à l'entière satisfaction de la municipalité de Port-Saïd, par des Filles de la Chanté, dont la plupart sont françaises. HAUTE-ÉGYPTE La Haute-Egypte n'était pas comprise dans mon itiné- raire. J'ai cru néanmoins devoir recueillir, soit à Alexan- drie soit au Caire, quelques renseignements touchant les moyens d'influence dont nous disposons dans cette région. La Haute-Egypte a été trop négHgée au cours de ces dernières années. Lorsque nous avons voulu réparer le temps perdu, nos etïorts se sont heurtés d'abord aux obstacles ordinaires : manque de ressources pécuniaires et manque de personnel, puis à l'opposition des hauts fonctionnaires de l'Église catholique romaine. Écoles de garçons. — Les Jésuites de la province de Lyon en ont établi plusieurs à Miniéh, à Mellaoui, à Tahta, à Assiout; ils ont été contraints d'en fermer quelques- unes, en raison des difficultés que leur suscitait l'autorité ecclésiastique. Les Frères de la Doctrine chrétienne ont ouvert eux-mêmes des écoles à Miniéh, à Mellaoui, à Tahta et à Assiout. Les Jésuites ont en Haute-Egypte des maisons de tnis- sion et des écoles de mission^ ces dernières situées dans les régions de l'intérieur. Les maîtres qui enseignent dans ces écoles sont des indigènes, qui ont acquis quelque con- naissance du français dans les écoles des Frères. Écoles de filles. — Plusieurs écoles de filles avaient été ouvertes par des religieuses syriennes, vulgairement nommées Mainamettes . Elles étaient aimées des indigènes. 74 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. animées de bonnes dispositions à Tégard de la France, mais peu capables d'enseigner notre langue. Les Jésuites, qui les dirigent, résolurent de les renvoyer en Syrie et de les remplacer en Haute-Egypte par des Religieuses de Saint-Joseph. La population égyptienne accueillit fort mal cette substitution. Des plaintes furent adressées à Rome et l'autorité ecclésiastique refusa aux Sœurs de Saint-Joseph .lautorisation d'ouvrir leurs écoles. Depuis lors, des démar- ches ont été faites en leur faveur, et quelques écoles ont été ouvertes. Nous avons le plus grand intérêt à ce que ces religieuses françaises puissent exercer librement en Haute-Egypte une activité favorable à notre influence et à nos intérêts. De leur côté, les Frères de la Doctrine chrétienne se montrent tout disposés à ouvrir des écoles dans quelques centres très peuplés. Mais ils demandent qu'on leur en procure les moyens. Leurs exigences sont modestes; ils calculent que chaque école, comportant un personnel de trois frères, coûterait environ ^*50 francs par an. Ils nous offrent ainsi le moyen de pénétration le plus économique et probablement aussi le plus efficace. On a essayé d'ouvrir une école dans le Fayoum, à Médi- net-el-Fayoum. La tentative n'a pas réussi, et cette ville est actuellement privée de toute école française. I OBSERVATIONS CONCERNANT LINFLUENCE ET LES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN EGYPTE L'enseignement français en Egypte. — En Egypte, comme à Constantinople, nos écoles laïques et nos écoles congréganistes se complètent les unes les autres : elles ne se font pas concurrence. Il convient pourtant d'observer que, toute proportion gardée, les résultats obtenus jusqu'ici par les établissements laïques créés et entretenus à grands frais sont bien inférieurs à ceux que nous devons aux établissements congréganistes, et en particulier aux écoles des Frères de la Doctrine chrétienne. Les programmes des Frères, où une place importante est faite aux sciences, aux langues vivantes, au commerce et à la comptabilité, répondent exactement aux aptitudes et aux besoins de la clientèle à laquelle ils s'adressent. Au contraire, les programmes de nos lycées et collèges s'y adaptent fort mal. Dans tous nos établissements d'ensei- gnement secondaire, les classes supérieures sont à peu près vides; elles le seraient complètement si quelques jeunes gens, séduits par le prestige du diplôme, ne venaient s'y préparer tant bien que mal aux épreuves du bacca- lauréat français. Ce n'est pas en multipliant les lycées et les collèges que nous développerons notre influence, mais bien plutôt en favorisant la création d'instituts techniques, commerciaux, agricoles ou industriels, et en perfectionnant les écoles 76 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE primaires et primaires supérieures, qui prépareront des élèves pour ces instituts. Nos écoles primaires et nos écoles professionnelles trouveront en Egypte une clientèle illi- mitée. La question de l'école de droit du Caire. — L'école française de droit du Caire a bénéficié de l'échec subi par la section française de l'école khédiviale de droit. Jusqu'au départ brusque et fort regrettable de M. Lam- bert, le directeur de cette dernière école avait été un Français. L'Angleterre a profité de la circonstance pour remplacer le directeur français par un directeur anglais. Il y a encore à Técole khédiviale une section française, dirigée par des professeurs français, mais les élèves y sont de moins en moins nombreux. Les statuts prévoient la suppression de la section fran- çaise, dès lors que cette section ne compterait pas dix élèves pour chacune des trois années de cours. Actuelle- ment, chaque année compte environ 12 élèves. Or il est de notre intérêt que la section française soit maintenue : elle constitue une sorte de tampon entre nos écoles et l'ad- ministration anglaise. On sait que celle-ci exerce son con- trôle sur la section française de l'école khédiviale^ mais ne possède sur notre propre école aucun droit de surveil- lance. Le jour où la section française de l'école khédiviale n'existerait plus, les Anglais seraient tentés d'intervenir, sous un prétexte ou sous un autre, dans la direction ou dans l'administration de notre école de droit. L'école française de droit compte un grand nombre d'élèves, et même un trop grand nombre, si l'on en croit quelques connaisseurs autorisés des choses d'Egypte. Les anciens élèves de notre école deviennent rarement fonc- tionnaires : les uns entrent au barreau, les autres, plus nombreux, se font agents d'affaires. Le nombre de ces DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 77 agents augmente de jour en jour ; cependant le commerce, Findustrie, l'agriculture attirent de moins en moins les jeunes Égyptiens. Au moment où j'ai passé en Egypte, tous les journaux commentaient un discours de lord Kitchener, où les dan- gers de cette situation étaient signalés en termes assez vifs. Tout en reconnaissant les bienfaits de l'instruction en général, lord Kitchener mettait les Égyptiens en garde contre les inconvénients d'une certaine instruction trop théorique; il s'élevait contre le sentiment qui pousse les parents à déclasser leurs enfants, sous prétexte de les éle- ver au-dessus de leur propre niveau social, en leur faisant donner une éducation qui les éloigne de leur famille et de leur terre natale. Il conviendrait peut-être que la France établît en Egypte, à côté de son école de droit, et comme pour lui faire une utile concurrence, une haute école commerciale, un ins- titut d'arts et métiers, ou une école d'agriculture. Le bon succès de l'école des Frères à Alexandrie, les tentatives faites au Caire par des particuliers pour propager l'ensei- i^nement commercial sont autant d'indices qui permettent de croire que la création d'une grande école française de commerce en Egypte répondrait à un besoin. J'ai entendu des chefs d'administration, des directeurs de banques déplorer qu'il n'existât en Egypte aucune institution officielle capable de leur préparer de bons employés. Une école française de hautes études commer- ciales, en comblant cette lacune, pourrait favoiiser tout ensemble le développement de certaines entreprises et le progrès de notre influence. Chambres de commerce françaises en Egypte. — Nous avons à Alexandrie une Chambre de commerce qui joue utilement son rôle. Nous n'en possé- 78 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE ' dons pas au Caire, où il existe pourtant, en dehors de la Chambre de commerce internationale, une délégation de la chambre anglaise d'Alexandrie. Plusieurs grands com- merçants français préconisent l'installation au Caire, soit d'une délégatioQ analogue, soit même d'une Chambre de Commerce. On reconnaît généralement que notre service de renseignements commerciaux, en ce qui concerne l'Egypte, est très inférieur à ceux que possèdent les Alle- mands et les Italiens. Le commerce français en Egypte. — Notre commerce est loin de faire en Egypte des progrès compa- rables à ceux qu'y font le commerce allemand, le com- merce italien ou même le commerce suisse. A côté des traditionnelles marchandises à bon marché, l'Allemagne a commencé à fabriquer de fort bons articles. Les machines allemandes ont presque entièrement rem- placé en Egypte les machines anglaises. Tous les appareils d'éclairage, y compris ceux qu'emploie la Société fran- çaise du Gaz, proviennent de l'Allemagne ou de la Suisse allemande (Zurich). D'autre part, l'Allemagne possède en Egypte un service de renseignements commerciaux remarquablement orga- nisé : les commerçants allemands reçoivent de leurs con- sulats, de leurs banques, de leurs maisons de commission,, des informations exactes et régulières. Enfin les Allemands envoient en Egypte d'excellents représentants de com- merce. Le Français, par prudence, s'adresse toujours à un représentant connu, — un Grec ou un Israélite, — qui, tra- vaillant en même temps pour plusieurs maisons de natio- nalité différente, n'hésite pas à en sacrifier quelques-unes aux autres. Les Allemands emploient de préférence leurs compatriotes et n'autorisent le cumul que par exception. A Alexandrie et au Caire, les Français observent avec in- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 79 quiétude les progrès continus du commerce allemand et du commerce italien et envisagent l'avenir sans confiance. Dans les banques étrangères, dans les consulats, des vitrines sont réservées aux échantillons que désirent expo- ser les maisons de commerce. Les maisons françaises auraient intérêt à suivre cet exemple. Il n'y a guère que deux articles pour lesquels la fabri- cation française tienne encore en Egypte le premier rang : les articles de modes ou de confections et les articles d'alimentation. Pour tout le reste, la préférence est acquise aux maisons allemandes et suisses. Quelques commerçants français estiment qu'il y aurait place en Egypte pour une banque qui escompterait les elfels de commerce : le rôle excessif et désastreux des cour- tiers et des usuriers se trouverait ainsi utilement réduit. Depuis que nous avons négligé nos écoles dans la Haute- Egypte, notre situation commerciale y est devenue moins bonne : la Haute-Egypte commence à être inondée de pro- duits anglais et allemands. On peut reconnaître par cet exemple combien, dans les pays d'Orient, les intérêts économiques d'une nation sont étroitement liés à son influence morale. Industrie et travaux publics. — ^ Il y a peu d'industrie en Egypte etil n'y en aura probablement jamais beaucoup : on ne peut guère y fabriquer que du sucre et du coton. Les entreprises de travaux publics sont de plus en plus accaparées par l'Angleterre ; nous en avons cependant notre part. La Compagnie du Gaz, la Compagnie des Tramways sont, au Caire, des compagnies françaises. La construction et l'exploitation des chemins de 1er nous ont valu quelques commandes importantes. iMais dès qu'il s'agit d'industrie ou de travaux pubHcs, 80 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE les maisons françaises montrent une hésitation et une défiance excessives. Et tandis qu'elles multiplient les de- mandes de renseignements, puis les demandes de garan- ties, quelque maison allemande ou suisse survient, qui conclut l'afTaire et y trouve ordinairement son bénéfice. Finances. — Nous sommes encore aujourd'hui les grands banquiers de FÉgypte. Les énormes capitaux fran- çais placés en Egypte sont, en partie du moins, adminis- trés par des Français. Il suffit de citer la Société du canal de Suez, le Crédit foncier égyptien, sur lequel nous avons heureusement remis la main, etc.. Les Anglais reconnais- sent cette prédominance du capital français et ne cher- chent guère à la combattre. Par contre, les Allemands s'efforcent de nous faire concurrence. La Deutsche Orierit Bank, qui est unie à la Bresdner Bank, forme avec d'autres maisons allemandes une sorte de grande banque de pénétration : elle fait dans le Delta et en Haute-Egypte des affaires considérables. Les Alle- mands ont de bonnes agences de renseignements; ils savent s'accommoder aux conditions spéciales du pays. Pour s'établir solidement en Egypte et pour nous y sup- planter, les banques allemandes paraissent décidées à faire momentanément de gros sacrifices. Les banques grecques et italiennes pratiquent indistinc- tement tous les genres d'opération. En Egypte, d'ailleurs, le nombre des courtiers, des intermédiaires ou des agents d'affaires est indéfini. Celui-ci fait des avances en argent, cet autre des avances en nature (par exemple en graines de coton). Tout ce négoce, plus ou moins régulier, fait aux banques proprement dites une redoutable concur- rence. 11 est permis de regretter que les capitaux engagés en Egypte par des Français ne soient pas, dans une plus DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 81 grande mesure, surveillés et administrés par des Français. Cet inconvénient résulte, pour une part, de la préférence que marque l'épargne française pour les obligations. Lors- qu'une société se fonde en Egypte, on trouve les action- naires sur place; quant aux obligations, on les jette toutes ou presque toutes sur le marché français. Ainsi arrive-t-il trop souvent que nos capitaux, en Egypte, ne travaillent pas pour nous. Navigation. Transports. — On se plaint assez généralement en Egypte de la médiocre organisation des services des « Messageries maritimes ». Les « Messageries » n'auraient pas fait assez d'efforts pour rendre leurs services de passagers plus rapides et plus confortables, et pour les combiner plus exactement avec les services de chemins de fer. La clientèle de premier ordre, égyptienne ou interna- tionale, celle qui exige le confort et même le luxe, a quitté les a Messageries », et le « Lloyd autrichien » s'est em- pressé à la satisfaire. Il a construit de nouveaux bateaux luxueusement aménagés ; il a conclu une entente avec la compagnie des chemins de fer de l'Est français et les com- pagnies austro-hongroises, en vue d'organiser entre Paris et Trieste un service rapide qui corresponde avec son pro- pre service Trieste-Alexandrie-Port-Saïd. Le Lloyd autri- chien réalise, durant les saisons d'hiver et de printemps, des bénéfices énormes. On déplore aussi les grandes pertes de temps auxquelles les « Messageries » exposent leurs passagers, lors des débarquements à Marseille ou à Alexandrie On observe enfin que les services postaux sont incommodes et mal répartis. Sur tous ces points, des améliorations seraient désirables. Intérêts politiques. Relations franco -an- glaises en Egypte. — Depuis les accords de 1904, IXTÉRKTS EN OKIENT. 6 82 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE nous défendons à grand'peine en Egypte une situation fort diminuée. Le nombre des fonctionnaires français est insensiblement réduit. Si les Anglais ne procèdent pas avec plus de hâte, c'est qu'ils ne sont pas en mesure de remplacer nos com- patriotes, et qu'ils ont besoin de leurs services. Sans com- mettre jamais d'injustice flagrante à l'égard des fonction- naires français, ils se gardent de les avantager et réservent toutes les faveurs pour les fonctionnaires britanniques. Nos incessantes réclamations sont reçues avec courtoisie, mais rarement suivies d'efïet. Désormais le gouvernement égyptien n'est plus qu'une façade, derrière laquelle les Anglais exercent effectivement le pouvoir. Le mouvement nationaliste, qui, de loin, a pu faire illusion, est artificiel et incohérent : il ne saurait ni inquiéter l'Angleterre, ni la retenir. Ce qui manque le plus en Egypte, c'est justement le sentiment national. Quelle que soit l'autorité, les Égyptiens sont naturellement portés à s'incliner devant elle. Il semble qu'on ait méconnu les intentions de la poli- tique anglaise, lorsqu'on a fait prévoir la suppression pro- chaine des tribunaux mixtes. Les Anglais ne seront pas de si tôt en mesure de proposer ou d'obtenir une pareille réforme. En ce qui nous concerne, il est évident que les capitaux français ne sont venus si nombreux en Egypte que parce qu'on assurait à leurs possesseurs la garantie d'une juridiction spéciale. L'abolition des tribunaux mixtes risquerait de compromettre la situation financière en Egypte; c'est une conséquence dont les Anglais seraient les premiers à souffrir et qu'ils n'auront pas manqué de prévoir. Compagnie du canal de Suez. — L'influence française demeure prépondérante dans cette Compagnie; DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 83 notre situation et nos intérêts moraux bénéficient large- ment de cette prépondérance, que les Anglais ne cher- chent d'ailleurs point à combattre. Les écoles et les hôpi- taux créés ou subventionnés par la Compagnie du Canal de Suez sont tous parfaitement dirigés et entretenus. Ils lui font et ils font à la France le plus grand honneur. La Délégation apostolique d'Egypte et les intérêts français. — Nous nous heurtons partout en Egypte à l'hostilité, sourde ou déclarée, du Délégué apos- tolique. M^'" Aurelio Briante, mineur conventuel italien, n'est pas bien disposé pour la France ; son vicaire, le Père Amadeo, passe pour favoriser assez volontiers les intérêts de l'Italie. Les Jésuites français qui, de par les règles de leur société, jouissent d'une certaine indépendance vis-à-vis de l'ordi- naire, réussissent parfois à tourner les difîcultés qu'on leur suscite ; mais les Lazaristes, les Frères des Écoles chré- tiennes et les religieuses françaises des différentes congré- gations sont souvent aux prises avec de graves embarras. Tantôt le Délégué fait intervenir la Propagande pour empêcher l'établissement de religieux français dans des villes ou dans des régions qu'il prétend soustraire à notre influence ; tantôt il exploite à notre détriment les petites rivalités qui peuvent surgir entre plusieurs congrégations françaises vouées à la même œuvre. Le Délégué apostolique maintient à Alexandrie et au Caire une répartition des paroisses qui nous est défavo- rable et que rien ne justifie. A Alexandrie, où la colonie française est la plus nombreuse, la seule paroisse latine est une paroisse italienne. Des trois paroisses latines du Caire, une seule est française. La France avait heureusement obtenu autrefois du Saint- Siège la création d'un « Vicariat apostolique du Delta )> 84 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE (décembi'e 1885), puis l'indépendance de ce Vicariat par rapport à la Délégation (mai 1891). La ville du Caire est divisée entre ces deux juridictions. Dans la partie de la ville qui dépend de la Délégation, tout ce qui se rapporte au culte latin est italien ; dans l'autre, qui est rattachée au Vicariat du Delta, c'est Tinfluence française qui domine. M^"" Duret, des Missions lyonnaises d'Afrique, titulaire actuel du Vicariat, défend avec beaucoup de zèle les inté- rêts de la France; il accueille et protège de son mieux les religieux français : mais il n'est pas toujours en état de faire prévaloir ses intentions. Pour l'exercice des fonctions pastorales, pour l'administration des sacrements, nos prê- tres, nos religieux sont en butte à des vexations conti- nuelles. A Alexandrie, les Frères des Écoles chrétiennes sont éta- blis comme locataires sur un terrain qui appartient aux Franciscains. Ils avaient ouvert à côté de leur collège un cercle déjeunes gens, œuvre post-scolaire très florissante. Les Franciscains voulurent mettre la main sur cette œuvre, pour en transformer l'esprit. Sur le refus des Frères, les Franciscains ont fait fermer le cercle par l'autorité du Délégué. Et l'on pourrait multiplier les exemples. Le principe établi par la Propagande et si souvent invo- qué par le Délégué d'Egypte, consiste à ne point permet- tre à deux congrégations qui ont le même objet de s'éta- blir dans le même lieu. Mais, lorsqu'il s'agit de protéger les religieux italiens, le Délégué fait volontiers fléchir ce principe. S'agit-il de nos compatriotes, il le main- tient et l'applique dans toute sa rigueur, fiit-ce au détri- ment des intérêts charitables, et même des intérêts reli- gieux. Les Franciscains de Terre Sainte et les inté- rêts français. — Dans la région la plus peuplée de DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 85 l'Egypte, les paroisses latines et les écoles paroissiales dépendent de la « Gustodie franciscaine de Terre Sainte ». La Gustodie est officiellement protégée par la France, elle est entretenue, pour une grande partie, par la Propaga- tion de la Foi et par la quête annuelle du Vendredi Saint : c'est assez dire dans quelle mesure elle vit de l'argent français. L'esprit qui anime actuellement la Gustodie n'en est pas moins nettement hostile à la France. Au Gaire, dans la nouvelle cathédrale, bâtie avec l'ar- gent français, les Franciscains ont eu pour premier soin de ne point établir le siège réservé dans le chœur à l'agent diplomatique de France conformément à une tra- dition ancienne et bien établie. Le long du canal de Suez, où les intérêts français sont prépondérants, les Pères présidents (curés) étaient autre- fois toujours dès Français. On y nomme aujourd'hui des étrangers, et souvent des Italiens. Les écoles paroissiales des Pères de Terre Sainte sont très négligées. L'enseignement de l'italien, qui fait le fond du programme, y est fort médiocre; quant à celui du français, on peut dire qu'il n'existe pas. Je reviendrai sur cette question à propos des établissements de Pales- tine et de Syrie. Vœux exprimés. — M. l'Agent diplomatique de France en Egypte m'a prié d'appeler l'attention du Gomité sur les questions suivantes : 1° Opportunité d'une promotion spéciale dans la Légion d'honneur, en faveur des colonies françaises d'Egypte, qui, à cet égard, ont été négligées depuis longtemps. 2^ Nécessité de construire au Gaire un hôtel pour le Gonsulat. Les services du Gonsulat sont installés dans un immeuble de location, incommode et de médiocre appa- rence.* 86 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 3" Utilité de pourvoir d'un nouveau local recelé des Frères, à Suez, très florissante et très mal installée. 4° La question de l'hôpital de Suez devrait être résolue le plus tôt possible. 5"" Il importerait de prendre tous les moyens efficaces pour regagner en Haute-Egypte le terrain perdu. CHAPITRE m PALESTINE JAFFA École des Frères de la Doctrine chrétienne. — Les Frères ont à Jaffa : V Un collège divisé en sept classes. Dans les deux pre- mières, ils donnent l'enseignement secondaire moderne et l'enseignement commercial; dans les autres, un enseigne- ment primaire très complet. L'arabe est obligatoire pour tous les élèves; le turc et l'anglais sont facultatifs. Les élèves qui ont suivi le cours de commerce et satisfait à l'examen de sortie reçoivent un diplôme qui est très recherché. Le jury, présidé par "Si. le Consul de France, est composé des agents de la Banque ottomane, du chef d'exploitation du chemin de fer français et de commer- çants notables. Les Frères comptent parmi leurs élèves les enfants des meilleures familles de Jaffa. Le gouverneur, plusieurs officiers et fonctionnaires ottomans envoient leurs fils au collège français. — 212 élèves, dont 82 musul- mans. Tous parlent très correctement le français. 2° Une école gratuite attenante au collège (École Saint- Jean-Baptiste). On y enseigne le français, la grammaire, la géographie et l'arithmétique. Le niveau des élèves est celui d'une bonne école primaire de France. — 139 élèves, répartis en trois classes. 3" Une école gratuite récemment fondée dans le nouveau quartier chrétien, qui est appelé à se développer (école Saint-Antoine). — 189 élèves répartis en trois classes. RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 89 4° Un cours d'adultes : on y donner l'enseignement du français et des notions élémentaires de commerce. Ce cours a lieu tous les jours, d'octobre à mai, entre 6 et 8 heures du soir. — 20 élèves. Sans compter le cours d'adultes, les Frères enseignent le français à 5i0 élèves, dont 489 sont ottomans. L'ensem- ble de leurs écoles est excellent. Écoles des Sœurs de St-Joseph de l'Appari- tion. — 1" L'école pmjante offre aux enfants des meil- leures familles un très bon enseignement primaire fran- çais et des cours d'arabe et d'anglais. Les élèves parlent et écrivent correctement notre langue. 2° L'école gratuite a été ouverte récemment dans le quartier Hajami. L'établissement est bien situé et installé avec le plus grand soin : les religieuses ont voulu que les enfants pauvres fussent aussi bien traités que les riches. Pour construire ce nouveau local, elles ont dû surmonter de graves difficultés. L'école est en plein développement : elle mériterait d'être favorisée de quelques dons. 3° A fasile d'enfants, on enseigne gratuitement le fran- çais et l'arabe aux enfants pauvres du quartier. Les sœurs de Saint- Joseph donnent l'instruction fran- çaise à il9 élèves : 321 dans les deux écoles, et 98 à l'asile. lOi de ces enfants sont musulmanes, 208 sont orthodoxes et 27 Israélites. Écoles de l'Alliance Israélite. — L'école de gar- çons compte environ 150 élèves, l'école des filles est moins nombreuse. Toutes deux sont très médiocres. Le fran- çais est peu et mal enseigné. On m'assure que la plus grande place est faite à l'étude de l'hébreu. Hôpital français. — Cet établissement que dirigent les Sœurs de Saint-Joseph a été fondé en 1884 par un Lyonnais, M. X..., et il est .entretenu par ses héritiers. 90 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE L'hôpital est fort bien tenu : on y regrette l'absence d'une salle d'opérations. 40 lits sont toujours réservés au service gratuit. Les indigènes fréquentent volontiers l'hôpital français. 730 personnes ont été reçues en 1911, avec un total de 8.760 journées de malades. Au dispensaire qui est adjoint à l'hôpital, les consulta- tions et les pansements sont gratuits pour tout le monde. Le dispensaire est pourvu d'une pharmacie très bien orga- nisée. 39.200 malades ont été soignés en 1911. Les Sœurs dirigent encore un petit orphelinat. 22 jeunes filles, toutes ottomanes, y apprennent les travaux manuels et un peu de français. (On me fait savoir à titre confidentiel que, les héritiers de M. X... ayant subi de graves revers de fortune, l'en- tretien de l'hôpital n'est plus assuré, de ce côté, que par une rente très insuffisante. Une demande de secours a été adressée au Ministère des Affaires étrangères, par l'inter- médiaire de M. le Consul de France à Jérusalem. Il con- viendrait de ne point laisser péricliter l'hôpital français de Jaffa.) ROUTE DE JAFFA A JERUSALEM Mikweh-Israël : école d'agriculture de l'Al- liance Israélite. — Soixante pensionnaires, sujets de l'empire ottoman ou des royaumes balkaniques, y sont préparés par quatre années d'études à devenir de bons chefs d'exploitation agricole. C'est un magnifique domaine, mais l'administration paraît un peu négligée et les locaux scolaires laissent à désirer. On enseigne l'hébreu, le fran- çais et le turc. Les élèves lisent et parlent assez couram- ment notre langue. La composition de la bibliothèque DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 91 réservée aux élèves témoigne d'un réel souci de propager la langue et les idées françaises. Ramleh : école paroissiale de garçons (Fran- ciscains de Terre Sainte). — On y enseigne à une quin- zaine d'enfants Tarabe et l'italien. H y a pourtant un Père français dans la maison; je ne sais à quoi on l'occupe. Ramleh : école de filles (Sœurs de Saint-Joseph de TApparition). — Sans disposer d'aucune ressource, ces religieuses trouvent le moyen d'enseigner l'arabe et le français à une centaine de pauvres petites filles. L'école est entièrement gratuite. Un dispensaire gratuit est ouvert tous les jours de 6 heures du matin à midi. Les Arabes y viennent de fort loin demander des consultations et des soins. La popularité des sœurs françaises est grande dans le pays. Supérieure et religieuses sont admirables d'acti- vité et de dévouement : elles méritent d'être aidées dan^ leur œuvre bienfaisante. El-Atroun : établissement agricole des Pères Trappistes. — Les Pères Trappistes se sont installés dans une région presque inculte : en peu d'années, ils ont métamorphosé le pays et créé une exploitation agri- cole très prospère, qui comprend des vignobles, des terres arables cultivées en céréales, des jardins, une froma- gerie et un moulin ; une hôtellerie est réservée pour les voyageurs. Dans un dispensaire gratuit, les moines français soi- gnent les malades et les blessés. Les affections des yeux sont fréquentes dans ce pays, les blessures ne le sont pas moins,. en raison des rixes continuelles entre les habitants. Très aimés dans le pays, les Trappistes d'El-Atroun ont été maintes fois choisis comme arbitres dans les querelles de village à village. Les habitants ne s'adressent aux auto- rités ottomanes que par leur intermédiaire. Dans le désert 92 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. qui sépare Jaffa de Jérusalem, la Trappe d'El-Atroun forme comme une oasis de terre française. Abou-Gosch. — L'église ancienne, qui est désormais la propriété de la France, est confiée à la garde des Béné- dictins français. Un dispensaire gratuit est desservi régulièrement par les Sœurs de Saint-Joseph de la communauté de Jérusa- lem. Les cheiks de douze ou quinze villages environnants ont demandé aux mêmes religieuses d'ouvrir auprès du dis- pensaire une école de filles, qui rendrait les plus grands services. Les religieuses construisent sur la colline qui domine l'église et le village un sanatorium, dont l'utilité ne m'est pas apparue. JÉRUSALEM ÉTABLISSEMENTS FRANÇAIS D'INSTRUCTION École française d'études bibliques (Pères Dominicains). — L'éloge de cette institution n'est plus à faire : elle jouit en France et en Europe d'un prestige considérable, elle a servi de modèle aux instituts analogues fondés par les étrangers. L'école comporte des cours ex- cellents de langues orientales anciennes et modernes, des cours d'archéologie, d'épigraphie, de topographie, d'his- toire et de géographie anciennes, de littérature et d'exégèse. Chaque année, les Dominicains français associent leurs élèves à des excursions et à des voyages d'études en Pales- tine, en Arabie, dans la presqu'île du Sinaï. Des confé^ rences publiques y sur des sujets d'histoire et d'archéologie, réunissent à l'École française les savants et les curieux des diverses colonies étrangères, et même l'élite de la société ottomane. Le Gouverneur de Jérusalem s'y fait toujours représenter, lorsqu'il n'y assiste pas en personne. Malheureusement une organisation aussi complète et aussi rare que celle que les Dominicains français ont créée à Jérusalem n'est guère mise à profit chaque année que par une douzaine d'élèves. L'École française biblique n'est point en faveur à Rome. Un certain nombre d'évêques étrangers et même d'évêques français se sont empressés de 94 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE la boycotter, pour favoriser exclusivement Tinstitut biblique que dirige à Rome un jésuite allemand, le Père Fonck. On constate avec tristesse que le Père Fonck est largement subventionné par des catholiques de France, et que c'est avec de l'argent français que le Père Fonck est en train de créer à Jérusalem une succursale de l'institut de Rome, qui compromettra le développement, sinon l'exis- tence de l'École française. Les intentions du Père Fonck ne sont que trop évidentes : ce n'est pas pour rien qu'on a sollicité et obtenu de l'autorité romaine la condamna- tion du directeur de l'École française pour quelques-uns de ses ouvrages et son éloignement temporaire de Jéru- salem. Si le Père Fonck demande à placer son établisse- ment sous la protection française, ce n'est, de sa part, qu'une habileté de plus et un moyen d'endormir les soup- çons que son initiative pourrait avoir éveillés en France, Les informations que j'ai recueillies avec beaucoup de soin, tant à Rome qu'en Palestine, ne me permettent point de douter que l'entreprise du Père Fonck ne soit dirigée contre nous et destinée à battre en brèche notre prestige et notre influence en Orient. Il conviendrait d'éclairer l'opi- nion française, et particulièrement l'opinion catholique, sur les dangers de cette situation, et d'accorder à l'École française d'Études bibliques les témoignages d'estime et d'encouragement qu'elle a très largement mérités. La Bibliothèque de l'École est fréquentée par tous les savants étrangers qui viennent étudier à Jérusalem : moins peut-être à cause de ses ressources, qui sont encore res- treintes, qu'en raison de la compétence et de la bonne grâce des bibliothécaires. Il est de notre intérêt que ce centre de haute culture française soit pourvu de tous les instruments nécessaires. Quel meilleur usage pourrait-on faire de tant de richesses accumulées dans les, réserves du I DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 95 Ministère de rinstruction publique, que d'y choisir tous les ouvrag-es qui ont leur place marquée dans un institut d'histoire et d'archéologie, et de les envoyer à l'École française de Jérusaleoi? L'École a du acheter cà grands frais les diiFérents Corpus d'inscriptions, ainsi que d'autres collections coûteuses, qui existent à plusieurs exemplaires dans les greniers de notre Ministère. Les sommes ainsi dé- pensées eussent été employées plus utilement en fouilles, en sondages et en excursions archéologiques dans une région fort riche, encore inexplorée, où la science française doit se tailler son domaine. Tout appui matériel ou moral accordé à l'École de Jéru- salem serait hautement profitable à nos intérêts et à notre influence. Séminaire de Sainte- Anne (Pères Blancs des Mis- sions d'Afrique). — Cet établissement, fondé en 1882 par M^'" Lavigerie, est ouvert gratuitement aux jeunes gens des diocèses grecs-cathoHques de Syrie et d'Egypte qui se destinent au ministère sacerdotal. Tantôt les anciens élèves deviennent prêtres, tantôt, lorsqu'ils ne s'en sentent point la vocation, ils deviennent professeurs ou maîtres d'écoles. Cette institution rend les mêmes services que celle que dirigent à Constantinople les Capucins français; elle peuple l'Egypte et la Syrie de prêtres élevés et instruits suivant les idées et les méthodes françaises, acquis à notre influence et dévoués à nos intérêts. 104 anciens élèves de Sainte-Anne exercent actuellement le ministère en Orient; d'autres ont fondé ou dirigent des écoles où le français est enseigné ; il en est fait mention à plusieurs endroits de ce rapport. Les religieux qui gouvernent le Séminaire de Sainte-Anne sont animés du patriotisme le plus ardent. Petit Séminaire. — On y donne aux élèves, en huit années d'études, une instruction secondaire très complète 96 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE et très soignée. Le programme comporte l'étude obligatoire de quatre langues : le français, le latin, l'arabe et le grec, les littératures française et arabe, l'histoire générale, l'histoire de France, la géographie et les éléments des sciences. Les cours m'ont paru être de beaucoup les meilleurs de tous ceux du même genre que j'ai rencontrés au cours de mon voyage. Les élèves s'expriment fort bien en français; ils répondent aux interrogations avec précision et avec mé- thode. Un jeune homme a expliqué devant moi un frag- ment des Oraisons funèbres de Bossuet aussi bien qu'aurait pu le faire dans un lycée de France un bon élève de première. Grand Séminaire. — Les élèves y suivent pendant cinq ans les cours de philosophie et de théologie. La langue de l'enseignement est le français pour toutes les matières, sauf pour la théologie qui est enseignée en latin, et pour la langue et la littérature arabes qui le sont en arabe. L'établissement pourrait recevoir 145 élèves; il en compte actuellement 125. Diverses subventions couvrent les frais pour les deux tiers; pour le reste, les religieux ont recours à la charité privée. Cours d'adultes. — Il est ouvert chaque soir aux indi- gènes qui désirent apprendre le français et qui trouvent un religieux à leur disposition. L'institution des Pères Blancs rend de grands services à la cause française ; nous avons tout intérêt à en favoriser le développement. Séminaire maronite des Lazaristes. — Dans cette maison, récemment fondée, 28 jeunes Maronites du Liban sont reçus gratuitement en qualité de pensionnaires. Ils y étudient le français, l'arabe, le latin et le grec suivant les programmes de notre enseignement secondaire. Leurs études achevées, les uns sont dirigés sur le noviciat des DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 97 Lazaristes et destinés à subvenir aux besoins des missions françaises d'Orient, les autres retournent à la montagne et enseignent le français dans les écoles. Le niveau des études est satisfaisant. L'installation, faute de ressources, laisse à désirer. Séminaire syrien des Bénédictins français (Mont des Oliviers). — Fondé en 1903, ce séminaire a pour objet de préparer à l'église syrienne-catholique un clergé instruit selon les programmes et les méthodes de rensei- gnement français et capable de servir notre influence en Orient. Les cours, sauf ceux d'arabe et de syriaque, sont professés en français. Les matières de notre enseignement secondaire sont réparties entre huit années d'études. Les 20 élèves instruits dans cette maison y sont reçus gratui- tement. Établissement des Frères de la Doctrine chrétienne. — Au Collège, les Frères donnent en fran- çais l'enseignement primaire supérieur, un peu d'enseigne- ment secondaire et un enseignement commercial complet. Un diplôme est délivré aux élèves qui ont subi avec succès l'examen final du cours de commerce. Les administrations, les banques et les maisons de commerce accueillent avec faveur les élèves diplômés. L'étude des langues arabe et anglaise est obligatoire au collège; celle de la langue turque est facultative. Les élèves sont à l'étroit dans leurs classes et les Frères voudraient agrandir l'établissement. — 150 élèves. A ïécole gratuite, 206 enfants reçoivent en français une bonne instruction primaire. Les deux écoles sont fré- quentées par un grand nombre de musulmans. Établissement des Pères de Sion : orphelinat de garçons et école professionnelle. — L'établissement, fondé en 1876, recueille les enfants pauvres de la Pales^ INTÉRÊTS EN ORIENT. 7 93 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE tine et d'autres contrées de la Turquie d'Asie, pour leur donner une instruction française et leur apprendre un métier. Tous sont admis gratuitement. Beaucoup provien- nent de la région d'Adana et ont été recueillis après les massacres. J'ai passé dans les classes : les enfants parlent et écrivent correctement le français, ils connaissent un peu l'arithmé- tique et la géographie. Les élèves sont tenus de suivre le cours de français pendant deux ans. Ils font ensuite, au minimum, quatre ans d'apprentissage dans les ateliers de menuiserie, de cordonnerie ou de cou- ture ou à la fabrique de tapis. Le travail qui sort des ateliers de Sion passe pour excellent, et plus fini, au dire des connaisseurs, que celui qui provient des ateliers de l'École professionnelle israélite. Malheureusement, cette institution manque de ressources et ne se développe que très lentement. Une allocation du gouvernement français, supprimée pendant quelque temps, n'a été rétablie ensuite qu'en partie; il y aurait lieu de la rétablir entièrement. Sans bruit et avec des moyens très faibles, l'école des Pères de Sion fait beaucoup de bien. — 85 élèves, appartenant à diverses religions. École professionnelle de l'Alliance israélite. — Telle qu'elle est organisée, cette école rend assurément de grands services; il y aurait quelques efforts à faire pour qu'elle servît l'influence française aussi bien que l'influence purement israélite. Le directeur de l'école a créé plusieurs œuvres intéressantes : habitations à bon marché, caisse de prêts, etc.. dont l'organisation est digne de tout éloge. A côté de l'école professionnelle, l'Alliance israélite a ouvert des écoles primaires de garçons et de fdles, où le français est bien enseigné. Sans valoir celles de Constanti- nople, ces écoles présentent pourtant un réel intérêt. Celle DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 99 des garçons compte 310 élèves, celle des filles 2G2, et Tasile, installé dans les mêmes locaux, 95 enfants. Établissements des Sœurs de Notre-Dame de Sion. — La maison de Jérusalem réunit : 1° un pen- sionnat, avec 43 jeunes filles, dont 9 orthodoxes et 15 musul- manes ; les programmes sont ceux de l'enseignement secon- daire français; les études sont excellentes; 2'' un second pensionnat, avec 33 petites filles; 3° un externat arabe : 70 jeunes filles, musulmanes pour la plupart, y apprennent gratuitement le français; 4° un orphelinat où sont élevées gratuitement 70 enfants indigènes. Les élèves de l'orphelinat parlent couramment notre langue, celle de l'externat sont un peu moins avancées dans la connaissance du français. La maison de Saint- Jean in Montana, aux environs de Jérusalem, comprend : V Un orphelinat, où sont recueillies 50 jeunes filles in- digènes ; on leur fait la classe en arabe et en français; 2"* Un dispensaire où soins et médicaments sont distri- bués gratuitement. On y reçoit environ 140 malades par semaine. L'établissement de Jérusalem est devenu trop étroit : les religieuses souhaiteraient de pouvoir l'agrandir. Écoles des Sœurs de Saint- Joseph. — Au pen- sionnat, l'enseignement secondaire est donné selon d'excel- lentes méthodes ; les cours d'arabe et d'anglais sont obli- gatoires. On me montre, parmi les élèves, les filles du gouverneur de Jérusalem et celles du directeur des écoles de l'Alliance israélite. A Yexternat et à Vorphelinat, on donne aux enfants l'enseignement primaire en français et en aiabe. Le succès croissant de leurs écoles a obligé les religieuses à cons- truire un nouveau bâtiment. 237 élèves, dont 16 musulmanes et 62 israélites. 100 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE École paroissiale de filles. — Elle compte envi- ron 250 enfants. La supérieure s'est efforcée de faire admettre un programme d'études où le français eût une place suffisante. Elle a dû s'incliner devant l'opposition formelle du Custode de Terre Sainte, de qui dépend l'é- cole paroissiale. Dès la plus basse classe, les enfants sont tenues d'apprendre en même temps l'italien, l'arabe et le français. Elles ne connaissent, ainsi que j'ai pu m'en con- vaincre, ni l'italien, ni malheureusement le français. Orphelinat melchite des Bénédictines fran- çaises. — 15 orphelines ottomanes y sont élevées et instruites gratuitement : on leur enseigne le français et l'arabe, le calcul elles travaux du ménage. Les religieuses s'occupent du placement des orphelines. Une de ces der- nières a récemment ouvert, dans les environs de Cailla, une petite école où elle enseigne le français aux enfants. Cette œuvre très intéressante manque absolument de ressources. Noviciat et orphelinat des Sœurs du Rosaire. — La Congrégation des Sœurs du Rosaire a été fondée par le Patriarcat latin de Jérusalem. Recrutée exclusivement parmi les Arabes, elle se voue à l'instruciion des enfants et au soin des malades dans les régions où des religieuses européennes ne pourraient pas vivre et où les sœurs arabes, familiarisées avec les mœurs des habitants, sont mieux en état de rendre des services. Chaque jour, un Père dominicain vient donner une leçon de français aux Sœurs qui se destinent à l'enseignement. « Nous entendons rester Arabes, me disent ces religieuses, mais nous vou- lons être capables d'ouvrir des écoles et d'y enseigner un peu de français. » La congrégation est pauvre, aucune religieuse n'appor- tant de dot. Avec des ressources minimes, les Sœurs du Rosaire ont fondé 21 écoles de campagne en Palestine, dans DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 101 le Hauran et dans la Transjordanie, parmi les Bédouins, Elles comptaient, en 1911, 65 religieuses enseignantes et 1.600 élèves. Les Sœurs du Rosaire réunissent aussi les femmes des villages où elles s'établissent: elles leur don- nent des leçons de couture et quelques notions d'hygiène et de propreté. Dans leur maison de Jérusalem, les religieuses arabes ont recueilli une trentaine d'orphelines, à qui elles ensei- ernent le français et les travaux manuels. Cette oeuvre est une de celles contre lesquelles s'acharne la Custodie de Terre Sainte. Il conviendrait, à mon avis, de la soutenir, mais de déterminer exactement son terrain d'action. Autant il est désirable que les Sœurs du Rosaire multiplient leurs écoles de villages dans les régions moins accessibles, autant il serait fâcheux qu'elles fissent concur- rence dans les villes à d'autres congrégations plus capa- bles que la leur de donner aux enfants une bonne instruc- tion française. ŒUVRES FRANÇAISES D'ASSISTANCE Hospice Saint- Vincent de Paul (Filles de la Charité). — Cet établissement, fondé en 1886, réunit toutes les œuvres de charité qu'a pu inspirer aux religieuses françaises le spectacle des misères de ce pays. 1° Aux Enfants trouvés, on recueille les abandonnés, les orphelins, les aveugles et les infirmes : 183 enfants (71 garçons, 81 filles et 31 bébés dans la pouponnière). Les petits apprennent à lire en français et en arabe ; on leur enseigne un peu de grammaire et de calcul. Comme tous les enfants élevés par les Sœurs de Charité, ils parlent notre langue avec le plus pur accent français. Les plus grands ont une heure de classe par jour, et sont occupés, 102 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE pour le reste du temps, à l'école professionnelle, où ils apprennent un métier. Les aveugles apprennent à lire et à écrire le français suivant la méthode Braille, et sont employés à divers travaux manuels. Partout règne une activité presque joyeuse. 2^ V Asile de vieillards réunit i6 infirmes incurables, 16 hommes et 32 femmes. 3° Un dispensaire est ouvert tous les matins aux malades indigents. Consultations, pansements, remèdes, tout est gratuit. On reçoit environ 200 malades chaque jour. 4" Un dispensaire, installé à Saint-Jean in Montana, est desservi par une religieuse de Jérusalem, qui s y rend une fois par semaine. 5° Deux religieuses visitent chaque semaine la Léproserie de Siloé et distribuent des secours et des médicaments aux 24 lépreux, tous musulmans. En outre, les Sœurs françaises accomplissent régulière- met des tournées de malades dans la ville et dans les vil- lages des environs. 6° Depuis 1898, V Hôpital municipal, qui contient 50 lits, a été confié aux Filles de la Charité. Les religieuses qui y sont employées n'acceptent que la nourriture pour toute rétribution de leurs services. 7^ Voîwroir externe est fréquenté par 35 jeunes filles qui y trouvent pendant toute l'année du travail payé à la journée; on les forme à l'ordre et à l'économie. Toutes ces œuvres sont entièrement gratuites. L'hospice reçoit une subvention du gouvernement français; pour le surplus, les religieuses ont recours à la charité privée. L'administration et la tenue de rétablissement ne laissent rien à désirer. Des 25 religieuses qui assurent les services de l'hospice, 17 sont françaises, 2 sont étrangères euro- péennes et 6 sont indigènes. I DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 103 Hôpital français Saint-Louis (Sœurs de Saint- Joseph). — L'hôpital français de Jérusalem est une fondation privée. Il est de dimensions modestes, mais confortablement installé; un médecin français le dirige. 1.160 malades y ont été traités en 1911, parmi lesquels 637 musulmans. J'ai entendu reprocher à l'hôpital français de n'accueillir gratuitement qu'un fort petit nombre de malades, alors que, dans les hôpitaux étrangers de Jérusalem les services gratuits sont généra- lement très développés. ÉTABLISSEMENTS ÉTRANGERS Toutes les nations chrétiennes se font les unes aux autres à Jérusalem une concurrence acharnée. Les moyens employés ne sont pas tous également judicieux : il semble qu'on cherche surtout à frapper l'imagination des indi- gènes par des édifices énormes et somptueux, dont Futilité n'apparaît pas toujours. Allemands, Autrichiens, Italiens, Anglais, Russes, Américains entretiennent à l'envi des écoles et des hôpitaux, dont le nombre et l'importance sont tout à fait disproportionnés avec les besoins du pays. Aux œuvres de ces diverses nations viennent encore s'ajouter les nombreuses et riches fondations israélites. Un directeur d'école a calculé, d'après des données exactes, que le budget annuel de l'instruction à Jéru- salem s'élève à deux millions de francs environ, sur lesquels le gouvernement ottoman, pour sa part, ne fournit pas plus de 25.000 francs. Il est vrai que les écoles de Jérusalem reçoivent des enfants de toutes les régions de la Turquie d'Asie : un grand nombre proviennent de la Syrie et de l'Arménie. Néanmoins les écoles des dif- férentes nations en sont le plus souvent réduites à se 104 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE disputer les élèves, en offrant, soit aux enfants, soit aux parents, des avantages de diverse nature. Il en va de même pour les hôpitaux, qui se disputent les malades. Jamais l'hôpital allemand de Jérusalem n'a été rempli; celui que les Italiens sont en train de construire ne le sera sans doute pas davantage. On ne sait que faire des immenses bâtisses que les Allemands, catho- liques et protestants, ont édifiées pour donner asile aux pèlerins. La préoccupation du prestige à maintenir, des rivaux à dépasser, a évidemment dominé toutes les autres. Si l'on compare l'importance des sommes dépen- sées à celle des résultats obtenus, on est bien obligé de conclure à un immense gaspillage. Établissements russes. — Les établissements russes sont, avec les nôtres et ceux des Israélites, ceux dont l'organisation répond le mieux, soit aux besoins réels des habitants, soit aux intentions bienfaisantes et civilisatrices dont l'action des Européens en Orient devrait avant tout s'inspirer. J'ai visité avec le plus grand intérêt les établissements russes de Jérusalem. Ils ont été fondés et sont entretenus par une société privée, la « Société Russe de Palestine », et comprennent : un hospice pour les pèlerins russes ; un hôpital, où tous les malades sont reçus gratuitement : l'installation est conforme à toutes les prescriptions et à toutes les exigences de la science actuelle; les pauvres sont soignés là aussi bien que les riches peuvent l'être ailleurs; des écoles, une pour les garçons, une pour les filles. L'enseignement est donné en russe et en arabe; on apprend aux enfants le chant, la musique et les travaux manuels. Sauf pour certains cours qui sont communs, les enfants russes et les enfants arabes sont instruits séparément. La tenue de tous ces établissements est parfaite. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 105 BETHLÉEM Écoles des Frères de la Doctrine chrétienne. — Pour s'installer à Bethléem, les Frères ont dû vaincre la résistance de la Custodie de Terre Sainte, qui redoutait pour les Franciscains et pour les Salésiens italiens la concurrence d'une école française. Les Frères ont fini par obtenir l'autorisation d'ouvrir une école payante. Dans un milieu où les écoles gratuites se disputent la clientèle, une école payante ne pouvait avoir que peu de succès. <( On nous oblige à demander une rétribution à nos élèves, me dit le Frère supérieur, mais on ne nous interdit pas de leur faire crédit : tout n'est pas perdu. » Toutefois les Frères, qui se sentent épiés et jalousés par leurs rivaux, ne peuvent agir qu'avec une grande circonspec- tion. Leur école compte 35 élèves; l'enseignement y est excellent. Les Frères ont organisé à Bethléem une petite école normale, où ils forment à l'enseignement les jeunes gens qui seront envoyés ensuite comme professeurs dans leurs établissements de Syrie et d'Egypte. 20 élèves internes sont reçus gratuitement. C'est à agrandir la maison et à développer l'œuvre de Bethléem que le Frère Évagre, provincial des Frères, a employé le montant du prix qui lui a été récemment décerné par l'Académie française. Le jour où les Frères pourraient ouvrir à Bethléem une école gratuite, ils auraient pour élèves tous les enfants du pays, tant leur enseignement est reconnu supérieur à celui» de leurs rivaux. École paroissiale de garçons (Franciscains de Terre Sainte). — Les élèves sont nombreux, mais l'ensei- 106 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE gnement est médiocre. Les enfants connaissent un peu l'italien, ils ignorent absolument le français. Le seul Père français qui soit dans la maison est employé à montrer l'alphabet aux commençants : tous les autres maîtres sont italiens, espagnols ou arabes. Pensionnat et orphelinat des Sœurs de Saint- Joseph. — Les élèves du pensionnat reçoivent un bon enseignement primaire en arabe et en français. On apprend aux orphelines un peu de français, la cou- ture et les travaux du ménage. Un oiœroir groupe utilement les anciennes élèves. Les religieuses auraient grand besoin de recevoir quel- ques fournitures scolaires : livres, tableaux de lecture et tableaux pour les leçons de choses. Elles espèrent pouvoir ouvrir prochainement un externat payant, où elles don- neraient une instruction plus complète aux enfants des meilleures familles de Bethléem. École paroissiale des Filles (Sœurs de Saint- Joseph). — L'école gratuite et l'asile comptent ensem- ble 500 enfants, sur lesquels 150 apprennent un peu de français. Cet établissement dépend de la Custodie de Terre Sainte, qui impose le programme des études. Hôpital français (Filles de la Charité). — Cet établissement, bien installé et dirigé par un médecin fran- çais, fait une sérieuse concurrence à l'hôpital de la Mis- sion allemande protestante, qui pourtant dispose de plus de ressources. L'hôpital français est toujours rempli : 1.635 malades y ont passé en 1911; le total des journées de malades a été de 15.457. Un dispensaire gratuit, ouvert tous les jours, a reçu, en 1911, 32.360 malades. Les religieuses ont établi dans les villages environnants 16 dispensaires gratuits qui sont desservis régulièrement. En 1911, on y a soigné 7.930 ma- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 107 lades. On visite à domicile les malades indigents de Beth- léem et des environs. A côté de l'hôpital, les Filles de la Charité ont installé : un orphelinat où sont recueillies *26 orphelines; une crèche, qui réunit 20 enfants internes et 50 externes, à qui on enseigne le français; une école externe, où 65 élèves reçoivent l'enseignement primaire en français et en arabe ; une classe d'adultes, où une re- ligieuse donne des leçons de français le jeudi et le di- manche. Établissements étrangers. — Les Pères Salé- siens ont à Bethléem un somptueux établissement dont l'argent français a fait tous les frais. La construction en était à peine achevée, que ces religieux ont décliné la protection de la France pour se ranger sous celle de l'Ita- lie. Ils nous font désormais la plus vive concurrence. Leur maison comprend : une école primaire, une école profes- sionnelle et un orphelinat. La mission protestante allemande a une école primaire pour garçons et filles. La mission protestante anglaise a ouvert une école de filles. Les deux écoles des Grecs orthodoxes et l'école des Armé - niens grégoriens sont respectivement soutenues par les Russes et par les Allemands. BEIT-DJALA École paroissiale de garçons. — Le français y est enseigné, officiellement du moins, par un prêtre ma- ronite qui, en dehors de l'arabe, ne parle que l'italien. La supérieure de l'école des Sœurs de Saint-Joseph m'as- sure que depuis longtemps, à Beit-Djala, les professeurs de français de l'école paroissiale ont le défaut de ne point 108 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE connaître la langue qu'ils sont chargés d'enseigner. Elle- même, dans ses rapports avec eux, en est réduite à se servir de l'arabe. École de filles des Sœurs de Saint-Joseph. — Elle est dirig\ée depuis 28 ans par une brave religieuse, qui fait la classe aux enfants, tantôt en arabe, tantôt en français. Quelques élèves comprennent et parlent notre langue. C'est à Beit-Djala que la « Société russe de Palestine » a installé son école normale de jeunes filles^ et Y école pri- maire modèle où les futures maîtresses font l'apprentis- sage de l'enseignement. JÉRICHO Bien qu'on voie figurer sur la liste des « établissements relevant de l'Ambassade de France à Constantinople », une chapelle latine desservie par les Franciscains de Terre Sainte, il n'y a à Jéricho ni service régulier de paroisse, ni école paroissiale. La « Société russe » a établi à Jéricho un grand hos- pice, une église, et, sauf erreur, une école. ROUTE DE JERUSALEM A CAÏFFA RAMALLAH École des Sœurs de Saint-Joseph. — C'est la plus ancienne école du pays. Toutes les femmes de Ra- mallah ont été les élèves des Sœurs de Saint Joseph et ont appris chez elles à parler français, à coudre et à broder. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 109 Mais au cours de ces dernières années la mission améri- caine et la mission anglaise ont entrepris la conquête de Ramallah. Dans ce bourg de 5.000 habitants, on ne trouve pas moins de 9 écoles étrangères : huit américaines et une anglaise. Les sœurs françaises ont essayé de lutter contre cette concurrence; mais, faute de ressources., elles ont grand'peine à se maintenir. En 190i, la subvention que leur donne le gouvernement frauçais a été très inopportunément réduite. Elle est au- jourd'hui de 500 francs pour cinq religieuses. Les sœurs n'en ont pas moins continué, non seulement à entretenir, mais encore à développer leur maison. Au-dessus du rez- de-chaussée incommode, elh^s ont bâti elles-mêmes un étage fort propre, où elles espèrent recevoir des pension- naires. Tous leurs soins vont à donner à leur petite école le meilleur aspect possible. L'école compte 70 élèves, qui reçoivent un bon ensei- gnement primaire en français et en arabe, apprennent les soins du ménage et divers travaux manuels. A côté de l'école, les Sœurs ont ouvert un dispensaire : 19.000 malades y ont été reçus en 1911, 600 ont été vi- sités à domicile. Poursuivies pour exercice illégal de la médecine, les sœurs françaises ont vu tout le pays pren- dre leur défense. L'autorité locale a du abandonner la poursuite. Les Religieuses de Ramallah ne trouvent aucun appui du côté du Patriarcat latin, tout au contraire. Il convien- drait de leur venir immédiatement en aide, et de les met- tre en état de soutenir la lutte contre les écoles étrangères. 110 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE NAPLOUSE Hôpital municipal et Dispensaire des Sœurs de Saint- Joseph. — C'est en 1910 que les Sœurs de Saint-Joseph ont été appelées à diriger l'hôpital municipal de Naplouse : elles y ont admirablement réussi. Cet établissement spacieux, pourvu d'une salle d'opéra- tion et d'un pavillon d'isolement, bien installé, d'une propreté minutieuse, surprend agréablement le voyageur qui visite la petite ville musulmane. 497 malades ont été hospitalisés en 1911, 24.000 ont reçu des soins. Les religieuses ont ouvert pour leur propre compte dans la maison de communauté qui domine l'hôpital un vaste dispensaire : en 1911, elles y ont soigné 19.846 malades. Les Sœurs de Saint-Joseph voudraient ouvrir une école à Naplouse. C'est dans cette intention qu'elles sont venues et qu'elles ont accepté le service de l'hôpital. Elles se sont heurtées jusqu'à présent à l'opposition formelle du curé, un prêtre du Patriarcat latin, qui soutient l'école parois- siale dirigée par les sœurs arabes. Or l'école paroissiale ne reçoit que des enfants catholiques et il n'y a pas douze familles catholiques à Naplouse. Les religieuses françaises sont très aimées de la popula- tion. Le gouverneur de Naplouse est fort bien disposé pour elles. Dans l'école qu'elles ouvriraient, elles pour- raient enseigner le français à deux ou trois cents jeunes filles musulmanes. Il serait sans doute plus opportun de favoriser leur entreprise que de soutenir, dans ses inter- minables démêlés avec le gouverneur, le curé latin qui, Dalmate de naissance, proteste à toute occasion de ses sen- timents français, mais néglige trop de les prouver. École et Orphelinat des Sœurs arabes du Rosaire. — Dans un local privé d'air et de lumière, ces DES INTERETS FRANÇAIS EN ORIENT. 111 eligieuscs ont installé : une école, où 17 petites filles, toutes catholiques, reçoivent une instruction très élémen- taire; un orphelinat : sept orphelines sont occupées à des travaux manuels et apprennent quelques mots de français. Cet établissement, qui empêche l'ouverture d'une véri- table école française à Naplouse, est plus nuisible qu'utile. Les Sœurs arabes rendent de grands services dans les campagnes; dans une ville, elles sont absolument dé- placées. CAIFFA Établissement des Frères de la Doctrine chrétienne. — Fondé en 1883^ cet établissement n'a pas cessé de se développer. Le collège, divisé en cinq classes, compte 111 élèves. Les cours de l'enseignement primaire supérieur sont complets, ceux de l'enseignement secondaire moderne sont établis jusqu'à la troisième. Outre le français, les élèves appren- nent l'arabe, le turc et l'anglais. Les cours d'anglais sont particulièrement suivis en raison de Tattrait qu'exerce l'Egypte sur la population de Caïffa. V école gratuite compte trois classes et 139 élèves; on y donne une bonne instruction primaire. Sur 240 élèves, 35 sont orthodoxes, 43 sont musulmans. Écoles de l'Alliance Israélite. — L'école des garçons a 210 élèves, celle des iilles en a 164. L'enseigne- ment est fort bon; mais la tendance qui s'y manifeste est ici moins française que sioniste et par conséquent alle- mande. Collège melchite. — Il est placé sous la haute direc- tion de M'' Haggear, archevêque melchite de GaïH'a et de Saint-Jean d'Acre. Parmi les professeurs, quelques-uns sont d'anciens élèves du Séminaire de Sainte- Anne à Jéru- salem. Le niveau des études semb^ médiocre, si on le com- pare à celui du collège des Frères. Cependant les élèves RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 113 parlent le français, ils ont quelques notions de grammaire, d'arithmétique, de géographie. Le collège melchite paraît être susceptible de progrès. Sur les 250 élèves, un grand nombre sont reçus gratuitement. M^'' Haggear a fondé et entretient en Palestine 39 écoles où le français est enseigné. On trouvera plus loin mention de quelques-unes d'enire elles. École maronite. — Elle a été ouverte en 1911 et compte actuellement 20 élèves. Ce n'est encore qu'un com- mencement. Écoles des Daines de Nazareth. — Les Dames de Nazareth ont à Caïffa : 1^ Un pensionnat payant, où les programmes sont à peu près ceux de l'enseignement secondaire, avec, en plus, des cours d'arabe et une école ménagère. — 50 élèves, qui parlent couramment notre langue et répondent bien aux interrogations. 2*" Une école gratuite, où 220 élèves reçoivent une bonne instruction primaire. 3*" Un dispensaii^e gratuit, où sont soignés chaque jour de 200 à 300 malades, suivant la saison. Les Dames de Nazareth, qui sont à l'étroit dans leur mai- son, voudraient s'installer dans un nouveau local. Mais le quartier qu'elles habitent, le plus populeux de la ville, avait été fort bien choisi. Elles risqueraient, en transpor- tant ailleurs leurs écoles, de perdre une partie de leur clientèle. École des Sœurs Tertiaires du Garmel. — Elle a été ouverte en 1911, pour faire concurrence à l'école des Carmélites italiennes, que la Custodie de Terre Sainte avait appelées à Caïffa. Les Sœurs françaises ont réuni dès les premiers mois environ 120 enfants. Elles leur donnent un bon enseignement primaire, leur fournissent gratuite- INTÉRÈTS E> ORIENT. 8 114 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE ment, outre les cahiers et les livres, des vêtements et des médicaments. La supérieure de l'école fait preuve de beau- coup d'intelligence et de dévouement. Son initiative mérite d'être encouragée. Maison des Filles de la Charité. — Les Filles de la Charité ont réuni dans leur « Maison de Charité », un bel ensemble dœuvres d'enseignement et d'assistance. Dans une petite école payante, elles apprennent à lire et à écrire en français à 49 enfants des deux sexes. Vécole gratuite et Vasile gratuit comptent ensemble 256 enfants, dont 68 musulmans. Les élèves, répartis en 4 -classes, reçoivent une instruction élémentaire en fran- çais et en arabe. Les méthodes d'enseignement pour les jeunes enfants sont excellentes. A V orphelinat y iO orphelines, catholiques et orthodoxes, sont recueillies et instruites. On leur apprend le français, l'arabe, le dessin et l'ouvrage manuel. Le dispensaire, ouvert tous les jours, a reçu gratuitement 3.060 malades en 1911. Les religieuses visitent aussi les malades à domicile ( 1 . 906 visites en 1 9 1 1 ) . Toutes ces œuvres sont dirigées et administrées à la perfection. L'hôpital français a existé. On l'a fermé, faute de res- sources. Les Filles de la Charité voudraient être mises en mesure de l'ouvrir à nouveau, et de compléter ainsi la série si intéressante de leurs œuvres. Couvent du Mont-Carmel. — Le sanctuaire, le couvent et l'hospice pour les pèlerins sont placés sous la protection de la France. Le supérieur du couvent des Carmes était, lors de mon passage, un religieux espagnol animé d'un esprit très français et capable d'exercer une excellente influence. Le provincial des Carmes, qui est en même temps curé latin de Caïffa, était un moine allemand très respectueux de nos droits et favorable à nos œuvres. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 115 Il n'avait pas dépendu, à ce que je crois savoir, des Carmes du Mont-Carmel, ni du provincial, que les Carmes d'Alexan- drette ne résistassent aux propositions qui leur furent faites par ritalie et auxquelles ils ont fini par céder. Les Carmes ont encore, à l'extrémité de la montagne, un petit séminaire, que je n'ai pas visité, et qui est égale- ment placé sous notre protectorat. Établissements étrangers. — La principale con- currence nous est faite par les Allemands. La « colonie allemande » fondée à Gaïfïa en 1869 renferme le bel établissement des Sœurs de Saint-Chai^les, qui comprend des écoles de filles, un orphelinat, un hôpital fort bien tenu et un hospice pour les pèlerins. L'école italienne des Carmélites ne semble pas appelée à un grand développement. SAINT-JEAN D'ACRE École melchite de garçons. — C'est une des écoles de M^^ Haggear. 60 élèves y reçoivent un assez bon en- seignement primaire en français et en arabe. École paroissiale des Franciscains de Terre Sainte. — Elle est supérieure à la plupart des écoles franciscaines. Un prêtre maronite fort capable est chargé d'y enseigner le français. Le supérieur de l'école est espagnol. École des Dames de Nazareth. — C'est une excel- lente école primaire ; toutes les élèves y sont reçues gratui- tement. Elles apprennent le français et l'arabe, la gram- maire, le calcul, un peu d'histoire et de géographie, et les travaux manuels. Toutes parlent et lisent couram- ment notre langue; toutes répondent avec aisance aux interrogations. — 94 élèves, dont 20 musulmanes. 116 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE TIBÉRIADE École paroissiale des Franciscains de Terre Sainte. — Elle était fermée lorsque j'ai passé à Tibé- riade (25 mars 1912). L'enseignement, me dit-on, y est donné surtout eu italien. École melchite. — Elle a été récemment fondée par M^"" Haggear. Une trentaine d'enfants parlent et lisent un peu le français. Écoles de l'Alliance Israélite. — Ce sont, à Tibé- riade, les écoles les plus fréquentées. C'est grâce à ces écoles que toute la jeune génération parle notre langue assez couramment, exemple à peu près unique dans toute la Palestine. Ce résultat est d'autant plus remarquable qu'il n'y a pas à proprement parler de Français à Tibé- riade, mais seulement une petite colonie d'Algériens. Les Juifs qui sont établis dans cette ville sont, pour la plu- part, autrichiens et polonais. L'école des garçons de l'Alliance israélite compte 106 élèves; celle des filles en a 260. Les Franciscaines italiennes ont fondé à Tibériade une école de filles, qui est très fréquentée : l'enseignement y est donné en italien. NAZARETH École des Frères de la Doctrine chrétienne. — C'est une bonne école primaire. On y enseigne aux élèves le français, l'arabe et quelques éléments de comp- tabilité et de commerce. — 124 élèves. L'école est pure- ment gratuite. École melchite. — C'est la meilleure des écoles DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 117 fondées par M^'* Haggear. Le français y est fort bien en- seigné par d'anciens élèves du séminaire de Sainte-Anne. Tous les enfants parlent et lisent couramment notre lan- gue; plusieurs récrivent avec une correction remarquable. L'esprit de l'école est très français. — 130 élèves. École paroissiale des Franciscains de Terre Sainte. — L'école est bien installée; l'enseignement y est meilleur que dans la plupart des établissements des Fran- ciscains. Un Père français est chargé d'enseigner notre langue : les élèves la parlent assez couramment. — Environ 150 élèves. Orphelinat de garçons des Salésiens. — Dans une bâtisse énorme, coûteuse et mal accommodée à son objet, on a réuni 34 orphelins. Ils reçoivent une petite instruction primaire et un enseignement agricole fort pro- blématique. Faute de connaître suffisamment un métier, la plupart des anciens élèves n'ont d'autre ressource que de se placer comme domestiques dans les Casa Nova des Franciscains. J'ai été surpris de ne pas rencontrer, parmi les pensionnaires de cet établissement, un seul orphelin d'Adana, alors qu'après les massacres les plus pauvres maisons religieuses françaises s'étaient fait un devoir d'en recueillir quelques-uns. Le supérieur de l'orphelinat a récemment bénéficié d'un prix de l'Académie française et d'une souscription ouverte en sa faveur par le Figaro. Son œuvre ne m'a paru nul- lement mériter l'intérêt qu'elle a éveillé en France. En dépensant des sommes importantes, on n'a fait que fort peu de bien. De plus, l'orphelinat de Nazareth est destiné à devenir tût ou tard un établissement italien. Ici, comme à Bethléem, nous aurons fait tous les frais de l'installation : d'autres seront appelés à recueillir les bénéfices. J'ai gardé delà visite que j'ai faite à l'orphelinat, des deux entre- 118 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE tiens que j'ai eus avec le supérieur et de la lecture du mémoire qu'il m'a remis, l'impression la plus nettement défavorable. Établissement des Dames de Nazareth. — Il comprend : 1^ Un orphelinat gratuit, où 34- jeunes filles reçoivent une instruction primaire complète. Les orphelines apprennent le français et l'arabe et sont exercées à divers travaux manuels; â** Une école gratuite, divisée en cinq classes. Le fran- çais y est bien enseigné. Il est, comme l'arabe, obligatoire dans toutes les classes. — 220 élèves ; 3** Un ouvroir gratuit : 20 jeunes filles y trouvent du travail régulièrement rétribué ; 4° Un dispensaire gratuit, ouvert matin et soir. On y soi- gne chaque jour de 100 à 300 malades, suivant la saison. Les religieuses ont groupé leurs anciennes élèves en association et les réunissent chaque semaine : cette œuvre post-scolaire donne de bons résultats. L'établissement est bien tenu, mais il aurait grand besoin d'être réparé et amélioré. Établissement des Sœurs de Saint-Joseph. — V École. — C'est un externat, fréquenté par des enfants des deux sexes : ils apprennent à lire, à écrire, à calculer en français; tous parlent notre langue. — 163 élèves, dont 28 musulmans. . T Patronage et Ouvroir. — 50 jeunes filles, anciennes élèves, se réunissent pour travailler à des ouvrages manuels et pour parler français. 3° Dispensaire. — 25.984 malades y ont été soignés en 1911. 4" Hôpital. — Il est très bien installé, dans une maison séparée des bâtiments d'école et construite sur la hau- teur, aux portes de Nazareth. Il renferme 25 lits. Un Frère de . DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 119 Saint-Jean de Dieu, docteur en médecine, le visite chaque jour. — 291 malades hospitalisés en 1911 ; 3.514 journées de malades. Les religieuses visitent les malades à Nazareth et, en été, dans les villages de l'intérieur. Partout, au cours de leurs tournées, elles sont accueillies avec sympathie et respect. Hôpital français des Filles de la Charité. — L'établissement est vaste et bien situé. Mais le mobilier fait défaut; il n'y pas d'instruments, pas de salle, d'opéra- tions. Le médecin de l'hôpital était un protégé italien. Comme on l'avait expulsé à cause de la guerre, c'est le médecin de l'hôpital anglais, qui, lors de mon passage à Nazareth, faisait la visite une fois par semaine. Les sœurs françaises sont entourées de la sympathie générale : on viendrait à leur hôpital plutôt qu'à l'hôpital anglais, si on ne les savait si dépourvues. Elles reçoivent du gouverne- ment français une subvention annuelle de 300 francs. Et l'argent dont elles feraient un si bon emploi, et qu'on leur refuse, afflue vers l'inutile établissement de leurs voisins les Salésiens. Les Filles de la Charité dirigent en outre : un dispen- saire gratuit, où elles ont soigné, en 1911, 12.975 malades; elles visitent les malades à domicile, l'hiver à Nazareth, l'été dans les villages des environs; un ouvroir, où les jeunes filles viennent travailler, sous la direction d'une maîtresse d'ouvrage, ordinairement pour elles et une fois par semaine pour les pauvres. Il est de toute utilité qu'on vienne en aide aux Filles de la Charité de Nazareth et qu'on leur envoie un méde- cin-chirurgien français, en leur fournissant les moyens de le payer. On verra alors l'hôpital français de Nazareth se développer comme s'est développé celui de Bethléem. 120 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Hôpital des Frères de Saint-Jean de Dieu. — Bien que les Frères soient autrichiens, rétablissement est placé sous notre protection, et les religieux tiennent beaucoup à leur qualité de protégés français. L'hôpital, bien installé, contient 10 lits. Le Frère médecin, très habile, rend de grands services au pays. Établissements étrangers. — Les protestants écossais ont à Nazareth un hôpital et une pharmacie. La Church Mission anglaise entretient un orphelinat de filles et des écoles pour les deux sexes. Les Grecs-ortho- doxes ont de bonnes écoles pour les garçons et pour les filles, probablement subventionnées par les Russes. Enfin la Société russe de Palestine possède à Nazareth de vastes établissements, qui contiennent un hôpital, une pharma- cie, un hospice pour les pèlerins, des écoles primaires de garçons et de filles, et une école normale de garçons. Mon attention s'est plus particulièrement portée sur l'école normale. École normale russe. — L'école normale de Naza- reth est pour les garçons ce que celle de Beit-Djala est pour les filles (v. plus haut). Les trois inspecteurs des écoles russes de Palestine choi- sissent, après examen, les meilleurs élèves de ces écoles et leur offrent gratuitement une place à l'école normale. Les élèves ne contractent aucun engagement. Quelques-uns, tentés par des offres alléchantes, partent pour l'Amé- rique; mais la plupart restent en Palestine et font d'excel- lents maîtres d'école. Les 42 élèves de l'école normale sont tous pensionnai- res. Le cours des études est de six années. Les programmes comportent : l'étude des trois langues russe, arabe, et turque; l'histoire de Russie et l'histoire d'Orient; les lit- tératures russe et arabe; la géographie, les mathémati- DES INTERETS FRANÇAIS EN ORIENT. 121 ques, les sciences physiques et naturelles. Dans les deux dernières années, les élèves font des exercices pratiques de pédagogie à l'école primaire modèle, instituée à cet efiet. Des neuf professeurs de Técole, deux sont russes, les autres sont arabes. Le directeur est russe. Le budget annuel de l'école normale est de 30.000 francs. Cette organisation a donné jusqu'à présent d'excellents résultats. GHEFA-AMR. École des Daines de Nazareth. — Chefa-Amr est un gros bourg, d'environ 3.000 âmes, situé sur la route de Saint-Jean d'Acre à Nazareth. Les Dames de Nazareth y ont ouvert une école de filles, qui, de l'aveu général, rend de grands services : la population apprécie les reli- gieuses françaises. Cependant celles-ci ont rencontré quel- ques difficultés, au sujet du rite à faire suivre à leurs élèves. Ces difficultés ont été levées par l'autorité romaine, à la demande du Patriarche latin de Jérusalem. Les Dames de Nazareth n'en ont pas moins manifesté l'intention de fermer leur école et de quitter le pays. Leur place ne manquerait pas d'être prise immédiatement, soit par une mission allemande ou anglaise, soit par quelque congré- gation catholique italienne. La mission anglaise n'a pour le moment à Chefa-Amr qu'une chapelle protestante : elle n'a pas encore ouvert d'école. Les Dames de Nazareth parlent de quitter le pays, au moment où la municipalité leur demande d'ouvrir, à côté de leur école, un petit hôpital, dont elle s'offre à faire tous les frais. Le Patriarche latin les a non seulement autorisées, mais invitées à se rendre à ce désir de la popu- 122 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. lation. Mais les religieuses ne semblent pas disposées à se laisser convaincre. Il y aurait lieu de faire appel au pa- triotisme des Dames de Nazareth et d'obtenir de leur su- périeure qu'elles voulussent bien continuer à Chefa-Amr Toeuvre qu'elles y avaient entreprise si utilement et avec tant de succès. OBSERVATIONS RELATIVES A L'INFLUENCE ET AUX INTÉRÊTS FRANÇAIS EN PALESTINE L'influence française en Palestine. — Il ne servirait de rien de dissimuler qu'en Palestine l'influence française est en train de décliner. Les Italiens, les Alle- mands, les Russes, les Anglais n'ont pas cessé de dévelop- per leurs œuvres dans les régions où ils ont des intérêts. Quant à nous, loin de gagner du terrain, nous en avons perdu. Nous commettrions une faute grave en abandonnant la Palestine; mais nous n'en commettrions pas une moins grave si, pour y maintenir et y développer notre influence, nous suivions les méthodes préconisées par les amateurs de bâtiments. Les Allemands ont construit à Jérusalem des édifices énormes, qui ne servent à rien, si ce n'est peut-être à étonner les indigènes. Le résultat ne corres- pond point à l'effort. Les Italiens ont suivi cet exemple : ils ont entrepris à Jérusalem la construction d'un im- mense hôpital, qui ne sera jamais rempli. Nos établissements en Palestine sont assez nombreux : ils le sont peut-être trop. Mais ils sont souvent mal dirigés ou mal organisés; ils ne disposent pas de ressources suf- fisantes. La conséquence est qu'ils nous font peu d'hon- neur et qu'ils rendent, relativement, peu de services. Nos intérêts en Palestine ne sont pas de même sorte que les intérêts de quelques autres nations. La Russie entretient, outre ses écoles, des hospices et des hôtelleries 124 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE pour les pèlerins. Les pèlerins russes se comptent chaque année par milliers : il ne passe pas à Jérusalem 500 pèle- rins français par an. L'Allemagne, l'Angleterre, l'Amé- rique font de gros sacrifices pour une propagande reli- gieuse que nous n'avons aucun besoin d'entreprendre. Nous étudierons avec profit les divers organisations étran- gères qui nous font concurrence, mais ce ne sera point pour les imiter servilement; nous n'aurons à retenir de chacune d'elles que ce qui nous manque et ce qui nous pa- raît en même temps correspondre à nos besoins particuliers. Nous pourrons emprunter à la Société russe de Pales- tine les institutions qu'elle a créées pour la formation des maîtres et des maîtresses d'écoles indigènes; la Société italienne de Turin nous offrira le modèle d'une très pratique organisation financière et d'une sage politique au point de vue des rapports avec le gouvernement et avec l'autorité religieuse ; la Société catholique allemande de Cologne et le Palaestina Verein nous montrent quels avantages les sociétés de missions peuvent retirer de leurs relations constantes avec les banques et les grandes mai- sons de commerce et d'industrie. Nulle part, mieux qu'en Palestine, on n'aperçoit l'importance du rôle joué par les sociétés privées. Les Allemands, les Italiens, les Russes voient l'action de leurs gouvernements puissamment secon- dée par l'initiative des associations particulières que nous venons de citer. Le Comité d'Orient pourrait assumer en Palestine, au plus grand avantage de l'influence française, un rôle analogue à celui de ces riches et actives sociétés étrangères. Nous dépensons peu d'argent en Palestine, au regard de celui qu'y dépensent les autres nations. Mais surtout nous le dépensons mal. A égalité de ressources, nous obtiendrions des résultats plus considérables, parce que I DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 125 nous avons sur nos concurrents l'avantage d'une situation acquise. Allemands, Russes, Italiens s'étonnent de notre maladresse à tirer parti de cette situation, et ils en pro- fitent. Les écoles françaises. — Les meilleures écoles françaises, en Palestine, sont celles des Frères de la Doctrine chrétienne, des Sœurs de Saint-Joseph et des Filles de la Charité. Les écoles de l'Alliance Israélite, infé- rieures à celles de Constantinople, obtiennent pourtant de bons résultats; mais elles commencent à nous échap- per, et, si nous n'y prenons pas garde, elles seront bientôt moins françaises qu'elles ne l'étaient jusqu'à présent. Les pensionnats des Dames de Sion et des Dames de Nazareth contribuent à développer notre influence dans les classes aisées de la population. Quant aux écoles des Franciscains de Terre Sainte, on peut à peine les compter comme écoles françaises : ce sont, pour la plupart, de médiocres écoles italiennes. Ce qui nous manque le plus en Palestine, ce sont des écoles d'arts et métiers et des écoles de commerce. L'École des arts et métiers de l'Alhance Israélite, à Jérusalem, se développe aisément par ses propres moyens. Celle des Pères de Sion manque de ressources; il serait très utile de lui en fournir. Il ne le serait pas moins de donner aux Frères de la Doctrine chrétienne les moyens d'entretenir en Palestine une école élémentaire de commerce. Le plus souvent, ils envoient leurs élèves poursuivre leurs études en Egypte : cette méthode n'est pas sans inconvénients. Jus- qu'à présent, nous n'avons rien à opposer, ni aux écoles professionnelles allemandes, comme l'école Schneller, ni aux instituts Israélites d'influence allemande, comme les fondations Rothschild ou Montefiore, ni même à lécole 126 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE des Salésiens italiens de Bethléem. Une telle lacune devrait être comblée le plus tôt possible. Enfin, en Palestine, comme dans tout l'Orient, nos écoles manquent d'instituteurs et d'institutrices indigènes, for- més à notre enseignement et à nos méthodes et aptes cà propager parmi leurs compatriotes notre langue et notre influence. Nous manquons à^écoles normales. Je reviendrai sur cette importante question dans la dernière partie de mon rapport. Je signalerai seulement ici, parce qu'il concerne particulièrement la Palestine, le projet que M^'^ Haggear, archevêque grec-catholique de GaïfTa et de Saint-Jean d'Acre, a soumis à notre ministère des Maires étrangères et dont ce prélat m'a longuement entretenu lors de mon passage. M^'" Haggear songe à établir une école normale, pour subvenir aux besoins des écoles primaires qu'il a lui-même fondées en Palestine. Il fournirait gratuitement un terrain et demanderait qu'on lui vînt en aide pour couvrir les frais de la construc- tion et ceux de l'entretien; il se réserverait d'ailleurs un droit de contrôle sur le choix des professeurs et sur les programmes d'études. Bref, l'école normale serait soumise à sa direction. Ce plan me paraît répondre très exactement aux besoins particuliers de M^"" Haggear et de ses écoles; et il est digne de nous intéresser, dans la mesure où ces écoles mêmes contribuent à répandre notre influence : j'ai déjà dit qu'elles nous rendent des services fort appréciables. Mais le plan de M^' Haggear est spécial et restreint. Ce ne sont pas seulement ses écoles, ce sont toutes les nôtres qui manquent de maîtres indigènes régulièrement formés. Si nous entreprenions de créer une école normale, il faudrait qu'elle répondit à nos propres besoins, et, par conséquent, qu'elle fût soumise exclusivement à notre contrôle et à notre direction. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 127 %cole normale que M^" Haggear propose d'établir peut avoir son utilité; mais elle ne remplacera pas, à notre point de vue, celle qui nous manque et que nous ne pouvons nous dispenser d'organiser, si nous voulons con- server notre situation. Les hôpitaux français. — Ils sont presque tous très inférieurs aux hôpitaux étrangers. A JatFa et à Jérusalem, les hôpitaux français ont été fondés et sont entretenus par des particuliers : l'installation est médio- cre, les ressources sont insuffisantes; les médecins sont trop peu nombreux et mal outillés. A Jérusalem, sans parler des établissements israélites, les hôpitaux natio- naux allemand et autrichien, l'hôpital russe de la So- ciété de Palestine laissent notre hôpital bien loin der- rière eux. A Nazareth, en face de l'hôpital anglais, vaste, parfaitement installé, dirigé par un médecin-chirurgien fort habile, on voit l'hôpital français des Filles de la Charité inachevé, dépourvu de mobilier et d'outillage, privé de médecin, et doté, pour tout revenu, d'une subvention de 350 francs par an. Nous ne faisons bonne figure qu'à Bethléem, grâce à une installation conve- nable et à un excellent médecin français. Il est tout à fait inutile d'édifier en Palestine d'immenses casernes ou des maisons somptueuses; mais il est indis- pensable que les hôpitaux français soient installés selon les règles de l'hygiène et les exigences de la science moderne, complètement outillés, dirigés par des médecins français compétents, pourvus de ressources suffisantes pour assurer un large service gratuit, tels, en un mot, que la comparaison avec les établissements étrangers ne leur soit pas défavorable. Cette question de l'organisation et de l'entretien des hôpitaux est de la plus grande importance ; le maintien de 128 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE notre prestige et de notre influence en dépend très direc- tement. On peut ne pas comprendre ou ne pas apprécier les raisons qui ont poussé les gouvernements ou les socié- tés privées à multiplier les œuvres d'instruction et d'as- sistance dans les trois lieux saints de la Palestine : à Jéru- salem, à Bethléem et à Nazareth. Mais il faut reconnaître le fait, et en tenir compte. La France compte dans ces trois localités un nombre suffisant d'établissements; mais elle en compte trop de médiocres. La Gustodie de Terre Sainte et les intérêts français. — Depuis longtemps, Faction de la Gustodie s'exerce au détriment de la France et à l'avantage du gou- vernement italien. Cependant c'est la France qui protège officiellement, et pratiquement aussi, la Gustodie, ses écoles, ses églises et ses hospices. Gefte situation est d'au- tant plus délicate que nous n'avons guère les moyens d'a- dresser à Rome des remontrances. Il nous est impossible de renoncer à la protection de la Gustodie de Terre Sainte sans compromettre notre prestige en Orient. Mais nous pourrions du moins faire entendre à la Gustodie, qu'en retour de l'appui matériel et moral que nous lui prêtons, nous nous croyons en droit d'attendre d'elle des égards particuliers, et que, si nous la protégeons, nous préten- dons qu'elle nous serve, ou tout au moins qu'elle ne nous combatte point. J'ai signalé à plusieurs reprises l'insuf- fisance des écoles dirigées par les Franciscains de Terre Sainte, soit au point de vue pédagogique, soit au point de vue français. Partout le Gustode qui vient de sortir de charge s'est efforcé de substituer l'italien au français dans les écoles de sa juridiction. Gette substitution a provoqué un vif mécontentement dans les populations, et même, en certains endroits, de petites révoltes. Les intéressés l'ont jugée inopportune et nous avons le droit de la trouver ar- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT 129 bitraire et injuste. Je n'ai pas à faire ici le récit des mille vexations auxquelles les Franciscains français sont en butte de la part de leurs confrères italiens et allemands, ni celui des continuelles difficultés que la Custodie suscite à nos religieux dans l'exercice de leur mission. Qu'il me suffise de résumer en un mot les rapports que j'ai recueillis et mes propres impressions : la Custodie de Terre Sainte nous a gênés autant qu'elle a pu. Le moins que nous devions obtenir d'elle, c'est qu'elle reste internationale dans son action, comme elle est internationale par le statut qui la régit. Le Patriarche latin de Jérusalem et les intérêts français. — L'intention du Saint-Siège, lors- qu'il a rétabli le patriarcal latin de Jérusalem, était de limiter les pouvoirs et la juridiction de la Custodie de Terre Sainte. Mais la Custodie n'a jamais cessé de soulever des conflits, qui, le plus souvent, ont été résolus à son avan- tage. Par deux fois, elle a réussi à faire attribuer le siège patriarcal à un franciscain. Même lorsqu'il est séculier, comme c'est le cas en ce moment, le Patriarche se sous- trait difficilement à l'influence de la Custodie. C'est ainsi que, dans ces derniers temps, de nombreuses autorisations d'établissements ont été refusées à nos religieux, par suite de l'opposition du Custode. On dit même couramment à Jérusalem, que u la Custodie a refusé l'autorisation à telle ou telle conoTéeation ». On reconnaît ainsi à la Custodie un droit qu'elle n'a plus et qui appartient exclusivement au Patriarche : nous aurions le plus grand intérêt à ce que celui-ci l'exerçât librement. Le Patriarche entretient lui-même en Palestine des écoles qui sont placées, du moins en partie, sous notre protection. Il conviendrait qu'elles fussent toutes mention- nées sur la liste des établissements que nous protégeons. INTÉKÊTS EN ORIENT. 9 130 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Dans toutes ces écoles, le français est tant bien que mal enseigné. La question juive en Palestine et les inté- rêts français. — On distingue deux tendances parmi les Israélites de Palestine : la tendance orthodoxe et la ten- dance latine. Les Israélites de tendance latine, qui sont également hostiles aux Espagnols, leuis anciens persécu- teurs, et aux Italiens, parce qu'ils confondent l'Italie et le catholicisme romain, viennent à nous volontiers. Mais ils reprochent à la France de ne les pas toujours bien accueil- lir. Les agents français les protègent et les négligent alternalivenient. Cette politique indécise a provoqué de nombreuses et regrettables défections. L'Allemagne a largement profité de notre négligence au lendemain de l'accord de Mitylène, elle a eu l'habileté de faire figurer sur la liste des établissements qu'elle entendait protéger, tous les établissements « indépendants », parmi lesquels se trouvaient de nombreuses institutions juives, qui sont devenues ses clientes et travaillent désormais pour elle. Les efforts constants de l'Allemagne etles progrès remar- quables du sionisme, qui, depuis le congrès de Hambourg (1909), est devenu très nettement antifrançais, sont autant d'indications qui semblent nous recommander l'adoption d'une politique plus suivie et plus décidée à l'égard des Juifs de Palestine. Il nous conviendrait de protéger et de favoriser, au moins moralement, les oeuvres de l'Alliance Israélite universelle et de l'inviter en retour à faire dans ses écoles de Palestine une plus grande place à l'ensei- gnement de notre langue et à la propagation de notre influence. L'Alliance Israélite dispose d'excellents moyens d'action dont la France pourrait profiter en Palestine aussi largement qu'elle en profite dans d'autres parties de 10- rient. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 131 L'Alliance française. — Il n'y a pas à Jérusalem de comité de rAlliance française. On m'assure qu'il serait possible d'en établir un, aussi prospère et aussi utile que celui de Beyrouth. Les Français ne seraient pas les seuls à en faire partie : on y verrait entrer des Russes, des Suisses, des Ottomans : tous les étrangers et tous les Ottomans de culture française. A Jérusalem et en Palestine, tous les facteurs d'influence française agissent isolément. On observe au contraire un parfait accord et une remarquable unité d'action entre tous les éléments dont peuvent disposer les influences étran- gères. Nous aurions tout intérêt à concentrer nos forces et à coordonner nos moyens d'action. Un comité de l'Alliance française contribuerait utilement à ce résultat. Le commerce français à Jérusalem et en Palestine. — Jérusalem est un centre très artificiel, mais c'est néanmoins un centre important. Les commer- çants allemands, italiens et autrichiens trouvent le moyen d'y faire d'excellentes affaires. Les nôtres n'en font pas. Tout le monde reconnaît en Orient notre supériorité financière. Mais tout le monde aussi se rend compte que seule notre force financière se manifeste par une action. On est porté à en conclure que la France produit peu et qu'elle a peu de commerce. Les produits français ne se trouvent nulle part; on ne rencontre pas de voyageurs de commerce français; on ne voit ni échantillons, ni catalogues français. L'hôpital français de Jérusalem achète toute sa pharmacie à des voyageurs allemands, les seuls qui lui aient fait des ofPres de service et qui lui donnent satisfac- tion. L'École israélite des arts et métiers avait fait en France quelques commandes : elle ne les a pas renouvelées, dé- couragée par l'inexactitude des livraisons. La Suisse, la Suède et la Norvège sont beaucoup plus 132 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE connues des commerçants de Jérusalem que ne l'est la France : elles font auprès d'eux plus de réclame. La guerre avait fait perdre à l'Italie quelques-unes des positions qu'elle occupait en Palestine, et qu'elle avait conquises sur nous. Nous ne les avons point reprises ; seul le commerce espa- gnol a bénéQcié de la situation. Il y a à Jérusalem une Chambre de commerce interna- tionale, dont le vice-président, sujet ottoman, marié à une Française, s'est déclaré tout disposé à mettre son influence au service des intérêts français et à répondre à toutes les demandes de renseignements que les commerçants français voudraient lui adresser. Jéricho et la vallée du Jourdain. — Toute la vallée comprise entre le lac de Tibériade et la mer Morte est d'une grande fertilité. Les colonies juives et allemandes y ont créé des exploitations agricoles très florissantes. De nouvelles acquisitions de terrain doivent être faites pro- chainement dans celte région par des sociétés allemandes. Ce sont aussi, à ce qu'on m'assure, des sociétés alle- mandes qui auraient mis à l'étude un projet de chemin de fer pour desservir la vallée du Jourdain. A ce propos, j'ai entendu déplorer l'absence de iout bureau technique capable d'eifectuer des levés, des prospections, des analyses agricoles, etc., et d'aider ainsi au développement des entreprises françaises en Palestine. Le directeur du Chemin de fer de Jaffa à Jérusalem (société française) m'assure qu'un bureau de ce genre, suffisamment muni de cata- logues, d'échantillons et de collections (minerais, essences forestières, céréales, etc..) pourrait rendre de grands services. On néglige, par ignorance, des affaires impor- tantes et lucratives, et l'on vient de France étudier sur place à grands frais des afîaires inexistantes. Le gouverneur de Naplouse m'avait longuement entre- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 133 nu, lors de mon passage clans cette ville, d'un projet de chemin de fer Jérusalem-Naplouse-Caïfla. Le gouvernement ottoman en avait fait faire les études et était prêt, me disait-on, à en entreprendre l'exécution. Nous avons oppor- tunément demandé depuis lors la concession de la ligne qui joindra Jérusalem à Damas (prolongement vers le sud du réseau Damas-Hamah) et qui, passant par Naplouse, Djenin et Afoulé, assurera la communication entre Jéru- salem et Caïffa. Les ports de Jaffa et de Caïffa. — Le gouverne- ment ottoman avait longtemps hésité entre deux projets : celui de créer un port à Jaffa et celui d'en créer un à Caïffa. On paraisait craindre à Constantinople que, si lé nouveau port était créé à Caïffa, toute la région de Jaffa ne fût attirée vers lÉgypte voisine, et par conséquent vers l'An- gleterre. Les deux ports ont leur utilité, et c'est avec raison que notre gouvernement a demandé qu'ils fussent tous deux concédés à des entreprises françaises. Consulats français et consulats étrangers en Palestine. — L'Allemagne, l'Angleterre et la Russie, qui développent très activement leurs intérêts en Pales- tine, semblent avoir pour principe de maintenir le plus longtemps possible dans cette région les fonctionnaires de leurs consulats. Beyrouth, Caïffa, Jalfa, Jérusalem forment une sorte de cycle que chaque agent parcourt plusieurs fois, en passant par les différents grades de son état. Ainsi les consuls allemands, anglais et russes arrivent à connaître parfaitement le pays et à se maintenir en contact avec les différents éléments de la population. En dix-sept ans, le consulat anglais de Jérusalem n'a changé que trois fois de titulaire, le consulat russe n'en a changé que deux fois. Nous pratiquons un système tout différent : sept consuls français se sont succédé à Jaffa en moins de cinq ans. 134 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. Après cela, il ne faut pas trop s'étonner si nos consuls n'ont parfois qu'une médiocre connaissance du pays où ils exer- cent leurs fonctions, et s'ils ne sont pas toujours en me- sure de fournir avec précision les renseignements qui leur sont demandés. \ CHAPITRE IV MÉSOPOTAMIE MÉSOPOTAMIE La France possède en Mésopotamie trois principaux cen- tres d'influence : Orfa, Mossoul et Bagdad. Orfa, l'an- cienne Édesse, est la ville capitale d'une niission de Capu- cins, qui comprend Karpout, Diarbékir, Mardin et s'étend jusqu'aux parties méridionales de l'Arménie. La mission des Dominicains dont le centre est à Mossoul pénètre dans le Kurdistan; au nord, elle atteint Seert et le lac de Van. La mission des Carmes étend son action de Bagdad à Bas- sorah . RÉGION D'ORFA ÉTABLISSEMENTS FRANÇAIS La mission des Capucins fut d'abord espagnole; elle devint ensuite italienne. Il y a vingt ans, l'italien était encore la seule langue, européenne qu'on entendît parler à Orfa. Depuis que la mission est devenue française, notre langue a remplacé partout la langue italienne. ORFA École de garçons. — Elle est divisée en trois classes, et comprend des cours spéciaux pour les enfants RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC- 137 arméniens et chaldéens. Les Pères Capucins font la classe en français; des maîtres indigènes enseignent aux enfants le turc, l'arabe et l'arménien. Les élèves parlent et lisent couramment le français; ils ont quelques notions de gram- maire, de géographie et d'arithmétique. La plus parfaite tolérance religieuse est observée par les professeurs. — 150 élèves. École de filles (Religieuses franciscaines). — Les religieuses franciscaines dirigent à Orfa trois écoles et trois asiles. Dans une vieille maison, assez peu confortable, on a installé deux écoles et deux asiles, dont l'un est réservé aux enfants syriens-catholiques. Une école et un asile ont été ouverts dans le quartier arménien. L'enseignement est meilleur dans les écoles de filles que dans celles de garçons, ou du moins il y donne de meil- leurs résultats. Les élèves parlent, lisent et écrivent cou- ramment notre langue; la grammaire, l'arithmétique, l'histoire, la géographie leur sont enseignés en français. Les salles d'asile sont bien organisées et fréquentées par un grand nombre d'enfants de toutes religions. — Au total environ 300 élèves. Les religieuses ont ouvert, à côté de leur principale école, un ouvroir externe; les jeunes filles y travaillent sous leur direction, les femmes viennent y prendre des commandes qu'elles exécutent à domicile. Cette œuvre donne de bons résultats. MAMOURET-UL-AZIZ Collège de garçons. — L'établissement a été en- tièrement détruit par l'incendie du 6 février 1911. On a fermé provisoirement l'internat et installé les classes dans 138 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE des locaux provisoires. Une subvention du gouvernement français a permis d'entreprendre la construction d'un nouveau bâtiment, et le collège sera bientôt cq état de rouvrir ses portes. Les Capucins donnent aux élèves l'enseignement secon- daire complet, y compris la philosophie; 6 religieux fran- çais et 8 professeurs laïques se partagent les différents cours dans les dix classes du collège. A partir de la qua- trième classe, tous les cours sont faits en français. Le turc et l'arménien sont obligatoires, l'arabe et l'anglais sont facul- tatifs. A la fin de leurs études, les élèves peuvent obtenir un diplôme, approuvé par le directeur de l'instruction publique du vilayet. Ce diplôme leur permet d'être nom- més professeurs dans les écoles de l'État ottoman. 66 élèves l'ont obtenu depuis l'ouverture du collège (1901) : on compte parmi eux 6 docteurs en médecine, 3 pharma- ciens, plusieurs fonctionnaires de l'administration, 3 pro- fesseurs de lycée, 20 maîtres d'école primaire; 10 sont actuellement étudiants à la Faculté française de Beyrouth. La moyenne des élèves, depuis 1901, a été de 250. En 1911, il y en avait 217, dont les trois quarts étaient ar-, méniens-grégoriens. École secondaire de Filles (Franciscaines). — Le programme est à peu près le même qu'au collège des garçons, moins la philosophie, et avec, en plus, des cours de coulure et de broderie. — 60 élèves. V Asile mixte, confié à deux institutrices, réunit 116 en- fants du premier âge, qui apprennent à lire en arménien et en français. Des écoles primaires de garçons et de filles ont été éta- blies, par les soins des Capucins, dans plusieurs villages des environs, à Bismichan, à Koilon et à Hussenik : elles réunissent environ 170 enfants. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 139 KARPOUT École de garçons. — C'est une école primaire, où deux religieux, assistés de deux maîtres indigènes, ensei- gnent à G5 élèves le français et la langue du pays. École de filles. — L'enseignement secondaire y est donné en français : les langues du pays sont enseignées par des institutrices indigènes : 172 élèves. Ces écoles sont entièrement gratuites. MARDIN École de garçons. — École primaire, qui compte 152 élèves. École de filles. — Cette école est peut-être la meil- leure de toute la mission des Capucins. Les jeunes filles parlent, lisent et écrivent couramment le français et con- naissent les matières principales de notre enseignement primaire. L'école est complétée par un asile et un oiivroir, 428 élèves à l'école, 200 à l'asile, 210 à l'ouvroir : au total, 838 jeunes filles, à qui l'instruction est donnée en français. MALATIA Les Capucins y ont ouvert une école primaire de gar- çons: les Franciscaines, une école primaire de filles : ensemble 350 élèves. DIARBÉKIR École de garçons. — Elle est très médiocre. Des trois religieux qui la dirigent, un seul est français; le second est italien et le troisième libanais. Ils sont aidés 140 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE par trois maîtres indigènes, qu'ils retiennent difficile- ment, faute de pouvoir leur offrir un traitement con- venable. L'enseignement est confus et manque de mé- thode. Cependant les élèves arrivent à parler le français. — 108 élèves. École de filles. — Les Franciscaines ont établi deux écoles à Diarbékir : l'une pour les Arméniennes, l'autre pour les Arabes (syriennes, chaldéennes, etc.). L'école arménienne compte 120 élèves : on leur en- seigne le français, le turc et l'arménien. L'école arabe en a i5, qui apprennent le français, le turc et l'arabe. 70 enfants du premier âge sont instruits à Vasile. Voii- vroir occupe toute l'année une centaine de jeunes filles. Sans avoir à proprement parler un dispensaire, les reli- gieuses distribuent des remèdes aux malades et pansent les blessés. Dans les écoles et à l'asile, l'enseignement est excellent. Non seulement les élèves lisent, parlent et écrivent cou- ramment notre langue; mais elles racontent fort bien en français les faits de l'histoire sainte, connaissent un peu la grammaire, l'arithmétique et la géographie. Au total, 235 élèves, dont 131 arméniennes-grégoriennes. École arménienne de garçons. — Elle est en- tretenue par la communauté arménienne-catholique de Diarbékir. Le directeur est un ancien élève du séminaire des Capucins français de Gonstantinople. Le français est enseigné à 150 élèves. École chaldéenne de garçons. — Les professeurs de l'école sont d'anciens élèves du séminaire français de Gonstantinople. — 130 élèves, qui apprennent le français. Collège arménien-grégorien du Progrès. — Il a été fondé en 1910 et comprend 8 classes. Le français est obligatoire à partir de la 2*^ classe. Les éléments de la I DES INTERETS FRANÇAIS EN ORIENT. 141 littérature, de l'histoire, de l'arithmétique commerciale et de la comptabilité sont enseignés en français. — 180 élèves. Il n'y a actnellement au collège qu'un professeur de fran- çais : on se propose de lui en 'adjoindre un second. École arménienne de filles. — C'est une bonne école, dont la communauté arménienne-catholique fait les frais. Le français y est enseigné à 120 élèves. École chaldéenne de filles. — On n'y enseigne pas le français. ÉTABLISSEMENTS ÉTRANGERS Orfa. — Dans la région d'Orfa, nos concurrents sont les Américains et les Allemands. Américains: — C'est en 188i que la mission protestante américaine s'est installée à Orta. Jusqu'en 1894, elle y y obtint peu de résultats. Mais, durant les massacres, les missionnaires américains, établis dans le quartier armé- nien, rendirent de grands services à la population. Au printemps de 1896, les écoles furent agrandies et des or- phelinats furent créés. La mission prit à son compte les écoles de la communauté arménienne, organisa un ou- vroir pour les jeunes filles et une école professionnelle pour les garçons. Les meilleurs élèves étaient envoyés aux écoles de Karpout, d'Aïntab, de Beyrouth, et même en Amérique. Plusieurs en sont revenus médecins, pharma- ciens, instituteurs ou institutrices. Les Américains ont à Orfa : un orphelinat : 48 garçons et 8 filles; un institut pour les aveugles : 28 élèves; une école professionnelle : 59 apprentis (forgerons, menuisiers, tailleurs, tisserands et teinturiers), des ouvroirSj qui fournissent du travail à 1.500 jeunes filles d'Orfa et à 500 femmes des environs. L'influence américaine s'étend au delà d'Orfa, à Bired- 142 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE jik à Suarek, à Ouéran-Glieir. La plupart des maîtres qui enseignent dans les écoles arméniennes de la région sortent des établissements américains : ainsi s'expliquent les progrès que fait dans ce pays la langue anglaise au détriment de la nôtre. Allemands. — Les Allemands sont arrivés à Orfa en 1897 : ils y ont ouvert une clinique, un orphelinat, une fabrique de tapis et une école. La clinique est de- venue un hôpital de 30 lits, qui bientôt va faire place à un autre établissement plus vaste. La Société protestante allemande couvre une partie de ses frais par Fexploitalion de vastes terrains qu'elle a achetés dans la plaine du Har- ran (au sud d'Orfa). La fabrique de tapis, après avoir traversé une crise de plus d'une année, est redevenue prospère : elle occupe au- jourd'hui 360 ouvrières. V orphelinat compte 70 garçons et quelques jeunes filles, qu'on emploie dans des ateliers de teinturerie, de tissage, de menuiserie et de cordonnerie. Les Allemands tendent à exercer sur les Syriens Jaco- bites la même influence que les Américains exercent sur les Arméniens Grégoriens. Mais, au cours de ces dernières années, les Syriens protestèrent contre certaines ingé- rences allemandes, refusèrent les subventions de la mis- sion et bannirent l'allemand de leurs écoles. Les Capucins français surent tirer parti de ces incidents; un grand nom- bre d'enfants syriens quittèrent l'école allemande pour entrer à l'école française. Cependant l'influence allemande continue de s'exercer par les maîtres d'école sortis des établissements d'Orfa, et la prochaine ouverture du che- min de fer sert de prétexte à la mission pour réintroduire la langue allemande dans les écoles syriennes jacobites. Américains et Allemands disposent de ressources fînan- b „ , ^™oières considérables. Tandis que les premiers se bornent à faire une propagande religieuse, les seconds semblent poursuivre un but politique. L'influence américaine a atteint son apogée, l'influence allemande tend au con- traire à se répandre et à s'accroître. Mamouret-ul-Aziz. — Les Allemands s'y sont ins- tallés en 1897. Us ont ouvert une école de garçons : 200 élèves; une école de filles ; 150 élèves; deux écoles maternelles : 120 élèves; deux orphelinats de garçons : 300 enfants; deux orphelinats de filles : 370 orphelines. On a organisé pour les enfants des orphelinats trois ateliers de couture, de menuiserie et de forge. Un orphelinat danois a recueilli 70 jeunes filles. Karpout. — La mission américaine, fixée à Karpout depuis 1866, a ouvert en 1878 deux vastes et beaux col- lèges, l'un pour les garçons, l'autre pour les filles. Le collège de garçons compte 500 élèves, dont liO internes; celui de filles, 520 élèves, dont 100 internes. Onze profes- seurs américains sont aidés par i2 instituteurs et institu- trices indigènes. La mission entretient encore : trois écoles primaires de garçons et trois de filles : 300 élèves; deux or- phelinats : 155 enfants; deux asiles pour garçons et filles : 120 enfants; un hôpital àe 15 lits; une pharmacie, où des remèdes sont distribués chaque jour gratuitement à 600 pauvres ; une école cCarts et de métiers, avec des ate- Uers de tapis, de menuiserie et de serrurerie. Enfin la mission américaine a ouvert à Eghine deux orphelinats et une fabrique de tissus et de tapis; à Arab- Idr, un orphelinat et une fabrique de tissus. Mardin. — La ?nission américaine possède à Mardin : une école de garçons : ko élèves (dont 21 internes) ; une école de filles : 50 élèves; un asile mixte : 100 enfants; un orphelinat de filles : 15 orphelines; un hôpital; un ouvroir 144 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE fournissant du travail à 180 jeunes filles; une librairie et un atelier de menuiserie ^ Malgré des dépenses considérables, les Américains n'ont pas obtenu jusqu'à présent de grands résultats à Mardin. Malatia. — La mission allemande a ouvert à Malatia : une école de garçons : 110 élèves; une école dé filles : 90 élèves; un asile : 60 enfants. Péri. — La mission allemande y possède deux écoles de garçons et de filles : 150 élèves; une école maternelle : 40 enfants; un orphelinat : 30 enfants. Kéri. — La mission allemande entretient : deux écoles de garçons et de filles : 160 élèves; une école maternelle : 40 enfants; un orphelinat : 30 enfants. La mission allemande dépense annuellement dans cette région environ 7.000 L.T. (161.000 francs). Les frais sont couverts par les dons de diverses sociétés allemandes, et par ceux de bienfaiteurs privés, qui se chargent de Ten- tretien d'un orphelin ou d'une orpheline. La mission américaine est subventionnée par la Board- ing Company, qui répartit chaque année des revenus considérables (on parle de 5 millions de francs?) entre les 300 missions américaines de l'Empire ottoman. Des dons particuliers et la pension payée par les internes des collèges procurent d'importantes ressources. Enfin les collèges américains de Karpout ont été dotés d'un capital de 27.000 L. S. Les dépenses, pour cette région, sont évaluées à 11.000 L. S. par an= Les instituteurs indigènes engagés par la mission reçoivent en moyenne un traitement mensuel de 6 L. T. (138 francs). Ce traitement est trois ou quatre fois 1. La mission américaine a établi à Mardin une école normale d'institu- teurs et d'institutrices : les élèves sont destinés, pour la plupart, à répan- dre l'influence de la mission dans le pays jacobite de Djebel-Tour. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 145 plus élevé que celui des instituteurs qui enseignent dans les écoles de nos missionnaires. Quelque abondantes que soient les ressources dont dis- posent les missions américaines et allemandes, l'anglais et l'allemand ont fait peu de progrès dans la région (sauf peut-être l'anglais parmi la population arménienne d'Orfa) : la langue européenne qu'on y entend parler le plus com- munément est le français. Cet avantage nous demeurera- t-il encore longtemps? il est permis de l'espérer. La plus grave préoccupation de nos missionnaires concerne le recrutement des maîtres indigènes, rendu fort difficile par la modicité des traitements qui leur sont offerts dans nos écoles, tandis que les missions étrangères font à leurs auxiliaires des conditions fort avantageuses pour le pays. INTÉRÊTS EN ORIENT. 10 RÉGION DE MOSSOUL ÉTABLISSEMENTS FRANÇAIS MOSSOUL Séminaire syro-chaldéen des Dominicains. — Cet établissement est destiné à former pour les rites syrien-catholique et chaldéen des prêtres instruits selon nos méthodes, connaissant bien notre langue et capables de répandre notre influence. Les Dominicains français font à Mossoul l'œuvre que font les Capucins français à Gonstan- tinople, les Jésuites français à Beyrouth, les Lazaristes français et les Pères Blancs du cardinal Lavigerie à Jéru- salem. J'ai déjà dit tout le bénéfice que nous retirons de ces « séminaires orientaux ». Les élèves du petit séminaire suivent un cours com- plet d^enseignement secondaire français. Ceux du grand séminaire font, également en français, leurs études de •philosophie et de théologie. L'enseignement est partout excellent. Les élèves connaissent bien les langues anciennes ; ils ont une culture classique très complète. Us exposent aisément en français les questions les plus difficiles de leurs programmes. On est agréablement surpris de trouver une pareille école au centre de la Mésopotamie. — 26 Chai- déens et 11 Syriens, en tout 37 élèves, suivent les cours des Dominicains. Séminaire du Patriarcat chaldéen. — Créé RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 147 en 1868, il fut dirigé à partir de 1880 par le Père Thomas, qui, devenu le patriarche Emmanuel Thomas, n'a point cessé de le développer. C'est M^*" Thomas qui a introduit au séminaire renseignement du français. • Les élèves passent huit années au séminaire : ils y étu- dient, outre la philosophie et la théologie, le français, l'arabe et Taraméen, langue liturgique du rite chaldéen. Les séminaristes parlent bien notre langue. Les études, moins fortes qu'au séminaire des Dominicains, sont pour- tant suffisantes. Lorsque je l'ai visité, le Séminaire patriar- cal ne contenait que 15 élèves. M^"^ Thomas l'a considéra- blement agrandi, et demande qu'on le mette en mesure d'y recevoir un plus grand nombre de jeunes gens. École externe des Dominicains. — On y donne l'enseignement primaire et primaire supérieur, et quel- ques notions de commerce et de comptabilité. Tous les cours sont faits en français, sauf les cours de turc et d'a- rabe, qui sont professés par des indigènes laïques. L'école est bien dirigée, les méthodes sont excellentes ; les élèves apprennent à écrire et à composer en français, en arabe et en turc; leurs réponses aux interrogations témoignent d'une connaissance étendue de notre langue. — 206 élèves de toutes religions. Œuvre dominicale : école du soir. — Les cours sont fréquentés par une trentaine d'ouvriers, auxquels on donne une instruction élémentaire en français. La population de Mossoul sollicite les Dominicains de créer un internat. Nos missionnaires auraient l'intention, non pas d'ouvrir un collège d'enseignement secondaire, dont le besoin ne se fait pas sentir, mais d'adjoindre un pensionnat à leur école primaire, dont les programmes pourraient devenir plus complets et plus approfondis. 11 faut souhaiter qu'ils réalisent ce judicieux projet. 148 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE École des filles (Sœurs de la Présentation). — C'est une excellente école primaire. Le français et l'a- rabe y sont enseignés concurremment. Une large place est faite aux travaux manuels. Les méthodes d'enseigne- ment sont fort bonnes. Les élèves parlent le français avec une grande pureté d'accent. — 216 élèves, dont 17 jaco- bites et 6 musulmanes. OEuvi^e dominicale. — 192 jeunes filles reçoivent gra- tuitement une instruction élémentaire en français. Ouvroir. — Il est fréquenté régulièrement par une tren- taine de jeunes filles, qui y travaillent sous la direction des religieuses. Salle d'asile. — On y enseigne les premiers éléments de l'arabe et du français à 290 enfants. Les religieuses françaises sont très appréciées par la population. Alliance Israélite. — V école de garçons a été fondée en 1908. Elle compte déjà 24.3 élèves, dont 5 musulmans. Les programmes sont ceux de l'enseignement primaire et primaire supérieur. Tous les cours sont faits en fran- çais. Les élèves parlent couramment notre langue. Vécole des filles a été ouverte au printemps de 1912; les cours n'y sont pas encore organisés lors de ma visite. Provisoirement, on occupe les élèves à des travaux ma- nuels. — 96 élèves, toutes Israélites. Écoles des Syriens catholiques. — Vécole des garçons est un bon établissement d'enseignement pri- maire : les élèves apprennent le français, l'arabe et le turc. Lors de ma visite, je trouve à l'école trois jeunes ofûciers, qui enseignent aux enfants le turc, l'arabe et les éléments des sciences, et suivent eux-mêmes le cours de français. Les petits enfants des deux sexes sont réunis dans une salle d'asile bien dirigée. — 160 élèves. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 149 A V école des filles, on donne aux élèves les premières notions du français. Écoles des Ghaldéens. — V école des garçons est excellente : les élèves parlent et écrivent correctement notre langue, et reçoivent une instruction primaire com- plète. — Environ 180 élèves. A V école des filles. Je français est enseigné sommaire- ment ; quelques élèves pourtant le parlent un peu. — Envi- ron 100 élèves. Ateliers d'imprimerie et de reliure. — Les Pères Dominicains y impriment eux-mêmes tous leurs livres scolaires. Les vocabulaires franco-arabes, franco- turcs, etc.. qu'ils ont publiés sont employés avec succès dans les écoles syriennes et chaldéennes. Les Pères ont édité aussi des ouvrages de linguistique et de grammaire comparée, des recueils de poésies et de proverbes, im- primés dans les langues du pays. Les presses, qui sont usées, auraient grand besoin d'être renouvelées. L'im- primerie des Dominicains, dirigée par deux religieux, oc- cupe 2 correcteurs et 13 ouvriers : elle rend, dans ce pays reculé et privé de ressources^ des services très précieux. Hospice et dispensaire. — Une petite salle meu- blée de 4 lits constitue un embryon d'bôpital, qu'il est urgent de développer. Le dispensaire, bien installé, est ouvert quatre fois par semaine. Deux fois par semaine, un médecin y donne des consultations. Les médicaments sont distribués gratuite- ment : c'est une dépense de 3 à 4.000 francs par an. 15.000 malades, en 1911, ont été soignés au dispensaire. Écoles de villages, aux environs de Mossoul. — Les Dominicains entretiennent dans les villages des environs de Mossoul sept écoles, qui réunissent 1.465 élèves. Ces écoles, régulièrement visitées par les missionnaires. 150 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE sont dirigées par des « tertiaires dominicaines » indigènes, anciennes élèves des religieuses de Mossoul, qui connaissent fort bien notre langue et seraient capables de l'enseigner. Les familles, qui escomptent le prochain établissement du chemin de fer, demandent avec instance qu'on enseigne le français à leurs enfants. On s'est heurté jusqu'à présent à quelques difficultés d'ordre local, qu'on espère bien pouvoir surmonter. Pour le moment, on se contente d'enseigner aux enfants le chaldéen, l'arabe, un peu de calcul et, dans les écoles de filles, les travaux manuels. Les écoles des Dominicains sont situées dans les villages suivants : Telkef (garçons et filles), Alcoche (garçons et filles), Batnaij Bakof, Teleskof, Péchabour (filles), Caracoche (garçons et filles). J'ai visité les deux écoles de Telkef, qui sont sommairement, mais proprement installées : celle des garçons compte 210 élèves; celle des filles, 360. DJEZIREH-IBN-OMAR Les Dominicains y ont ouvert : une école de gar- çons : 60 élèves; une école de filles : 50 élèves; un asile : 50 enfants. On enseigne le français, le turc et l'arabe. Les classes sont dirigées par un professeur laïque et par deux prêtres chaldéens, anciens élèves du séminaire des Dominicains de Mossoul. MAR-YAGOUB Pensionnat nestorien de garçons (Domini- cains). — 17 jeunes chaldéens nestoriens y reçoivent une bonne instruction primaire. On leur enseigne le français, le turc, l'arabe et le chaldéen. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 151 Un dispensaire est annexé au pensionnat : on y a reçu 2.840 malades en 1911. Onze écoles de villages dépendent de cette résidence : elles réunissent 200 élèves. SEERT Orphelinat de garçons. — Les Dominicains y ont recueilli 9 orphelins, à qui ils enseignent le tissage des tapis. École de garçons. — C'est une école primaire où les élèves de la première classe parlent assez correctement le français; ils apprennent en outre le turc et Farabe et, selon le rite auquel ils appartiennent, le chaldéen, l'armé- nien ou le syriaque. — 99 élèves, dont 20 musulmans. École de filles : 31 élèves. — Asile : 90 enfants appartenant aux divers rites chrétiens. Orphelinat de filles. — Les Sœurs de la Présenta- tion y élèvent 10 orphehnes. Dispensaire. — 5.000 malades y ont été soignés en 1911. Les Sœurs ont ouvert aux environs de Seert, à Ain- Salib, une école de filles (62 élèves) et un asile (61 enfants). Trois autres écoles de village comptent ensemble 97 élèves. VAN École de garçons. — Les Dominicains y don- nent à 122 jeunes garçons l'enseignement primaire et primaire supérieur, en français. On enseigne la compta- bilité et le dessin. Les élèves apprennent, outre le français, Farménien et le turc. Orphelinat de garçons. — 6 orphelins. École de filles. — Elle est dirigée par les Sœurs de la 152 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Présentation. 209 élèves y reçoivent l'instruction primaire française; on enseigne le turc et l'arménien; on donne des leçons de dessin et de musique. A Vouvroir, 17 jeunes filles apprennent la couture et la broderie. La salle d'asile réunit 160 enfants. Orphelinat de filles. — 12 orphelines. AIDJI-OGHLOU École de garçons (arménienne-catholique). — C'est une école élémentaire dirigée par les Dominicains. Aux élèves des trois premières classes ils enseignent, avec l'arménien, le turc et le français, un peu d'histoire et de géographie et les éléments des sciences. — 98 élèves, catholiques ou grégoriens. GLORTAR L'école des garçons compte 41 élèves, celles des filles 80. Six écoles de village réunissent 80 élèves. ACHITHA Les Dominicains ont ouvert dans cette localité six petites écoles ^i \m dispensaire, où 2.000 malades ont été soignés en 1911. ÉTABLISSEMENTS ÉTRANGERS Mossoul. — Le gouvernement ottoman a commencé à faire construire une école d'arts et métiers, qui ne sera peut-être jamais achevée. Quand j'ai passé à Mossoul, les travaux en étaient interrompus. V école secondaire supérieure, fondée récemment par le DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 153 Comité « UnioQ et Progrès », n'a pas donné jusqu'ici de grands résultats. Cependant les maîtres s'efforcent d'y at- tirer les enfants chrétiens et de les soustraire aux influences étrangères. La mission anglicane entretient à Mossoul deux écoles, dirigées par des diaconesses anglaises et comptant ensemble environ 100 élèves, et un dispensaire où deux médecins, l'un anglais, l'autre indigène, soignent gratuitement les indigènes. La mission américaine a annoncé l'intention de s'établir prochainement à Mossoul : elle ouvrirait un collège dans la ville et des écoles de village dans la région. Les Salésiens italiens ont fait à Mossoul, en 1911, une tentative qui n'a échoué que grâce à l'intervention éner- gique du Délégué apostolique qui est un religieux fran- çais, M^' Drure. Les missionnaires italiens avaient été appelés, dit-on, par quelques membres du clergé syrien- catholique. M^' Drure a excommunié et expulsé les intrus. Mais les Salésiens sont bien décidés à renouveler leur effort : ils peuvent compter sur l'appui du gouverne- ment de Rome et sur celui de certains éléments italophiles de la Propagande. Leur dessein est connu en Italie et les Salésiens ont à plusieurs reprises exprimé l'assurance qu'ils le mèneraient à bonne fin. Seert. — Les établissements de la mission anglaise sont peu prospères et ne semblent pas appelés à un grand déve- loppement. Au contraire, les écoles des Dominicains fran- çais sont de plus en plus fréquentées, au point que les locaux sont devenus insuffisants. Van. — Les Américains ont établi à Van huit écoles de garçons et de filles, une école d'arts et métiers, des orphe- linats, un hôpital et un dispensaire. Les Allemands y ont ouvert des orphelinats. 154 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC- Les Dominicains français voudraient pouvoir agrandir les locaux de leurs écoles, devenus trop étroits, surtout ceux de l'école des garçons et des écoles paroissiales. Ils désireraient aussi ouvrir à Van un dispensaire. Bibédé. — C'est à Bibédé, dans le diocèse chaldéen d'Amadia, en Kurdistan, que la mission anglaise se propose d'établir prochainement une école normale. Cothanès. — Cothanès est la résidence du Patriarche nestorien. Un pasteur anglais s'y est établi à demeure et exerce sur le Patriarche une influence très efficace et con- traire à nos intérêts. Tout le pays nestorien est méthodi- quement attaqué par les Anglais, qui y poursuivent des desseins plus politiques que religieux. Les Dominicains français ont réussi depuis peu à établir dans cette région quelques écoles, où ils espèrent introduire bientôt l'ensei- gnement du français. Cette entreprise est digne d'intérêt et mériterait d'être encouragée et soutenue. Bitlis. — Les Américains entretiennent à Bitlis des écoles primaires de garçons et de filles, une école d'arts et métiers et un dispensaire. Les Dominicains français ont déjà jeté leurs vues sur Bitlis et se proposent d'y ouvrir bientôt une école Djebel-Tour. — C'est le centre du pays jacobite. On a vu plus haut que les missionnaires américains- font de grands efforts pour s'en emparer. Les Dominicains français étudient les moyens d'étendre leur action jusqu'à cette région et d'y introduire notre langue et notre influence. RÉGION DE BAGDAD BAGDAD École de garçons. — Cette école est dirigée par les Pères Carmes, que secondent dans leur tâche des Frères Maristes. Les élèves sont répartis en trois divi- sions, selon qu'ils sont « gratuits », <( semi- gratuits » ou « payants ». L'enseignement m'a paru médiocre. Cependant le français est parlé assez correctement par les élèves des premières classes. Les Frères Maristes, qui sont d'excellents éducateurs, ne se trouvent pas en assez grand nombre dans cette école pour y maintenir les études à un niveau co;ivenable. Le Délégué apostolique a fait récemment une démarche tendant à obtenir l'envoi de plusieurs ma- ristes à l'école de Bagdad. — 307 élèves, dont 18 musul- mans. Le patronage organisé par les Pères Carmes pour leurs anciens élèves est appelé à rendre des services. Si les jeunes gens pouvaient y trouver des livres, quelques revues et jour- naux français convenablement choisis, ils s'entretiendraient plus volontiers dans la connaissancade notre langue. École chaldéenne de garçons. — Elle est excel- lente. Le français y est bien enseigné : tous les élèves le parlent correctement. — 182 élèves. École arménienne grégorienne (garçons). — 156 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Sur 70 élèves que compte cette école, quelques-uns seule- ment apprennent le français : il leur est enseigné suivant d'excellentes méthodes. École syrienne-catholique. — Le Patriarche fait de grands efforts pour développer cette école. Elle est dirigée par de bons maîtres qui enseignent bien notre langue. École chiite. — Cette école, que subventionne le gouvernement français, mérite d'être soutenue et encou- ragée. On enseigne le français dans les cinq premières classes. Les enfants montrent une grande ardeur à étudier notre langue. Ils la parlent correctement, quelques-uns l'écrivent. — 310 élèves, tous musulmans chiites. Écoles de l'Alliance Israélite. — Elles sont très nombreuses à Bagdad. Les plus importantes se trouvent réunies dans un magnifique établissement, le collège Sas- soon. Vécole des garçons compte 700 élèves. On y donne un enseignement primaire supérieur très complet, avec des cours de turc, d'arabe, d'anglais et d'allemand. Le français est la langue de l'enseignement. Pour répondre aux désirs des familles et à ceux de la Société du chemin de fer, le directeur a établi deux cycles d'études : a) Cycle commercial : les langues étudiées sont, avec le français, l'arabe et l'anglais; b) Cycle « fonctionnaire » : on y enseigne le français, le turc et l'allemand. C'est le premier cycle qui est le plus suivi. Les résultats obtenus par les professeurs de ce collège sont extraordinaires. Les compositions françaises des élè- ves pourraient figurer au cahier d'honneur des meilleures classes de nos collèges de France. École des fuies — C'est un véritable lycée, pour l'orga- DES INTERETS FRANÇAIS EN ORIENT. 157 nisation et pour le développement des études. On y ensei- gne le français, l'arabe et Thébreu. Toutes les jeunes filles parlent notre langue sans la moindre incorrection. — 800 élèves. Deux autres écoles de garçons, fondées récemment, réu- nissent 550 élèves, qui apprennent le français, l'bébreu, le turc et l'arabe. Vaslle mixte, où l'enseignement est donné en hébreu et en arabe, compte 300 enfants. Écoles de filles des Sœurs de la Présen- tation. — Elle est divisée en plusieurs sections. Dans les classes françaises, 84- jeunes filles, dont 19 mu- sulmanes appartenant aux premières familles de Bagdad, reçoivent une bonne instruction primaire; elles appren- nent le français, l'arabe et l'anglais. Les religieuses vou- draient compléter cette section par une école ménagère; mais les moyens leur font défaut pour l'installer. Dans les classes arabes, l'enseignement est donné en arabe; cependant les élèves apprennent les premiers élé- ments du français. — 392 élèves. A Vécole professionnelle, 60 jeunes filles appartenant à des familles modestes apprennent les travaux manuels, la couture, la broderie; on cherche avant tout à leur donner Is moyens de gagner honnêtement leur vie. L'asile mixte réunit 320 enfants : 130 petits garçons et 190 petites filles. V orphelinat n'est pas aussi développé que le désire- raient les religieuses. 40 jeunes filles chrétiennes y sont élevées de quatre ans à vingt ans. Cette institution rend de grands services ; les demandes d'admission sont nom- breuses, et il en coûte souvent aux religieuses de ne pou- voir les accueillir. Des patronages et des ouvroirs sont organisés pour les 158 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE anciennes élèves. Toutes ces œuvres sont dirigées avec le plus grand soin et dans un excellent esprit. Orphelinat et école des arts et métiers (Sœurs de la Présentation). — On a pu organiser jusqu'à présent trois ateliers pour la menuiserie, l'orfèvrerie et la reliure. On désirerait installer une imprimerie. V asile d'aveugles compte 15 jeunes gens : 10 chrétiens, pensionnaires; 4 Israélites et 1 musulman, externes. Les religieuses apprennent aux aveugles la lecture, l'écriture et la musique selon la méthode Braille, et les occupent à divers travaux manuels. Ce petit établissement jouit à Bag- dad d'un grand prestige. Dispensaire (Sœurs de la Présentation). — Il est dirigé par un médecin et par une sœur infirmière. La moyenne des iiidigents soignés gratuitement est de 1.250 à 1.300 par mois. HILLÉ (IRAK) Écoles de l'Alliance Israélite. — L'école de gar- çons, fondée en 1907, compte 175 élèves. L'enseignement est donné en français; les élèves apprennent en outre l'a- rabe, le turc et l'hébreu. L'école de filles a été ouverte en 1911 : elle a déjà 60 élèves. HANIKMÉ (IRAK) Écoles de l'Alliance Israélite. — L'enseigne- ment y est donné en français. L'école de garçons, fondée en 1911, compte 120 élèves; l'école des filles, fondée en 1912, en a 80. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 159 AMARAH (IRAK) Les Pères Carmes, assistés parles Religieuses de la Pré- sentation, y ont installé une mission qui comprend : deux écoles primaires, l'une de garçons, l'autre de filles; 25 enfants y apprennent le français; un petit hospice, où sont recueillis 7 infirmes, dont 3 aliénés ; un petit or- phelinat de garçons, avec un atelier de forge; un dis- pensaire, où l'on soigne chaque jour gratuitement de 50 à 60 malades indigents; la plupart sont des Bédouins des tribus nomades. V Alliance Israélite a ouvert une école à Amarah en 1910. 178 élèves y apprennent l'arabe, le turc, l'hébreu; mais le français n'est pas enseigné. BASSORAH École des Sœurs de la Présentation. — L'é- cole comprend : une classe française : 25 élèves , dont 9 israélites et 7 musulmanes; deux classes arabes: 55 élè- ves ; une classe de petits garçons : 25 élèves, dont 9 mu- sulmans. Les religieuses voudraient ouvrir un dispensaire; elles sont retenues jusqu'à présent par le manque de res- sources. École de garçons de l'Alliance Israélite. — Fondée en 1903, elle compte 280 élèves : on leur apprend le turc, l'arabe, l'hébreu et l'anglais. Le français n'est pas enseigné. MOHAMARRAH École des Carmes. — Elle a été installée en 1912 dans une maison de location; un Père Carme la dirige. 160 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. BOUCHIR Mission des Pères Carmes. — Un Père Carme, assisté d'un prêtre goannais, visite chaque année toutes les communautés chrétiennes du Golfe Persique : Bah- rein, Bender-Abbas, Mascate. Il réside à Bouchir, dans une maison qui appartient à la congrégation. Une petite école française a été ouverte à Bouchir. ÉTABLISSEMENTS ÉTRANGERS Bagdad. — Jusqu'à présent nous occupons à Bagdad la première place, par nos œuvres d'éducation et de bien- faisance. Une école anglaise , fondée en 1906, compte environ 50 élèves, pour la plupart, des garçons. V hôpital de la mission anglaise (« English Mission Hos- pital ») a été fondé en 1886. Un médecin, six infirmiers et infirmières donnent des soins aux malades, le plus sou- vent à domicile. La mission a décidé de construire pro- chainement un hôpital proprement dit, où les malades puissent être hébergés. V école primaire allemande, ouverte en 1909, reçoit deux allocations importantes, l'une du gouvernement im- périal, l'autre de la Société du chemin de fer. Elle réu- nit environ 100 élèves. La Société du chemin de fer construira à Bagdad un vaste hôpital. En prévision de cette installation, l'ingé- nieur en chef, Meissner Pacha, a déjà fait venir à Bagdad deux diaconesses allemandes. OBSERVATIONS CONCERNANT L'INFLUENCE ET LES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN MÉSOPOTAMIE Comme on a pu le voir au cours de ce chapitre, les missions étrangères, américaines, anglaises et allemandes, font de grands efforts pour établir et pour développer leur influence en Mésopotamie, et leur action est ordinai- rement soutenue par des ressources financières bien supé- rieures à celles dont disposent nos propres missionnaires. Néanmoins l'activité intelligente et méthodique de nos religieux et le précieux concours des écoles de l'Alliance Israélite assurent à la langue et à l'influence françaises une place importante dans toute la Mésopotamie, et la première place dans certaines des parties les plus peuplées de cette contrée. Notre œuvre est prépondérante à Orfa, à Diarbékir, à Mossoul, à Bagdad. Lors de mon passage à Orfa, plusieurs personnes m'ont entretenu de l'opportunité d'y établir une agence consu- laire française. L'agent français qui résiderait à Orfa n'aurait guère à y défendre que des intérêts moraux : il est vrai que ces intérêts moraux valent qu'on les défende. Au demeurant, la France n'a pas d'industrie dans la ré- gion d'Orfa et elle y a peu de commerce. L'importation étrangère est insignifiante, les quelques marchandises ven- dues dans les bazars sont de provenance allemande ou autrichienne. Le pays exporte du hois de réglisse, qui est expédié à Alep et vendu en gros à une société américaine; de la laine, et des œufs. Les œufs sont envoyés en grande INTÉRÊTS EN ORIENT. Il 162 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE quantité à Grenoble et dans tout le Dauphiné, pour l'usage des mégisseries. La France est la seule puissance qui entretienne un con- sul à Dîabékir. La position de notre agent, qui naguère encore était assez difficile, est devenue beaucoup meil- leure depuis 1911 : on sait comment le consul de France sut alors, par son attitude énergique, prévenir le massacre des chrétiens à Diarbékir et à Mardin. A la suite de ces incidents, les diverses communautés chrétiennes se sont rapprochées de nous. Les deux communautés arméniennes témoignent d'une sympathie très vive envers la France : parmi elles notre influence pourrait aisément se pro- pager. Les écoles des sœurs Franciscaines font à Diarbé- kir d'excellente besogne; l'œuvre des Capucins est plus médiocre, mais pourrait devenir meilleure au prix d'un personnel plus nombreux et plus homogène. Les Alle- mands, qui avaient tenté de s'établir à Diarbékir, ont quitté la place. La mission américaine, qui avait ouvert un dispensaire dirigé par un médecin, s'est retirée à la fin de 1911. L'industrie de la soie est relativement développée à Diarbékir : elle pourrait y faire des progrès. Déjà quel- ques relations ont été établies avec le marché lyonnais. Le point de vue commercial est sans intérêt; le pays se suffît à lui-même; il a peu de ressources, mais peu de besoins. A Mossoulj tout le commerce est allemand, autrichien, ou anglais. Comme à Orfa, le principal objet d'expor- tation est le bois de réglisse, ou, comme on dit dans le pays, le sous. Des relations sont établies avec Trieste et avec Manchester. L'œuvre des Dominicains et l'influence fran- çaise à Mossoul. — Les Dominicains français dévelop- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 163 pent à Mossoal, dans le pays chaldéen, dans le Kurdis- tan et jusque dans le sud de l'Arménie, une activité considérable et très efficace. En ce qui concerne Mossoul, ils poursuivent en ce moment la réalisation de plusieurs projets qui nous intéressent directement. Les Dominicains se proposent de créer à Mossoul un hôpital français. Ils ont acquis un terrain en dehors de la ville, et dans une situation d'autant plus favorable, que la Compagnie du chemin de fer de Bagdad a choisi l'emplacement voisin pour y établir la gare. J'avais vu le terrain encore net de toute construction au mois de mai 1912. Une lettre du Supérieur de la mission, en date du 19 décembre, m'annonce que l'hôpital est bâti : il ne reste qu'à en achever l'aménagement intérieur et à le meubler. La Compagnie du chemin de fer avait d'abord formé le projet de créer elle-même un hôpital, dont la direction eût été confiée à des diaconesses allemandes. Les missionnaires français ont prévenu l'exécution de ce dessein. Ils ont proposé à Meissner Pacha de recevoir dans leur hôpital les malades de la Compagnie : leur ofifre a été agréée. Le terrain acquis en vue de la construction de l'hôpital est assez vaste pour permettre d'y installer encore d'autres établissements. Les Dominicains voudraient y bâtir une école professionnelle : cette création répondrait fort à propos aux besoins que va faire naître l'établissement du chemin de fer. Les plans de l'école sont déjà dressés. On n'attend, pour entreprendre la construction, que l'autori- sation du gouvernement ottoman. Celle-ci, demandée depuis longtemps, semble difficile à obtenir. Enfin les Dominicains sentent le besoin de placer à la tête des nombreuses écoles qu'ils ont établies dans les villages, des instituteurs et des institutrices formés à leurs 164 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE méthodes et capables d'enseigner convenablement le français. C'est pourquoi ils se proposent de construire, à côté de l'hôpital et de l'école professionnelle, une petite école normale, où les sujets qui se destinent à l'enseigne- ment pourraient achever leur instruction! Les populations des villages chaldéens réclament des écoles oij le français soit enseigné : l'espoir qu'ils ont fondé sur le prochain établissement du chemin de fer explique leur insistance. Les Dominicains se sont heurtés jusqu'à pré- sent à deux obstacles. Le premier est le manque de person- nel : et c'est à ce défaut que la création de l'école normale devrait remédier. Le second estLi résistance du Patriarche chaldéen, qui voudrait que les écoles ouvertes sur les terri- toires de sa juridiction servissent exclusivement à répandre la langue chaldéenne. Le gouvernement français, qui s'est récemment acquis des droits à la reconnaissance de ce prélat, pourrait utilement lui faire connaître son désir formel que le français fût enseigné, conformément au vœu des populations, dans les écoles que les Dominicains ont établies en pays chaldéen. Nous avons le plus grand intérêt à prendre position dans cette contrée, avant que d'autres ne tentent de s'y établir. Il faut souhaiter que les Dominicains français puissent multiplier leurs écoles de village et en perfectionner l'organisation. Il serait aussi très utile qu'on adjoignît aux écoles de petits dispen- saires, car ce pays est privé de tout secours médical. Commerce, agriculture, travaux publics à Bagdad. — A Bagdad, les principales maisons de com- merce sont anglaises, allemandes ou autrichiennes. Parmi les maisons anglaises, on peut citer : le comptoir de commerce que la Compagnie Lynch a adjoint à son entre- prise de navigation; la maison Blockey, Crée and C° (moteurs); la maison David Sassoon. Tout le petit com- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 165 merce^ dans les boutiques des bazars, est aux mains des Anglo-Indiens. Le commerce allemand est représenté par l'importante maison Berck, Puttmann et G'", qui possède des succursales à Bassorah ; le commerce autrichien par rOrientalische Gesellschaft (maison de commission) . Quant au commerce français, on peut dire qu'il n'existe pas. Seule la maison Dupleix vend à Bagdad quelques pompes agricoles. Nous ne sommes pas beaucoup mieux représentés df^ns l'agriculture que dans le coinmerce. Un Français, M. Ylasto, dirige pour une part l'exploitation du vaste domaine de Bellarlrouz, propriété de M. Zariifi. Un autre Français, M. VValel, a acquis des terrains dans la contrée pour une valeur d'environ 700.000 francs et a entrepris de les exploiter. Il ne faut pas oublier que la région de Bagdad est appelée à un développement agricole magnifique, moyennant l'exécution des travaux d'irrigation qui ont été projetés. L'administration ottomane avait, au moment où j'ai passé à Bagdad, de grands proj^-ts de travaux publics : on parlait de plusieurs ponts à établir, sur le Tigre, sur l'Eu- phrate et sur la Diyala. Le vilayet avait demandé un ingénieur français pour l'inspection générale des travaux publics. La France pourrait, en ce qui concerne les tra- vaux publics, prendre assez aisément à Bagdad une place considérable, qu'elle n'occupe point jusqu'à présent. Nous avons en effet sur les Allemands et sur les Anglais l'avantage de susciter moins de défiance, les indigènes ne nous reconnaissant ni les mêmes intérêts, ni les mêmes aspirations qu'ils supposent à nos rivaux. Missions archéologiques en Mésopotamie. — II est regrettable que la France ne se soit pas réservé sa part dans les recherches scientifiques qui se poursuivent avec 166 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE tant de succès en Mésopotamie : la présence de nos savants n'eût pas manqué de rehausser notre prestige dans ce pays. Dans la haute vallée de l'Euphrate, une mission du British Muséum, sous la direction du professeur C. Léonard Woolley, découvre les restes de l'ancienne Kar- kemich (Oropa), située non loin du village actuel de Dje- rablous. Les fouilles ont donné des résultats intéressants, touchant l'histoire, la civilisation et l'art du peuple hittite. Les savants anglais qui travaillent à Djerablous ne s'oc- cupent que d'archéologie. On peut supposer, sans être trop téméraire, que l'activité des savants et des architectes allemands, qui sont établis à Tell-Hélif, à Assour-Ghargat et à Babylone, ne s'exerce pas uniquement sur le terrain de la science. Le choix qu'on a fait de ces trois points est par lui-même très caractéristique : ils commandent toute la Mésopotamie. Je ne parlerai pas de la station de Tell- Hélif, que je n'ai pas visitée : on sait du reste que la mis- sion confiée au baron von Oppenheim est, pour le moins, aussi politique que scientifique. La station d'Assour-Chargat a été établie par les soins et aux frais de l'Orientahsche Gesellschaft. Les fouilles qui ont été entreprises, et qui se- ront continuées encore pendant cinq ou six ans, offrent peu d'intérêt au point de vue de l'histoire de l'art ; mais elles ont permis de mieux connaître la topographie et l'his- toire de l'ancienne ville d'Assur. La ligne du chemin de fer de Bagdad passe par Tell-Hélif; elle passe aussi à quelques kilomètres de la station archéologique d'Assour- Chargat. C'est encore une mission allemande qui exploite le magnifirjue champ de fouilles de Babylone. Les rapports du professeur Coldewey, qui dirige les recherches, ont fait connaître sommairement les résultats obtenus par les archéologues et les architectes allemands. Les dépenses DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 167 considérables que nécessitent les travaux sont couvertes en partie par les subventions de l'Orienlalische Gesellschaft, en partie par les dons de certaines communautés religieuses américaines, qui s'intéressent particulièrement au prophète Daniel et à tout ce qui touche à son histoire. L'espace occupé par les ruines de Babylone représente une circon- férence d'environ 50 kilomètres. A côté de cet immense chantier allemand, le petit champ de fouilles exploité, d'ailleurs avec succès, par notre compatriote M. de Genouil- hac, fait une assez médiocre figure. Les entreprises de la Société française des Routes. — En passant à Biredjik, j'ai eu l'occasion de recueillir quelques renseignements sur le projet de route Alep-Bagdad, dont une société française avait fait les étu- des et devait . entreprendre l'exécution. C'est à Biredjik que la route projetée devait traverser l'Euphrate. Les étu- des relatives à l'établissement du pont étaient achevées lors de mon passage. L'ingénieur français qui les a faites m'a assuré que ses collègues et lui avaient été fort bien accueillis dans cette région. Les fonctionnaires leur avaient marqué une grande bienveillance. La population de Bired- jik, qui est presque entièrement turque, s'est montrée bien disposée pour les Français, sauf peut-être la basse classe, qui est très fanatique et voit d'un mauvais œil les étrangers s'étabHr dans le pays. La présence de nos ingé- nieurs a causé quelque dépit aux ingénieurs allemands du chemin de fer, qui déjà se considèrent en pays conquis. L'ingénieur français que j'ai rencontré à Biredjik esti- mait que, même après l'ouverture du chemin de fer, la route projetée, desservant la vallée de l'Euphrate, conser- verait son importance. En repassant par Alep, au mois de juin, j'ai appris que le projet de route Alep-Bagdad avait été « provisoirement » abandonné. Je reviendrai sur l'or- 168 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE ganisation et sur Factivité de la Société des Routes dans le chapitre consacré à la Syrie. Le chemin de fer de Bagdad. — Je réunis ici, pour plus de commodité, tous les renseignements sur le chemin de fer de Bagdad que j'ai recueillis au cours de mon voyage, soit en Mésopotamie, à Djerablous, à Mossoul, à Bagdad; soit en Syrie, à Alep où à Alexandrette, soit en Asie Mineure. Lorsque j'ai traversé le Taurus pour aller rejoindre le chemin de fer (22 juillet 1912), le rail, provenant de Hay- dar-Pacha, arrivait jusqu'à Oulou-Kichla, où j'ai pu pren- dre le train pour Koniah ; il doit être prolongé aujourd'hui jusqu'à Buzanti. Il s'en faut donc encore d'environ 60 kilo- mètres, que la voie ferrée venant d'Adana ne rejoigne celle qui vient de Koniah. Mais ces 60 kilomètres se trouvent dans la partie montagneuse la plus difficile. La traversée du Taurus comporte plus de 100 tunnels, dont la longueur varie entre 30 et 1.500 mètres : on peut considérer que la voie est souterraine sur une longueur de 30 kilomètres ; on a prévu pour cette section 50 viaducs. Le tronçon Oulou- Kichla-Adana sera probablement, de toute la ligne, le dernier livré. Le pays est malsain; plusieurs ingénieurs allemands y ont trouvé la mort; dix d'entre eux ont été licenciés pour raison de santé en 1911-1912. I. — Entre Osmaniéh et Alexandrette, ou plus exacte- ment, entre Toprak-Kaleh et Alexandrette, le travail de piquetage était achevé sur tout le parcours (environ 50 kilo- mètres) lors de mon passage. Les travaux de construction doivent être très avancés aujourd'hui : ils ne présentent d'ailleurs aucune difflculté. Entre Osmaniéh et Alep, les travaux continuaient : on poussait très activement la percée des tunnels qui doivent traverser l'Amanus. On a renoncé à relier directement Alep DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 169 à Alexaiidrette, en raison des difficultés qu'offrait la traver- sée da mont Beylan. Alexandrette est reliée par un em- branchement à Toprak-Kaleh ; Alep est relié de même à la grande ligne par un embranchement de 1*2 kilomètres, qui aboutit à iMousleniéh. Cette solution donne une satisfaction partielle aux desiderata exprimés par le vilayet dAlep. II. — De Mousleniéh, la ligne se dirige, du sud-ouest au nord- est, vers l'Euphrate qu'elle atteint près de Djera- blous, à Zoormara. Ce tronçon est achevé depuis quelques mois, et désormais on peut aller par chemin de fer depuis Alep jusqu'à l'Euphrate. Le pont sur l'Euphrate doit avoir une longueur d'environ 1 kilomètre. C'est un pont métal- lique, dont les pièces, fabriquées en Allemagne, seront amenées à pied d'œuvre, toutes prêtes à être montées. La hauteur du pont dépassera de 15 mètres les plus hautes eaux du fleuve; le pont aura 5 travées et 80 mètres d'ou- verture. On prévoit son achèvement pour 1915. En atten- dant, on établit un pont provisoire en bois, qui puisse livrer passage aux trains de marchandises, et permettre le transport des matériaux nécessaires à la construction de la ligne entre l'Euphrate et Mossoul. Jusqu'alors, les maté- riaux étaient amenés d'Alep à dos de chameau; ce mode de transport lent et coûteux retardait les travaux. Le pays est plat jusqu'à Ras-el-Aïn, où une station est prévue. A Ras-el-Aïn, le baron von Oppenheim fait faire des fouilles archéologiques, qui seront encore poursuivies pendant deux ou trois ans. La section comprise entre l'Euphrate et Tell-Hélif pour- rait être achevée à la fin de 1914, si l'on ne rencontrait de grandes difficultés pour le transport des matériaux; le pays est absolument dépourvu de route. De plus, la population est paresseuse et le fanatisme des habitants empêche de recourir à la main-d'œuvre étrangère. Dans toute cette 170 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE région, les ingénieurs allemands que j'ai rencontrés se louaient fort de l'attitude observée à leur égard par les au- torités locales, mais se plaignaient de la population et en particulier des Bédouins. J'ai cru comprendre que l'hostilité des habitants était due à deux causes : la main-d'œuvre est fort mal payée; les expropriations sont obtenues par des procédés arbitraires, et quelquefois violents. Il n'est pas probable que cette section puisse être ouverte avant 1916. III. — Le plan de la section Tell-Hélif-Bagdad, soumis à l'approbation du gouvernement de Constantinople le 15 mars 1912, a été approuvé le 27 du même mois (le 15 mars était le terme extrême fixé par la convention d'avril 1911). On sait que le tracé actuel diffère considé- rablement de celui qui avait été établi en 1902 par une délégation de la Deutsche Bank, et plus encore de l'ancien tracé français qui faisait passer la ligne par Diarbékir et Mardin. Au point de vue de l'intérêt général, le tracé actuel se défend assez mal, puisqu'il prive de toute voie de com- munication les riches contrées comprises entre la vallée du Tigre et celle de l'Euphrate. Il ne s'explique guère que par d'autres considérations : celles qui ont amené les Alle- mands à modifier progressivement les anciens projets, de manière à rapprocher la ligne du Bagdad de la haute Syrie, d'Alep, et du golfe d'Alexandrette. Les études du tronçon Tell-Hélif-Chargat ont été ache- vées en janvier 1911. La ligne passe par Nisibin, Tell- Aouénat, Heugna et Mossoul. Elle traverse des territoires très fertiles. Avant d'arriver à Nisibin, on rencontre le village de Tell-Ermen, où, dans une école arménienne- catholique, le français est enseigné. On prévoit que le chemin de fer augmentera beaucoup l'importance de Nisi- bin. On trouve à Tell-Aouénat une grande abondance d'eau pure et des sources sulfureuses. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 171 La gare de Mossoul doit être établie à environ 1.500 mè- tres de la ville. Après Mossoul, la ligne suit la rive droite du Tigre jus- qu'à Kayara. Les mines de naphte et de pétrole qui se trou- vent à Kayara ont été jusqu'à présent mal exploitées par les indigènes. Puis, le tracé s'écarte du fleuve et gagne les plateaux de Tekrit, qui se prêteront merveilleusement à l'agriculture. Entre Tekrit et Bagdad, la ligne parcourt un terrain plat et fertile, où l'on cultive le palmier-dattier. Cette région est comprise dans le plan des travaux d'irri- gation dressé par l'ingénieur anglais sir William Wilcox. La gare de Bagdad, pour laquelle on a prévu une dépense de 8 raillions de francs, sera construite sur la rive droite du fleuve. Un pont tournant la reliera à une gare secondaire, située sur la rive gauche, et d'où partira l'embranchement Bagdad-Hanikin, qui doit relier le che- min de fer de Bagdad au chemin de fer transpersan. Les études relatives à cette ligne étaient déjà complètement achevées au mois de mai 1912, et l'on comprendra aisé- ment cette hâte des Allemands, si l'on se rappelle les clauses de l'arrangement conclu à Potsdam entre l'Allemagne et la Russie. Un port devait être creusé à Bagdad pour quatre bateaux, et l'on prévoyait l'organisation d'un service fluvial régu- lier entre Bassorah, Bagdad et Tekrit, pour les besoins de la construction. Une convention était même intervenue à ce sujet entre la Compagnie du chemin de fer et la Com- pagnie Lynch. Mais, d'après une information que les jour- naux français ont publiée récemment et dont je n'ai pu contrôler l'exactitude, la Compagnie du Bagdad aurait renoncé à ce projet. Elle serait alors amenée à pousser le plus activement possible les travaux et les ouvrages d'art entre Bagdad et Tekrit. Dès que le rail aura atteint Tekrit, 172 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE la Compagaie ferait à la route Tekrit-Mossoul toutes les réparations nécessaires : cette route est, pour le moment, à peu près impraticable. C'est à Tell-Hélif, au kilomètre. 1062, que doit se faire la jonction du rail venant de Bagdad avec celui qui vient d'A- lep. L'inauguration officielle des travaux a eu lieu à Bagdad au mois de juillet 1912. On prévoyait que la construciion de la ligne entre Bagdad et Tell-Hélif demanderait environ cinq ans. La convention de 1911 fixe comme date extrême pour Tachèvement total de la ligne le l^"" mars 1917. Mais il n'est pas invraisemblable que la Société se trouve dans le cas de solliciter de nouveaux délais. L'irrigation de la Mésopotamie. — La Société anglaise Jackson and C° a été chargée d'exécuter une par- tie des travaux prévus par le plan général d'irrigation de la Mésopotamie, qu'avait dressé sir William Wilcox. Aux termes du contrat qu'elle avait passé en 1909 avec le gou- vernement ottoman, la Société Jackson travaillait en régie, pour le compte du gouvernement impérial, qui lui rem- boursait tous ses frais, payait tous ses employés, et lui attribuait en plus une indemnité égale au 15 % des dé- penses effectuées. En 1912, la concession définitive des travaux fat mise en adjudication. Trois sociétés se trouvèrent en concur- rence; la société anglaise Jackson, soutenue par la Ban- que Nationale de sir Ernest Gassel, la société américaine Pearson, soutenue par la Banque Ottomane, et la société Pawlin. Un projet de consortium avait été formé entre plusieurs maisons françaises en vue d'obtenir la conces- sion d'une partie des travaux : mais il ne semble pas que ce projet ait été réalisé. La société Pearson refusa de pren- dre la responsabilité des travaux précédemment exécutés par la société Jackson; d'autre part, le gouvernement DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 173 ottoman ne voulait point que la concession fût divisée. La société Pearson se retira et la société Jackson a continué les travaux aux conditions fixées par l'ancien contrat. L'ensemble des travaux prévus par sir William ^Yilcox comporterait une dépense d'environ 8 millions 1/2 L. T. Mais la partie qui faisait l'objet de l'adjudication ne repré- sentait guère qu un total de frais de 2 millions 1/2 L. T. Le plan général d'irrigation de la Mésopotamie com- prend plusieurs barrages et un système de canaux. Le barrage à'Hindiéh, sur l'Euphrate (en aval de Mous- sayieb) doit être aujourd'hui terminé. Le premier barrage d'Hindiéh avait été construit par un ingénieur français, M. Mougelle. Les ingénieurs anglais de la Société Jackson en ont construit un second, sur les plans de sir W. ^yilcox. Au moment où je l'ai visité (23 mai 1912), le chantier d'Hindiéh occupait 2.000 ouvriers. Un four à briques et un petit chemin de fer avaient été établis pour les besoins de la construction. Les ingénieurs anglais ne se soumet- taient qu'à contre-cœur et avec défiance à la vérification dont le gouvernement ottoman avait chargé des inspec- teurs égyptiens. Us doutaient généralement que le pro- gramme de sir W. Wilcox pût être réalisé dans son intégrité. Mais tous s'accordaient à reconnaître que la Mésopotamie serait complètement transformée par le che- min de fer et par l'irrigation et tous manifestaient la plus entière confiance dans l'avenir de cette contrée. A Kalaat-Ramadi^ sur l'Euphrate (en amont de Feloud- jah), les travaux ont été commencés à la fin de 1911 par la Société Jackson. Ils comprennent un barrage, un bas- sin régulateur et un canal joignant le fleuve au lac Haba- niéh. Le régulateur a une largeur de 100 mètres. Le canal est large de 50 mètres et long de 12 km. Le diamètre du lac lïabaniéh est d'environ 30 km. Les eaux du lac, 174 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. impures et saumàtres, sauf au temps de la crue, rendent tout ce pays fort malsain. Elles seront désormais entraî- nées par celles que le canal amènera du fleuve, et iront se déverser dans un second canal, long de 10 km. qui aboutira à Hindiéh. Le premier canal, qui n'a que 1 mètre ou 1"',50 de profondeur, est très facile à creuser; le second, qui sera profond de 8 mètres, nécessitera des tra- vaux longs et difficiles. Ce second canal permettra d'at- ténuer les effets désastreux de la crue : les eaux provenant du fleuve, mêlées à celles du lac, se déverseront sur la contrée déserte et la rendront fertile. Tout le plan semble aux connaisseurs d'une simplicité et d'une économie mer- veilleuses. Les travaux qui, lors de mon passage (27 mai 1912), étaient commencés aussi au lac Hamidiéh, occu- paient environ 3.000 ouvriers. Les ingénieurs anglais trouvent à Hitt, sur l'Euphrate, à une journée en amont de Ramadi, des carrières de pierre et des sources de bitume, qu'ils exploitent pour les besoins de leur construction. Il semble que l'Allemagne ne puisse pas se désintéres- ser longtemps des entreprises relatives à l'irrigation de la Mésopotamie : elle n'a pas laissé ignorer les desseins qu'elle poursuit dans ce pays, et son intention de prendre part au développement économique de la Mésopotamie, non seulement par la construction du chemin de fer, mais encore par de vastes entreprises agricoles. Les Allemands rêvent, dit-on, de transformer ces plaines, qui furent autrefois fertiles, en un immense champ de coton, qui libérerait l'Europe de la dépendance de l'Egypte. Il est difficile de prévoir en ce moment comment les projets des Allemands pourront s'accorder avec ceux que les An- glais ont déjà commencé de réaliser. CHAPITRE V SYRIE BEYROUTH ÉTABLISSEMENTS FRANÇAIS Faculté française de médecine. — Fondée en 1883, la Faculté de médecine de Beyrouth s'est développée rapidement et donne d'excellents résultats. Voici l'état de la Faculté en 1911 : 11 professeurs, dont 1 suppléant; 2 chargés de cours ; 7 chefs de clinique; 1 secrétaire-bibliothécaire. Élèves en médecine : Élèves en pharmacie : 1^^ année 82 1" année 8 2° année 41 2^ année 2 3^ année 36 3® année 2 4® année 29 En cours En cours d'examen 37 d'examen 6 225 18 Au total, 243 élèves; 127 sont catholiques; parmi les 116 non catholiques, 20 sont musulmans. Seuls sont reçus comme étudiants les Orientaux et les Européens nés et fixés définitivement en Orient. Pour être admis à suivre les cours, les candidats doivent être munis du diplôme de bachelier français, ou subir un RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 177 examen d'entrée devant un jury nommé et présidé par le Consul général de France. L'enseignement est donné exclusivement en français. La Faculté est bien organisée. L'assiduité est exigée des étudiants et exactement contrôlée. Un système d'examens préparatoires oblige les élèves insuffisants à redoubler leur cours ou même les écarte définitivement. L'ins- truction théorique a été reconnue fort bonne par les juges compétents. iMais on constatait jusqu'à présent chez les élèves un défaut de pratique, provenant de ce que les services hospitaliers sont insuffisants et de ce qu'il n'y a pas d'internat. On vient de porter remède à cet incon- vénient, en construisant une nouvelle école et un nouvel hôpital. Grâce à l'initiative du Comité de l'Asie française et à la souscription ouverte par le Syndicat de la Presse parisienne, la Faculté de médecine a été dotée d'un édifice convenable, qui la met en état de soutenir avantageusement la concurrence de la Faculté améri- caine. Les constructions étaient déjà fort avancées, lorsque je les ai visitées, le 30 juin 1912. Depuis, la nouvelle Faculté a été inaugurée solennellement. L'édifice com- prend des amphithéâtres nombreux et commodes et de vastes laboratoires. La pharmacie est complètement séparée de la médecine. A chaque matière d'enseignement sont réservés des locaux particuliers. La bibliotèque est bien aménagée. Les caves sont spacieuses et aérées. Des serres ont été construites dans le jardin botanique, dont la création remonte au moment où les terrains furent acquis (1901). On a choisi pour construire l'hôpital un emplacement avantageux et salubre, en dehors de la ville. Toutes les INTÉRÊTS EN ORIENT. 1'^ 178 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE conditions requises par l'hygiène s'y trouvent réunies. Les travaux ont été commencés au mois de novem- bre 1912. Reste à résoudre la question fort importante du per- sonnel. L'institution de l'internat s'impose; elle ré- pond à un besoin qu'il faut absolument satisfaire. Mais les Filles de la Charité, qui dirigent Tancien hôpital français, soulèvent quelques objections très raisonnables et ne s'accommoderaient à l'organisation nouvelle que si on leur offrait certaines garanties contre les inconvénients qu'elles prévoient. Faculté orientale des Pères Jésuites. — Elle a été fondée en 1902 et comprend trois années d'études. On y enseigne l'arabe classique, le syriaque, l'hébreu, l'arabe dialectal de Syrie, l'éthiopien et le copte; la grammaire comparée, l'histoire et la géographie orien- tales, l'archéologie orientale et les sciences relatives à l'antiquité gréco-romaine. Le français est la langue de l'enseignement. Les élèves les plus avancés suivent quelques cours en arabe. Cette faculté était provisoire- ment fermée, lorsque j'ai passé à Beyrouth. Elle a de nouveau ouvert ses portes au cours de cette année. A la faculté se rattachent une excellente bibliothèque et une imprimerie, où sont édités des journaux, des revues et des livres en français, en latin, en grec et dans toutes les langues orientales. Université Saint-Joseph : collège dés Jésuites. — Les cours sont ceux de l'enseignement secondaire classique et moderne ; les élèves apprennent l'anglais, l'allemand, l'italien, l'arabe, fort peu le turc. Le français est la langue de l'enseignement. Un diplôme de bachelier de l'université est délivré aux élèves qui ont subi avec succès les examens de rhétorique et de philoso- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 179 phie. 175 pensionnaires proviennent du Liban, de la Syrie, de la Palestine, de l'Egypte, de Constantinople, et même de Mossoul et de Bagdad. Les demi-pensionnaires et les externes sont au nombre de 284- : en tout 459 élèves, dont 32 musulmans. Aux professeurs jésuites et ma- ristes sont adjoints 17 maîtres indigènes, prêtres ou laïques. Un cercle de jeunes gens est organisé pour les anciens élèves. Séminaire oriental des Pères Jésuites. — Le but de cette institution est de préparer des prêtres et des missionnaires pour les pays d'Orient. On y admet des élèves de tous les rites catholiques. La durée moyenne des études est de 10 à 12 ans. Les séminaristes suivent les cours de l'enseignement secondaire classique au collège de l'Université Saint-Joseph. Tous les élèves parlent le français et sont exercés en français à la prédication. La philosophie et la théologie sont seules enseignées en latin. Les élèves qui ont subi avec succès les examens de sortie reçoivent les diplômes de docteur en philosophie et en théologie. — 45 élèves en 1912. Collège des Frères de la Doctrine chré- tienne. — Fondé en 1894, ce collège compte aujourd'hui plus de 500 élèves. Depuis que l'acquisition de nouveaux terrains (1908) a rendu possible une installation plus vaste, le nombre des élèves a doublé. Le collège comprend une section d'enseignement se- condaire moderne et une section d'enseignement com- mercial. Mais le cours commercial a toutes les préfé- rences des élèves. Un petit nombre se préparent aux examens du baccalauréat français d'Egypte (sciences- langues vivantes); la plupart aspirent au diplôme d'études commerciales que délivre l'établissement et qui 180 RAPPORT AU COMITE DE DEFENSE est fort apprécié dans les maisons de commerce et dans les administrations. L'enseignement est généralement . bon ; il est dégagé de toute théorie inutile : l'esprit qui le domine est exclu- sivement pratique. Sur les 504 élèves qui fréquentent le collège en 1912, il y a 149 grecs orthodoxes, 91 musulmans et 21 Israélites. Collège de la mission laïque. — Le collège de garçons comprend les cours de l'enseignement secon- daire moderne, ceux de l'enseignement commercial, une section industrielle' en formation, et un atelier de méca- nique et d'ajustage. 198 élèves étaient inscrits en 1912; Tannée précédente, le collège en comptait 24-5. 11 y avait, durant la dernière année scolaire, 22 élèves en première commerciale et 8 en première industrielle. Collège de filles — En comptant les petits garçons qui suivent avec les fillettes la classe enfantine, on obtient un total de 38 élèves. Ce chiffre représente le maximum atteint par le collège. Le collège de filles, comme on le voit, a peu de suc- cès. Le collège de garçons n'a pas beaucoup mieux réussi. Le comité de patronage, justement préoccupé de cette situation, a mis en avant divers projets. On se propose surtout de développer l'enseignement commercial et industriel; on songe même à créer de toutes pièces une école d'arts et métiers; enfin l'organisation d'une école d'agriculture dépendant de la mission laïque a ses par- tisans. Le professeur de sciences du collège préconise la création d'une école externe dont les cours pourraient être suivis même par les élèves des autres établissements de Beyrouth, laïques ou congréganistes. Il ne m'a point paru que le directeur du collège fût entièrement favo- rable à ce projet. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 181 Collège maronite de la Sagesse. — C'est un excellent établissement d'enseignement secondaire. L'ar- chevêque maronite de Beyrouth, M'^'' Chebli, ancien élève du séminaire de Saint-Sulpice, consacre tous ses soins à en assurer le progrès. L'histoire, la géographie, la gram- maire, la langue latine sont très bien enseignées; il n'im- porte guère que la philosophie et l'histoire ecclésiastique le soient assez mal. Le nombre des élèves augmente chaque année. 315 élèves en 1912. Le directeur désirerait installer un cabinet de physique et d'histoire naturelle et un petit laboratoire de chimie, pour faciliter aux élèves l'étude des sciences. Collège patriarcal melchite. — Il dépend di- rectement, non de l'évêque de Beyrouth, mais du pa- triarche grec- catholique d'Antioche. L'enseignement y est médiocre; les méthodes employées par les professeurs sont défectueuses; on ne fait appel qu'à la mémoire des élèves. La rhétorique et la philosophie sont enseignées par un professeur français laïque ; les autres professeurs sont des prêtres ou des laïques indigènes. Le français est la langue de l'enseignement; en outre, les élèves appren- nent l'arabe, le turc et l'anglais. On donne aux élèves de la classe supérieure quelques notions de droit commer- cial et d'économie politique. Dans toutes les classes, notre langue est parlée assez correctement. 196 élèves, dont 58 musulmans. Collège de Saint- Jean Maron. — Ce collège maronite, situé aux environs de Beyrouth, compte 120 élè- ves. Le français y est enseigné. Écoles de l'Alliance Israélite. — V école de gar- çons a été fondée en 1865. On y donne, en huit années d'études, l'enseignement primaire et primaire supérieur. — 230 élèves. 182 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE V école de filles, fondée en 1880, compte 195 élèves. • Le jardin d'enfants, ouvert en 1905, est fréquenté par 75 enfants de quatre à six ans, garçons et filles. Le cours supérieur est suivi par des élèves des deux sexes. On y prépare au brevet et on y donne les premiè- res notions de comptabilité et de correspondance com- merciale. Partout l'enseignement est excellent. Le chan- celier de la Faculté de médecine de Beyrouth m'a déclaré que c'est l'école de l'Alliance Israélite qui fournit à la Faculté les étudiants les mieux préparés et les plus labo- rieux. Écoles gratuites des Jésuites (Université Saint- Joseph). — L'enseignement primaire y est donné en arabe et en français. Les élèves lisent couram- ment notre langue. Il semble pourtant qu'à l'Université Saint- Joseph, les écoles primaires gratuites soient un peu sacrifiées aux écoles supérieures. Écoles gratuites des Frères de la Doctrine chrétienne. — Il y en a deux, dont chacune compte environ 200 élèves. L'enseignement y est très bon. Au bout de la première année, les élèves parlent couram- ment le français. Ils apprennent en outre le turc, l'arabe et l'anglais. Presque tous les élèves sont ottomans; 56 ap- partiennent à la religion musulmane. Ecole paroissiale des Capucins. — Une cin- quantaine d'enfants y apprennent à lire un peu le fran- çais. L'école est médiocrement installée et la tenue des élèves laisse fort à désirer. Les Pères Capucins possèdent, à côté de l'école, une petite imprimerie. École grecque de Saint-Sauveur. — C'est une bonne petite école primaire, dont la communauté grecque- catholique de Beyrouth fait à peu près tous les frais. Notre langue y est enseignée par deux professeurs fran- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 183 rais. Le français et l'arabe sont obligatoires pour tous les élèves; le turc et l'anglais sont facultatifs. — 216 élèves. École syrienne catholique. — 64 élèves y reçoi- vent l'enseignement primaire, en arabe et en français. Établissement des Dames de Nazareth. — Il a été fondé en 1868 et comprend : 1° Un pensionnat , où les jeunes filles sont préparées au brevet. — 134 élèves, provenant de Syrie ou d'Egypte; 2*^ Une école gratuite : on enseigne le français et l'arabe à 300 enfants, répartis en trois classes. 80 petites filles des plus pauvres reçoivent chaque jour gratuite- ment le repas du midi ; on distribue plusieurs fois par an des vêtements et des jouets; 3^ Un ouvroir et une école ménagère, installés mal- heureusement dans un local trop exigu. Les Dames de Nazareth voudraient avoir les moyens de s'agrandir et d'ouvrir de nouvelles salles d'école, qu'elles rempliraient aisément, car l'enseignement qu'elles donnent aux jeunes filles est très justement réputé. De la maison de Beyrouth dépendent deux petites écoles que les Dames de Nazareth entretiennent dans le Liban : celle à'Araya compte 100 élèves, celle de Smarj- bail en a 52. Établissement des Sœurs de Saint-Joseph. — Il comprend : 1° nn pensionnat : les programmes d'en- seignement sont très complets et on y fait une place impor- tante aux travaux manuels, à l'hygiène et à la tenue du ménage. Le français et l'arabe sont obligatoires; l'anglais est facultatif, — 173 élèves, dont 23 musulmanes ; — 2° une école gratuite : on y donne l'enseignement primaire en français et en arabe, à 190 jeunes filles, dont 49 musul- manes; 3^ un orphelinat, où sont élevées une quinzaine d'orphelines. 184 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Bien que le niveau des études m'ait paru satisfaisant, je n'aipas retrouvé dans cet établissement les bonnes méthodes et l'esprit pratique qui distinguent presque partout l'ensei- gnement des Sœurs de Saint-Joseph et en font l'un des plus parfaitement adaptés aux besoins des populations orientales. Établissement des Sœurs de la Sainte- Famille. — On donne au pensionnat l'enseignement primaire et primaire supérieur français, et quelques notions d'économie domestique. Une école de petits garçons et une classe enfantine sont fort bien dirigées. On élève enfin une quinzaine d'orphelines. L'instruction donnée à tous ces enfants est simple, méthodique et inspirée du meilleur esprit. Plus de 400 élèves : 50 sont reçus gra- tuitement. École des Filles de la Charité. — V Maison de Charité de Raz-Beyrouth, — Fondé en 1853, agrandi en 1882, cet établissement n'a été achevé qu'en 1902. Les Filles de la Charité y ont installé : Une école de filles^ divisée en cinq classes, où les élèves sont reçues presque gratuitement; une classe de petits gar- çons et un asile; un ouvroir où les jeunes filles apprennent la couture, la coupe, la broderie, et trouvent un travail bien rémunéré ; un dispensaire, où des médicaments sont dis- tribués gratuitement chaque année à environ 7.000 mala- des indigents ; un médecin y donne des consultations gra- tuites trois fois par semaine. Les religieuses visitent à domicile les malades et les pauvres. Les enfants pauvres de l'Asile sont nourries chaque jour à midi et reçoivent des vêtements deux fois par an. L'école de Raz-Beyrouth est l'une des plus gaies, des plus vivantes que j'aie visitées. Le chant et la leçon de choses animent toutes les classes. Les méthodes d'ensei- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT- 185 gnement sont excellentes. — 506 élèves, dont 75 musul- mans et 35 Israélites. Une dette assez lourde pèse sur cette maison, qui rend les plus grands services à l'influence française. •2^ Maison de la Quarantaine, — Elle comprend, comme celle de Raz-Beyrouth, une école de filles, un asile et un dispensaire. — 435 élèves. Cours de jeunes filles de M}^^ Plassat. — Ce cours, médiocrement organisé, compte 16 élèves en 1912. Maison centrale des Filles de la Charité. — Elle a été fondée en 18i7 sous le nom de la « Miséricorde », et elle réunit aujourd'hui plusieurs œuvres d'enseignement et d'assistance. Le groupe scolaire comprend : un petit collège de gar- çons, pour les enfants de trois à douze ans; 150 élèves y reçoivent une bonne instruction élémentaire ; Un pensionnat de jeunes filles, avec des demi-pension- naires, — 202 élèves; Deux externats de jeunes filles. L'un est gratuit : les enfants y sont nourries et vêtues par ia maison; dans l'autre, les élèves payent un écolage de 2 francs par mois. — Ensemble, 375 élèves; Une école normale, où les religieuses forment des mal- tresses indigènes pour leurs écoles du Liban : 45 élèves, destinées à diriger 20 écoles, où sont instruits gratuitement 1.420 enfants. Toutes les jeunes filles admises à l'école normale sont instruites et entretenues gratuitement. L'œuvre des Enfants trouvés comprend trois groupes : 1' les bébés en nourrice (53 enfants); 2° Tasile des gar- çons, installé à Broummana : 31 garçons; 3'' l'asile des filles, installé à Zouk : 80 filles. On trouvera quelques détails sur ces deux asiles dans la section de ce chapitre qui est consacrée aux établissements français du Liban. 186 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Garçons et filles restent à la charge de la maison jusqu'à l'âge de douze ans. Deux ouvroirs réunissent 100 ouvrières; les unes sont employées à l'atelier de couture, les autres à l'atelier de lingerie. Le catéchis7ne du dimanche groupe 180 femmes pauvres, à qui l'on distribue du linge et des vêtements. La visite des pauvres à domicile est faite par les religieu- ses, assistées des Dames de Charité. Un patronage de jeunes filles est organisé et soutenu par les anciennes élèves pour les ouvrières des manufac- tures de tabac et de quelques autres usines. Toutes ces œuvres sont dirigées et administrées avec le plus grand soin. Orphelinat de garçons (Filles de la Cha- rité). — C'est, à Beyrouth, la maison française par excel- lence. Fondée en 1881, elle accueille aujourd'hui environ 200 orphelins, presque tous libanais. Tous ces enfants reçoivent une instruction élémentaire en français et en arabe et apprennent un métier. V école des arts et métiers est fort bien outillée; elle comprend les ateliers suivants : cordonnerie, couture (l'atelier fournit la Compagnie du chemin de fer), tis- sage, moulinage, menuiserie, sculpture sur bois, tapis- serie, forge (l'atelier travaille pour la Compagnie du chemin de fer), ajustage, tour. Tous les apprentis suivent chaque jour une classe de français et d'arabe, les petits pendant 4 heures, les grands pendant 2 heures. Ils sont exercés à jouer en français de petites comédies et donnent des représentations dans une salle de théâ- tre bien aménagée. Quelques-uns apprennent la musique et composent une « harmonie » très appréciée à Bey- routh. A leur sortie de la maison, les religieuses s'occu- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 187 pent de les placer : beaucoup sont engagés directement comme chefs d'atelier. Les « billets d'honneur » mérités par les enfants durant leur apprentissage leur sont payés en argent lors de leur sortie; il n'est pas rare que des orphelins trouvent ainsi au moment de leur départ une petite somme de 150 ou de 200 francs qui leur est d'un grand secours pour leur établissement. Les religieuses ont récemment acheté un terrain, dans l'intention de construire de nouveaux ateliers, où elles chercheraient à employer les sourds-muets et les aveugles, qui sont très nombreux dans celte région. Orphelinat de filles (Filles de la Charité). — Il a été fondé en 1860 par l'initiative de M^ Lavi- gerie. Les religieuses y élèvent jusqu'à l'âge de vingt ans environ 300 orphelines, presque toutes maronites du Liban. On leur donne une bonne instruction primaire en français et en arabe; on leur apprend la couture, la broderie et les soins du ménage. L'atelier de lingerie fine où elles sont employées est très réputé. Les locaux sont sains et con- venablement aménagés. Les religieuses cherchent à pla- cer les orphelines qui sortent de leur maison; mais elles y rencontrent de grandes difficultés. École ménagère des Sœurs de la Charité de Besançon. — Fondée en 1908, cette école n'a pas donné jusqu'ici les résultats qu'on pouvait en attendre. Elle n'est pas dirigée dans un esprit suffisamment pratique. Cette (( école ménagère » m'a paru être surtout une école d'arts d'agrément. On y enseigne aux dames et aux jeunes filles de la classe aisée la peinture sur soie ou sur porcelaine,' le repoussage du cuir, etc. Les religieuses pourraient faire œuvre plus utile. A côté de l'école, elles ont ouvert un petit orphelinat où elles forment quelques jeunes filles au service domestique. 188 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Asile de vieillards (Sœurs de Notre-Dame des Douleurs). — La maison est petite, mal installée, incommode. Cependant les religieuses en tirent tout le parti qu'elles peuvent. Leur établissement est propre et bien tenu. La population de Beyrouth apprécie cette œuvre de charité et fait bon accueil aux sœurs quêteuses. Mais les ressources ne sont pas suffisantes : l'œuvre végète. Il importerait de la secourir sans tarder. Hôpital français (Filles de la Charité). — Cet hôpital, bien installé, mais de dimensions trop exiguës, va être incessamment remplacé par un nouvel établis- sement (v. ci-dessus). En 1911, on a reçu à l'hôpital 759 malades; on en a reçu 112 au pavillon des contagieux : le total des journées de malades s'est élevé à 15.850. Un dispensaire gratuit est ouvert tous les jours. La supérieure de l'hôpital déplore vivement le taux élevé des droits de douane auxquels sont soumis les meu- bles, instruments et médicaments qui proviennent de la France. On a dû payer 77 francs pour une table d'opéra- tion; pour un lit d'hôpital de la valeur de 110 francs, les frais de transport et de douane se sont élevés à 100 francs. Maternité. — Elle est installée dans un petit bâti- ment voisin de l'École de Médecine. Le nombre des femmes qui consentent à faire leurs couches à l'établissement est fort restreint ; aussi est-il difficile de donner aux étudiants, en cette matière, un enseignement pratique suffisant. Le directeur de la Maternité estime qu'il y aurait lieu d'ins- tituer une école de sages- femmes, dont le pays est abso- lument dépourvu. Alliance française. — La section de Beyrouth est très active et contribue à répandre Tinfluence française en Syrie. Elle compte 225 adhérents. Au siège de V Alliance, trois salles de lecture sont ou- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 189 vertes tous les jours de 8 h. à midi et de 2 h. à 7 h. 1/2 du soir. Les jeunes gens de la ville les fréquentent volon- tiers (de 10 à 15 visiteurs par jour). Ils y trouvent les principaux journaux de Paris, les grandes revues, en tout 35 publications françaises, et une bibliothèque con- tenant 1.350 ouvrages français. Au cours de chaque hiver, V Alliance organise une dizaine de conférences gratuites. La section de Beyrouth distribue annuellement 7.450 fr. de subventions aux écoles de Syrie, secourant plus parti- culièrement celles de nos écoles qui ont à lutter contre les influences américaine, anglaise, ou russe. Elle a constitué un dépôt de fournitures scolaires et répond, dans la mesure de ses moyens, aux nombreuses demandes qui lui sont adressées. ÉTABLISSEMENTS ÉTRANGERS Ils sont nombreux à Beyrouth, et quelques-uns sont fort importants. Les diaconesses allemandes ont une école primaire, un collège secondaire et un orphelinat pour les jeunes filles indigènes (130 orphelines). Le collège est très réputé; il ne m'a pas été possible de le visiter. Les diaconesses diri- gent l'hôpital protestant des Chevaliers de Saint- Jean, situé dans la ville haute et fort bien organisé. La mission britannique entretient une école normale d'institutrices et 8 écoles primaires, dont 2 sont réservées aux jeunes aveugles : en tout 700 élèves environ. De la maison de Beyrouth dépendent 36 écoles, réparties sur toute la Syrie, et comptant ensemble 2.500 élèves. La mission écossaise a une école de garçons, une école et un collège de jeunes filles. Une dame écossaise, miss Taylor, dirige l'institut Saint-Georges, où l'on élève les jeunes filles musulmanes et druses. 190 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE La Russie subventionne les écoles grecques-orthodoxes, et, en particulier, un collège de filles assez réputé. V Association italienne entretient une école de garçons, où l'on enseigne, outre l'italien, un peu d'arabe et de fran- çais (150 élèves), une école de filles (100 élèves) et un asile enfantin (70 enfants). Nos écoles des Frères ont enlevé beau- coup d'élèves à l'école italienne de garçons. Enfin la concurrence la plus redoutable nous est faite par la mission américaine, qui réunit toutes les œuvres d'enseignement dans son « Syrian Protestant Collège », que j'ai visité dans le plus grand détail. Le Syrian Protestant Collège a été fondé en 1871 ; il a été depuis agrandi et perfectionné. On vient encore d'y ajouter de nouveaux bâtiments. C'est le plus somptueux établissement de Beyrouth. Il comprend : Un lycée , Une école préparatoire : ensemble, 397 élèves; Une faculté de médecine, 139 étudiants; Une école de pharmacie, 25p étudiants; Une clinique dentaire, 5 étudiants; Une école de nurses, 25 étudiantes ; Une école de commerce, 71 élèves; Une école d'arts et sciences, 234 élèves; Un observatoire, des musées et une bibliothèque ; Trois hôpitaux : un hôpital d'enfants, 40 lits; un hôpital de femmes, 40 lits^; une clinique pour les maladies des yeux, 40 lits. Le total des élèves et étudiants est, en 1912, de 895. Les professeurs sont de toutes nationalités, mais l'élé- ment anglais et américain est prédominant ; tous les insti- tuteurs sont syriens. Les anciens élèves deviennent méde- cins, avocats, professeurs, rédacteurs de journaux. Plusieurs vont exercer leur métier en Egypte; mais un DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 191 grand nombre demeurent en Syrie, où ils constituent un puissant moyen d'influence. L'organisation intérieure du collège est tout améri- caine. Les sports tiennent une grande place dans la vie des élèves. Au moment où j'ai visité rétablissement, on construisait une « Maison », destinée à abriter la « vie sociale des élèves » : elle comprend des salles de confé- rences, des salles de clubs et des offices pour la rédaction d'un journal. Les exercices religieux sont obligatoires pour tous les élèves. Le directeur du Collège prêche surtout aux jeunes gens la charité et tolérance, et se propose de rapprocher musulmans et chrétiens en combattant à la fois le fana- tisme des uns et celui des autres. Le collège protestant entretient de bonnes relations avec les écoles de la communauté grecque-orthodoxe et avec le collège de la mission laïque française. L'exercice des sports donne aux élèves de ces établissements l'occasion de se rencontrer. Le directeur du collège américain désirerait voir s'établir des relations du même genre entre ses élèves et ceux de l'Université française des Jésuites. LE LIBAN ET LA COTE DE SYRIE Antoura. — Collège de garçons des Laza- ristes. — C'est le plus ancien établissement français d'instruction en Syrie, et c'est assurément aussi l'un des meilleurs. Fondé en 1828, il compte depuis dix ans 300 élèves, et ce chiffre serait aisément dépassé, si l'on disposait de locaux plus vastes. Les élèves proviennent pour la plupart du Liban et de la Syrie, plusieurs de l'Egypte et des lies grecques, surtout de Chypre, quel- ques-uns de la Perse. Le collège est dirigé dans un esprit très français et très tolérant : aucun conflit ne s'est jamais produit entre élèves de races ou de religions différentes. 40 musulmans, druses ou israélites vivent en bon accord avec 200 maronites et 60 chrétiens des autres rites orien- taux. Chaque élève est tenu d'apprendre le français, sa langue maternelle et une troisième langue à son choix : turc, arabe, allemand, anglais, italien ou latin. L'ensei- gnement est donné par 23 Lazaristes, assistés de 17 maîtres indigènes, laïques ou ecclésiastiques; les programmes sont ceux de l'enseignement secondaire et de l'enseignement commercial français. Les méthodes sont excellentes. Notre langue est très familière à tous les élèves, qui répondent aisément aux interrogations, formant leurs phrases correc- tement et sans hésitation. Plusieurs subissent chaque RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 193 année avec succès les épreuves du baccalauréat français d'Egypte (sciences-langues). La plupart de ceux qui ont achevé leurs études (25 ou 30 chaque année) se destinent au commerce ; un petit nombre entreprend des études de droit ou de médecine. Le directeur du collège a exprimé le désir d'installer un cabinet de physique : je crois que les moyens lui en ont été récemment fournis par l'Institut de France ; il demande aussi quelques ouvrages français pour la bibliothèque des élèves. Les Lazaristes d'Antoura ont fondé une œuvre intéres- sante : celle des Écoles communales des villages libanais. Ils donnent 1 franc par jour au curé ou à un jeune homme de leur choix, pour qu'il réunisse les enfants et leur apprenne à lire et à écrire ; si le maître leur enseigne en outre un peu de français, il reçoit 2 francs par jour. Le collège entretient complètement six de ces écoles. Nous aurions intérêt à ce que cette œuvre se développât : au contraire, elle périclite, faute de ressources, et les Laza- ristes se demandent s'ils ne seront pas bientôt contraints de Tabandonner. Jouniéh. — École primaire supérieure de garçons (Maristes). — C'est une bonne institution, où les Maristes donnent aux jeunes gens, outre l'enseigne- ment primaire supérieur français, un peu d'enseignement commercial et des notions de comptabilité à l'usage du Levant. 260 élèves, dont 20 sont reçus gratuitement. On demande un cabinet de physique et de chimie, des cartes géographiques et des tableaux pour les leçons de choses. Ecole des Sœurs de la Sainte-Famille — Le pension- nat et l'externat, avec l'école annexe de Mameltein, réu- nissent 276 élèves, dont 148 sont reçues gratuitement (quelques orphelines). L'enseignement est bon et les jeunes filles parlent correctement le français. l.NTÉnÊTS EN OKIENT. 13 194 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Batroun. — École de garçons des Maristes. — On y donne l'enseignement primaire, primaire supé- rieur et commercial. Les Maristes se proposent d'ouvrir prochainement une petite école d'agriculture, demandée par la population : le terrain est acheté et la construction doit être entreprise à Fheure qu'il est. École de filles des Mariamettes. — C'est une école primaire. Sur cent élèves, une trentaine apprennent le français, qui est bien enseigné. École de filles des religieuses maronites. — Le Pa- triarche maronite s'intéresse particulièrement à celte école, qui réunit de nombreuses élèves. On y enseigne notre langue avec beaucoup de soin. GebaïL — Amohit. Les Maristes ont ouvert dans ces deux localités des éco- les nouvelles. Celle de Gebaïl compte 159 élèves, celle d'Amchit en a 60. Baabdah. — Haabdah est la résidence du gouverneur du Liban. La Mission anglaise se proposait d'y ouvrir une école. Les Sœurs françaises de la Sainte-Famille ont prévenu ce dessein et s'y sont installées. Elles enseignent le fran- çais à 40 élèves payantes, et l'arabe à 130 élèves gratuites. Zouck. — Maison des Filles de la Charité — Elle réunit les œuvres suivantes : 1) Asile d'enfants trouvés. — 80 petites filles, prove- nant de la maison de Beyrouth, sont recueillies et élevées jusqu'à vingt ans. Elles apprennent le français et l'arabe, reçoivent une instruction élémentaire, sont formées aux soins du ménage et aux travaux manuels. 2) École externe. — On y donne l'enseignement primaire, en français et en arabe, à 200 enfants, garçons et filles. Ces enfants parlent et lisent très couramment notre langue. Une cinquantaine d'enfants payent un écolage de 1 franc DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 195 par mois; les autres sont reçus gratuitement. On donne chaque jour le repas de midi à 25 enfants des plus pauvres. 3) Patronage. — On y réunit tous les dimanches, outre les élèves de l'école, 120 jeunes filles du pays. k) Hospice de vieillards. — 22 vieilles femmes y sont recueillies et bien soignées ; mais le local est insuffisant. 5 ) Pharmacie et dispensaire. — On y soigne gratuitement 40 ou 50 malades chaque jour; un médecin donne des consultations gratuites une fois par semaine. Ghazir. — École de garçons des Jésuites. — Les Jésuites ont à Ghazir une école et une résidence, (blette résidence est le centre d'où les Pères visitent et dirigent les écoles de village de la montagne, dont il sera parlé plus loin. Les Jésuites ont organisé un service de six fac- teurs pour la diffusion de leur journal arabe « El Bcchir », et de quelques opuscules dont les tendances sont favora- bles à l'influence française. Ils assistent les malades et les prisonniers, s'occupent des infirmes et des sourds-muets. Ces différentes œuvres sont alimentées par des aumônes, que recueille personnellement le supérieur de la mission. Les Capucins ont à Ghazir une petite école paroissiale de garçons. Collège maronite de Saint-Louis. — Il est subven- tionné par le gouvernement français. L'enseignement y est fort médiocre; il y a, dans cette maison plus d'appa- rence que de fond . CependaMt les élèves connaissent un peu notre langue. Baabdeth. — École de garçons des Capu- cins. — 57 élèves sont répartis en deux classes; 22 d'en- tre eux apprennent un peu le français. Les Capucins entre- tiennent en outre un certain nombre d'écoles de village pour les garçons et pour les filles : on y enseigne tantôt l'arabe et le français, tantôt l'arabe seulement. 196 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE École de filles des Sœurs de la Charité de Besançon. — Les Sœurs dirigent à Baabdetli une école gratuite, où 80 élèves apprennent l'arabe et un peu le français; un externat et un pensionnat payants, divisés en deux classes : on y donne un bon enseignement primaire, en français, à 45 petites filles ; une classe enfantine de petits gar- çons. Les religieuses, mal installées, construisent une mai- son spacieuse où elles doivent transporter bientôt leurs écoles. Elles dirigent fort bien leurs œuvres et obtiennent d'excellents résultats. Elles demandent des cartes murales de géographie et des tableaux pour les leçons de choses. Phannès. Hospice pour les tuberculeux (Filles de la Charité). — Une religieuse a fait cons- truire à ses frais, dans une position magnifique, un hos- pice pour les tuberculeux. L'installation très moderne répond à toutes les exigences de Fhygiène. Les pavil- lons, isolés les uns des autres, peuvent recevoir chacun une trentaine de malades. Un dispensaire est ouvert gratuitement aux malades indigents : il est pourvu d'une salle d'opération et d'une salle de pansement. Broummana. École de garçons (Lazaristes). — Gomme beaucoup de nos écoles du Liban, celle-ci est médiocrement installée et manque des ressources néces- saires. Cette insuffisance est d'autant plus regrettable que Broummana est, dans la montagne, un centre d'action pour nos rivaux étrangers. Les Russes y ont de bonnes écoles. La mission américaine des Quakers y entretient un hôpital, un dispensaire, une école de garçons et une école de filles. Les Lazaristes ont à Broummana une « procure- ». C'est de là qu'ils partent chaque année pour faire leurs « mis- sions » dans la montagne ; c'est de là aussi qu'ils vont visiter DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 197 les iSO petites écoles gratuites qu'ils ont fondées dans le Liban. Les enfants apprennent à lire et à écrire en arabe; quand on le peut, on donne quelque argent à un maître, pour qu'il leur enseigne le français. Toutes ces écoles sont inspectées très régulièrement. Les Lazaristes les établissent de préférence dans les localités où sont installées des écoles russes ou anglo-américaines. Ils pourvoient ainsi à l'instruc- tion d'environ 5.000 enfants. Établissement des Filles de la Charité. — Il réunit les œuvres suivantes : 1) Asile d'enfants trouvés : 30 garçons, provenant de la maison de Beyrouth, sont élevés jusqu'à douze ans. On leur fait la classe en arabe et on leur enseigne un peu de français. Ils sont ensuite envoyés dans une ferme-école installée aux environs de Beyrouth ; 2) École de filles : les élèves reçoivent une instruction élémentaire en français et en arabe; elles apprennent la couture et sont formées aux travaux du ménage ; 3) Asile enfantin, fréquenté par 150 enfants; 4) Dispensaire, ouvert tous les jours; un bon médecin donne des consultations et fait les petites opérations ; 5) Hôpital, Le local existe, mais, faute de ressources et de personnel, on a été contraint de le fermer. La supérieure des Filles de la Charité songe à créer un internat de jeunes filles et un atelier de tailleurs pour les garçons de l'asile. Il serait encore plus urgent de réorganiser l'hôpital ; c'est l'avis du supérieur des Lazaristes Beit-Mery. — École française de M. Kazier. — C'est une bonne petite école primaire : les élèves parlent bien le français. 55 élèves en 1912, druses pour la plupart. Ecole des Frères de la Doctrine chrétienne. — Les Frères, qui s'accordaient mal avec la population, se sont retirés. Il ne reste plus à l'école qu'un maître indigène, 198 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE qui fait la classe en arabe à une centaine d'enfants et en- seigne un peu d'anglais à 4 ou 5 d'entre eux. Le village possède des écoles russes et américaines. Hammana. — Pensionnat de filles des Sœurs du Bon-Pasteur. — C'est un des meilleurs établissements français du Liban. Les élèves savent lire, parler, écrire en français; elles connaissent un peu l'his- toire, la géographie, les éléments des sciences; elles sont formées aux travaux du ménage. L'enseignement est bon et pratique; la tenue desjeunes filles est parfaite. — 110 élèves. Un ouvroir et un dispensaire sont adjoints au pensionnat : 1.190 malades ont été soignés gratuitement au dispensaire en 1911-1912. Écoles des Jésuites. — L'école de garçons compte 150 élèves, dont 5 apprennent un peu de français; l'école de filles, dirigée par les sœurs Mariamettes, compte 120 élèves : 12 apprennent notre langue. Les Sœurs ont installé un petit ouvroir. Le Kreye. — Orphelinat-école de la Maison Guérin. — Il est dirigé par les Sœurs de la Charité de Besançon. 100 orphelines, qui sont employées à la filature de la soie, suivent chaque jour pendant une heure une classe d'arabe et de français. Bikfaya. — Ce village, qui compte près de 5.000 ha- bitants, est, dans le Liban, le centre de l'industrie du ta- bac; on y tisse une sorte d'indienne, qui est vendue prin- cipalement en Albanie et en Macédoine. V école de garçons des Pères Jésuites est fréquentée par 143 élèves, dont 33 apprennent le français. h' école des filles, dirigée par les Mariamettes, compte 1 20 élèves. Notre langue est fort bien enseignée à 30 d'entre elles. Le noviciat-école normale^ où les Mariamettes sont pré- DES INTERETS FRANÇAIS EN ORIENT. 199 parées à l'enseignement, est un établissement bien organisé et bien dirigé. k\x pensionnat des Sœurs de la Sainte-Famille, 48 jeunes filles reçoivent une bonne instruction primaire en français et en arabe. Cette école, si elle possédait quelques res- sources, pourrait aisément se développer. Un petit dispen^ saire y est joint. Sgorta, Hasroun. — .Dans ces deux villages, les Filles de la Charité dirigent des écoles de filles très floris- santes. L'une compte 350, l'autre 215 élèves. A chaque école est adjoint un dispensaire. Deir-el-Kamar. — V école de garçons des Maristes a 2i0 élèves. L'établissement des Sœurs de Saint-Joseph comprend : un externat gratuit avec 213 élèves; les jeunes filles apprennent le français et l'arabe, les travaux manuels et le ménage; un externat payant, où l'instruction est un peu plus développée : 52 élèves; et un ouvroir. Au total 265 élèves, toutes ottomanes. Beskinta. — V école de filles des Sœurs de la Charité de Besançon compte 89 élèves, à qui le français est bien enseigné. Zahlé. — Cette petite ville, qui se développe rapide- ment, possède de nombreuses écoles indigènes et étran- gères. Le collège melchite hasilien, placé sous la direction de Tévêque, est un bon établissement d'enseignement secon- daire; on y enseigne notre langue à 218 élèves. Les écoles de l'évéché ynelchite, pour les filles et pour les garçons, réunissent 1.399 enfants. Le niveau des études y est peu élevé. Cependant les filles apprennent bien le fran- çais, sous la direction des Sœurs Mariamettes. Les Jésuites ont plusieurs écoles à Zahlé : 200 RAPPORT AU COMITE DE DEFENSE i) dans le quartier de Hara, une école primaire supé- rieure de garçons (14-4 élèves), où l'on enseigne le fran- çais, Tarabe et le turc; une école primaire de garçons (161 élèves) où renseignement n'est donné qu'en arabe ; un pensionnat de filles : 71 élèves; toutes apprennent l'a- rabe et le français; une école primaire de filles : 14-8 élèves, dont 11 apprennent le français; 2) dans le quartier de Saïdat-Ennaia, une école de filles : 196 élèves : notre langue est enseignée à 51 ; 3) dans le quartier de Quatah, une école de filles : 154 élèves; le français est enseigné à 29 d'entre elles. V école du soir est faite en français et en arabe à un cer- tain nombre de jeunes gens, groupés en deux associations. Trois associations de jeunes filles ont été fondées sous le vocable de Jeanne d'Arc : les associées travaillent ensemble pour les pauvres. De Zahlé, les Jésuites dirigent et visitent plusieurs écoles de village, où le français est enseigné, notamment celles de iMaallakat et de Baaibek. Aucune de ces écoles n'est subventionnée par le gouvernement. La mission américaine a établi à Zahlé une école de gar- çons (250 élèves) et 2 écoles de filles (environ 200 élèves) ; elle a une école de garçons à Maallakat et une école de filles à Baaibek. Les Russes sont installés à Zahlé dans le quartier ortho- doxe. Leur école de garçons compte 175 élèves, celle de filles une centaine; ils ont aussi deux écoles à Maallakat. Tanaïl. — Orphelinat agricole (Pères Jé- suites). — Dans un domaine concédé par la Porte à la suite des massacres de 1860, autrefois inculte et malsain, considérablement amélioré aujourd'hui, les Jésuites ont installé un orphelinat agricole : 50 orphelins sont exercés aux travaux des champs et reçoivent une petite instruction DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 201 élémentaire. Les pensionnaires de Tanaïl semblent avoir peu de goût pour ragriculture : la plupart, aussitôt sortis, abandonnent le métier qu'ils ont appris, pour prendre un métier sédentaire : ils se font charrons, tailleurs ou cor- donniers. Les Jésuites construisent à Tanaïl une petite école nor- male, où ils se proposent de former des maîtres pour leurs écoles de village. On y admettra des garçons de quinze ans ayant achevé leurs études primaires. La préparation durera deux ans : on enseignera aux élèves Tarabe et le français, rhistoire, la géographie, l'arithmétique, les éléments des sciences naturelles, la comptabilité et un peu d'agricul- ture. Cette nouvelle école disposant de peu de ressources, on commencera avec 12 élèves : mais on espère ensuite pouvoir en admettre un plus grand nombre. L'œuvre entreprise est fort utile et se recommande à notre intérêt. Ksara. — Observatoire des Pères Jésuites. — Ksara est situé sur la route qui mène de Zahlé à Tanaïl, à quelque distance de la station de Saad-Neil. Les Pères Jésuites y ont installé, en 1907, un observatoire. C'est le seul établissement français de ce genre, dans une région où les Allemands et les Américains déploient une activité scientifique très remarquable. Gezzine. — École des Pères Jésuites. — C'est une bonne école, où le français est enseigné. Ecole de M. Haage — Cette petite école laïque rend des services, dans une région où notre influence résiste avec peine aux efforts de la propagande que font les Russes et les Américains parmi les grecs-orthodoxes. Pas plus que je n'ai donné la liste de toutes les petites écoles de village entretenues et visitées soit par les Capu- cins français, soit par les Lazaristes, je ne puis énumérer ici toutes celles que visitent et dirigent les Jésuites dans le 202 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Liban et dans quelques autres régions de la Syrie. Ces dernières sont au nombre de 137 : 77 pour les garçons et 60 pour les filles; elles réunissent environ 10.000 enfants. Ni le nombre des écoles ni celui des élèves ne doivent faire illusion sur l'importance des résultats obtenus. Le français n'est enseigné que dans un petit nombre de ces écoles et à un petit nombre d'élèves. Toutefois cette organisation représente un effort considérable et qui mériterait d'être encouragé. Sour (Tyr). École de filles des Sœurs de Saint- Joseph. — C'est un externat, gratuit pour la plupart des élèves. L'enseignement y est excellent : les enfants parlent bien notre langue. 244 élèves. Les Sœurs ont un dispensaire et soignent les malades à domicile. En 1911, 3.783 malades ont été reçus gratuitement au dispensaire; j.118 malades ont été visités chez eux. Nous n'avons point à nous louer de l'attitude de l'é- vêque grec-catholique de Sour, qui aurait mis, dit-on, ses écoles à la disposition des missions allemandes. Saïda (Sidon). École de garçons des Ma- ristes. — 125 élèves apprennent notre langue et reçoi- vent une bonne instruction primaire. Écoles melchites du diocèse. — Elles réunissent 1.071 élèves, à qui le français est enseigné. Une petite école maronite compte 65 élèves, qui appren- nent aussi le français. Établissement des Sœurs de Saint-Joseph. — Il com- prend : une école gratuite, une école payante^ un orphe- linat : 275 élèves reçoivent un bon enseignement primaire en français et en arabe, et sont formées aux travaux manuels; un dispensaire : 1.025 malades soignés gra- tuitement en 1911-1912. La inission américaine entretient à Saïda un orphelinat DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 203 de garçons, avec une école professionnelle « pour les petits métiers ». Lattaquiéh. — École des Frères de la Doc- trine chrétienne. — Fondé en 1890, l'établissement des Frères a végété pendant trois ans, en butte aux vexa- tions de l'autorité locale. Pourvu d'un statut régulier en 1894, il n'a cessé depuis lors de faire des progrès. Il avait 20 élèves en 1894; en 1900, il en a 120. L'ouver- ture de Fécole russe le fait retomber à 70 ; mais il se re- lève bientôt après et compte aujourd'hui 159 élèves, dont 110 orthodoxes et 12 musulmans. Aux cours de l'enseignement primaire et primaire su- périeur on a ajouté en 1907 un cours de commerce, dont le programme est parfaitement adapté aux besoins du pays. On y enseigne aux élèves un peu d'économie poli- tique, de droit civil et commercial, la sténographie et la dactylographie. Le diplôme de l'école commerciale des Frères est très recherché. L'autorité ottomane est devenue très bienveillante à l'égard de l'école française, et le gouverneur de la ville assiste chaque année à la distribu- tion des prix. École de filles des Sœurs de la Sainte-Famille. — Elle est en progrès : elle avait 107 élèves en 1911; en 1912 elle en compte 131, dont 68 orthodoxes. Elle pourrait se développer encore, si les ressources ne lui faisaient totalement défaut. Nos religieux soutiennent à Lattaquié une lutte difficile contre la concurrence étrangère. La Société russe de Pa- lestine a fondé en 1900 une école fréquentée par les en- fants grecs-orthodoxes (200 élèves). Les missions protes- tantes anglo - américaines ont aussi des établissements, qu'elles entretiennent à grands frais, sans obtenir des résultats proportionnés à leurs efforts (environ 60 élèves) . 204 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Tripoli de Syrie. Écoles des Frères de la Doctrine chrétienne. — Le Collège installé à Tri- poli-Ville, compte aujourd'hui 260 élèves; V école gratuite en a 60; Vécole de Tripoli-Marine en a 160 : en tout 480 élèves, qui tous apprennent notre langue. Des cours spéciaux de commerce et d'anglais ont été institués en 1907 avec le plus grand succès. Les élèves des Frères ont leur Académie, leur bibliothèque, bien pourvue d'ouvra- ges français, et leur journal mensuel, l^Excelsior, rédigé en français. Une société amicale groupe les anciens élèves. Pour agrandir leur collège de Tripoli- Ville, les Frères ont acheté un terrain qui l'avoisinait : ils ne l'ont pas encore entièrement payé. La concurrence la plus redoutable leur est faite par la mission américaine, dont les deux écoles réunissent 115 élèves, et par la Société russe, qui donne l'instruction à 370 enfants des deux sexes. L'école italienne fondée par Crispi en 1889, transformée plus tard en école congréga- niste, a eu quelques années de vogue : elle est aujour- d'hui presque abandonnée. Maison des Fi/ les de la Charité. — L'établissement de Tripoli-Ville, fondé en 1863, comprend : un orphelinat : 100 orphelins; un groupe scolaire : 396 élèves; deux ouvroirSy pour la lingerie et la couture : 30 ouvrières; un hospice d'enfants trouvés : 30 enfants; un hôpital : 20 lits; un dispensaire, où 30.000 malades ont été soignés en 1911. La maison de Tripoli-Marine, fondée en 1898, com- prend : un groupe scolaire : 200 élèves; un dispensaire où 3.000 malades ont été soignés en 1911. Les classes de la montagne, fondées et dirigées par les Filles de la Charité, sont fréquentées gratuitement par 500 enfants. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 205 Bcherré (région de Tripoli). École de M"" Né- jeh Rahmé. — Cette école nous est devenue d'autant plus utile, que les Carmes, qui naguère enseignaient le français dans leur école de Bcherré, n'y enseignent plus que l'italien. L'école de M'^^ Rahmé compte liO élèves et mérite d'être encouragée. Cependant M. le Consul de France à Tripoli estime qu'on réunirait un plus grand nombre d'enfants, en créant une école française à Has- roNfi, où les Filles de la Charité ont déjà ouvert un petit établissement (v. plus haut). Enféh (région de Tripoli). École de M. Ga- briel Makari. — Cette école est en relation avec la mission laïque française. Le directeur, suffisamment ins- truit et très zélé, mérite que Ton encourage ses efforts. Son école est la seule que nous puissions opposer, pour le moment, à l'influence russe, très active dans cette DAMAS ÉTABLISSEMENTS FRANÇAIS Collège des Lazaristes. — L'enseig-Qement secon- daire moderne y est donné parallèlement en français et en arabe. L'étude du turc est obligatoire dans toutes les classes, celle de l'anglais dans les quatre premiers cours. Le collège compte 205 élèves, dont 85 musulmans, qui appartiennent aux premières familles de Damas, du Hau- ran et de l'Arabie. Plusieurs de ces jeunes gens vont chaque année achever leurs études en France; d'autres trouvent dans l'administration ou dans le commerce des débouchés avantageux. Le diplôme de fm d'études délivré par l'établissement équivaut au baccalauréat. Les Lazaristes dirigent en outre deux écoles primaires : celle du Midan, payante, a 200 élèves; l'école Saint-Joseph, gratuite, en a 185. Les élèves les mieux doués et les plus laborieux sont admis ensuite au Collège à des conditions de faveur. Un Cercle de jeunes gens ofiPre aux anciens élèves des jeux, une petite bibliothèque, et des conférences. Toutes ces écoles sont bonnes; le français est parlé très correctement par les élèves; l'enseignement des sciences est particulièrement développé. On désirerait un cabinet de physique, quelques revues RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 207 et journaux français pour la bibliothèque, des tableaux et des échantillons pour les leçons de choses. Collège patriarcal grec-catholique. — L'en- seignement secondaire classique est donné aux élèves par 2 professeurs français, 7 prêtres indigènes, anciens élèves du séminaire français de Sainte-Anne à Jérusalem, et plusieurs maîtresses qui ont fait leurs études dans des écoles françaises. Toutes les sciences, au collège, sont en- seignées en français. A Vécole gratuite, les élèves reçoivent une instruction élémentaire, en français et en arabe. Notre langue est partout enseignée selon de bonnes méthodes. Il y a 200 élèves au collège et 80 à Técole gratuite; 30 sont musulmans. On demande une augmentation de la subvention an- nuelle, qui permette d'engager un nouveau professeur français, laïque ou ecclésiastique. Écoles de l'Alliance israélite. — Vécole de gar- çons a été fondée en 1880. Les orphelins y sont admis gratuitement; les autres enfants payent, pour la plupart, un écolage de 1 à 2 francs par mois. Dans les classes in- férieures, on enseigne surtout l'hébreu et l'arabe; mais le français est fort bien enseigné dans les hautes classes. — 260 élèves. OEiwre d'apprentissage. — Les jeunes gens que l'école a placés chez des patrons viennent chaque soir suivre des cours de français et d'arabe. On encourage leur assi- duité par une petite subvention, et on leur remet, à la fin de l'apprentissage, une somme de 100 à 200 francs. Les cours du soir sont fréquentés par une trentaine d'apprentis. École des filles. — Elle comprend six classes et un asile enfantin. 24i petites filles y reçoivent une bonne instruction primaire. Un dispensaire est ouvert à côté de l'école. .208 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE L'xVlliance distribue chaque année des dots aux jeunes filles Israélites pauvres et méritantes (fondation du baron Stern). Écoles des Filles de la Charité. — La maison principale, située au centre de la ville, comprend : un pensionnat : 60 élèves; un externat payant : 185 élèves, qui suivent, outre leurs classes, des cours d'ouvrage ma- nuel; îin externat gratuit : 230 enfants (deux classes et un asile) ; un orphelinat de filles : 30 orphelines; on leur ap- prend le fram^ais et l'arabe, la cuisine, les travaux du ménage, et on les élève jusqu'à dix-huit ans; un j^etit col- lège de garçons ; 115 élèves, qu'on instruit jusqu'à dix ans; ils sont ensuite envoyés aux écoles des Lazaristes; un dis- pensaire : le médecin y reçoit les malades pauvres deux fois par semaine; consultations et médicaments sont le plus souvent gratuits; une œuvre d'enfants trouvés : on recueille les enfants et on les met en nourrice. L'ensemble est parfaitement organisé. L'enseignement, dans les hautes classes du pensionnat, pourrait être meil- leur; mais il est fort bon dans les classes élémentaires : 630 enfants apprennent à parler convenablement notre langue, et c'est là le point essentiel. La maison du Mldan (faubourg de Damas) a été fondée par les Filles de la Charité en 1907. 270 enfants, presque toutes grecques, y reçoivent une bonne petite instruction, en français et en arabe L'école, appartenant au Patriar- cat melchite, est gratuite pour les enfants grecs-catholiques, les orthodoxes payant un écolage de 0 francs 50 à 2 francs par mois. Toutes ces fillettes du quartier grec sont à huit ans d'ex- cellentes ménagères ; elles savent même faire le pain. Quand elles sortent de l'école à douze ans, elles sont déjà fiancées. La supérieure de la maison du Midan voudrait profiter de DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 209 la grande confiance que les parents témoignent aux Sœurs françaises, pour fonder une école professionnelle et un patronage, afin de retenir ces enfants plus longtemps et d'exercer sur elles une influence un peu plus profonde. Mais la place manque pour installer des œuvres de ce genre. Au dispensaire, on soigne gratuitement 200 malades par mois. Écoles syriennes -catholiques. — Le diocèse syrien-catholique de Damas entretient k écoles primaires, où le français est enseigné : à Damas, à Catana (garçons et filles), à Kalat-el-Djandal et à Racha!ïa. En 1912, l'évêque syrien avait essayé d'organiser à Damas une école du soir, avec des cours de français, d'arabe et de turc. Faute de ressources, on a dû fermer l'école au bout de deux mois. Il conviendrait d'encourager l'œruvre de l'évêché syrien. École des Franciscaines de Marie, à Salhiéh (faubourg de Damas). — Cette école a été ouverte en 1912, sur la demande du gouvernement français, et elle a déjà donné de bons résultats. 125 élèves se sont inscrites dès les premiers jours; il en restait 113 lors de ma visite (17 juin 1912). Dans ce nombre se trouvaient 79 musul- mans, appartenant aux meilleures familles de Damas. Ces jeunes filles ont tenu à être interrogées comme leurs ca- marades chrétiennes, et la plupart ont fort bien répondu. Le programme est celui de nos écoles secondaires; le français, l'arabe et le turc sont obligatoires; l'anglais et l'allemand facultatifs. Toutes les élèves apprennent le sol- fège et le travail manuel. Les pensionnaires sont formées aux soins du ménage. Cette nouvelle école promet de devenir l'une des meilleures écoles françaises de Damas. On demande des tableaux de lecture et le matériel néces- saire à l'emploi de la méthode Froebel. INTÉKÊTS EN ORIENT. 14 210 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE École paroissiale des Franciscains. — C'est à peine si elle mérite d'être mentionnée. École des Jésuites. — Les Jésuites ont à Damas une « résidence » ; ils ont ouvert dans leur maison une petite maîtrise pour les garçons et une école pour les filles. Hôpital français (Filles de la Charité). — Notre hôpital est bien installé, mais trop petit, et ses res- sources sont insuffisantes : chaque année se clôt par un déficit. Aussi la direction se voit contrainte de restrein- dre le nombre des admissions gratuites, et l'effet d'une pareille mesure est désastreux. 311 malades, dont 112 mu- sulmans, ont été soignés à Fhôpital français en 1911. Les religieuses ont ouvert à côté de l'hôpital une petite école, gratuite pour la plupart des élèves : elles y ensei- gnent le français à 150 enfants pauvres du quartier. Ni l'hôpital ni l'école ne reçoivent aucune subvention d'au- cun côté. La seule ressource ïwe de l'hôpital est une allo- cation de 2.000 francs, que le gouvernement français des- tine au traitement d'un médecin. Or ce médecin reçoit de l'établissement un traitement annuel de 4.000 francs. ÉTABLISSEMENTS ÉTRANGERS La mission britannique de Syrie entretient à Damas trois écoles de filles et une école de garçons. La mis- sion presbytérienne et la mission américaine ont égale- ment des écoles de garçons et de filles. Le Victoria Hospital est administré par VEclimburgh Médical Missionary Society. La Société russe de Palestine a ouvert dans le quartier grec d'excellentes écoles, que j'ai visitées. L'ensei- gnement y est donné en russe et en arabe. Une large place est faite aux jeux, aux récréations instructives, au DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 211 chant. Ces écoles m'ont semblé plus propres, plus coquet- tes et plus gaies que plusieurs des nôtres. Le directeur de l'école des garçons va introduire l'étude du français dans la classe supérieure, afin d'attirer plus d'élèves. La concurrence est très vive entre les établissements russes et les nôtres. Des deux côtés on entend exprimer les mêmes griefs; on se reproche mutuellement de recou- rir à des moyens peu licites pour attirer la clientèle ou pour la retenir. HOMS Écoles de garçons des Jésuites. — Les Jésuites dirigent à Homs trois écoles primaires, où renseignement est très élémentaire : cependant les enfants lisent et écri- vent le français. 170 élèves suivent les cours de français, 124 n'assistent qu'aux classes d'arabe. Les enfants ne pas- sent à l'école que peu d'années : la population est très pauvre, et le travail réclame les jeunes gens de bonne heure. Cependant la plupart d'entre eux sont intelligents, désireux de s'instruire, et surtout d'apprendre le français. C'est pourquoi les Jésuites voudraient ouvrir à Homs une école du soir. Le dispensaire, installé à côté des écoles, est ouvert trois fois par semaine. Un médecin le dirige, et deux infirmières religieuses y soignent les malades indigents. Vhôpital, ouvert à Tépoque de la construction du che- min de fer, est aujourd'hui fermé. Écoles de filles (Mariamettes). — Les trois écoles des Mariamettes réunissent 168 élèves, dont 37 apprennent le français. Notre langue leur est enseignée par trois Sœurs arabes, qui la parlent fort bien et ont été formées à de bonnes méthodes. On demande des cartes murales et des tableaux de lecture. Dans les deux écoles de la banlieue d'Homs et dans les écoles de village des environs, le français n'est pas en- seigné. RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 213 La municipalité de Hamali a demandé aux Pères Jésui- tes d'ouvrir dans cette ville une école française pour les garçons. Cette proposition est intéressante, et il faut sou- haiter que les Jésuites l'accueillent favorablement. Homs et Hamah sont certainement appelées à se développer et pourraient devenir, en Syrie, des centres importants d'in- fluence française. Établissements étrangers. — J^es écoles russes de Homs, très prospères, comptent 700 élèves, garçons et filles, recrutés surtout parmi les Grecs orthodoxes. Le collège de Cévéché orthodoxe, subventionné par les Russes, est installé dans un bel édifice : 80 jeunes gens y reçoivent une instruction assez complète. La mission américaine protège à Homs une petite com- munauté protestante autonome et reconnue par l'autorité ottomane. Elle l'a dotée d'une école, que fréquentent envi- ron 250 élèves, dont la plupart sont des grecs-orthodoxes. ALEP ÉTABLISSEMENTS FRANÇAIS Collège de garçons des Franciscains de Terre Sainte. — C'est un médiocre établissement d'en- seignement secondaire classique. Les méthodes sont mau- vaises, les programmes chargés de matières inutiles. On sent que les élèves sont déconcertés par la bizarrerie d'un enseignement qui leur est donné tantôt en italien et tantôt en français. Le dévouement et l'activité d'un Fran- ciscain français ne suffisent pas à neutraliser l'effort hos- tile de ses confrères italiens. Une réforme parait s'imposer. Le collège compte 228 élèves. Écoles arméniennes-catholiques. — École de garçons. — Elle est dirigée par des Frères maristes. Les programmes sont ceux de nos écoles primaires supérieu- res; l'enseignement est complété par un cours de comp- tabilité et de commerce. Cette école est excellente. — 261 élèves de toutes religions. Une école primaire gratuite compte 250 élèves, tous arméniens-catholiques , Ecole de filles. — L'enseignement y est donné par des religieuses arméniennes. — 138 élèves, qui apprennent toutes notre langue. Écoles grecques-catholiques. — École de gar- çons. — C'est une assez bonne école primaire, dirigée par RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 215 des prêtres du diocèse. L'évêque désire vivement que les Frères Maristes consentent à enseigner dans son école, comme ils le font dans l'école arménienne. — 229 élèves, qui parlent et lisent le français. École de filles. — Elle est dirigée par les Sœurs françaises de Saint-Joseph. — 71 élèves y reçoivent une très bonne instruction élémentaire, en arabe et en français. Écoles syriennes-catholiques. — Vécole des garçons est médiocre. — 18i élèves. Vécole des filles est un peu meilleure. Les Sœurs de Saint-Joseph y enseignent le français, mais ne sont pas libres d'y organiser les classes comme elles le voudraient. — 162 élèves. Écoles de l'Alliance Israélite. — La population israélite d'Alep peut être évaluée à 15.000 âmes. 1.160 en- fants fréquentent les écoles de l'Alliance. Vécole de garçons (310 élèves) comprend trois cours : élémentaire, moyen, complémentaire. L'enseignement commercial y est très développé. Tous les cours sont faits en français. Notre langue est parlée et écrite couramment par tous les élèves. Les méthodes d'enseignement sont excellentes. Vécole populaire de garçons compte 200 élèves : c'est une bonne école primaire. Vécole populaire de filles a 270 élèves, et Y école mater- nelle qui y est jointe réunit 185 enfants. En outre, FAlUance possède dans le nouveau quartier d'Alep, à Djemilié, une école de filles et une école mater- nelle (195 élèves). Dans les écoles de filles, où le français est aussi fort bien enseigné, on fait une large place aux travaux manuels, à la couture, à la coupe et à la cuisine. Une œuvre d'apprentissage analogue à celle de Damas existe à Alep; les cours du soir sont très fréquentés. On a 216 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE organisé aussi, pour les écoliers pauvres, des œuvres de nourriture et à' habillement. L'Alliance israélite, qui contribue si largement à répan- dre notre langue et notre influence en Syrie, se trouve eu butte à l'opposition du Rabbin d'Alep. Au moment où les Allemands s'installent à Alep comme en pays conquis, il ne serait pas inutile de resserrer les liens qui attachent à la France la communauté israélite, et de reconnaître les services rendus par les écoles de l'Alliance au moyen de quelques encouragements moraux : prix de français, dons de livres ou de tableaux de lecture, etc.. J'ai entendu des professeurs, dans ces écoles, se plaindre de ce que la natu- ralisation française leur fût si difficilement accordée, et de ce que des bourses fussent si rarement attribuées à leurs enfants dans les établissements français d'instruction. Écoles de filles des Sœurs de Saint- Joseph. — Les Sœurs de Saint-Joseph enseignent le français à Alep dans 7 écoles : 5 de ces écoles leur appartiennent; les deux autres dépendent des communautés grecque et syrienne catholiques. Pensionnat Saint-Joseph et orphelinat. — 104 élèves, dont 46 orphelines, y reçoivent l'enseignement primaire et primaire supérieur. Cette excellente école est fréquentée par les enfanis des premières familles d'Alep\ École de Djemilié. — 89 élèves, dont 20 musulmanes et 17 Israélites. École d'Azizié. — 162 élèves. École de Skak-el-Arbaïn. — 151 élèves. École de Slemanié. — École gratuite : 140 élèves. Si l'on ajouté les élèves qui suivent les cours de français dans les écoles syrienne et grecque catholiques, on voit que les Sœurs de Saint-Joseph d'Alep enseignent notre langue à 921 élèves. Dans toutes les écoles qu'elles diri- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 217 uent, l'instruction est fort bonne. Toutes les classes, sauf celles d'arabe, sont faites par des maîtresses françaises. Les élèves lisent et parlent le français correctement. Elles sont formées aux travaux manuels dans des oiivroirs. Le dispensaire a été momentanément supprimé. Écoles patronnées par les Pères Jésuites. — Les Jésuites dirigent à Alep une école élémentaire de garçons, ou maîtrise, qui compte 70 élèves, tous catho- liques. Ils ont confié aux Sœurs Mariamettes la direction de trois écoles populaires de filles, qui réunissent 5i0 élèves, dont 180 apprennent le français. Hôpital français. — C'est une toute petite mai- son, qui ressemble plutôt à une clinique qu'à un hôpital. L'installation est sommaire, incomplète, et ne répond nul- lement aux besoins du lieu. La supérieure des Sœurs de Saint-Joseph, qui desservent l'hôpital, a déjà acquis un terrain et réuni une somme de iO.OOO francs, en vue de construire un nouvel hôpital. Cette somme est insuffisante : il conviendrait qu'elle fût complétée au plus vite, et que nous eussions bientôt à Alep un établissement convenable. Les Allemands de la Com- pagnie du (( Bagdad », qui, pour le moment, envoient leurs malades à notre hôpital, ne manqueront pas d'en cons- truire un pour leur compte, si nous ne prenons les devants. Or nous avons grand intérêt à ce que les Alle- mands ne prennent pas à Alep trop d'importance : ils ne s'y développent qu'à nos dépens. ÉTABLISSEMENTS ÉTRANGERS Les Allemands ont à Alep une petite école, pour laquelle ils font beaucoup de propagande dans les milieux indi- 218 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. gènes, mais qui n'est fréquentée jusqu'à présent que par un petit nombre d'enfants du pays^ Ils ont ouvert depuis peu des cours du soir et une bibliothèque abondamment pourvue d'ouvrages allemands, mais qui n'est guère visitée que par les employés du chemin de fer. La colonie allemande, de plus en plus nombreuse, possède un cercle et un club de sport. Une banque allemande a établi depuis peu une succursale à Alep. Une solciété de Berlin, la « Vereinigte Elektrizitaets werke », brigue depuis longtemps la concession de l'éclai- rage et celle d'un tramway électrique. Lors de mon pas- sage à Alep, elle ne les avait pas encore obtenues. Les Allemands voient avec raison dans la ville d'Alep un des points les plus importants, non seulement de la Syrie, mais de toute la Turquie d'Asie ; les principales routes de caravane y aboutissent : c'est le point de jonc- tion entre les régions de l'intérieur (jusqu'à la Mésopo- tamie et à la Perse), et celles de la côte. Aussi l'effort des Allemands pour s'installer à Alep et y rendre leur in- fluence prépondérante se traduit-il chaque année par de nouvelles entreprises. La mission américaine subventionne les écoles et V hôpi- tal des Arméniens-Grégoriens. Cet hôpital est médiocre. Les écoles grecques-orthodoxes sont peut-être soutenues par la Société russe . Le français est enseigné dans les écoles secondaires du gouvernement et dans l'école fondée par le Comité U7iion et progrès. î. Une école de filles doit être ouverte prochainement à Alep par des re- ligieuses catholiques allemandes. ALEXANDRETTE École de filles des Sœurs de Saint- Joseph . — Cette école a été fondée en 1887 : elle comprend un pensionnat, un externat gratuit et un oiivroir. L'enseigne- ment est bon, et les élèves parlent convenablement le fran- çais. — 206 élèves, dont 122 sont reçues gratuitement. Le dispensaire, médiocrement installé, est dirigé avec un grand dévouement par une sœur pharmacienne très compétente; 3.920 malades y ont été soignés gratuitement en 1911-1912. Ce dispensaire aurait besoin d'être agrandi. Les Sœurs désireraient ouvrir une salle d'asile gratuite, pour les enfants des deux sexes ; mais il leur faudrait un personnel plus nombreux et un local approprié. Depuis que les Carmes d'Alexandrette ont passé à l'Italie, les Sœurs de Saint-Joseph ont ouvert une classe de petits garçons. Projet d'une école de garçons. — Lorsque les Carmes abandonnèrent notre protectorat pour réclamer la protection de l'Italie et substituèrent l'italien au français dans leur école de garçons, la femme de l'Agent consulaire de France ouvrit elle-même une école, où elle enseigna pendant un an les garçons d'Alexandrette, assistée du directeur de l'agence de la Banque Ottomane. Les Frères de la Doctrine chrétienne n'avaient pas man- qué d'offrir leurs services, aussitôt après la défection des Carmes. Mais ils se heurtèrent d'abord à l'opposition de l'autorité ecclésiastique. On dut alors rappeler au Délégué 220, RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE apostolique de Syrie que l'école de garçons d'Alexandrette avait appartenu pendant treize ans aux Sœurs françaises, et que c'étaient les Sœurs françaises qui en avaient ensuite confié la direction aux Carmes. Les Frères, après beau- coup de difficultés, obtinrent l'autorisation qu'ils deman- daient. Ils ont acheté un terrain et bâtissent un collège, qu'ils espèrent pouvoir ouvrir à l'automne de 1913. En attendant, ils font la classe aux garçons dans une maison qu'ils ont louée. Procure de Terre Sainte. — La procure de Terre Sainte d'Alexandrette est placée sous notre protectorat, comme tous les établissements de la Custodie. Le Francis- cain italien qui tient l'emploi de procureur est très nette- ment hostile à l'influence française; il a contribué, pour sa part, à détacher de nous les Garnies pour les amener à l'Italie. L'Agent consulaire de France souhaite vivement de voir nommer à la procure d'Alexandrette un Franciscain français, qui puisse servir d'aumônier aux Frères de la Doctrine chrétienne et aux Sœurs de Saint-Joseph. Il n'y a pas d'apparence que ce vœu soit réalisé. Le procureur m'a remis la liste des écoles que les Fran- ciscaines dirigent dans le vilayet d'Alep. Le français est enseigné dans les écoles d'Aintab et de Marache; dans les autres écoles, on n'enseigne que l'arabe. Concurrence étrangère. — Les Italiens possèdent désormais deux écoles à Alexandrette : l'école de garçons des Carmes, l'école de filles des Carmélites. On peut prévoir que les Allemands ne tarderont pas à s'y établir à leur tour. BEYLAN École arménienne-catholique. — Elle est dirigée par le Curé, homme intelligent, actif et qui paraît très DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 221 dévoué à nos intérêts. 60 garçons et 50 filles y apprennent le français. Les Carmes italiens, qui possèdent une école à Beylan, avaient entrepris de gagner à leur cause le prêtre arménien. Celui-ci s'est dégagé fort habilement et a bâti lui-même une petite école et une chapelle, qui sert de paroisse à la communauté arménienne-catholique. Les Car- mélites italiennes ont aussi à Beylan une école de filles. Cette école, comme celle des Carmes, était fermée lors de mon passage en raison de la guerre. Toutes deux ont sans doute été rouvertes depuis. ANTIOCHE École de garçons des Capucins. — Dans un milieu très difficile, les Capucins français ont réussi à établir une bonne petite école, où 60 élèves reçoivent l'en- seignement primaire en français et en arabe. Pour faire concurrence aux écoles anglaises, les Pères ont ouvert eux- mêmes un cours d'anglais. L'école est pauvre et absolu- ment dépourvue de cartes géographiques et de tableaux de lecture. La plupart des élèves sont reçus gratuitement. L'école française d'Antioche date de 18i6. Établissement des Soeurs de Saint-Joseph. — Les Sœurs de Saint-Joseph dirigent à Antioche une l'cole payante, une école gratuite, une classe enfantine et un orphelinat f où 15 enfants ont été recueillis après les massacres d'x\dana. Les élèves parlent un peu le français. L'établissement est modeste, mais fort bien tenu, et mérite tout notre intérêt. On demande des cartes et des tableaux de lecture. — Environ 100 élèves. Concurrence étrangère. — La mission anglaise entretient des écoles où l'on n'enseigne que l'anglais. Une école a été fondée par la communauté grecque-orthodoxe : 222 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. bien que les maîtres soient pour la plupart d'anciens élè- ves des Capucins français, cette école est plutôt hostile que favorable à notre influence. KODERBEK Écoles des Capucins. — Koderbek est un impor- tant village situé à 30 kilomètres d'Antioche. Les Capucins français s'y installèrent en 1892, pour essayer de combattre l'influence de la mission anglicane : ils y ont en partie réussi. Les trois écoles gratuites qu'ils ont ouvertes pour les garçons réunissent 140 élèves; V école de filles en compte une trentaine. Les Capucins ont aussi deux petites écoles à Abey et à Saïma. Cette région étant privée de tout secours médical, nos religieux ont établi à Koderbek un petit dispensaire, où 10.000 malades ont été soignés en 1911. OBSERVATIONS RELATIVES A L'INFLUENCE ET AUX INTÉRÊTS FRANÇAIS EN SYRIE Influence française et influences étran- gères. — Bien que nous possédions en Syrie quelques centres d'influence très actifs et admirablement organisés, comme Beyrouth sur la côte, Antoura dans le Liban, et Damas dans l'intérieur, noire situation en ce qui concerne les écoles, la prédominance de notre langue et notre pres- tige moral sont loin d'être également assurés dans toutes les parties de la Syrie. Nous avons quelques établissements d'enseignement supérieur et secondaire qui sont excel- lents; mais les écoles primaires, qui importent surtout, sont de valeur très variable. Même en tenant compte du fait que la population des montagnes de Syrie, est, en général, moins intelligente et moins ardente à l'étude que celle des plaines de l'intérieur, on ne peut pas ne point attribuer pour une part l'infériorité des résultats obtenus en Syrie à la moindre qualité des efforts de ceux qui enseignent. Nos compatriotes m'ont paru portés, en Syrie, à consacrer tous leurs soins aux écoles supérieures, où l'enseignement dépasse souvent la portée moyenne de l'esprit des élèves et presque toujours leurs besoins, et à négliger les écoles élé- mentaires, qui constituent pourtant notre moyen d'influence le plus puissant et le plus indispensable. Je ne reviendrai pas ici sur la médiocrité de la plupart de nos écoles du Liban; mais je dois avouer qu'en visitant les écoles populaires, les écoles gratuites de Beyrouth, de Damas ou d'Alep, j'ai souvent souhaité d'y rencontrer une connaissance de notre 224 RAPPORT AU COMITE DE DEFENSE langue aussi générale et aussi pratique que celle que j'a- vais trouvée parmi les enfants d'Orfa, de Mossoul ou de Bagdad. Nos écoles élémentaires sont innombrables en Syrie : on pourrait croire, à en parcourir la liste, que notre langue est connue et parlée jusque dans le moindre vil- lage. C'est une illusion. Dans certaines parties du Liban, où notre influence passe pour être prépondérante, l'anglais est certainement plus connu que le français; sur quelques points de la côte, lïtalien fait des progrès rapides. Ailleurs nous conservons les positions acquises, nulle part nous ne gagnons du terrain : nos adversaires s'en aperçoivent et ils redoublent leurs efforts. J'ai indiqué çà et là, au cours de ce chapitre, par quels moyens et dans quelle mesure ces efforts ont abouti. Je crois utile, en terminant, de jeter un regard d'ensemble sur la situation qu'occupent aujourd'hui en Syrie les principales missions étrangères. I. — Les missions protestantes, américaines et britanni- ques (anglaises, irlandaises ou écossaises) sont très solide- ment établies sur la côte syrienne, dans le Liban et à Damas. Elles sont devenues propriétaires de grands domaines à Beyrouth, à Saïda, à Souk-el-Gharb, et cette circonstance n'apaspeu contribué à accroître le prestige dont elles j ouïssent auprès des indigènes. « L' American Presbyterian Mission » a ses principaux centres à Beyrouth, Tripoli, Zahié et Saïda : elle donne l'instruction à 5.000 enfants. Les « Pres- bytériens réformés » ont leur siège à Lattaquiéh, les Irlan- dais à Damas, les Écossais à Choueir, les Quakers à Broum- mana. « L'English Ghurch » est établie à Beyrouth et à Damas. Il y a dans le Liban 60 écoles anglo-américaines, qui réunissent environ 3.000 élèves. II. — L'influence de la Russie avait notablement diminué à la suite de la guerre avec le Japon. Les Grecs-ortho- doxes, qui forment en Syrie la clientèle ordinaire des Russes, DES INTERETS FRANÇAIS EN ORIENT. 225 se tournèrent alors du côté des Anglais. Mais ce mouve- ment a été bientôt enrayé par les efforts de la Société russe de Palestine, qui a créé des écoles nouvelles et augmenté les subventions aux écoles des communautés grecques. Les Russes sont établis à Beyrouth, à Homs, à Beskinta, à Tripoli, à Lattaquiéh et à Damas. Ils instruisent de 2.000 à 3.000 enfants. m. — L'influence allemande s'exerce à la fois par des œuvres catholiques et par des œuvres protestantes. Ses deux centres d'action sont Beyrouth et Caïffa. IV. — L'influence italienne, arrêtée dans son dévelop- pement par la guerre de Tripolitaine, est appelée, après le succès des Italiens, à faire de rapides progrès. Les écoles laïques fondées par Grispi en Palestine et en Syrie avaient donné de médiocres résultats. Elles ont été transformées depuis en écoles congréganistes, et, comme telles, sont devenues des moyens d'action très efficaces. L' « Associa- tion nationale des Missions » dispose de ressources consi- dérables; les religieux qu'elle emploie, Salésiens, Carmes, Sœurs d'Ivrée, Carmélites, etc.. peuvent compter le plus souvent sur la faveur particulière des autorités catholi- ques et tirent de l'appui qui leur est ofïert un parti fort avantageux. Peut-être n'avons-nous pas aujourd'hui en Syrie et en Palestine d'adversaires plus acharnés et plus redoutables que les Italiens. Telle est, résumée à grands traits, la situation de nos rivaux; la nôtre a été exposée en détail au cours de ce chapitre. La conclusion qui s'impose, c'est que nous devons, plus que jamais, nous attacher à développer et à perfec- tionner en Syrie nos œuvres d'enseignement. L'influence française ne peut rester stationnaire : si elle ne fait pas de progrès, elle déclinera^ et nous ne reprendrons jamais ce que nous aurons perdu. INTÉRÊTS EN ORIENT. 15 226 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE Culture littéraire et enseignement scienti- fique en Syrie. — Plusieurs chefs détablissements fran- çais, des plus compétents et des plus expérimentés, ont attiré mon attention sur la nécessité de développer dans nos écoles de Syrie l'enseignement scientifique. Jusqu'à présent, la culture des Orientaux a été surtout littéraire. Or, dans ces derniers temps, les besoins du progrès maté- riel ont commencé à se faire sentir, surtout dans les régions où les indigènes se trouvent en contact avec les Européens. Les Orientaux ont aujourd'hui le sentiment que leur pays n'est pas exploité, qu'il devrait l'être, et qu'ils auraient tout intérêt à contribuer eux-mêmes à sa mise en valeur. Depuis cinq ans, on voit d'anciens élèves du collège d'An- toura partir pour Lille, pour Grenoble, pour Montpellier ou pour Nancy : ils vont étudier le génie, l'agriculture, l'électricité. Les préventions et les préjugés d'autrefois sont tombés peu à peu : un état d'esprit nouveau s'est créé, dont il faut tenir compte. Un enseignement plus sérieux des sciences offrirait aux jeunes gens des débouchés nom- breux et les rendrait aptes à travailler eux-mêmes au déve- loppement de leur pays. L'enseignement des sciences devrait être donné dans nos écoles sous une forme simple et pratique : les jeunes Syriens recherchent dans tout ce qu'ils apprennent la possibilité d'une a pplication immédiate , d'un profit. Qu'on leur enseigne donc ce que doivent savoir un bon mécanicien, un électricien, un chef d'atelier, un contremaître. Qu'on adapte- à l'usage du pays l'organisation et les programmes de ces écoles professionnelles, de ces ({ technikums » suisses. La culture littéraire ne souffrira pas de ce plus grand développement donné à l'enseigne- ment scientifique, car le goût des lettres est inné chez les Syriens et fait partie du génie même du pays. Ces réflexions autorisées, que je me borne à reproduire, DES INTERETS FRANÇAIS EN ORIENT. 227 m'ont paru confirmer singulièrement mes propres obser- vations. Le projet d'une École de Droit à Beyrouth'. — L'université de Lyon a formé le projet, que les Jésuites ont approuvé et encouragé, de créer à Beyrouth, à côté de la Faculté de médecine, une École de droit : ainsi, serait complétée l'université française de Beyrouth. Lue mission est allée étudier sur place, en 1912, les conditions dans lesquelles ce projet pourrait être exécuté. Les partisans du projet font valoir les aptitudes natu- relles des jeunes Syriens et leur formation intellectuelle, plus littéraire que scientifique ; ils insistent sur les avan- tages pratiques qu'offrirait la connaissance du droit aux jeunes gens de certaines classes sociales. A côté des cours préparatoires à la licence française, on organiserait un enseignement spécial, qui permit aux étudiants d'obtenir un « diplôme ottoman » équivalant au diplôme délivré par l'école de droit de Coustantinople. 11 me semble que ce projet soulève quelques objections. Entre le droit musulman et le droit français, il y a sans doute quelques analogies, mais il y a surtout des diffé- rences profondes. L'étude du droit français, isolée de celle du droit romain, est incomplète et peu rationnelle : or on ne prétend pas imposer aux jeunes Syriens l'étude du droit romain, dont ils n'auraient que faire. On ne voit pas bien pourquoi nous irions choisir, pour l'enseigner à des Orien- taux, la science la moins universelle, la plus spéciale dans ses théories comme dans ses applications. Pense-t-on que les jeunes gens de Syrie viendront étudier le droit à notre école pour devenir avocats ou 1. Ce projet est aujourd'hui réalisé. On ne juge pourtant point inutile de faire connaître au Comité les observations qu'il avait soulevées d'abord de la part de personnes compétentes et dévouées aux intérêts français. 228 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE magistrats dans leur pays? ce n'est pas vraisemblable. Ils chercheront bien plutôt à s'initier aux connaissances qu'ils pourront utiliser pratiquement dans les transac- tions entre Européens et indigènes; nous augmenterons en Syrie le nombre des agents d'affaires, des entremet- teurs plus ou moins louches, comme nous l'avons augmenté en Egypte. Ne vaudrait-il pas mieux consacrer les ressources que nécessiteraient la création et l'entretien d'une institution aussi coûteuse qu'une école de droit, à fonder quelques écoles professionnelles, quelques technikums, où seraient formés les auxiliaires instruits et habiles dont tous les chefs d'entreprise sentent aujourd'hui le besoin? De telles institutions rendraient plus de services et répondraient mieux qu'une école de droit aux besoins d'un pays où l'on construit des routes et des chemins de fer, où l'on exécute de grands travaux d'irigation, où l'on va peut-être exploiter des mines ^. Aux jeunes gens qui sortiraient de ces écoles pratiques, les débouchés ne manqueraient point : ceux qui sortent de notre école de médecine sont souvent contraints de quitter la Syrie, pour aller exercer ailleurs le métier qu'ils ont appris, ou même de renoncer à l'exercer utilement; dans un cas comme dans l'autre, à notre point de vue, le résultat est manqué. La question d'un journal français en Syrie. — Il y a en Syrie 50 journaux quotidiens, 15 feuilles heb- domadaires, 20 revues mensuelles ou trimestrielles. De ces 85 organes, la moitié est dirigée par des musulmans ; l'autre moitié est entre les mains des Druses, des Grecs 1. L'Université de Lyon, sans renoncer à son projet de créer à Beyrouth une école de droit, l'a du moins très utilement complété en décidant aussi l'ouverture prochaine, dans celle même ville, d'une école professionnelle d'arls et métiers. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 229 orthodoxes ou catholiques, et des Marooites. Beyrouth est le centre de ce grand mouvement de publicité. La presse musulmane est surtout religieuse : les comités dont elle est l'organe cherchent à répandre l'idée panis- lamique, à faire une propagande xénophobe en général, et antifrançaise en particulier. Sous Tinflucnce des Jeunes Turcs, la presse musulmane a multiplié les attaques contre la France, sa politique, son gouvernement, et les flatteries envers l'Allemagne, son armée et son empereur. Plusieurs journaux musulmans de Syrie entretiennent à Berlin des correspondants. Au cours de ces dernières années^ la presse musulmane a mené une campagne très vive contre notre politique africaine : on dénonçait la « misérable situation des Algé- riens », les (( usurpations de la France au Maroc », les actes arbitraires et injustes commis par les fonctionnaires français en Tunisie, etc.; etc.. Au moment de la guerre de Tripolitaine, on a représenté la France comme étant « l'ins- piratrice de l'agression italienne ». Les journaux de Damas, de Tripoli, de Lattaquiéh, faisaient écho à ceux de Beyrouth. Parmi les journaux musulmans de Syrie, 18 peuvent être considérés comme germanophiles, 2 comme favo- rables à l'Angleterre. Quant aux journaux chrétiens, 5 sont de tendance allemande, 6 de tendance russe, 3 de tendance anglaise, 4 de tendance française. L'inspiration de ces journaux varie d'ailleurs suivant les circonstances : c'est ainsi qu'un journal de Beyrouth, subventionné par le consulat italien, est devenu italophobe et a continué de l'être tant (ju'a duré la guerre de Tripolitaine. Le journal bi-hebdomadaire des Jésuites, El Béchir, est nettement français, mais il est aussi nettement clérical; quant aux trois journaux dirigés par des protégés français, le Réveil, El Sabat, à Beyrouth, et les Cèdres à Jouniéh, 230 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE ils tirent à un petit nombre d'exemplaires et n'exercent que peu d'induence. Au contraire, les journaux chrétiens de tendance allemande sont très répandus, bien informés et s'occupent activement de défendre les intérêts de l'industrie et du comme: ce germaniques. Le besoin se ferait sentir d'un journal de langue arabe et de tendance française, qui dépendit dans une certaine mesure de notre consulat et soutint efficacement nos divers intérêts. L'arclievêque maronite de Beyrouth a élaboré un projet qui m'a paru fort pratique et dont nous pourrions favoriser la réalisation. Toutefois un tel journal ne peut réussir que s'il est bien informé : et nous touchons ici à une autre question fort importante. Toutes les nouvelles qui parviennent en Syrie ou en Palestine sont de source anglaise ou ottomane : et, dans la source ottomane, les infiltrations allemandes sont laciles à recoimaitre. Les feuilles fle VAgence Reuter sont expédiées par la poste de Port-Saïd à Jérusalem, à CaïlTa, à Beyrouth, etc.... Les dépêches de VAgence télégra- phique ottomane y parviennent directement et par télé- graphe. Ces dernières sont fort tendancieuses, et l'inspi- ration allemande s'y manifeste souvent de la façon la plus grossière. Elles sont reproduites dans tous les journaux, affichées en français dans les bureaux des maisons de banque et de commerce, dans les hôtels, dans les cercles; notre prestige et nos intérêts subissent de ce fait un réel dommage. Un journal arabe d'inspiration française pourra rendre des services en Syrie; mais il ne sera utile qu'à la condition d'être directement informé; et ce qu'il importe- rait de créer tout d'abord, c'est un service télégraphique, qui transmette en Orient des nouvelles exactes, suscep- tibles d'être opposées en temps utile aux nouvelles ten- dancieuses que les agences étrangères y répandent. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 231 Les émigrants algériens en Syrie. — Damas est le centre d'un mouvement créé et entretenu par les émigrants algériens pour « dénoncer les abus et les injus- tices » de Tadministratiou française en Algérie. Un certain nombre de Syriens musulmans ont pris fait et cause pour leurs coreligionnaires algériens. Ce groupe possède des journaux, organise des réunions et se livre à une propa- gande dangereuse en elle-même et que nos adversaires ex- ploitent contre nous. Durant mon séjour à Damas, j'ai reçu la visite de Mohamed ben Toukami Ghatta, qui s'intitule « délégué des émigrants algériens ». Il m'a longuement exposé ses doléances. Soit aux propos qu'il m'a tenus, soit à d'autres indices, j'ai cru reconnaître que nous ne nous étions pas toujours assez préoccupés de prévenir certains inconvénients, et que notamment l'incident de Kérak, ridiculement gonflé par une certaine presse fran- çaise, avait donné prétexte à critiquer notre politique et la conduite de nos agents. On s'aperçoit, en Syrie comme ailleurs, qu'il est indispensable à la France d'avoir une politique musulmane, mûrement étudiée et réfléchie, et non pas improvisée et incohérente. L'exemple que don- nent les Pays-Bas mériterait d'être connu et médité. Questions libanaises. — Je n'ai pas à m'occuper ici de la question proprement politique : réforme du statut libanais. Lorsque j'ai passé dans le Liban, elle faisait l'ob- jet de toutes les conversations. Les Libanais, comme beau- coup d'Orientaux, ne comptent que sur les autres pour améliorer leurs affaires et attendent tout de l'intervention de quelques gouvernements étrangers qu'ils opposent volontiers les uns aux autres. Ils sont portés à s'exagérer l'importance de tout ce qui se passe chez eux, et à faire de la moindre question libanaise une question européenne. Il convient toutefois de reconnaître qu'ils ont toutes raisons 232 RAPPORT AU COMITÉ CE DÉFENSE de se plaindre de la mauvaise administration ottomane. Il m'a paru qu'ils attachaient un grand prix à celle de leurs revendications qui concernait l'ouverture des ports de.lou- niéh et de Nebi-Ounès, et que la Porte a d'ailleurs admise. L'ouverture de ces deux ports aura pour unique avantage de soustraire les émigrants libanais aux vexations et aux exactions des fonctionnaires ottomans du port de Bey- routh. Situation économique. — La situation économique des habitants du Liban est très misérable. La montagne se déboise de plus en plus :• on compte les cèdres, et les noyers, autrefois recherchés, se font rares. La production en céréales ne suffit pas à nourrir la population, qui en est réduite à tirer ce qui lui manque des plaines de la Béka et du Hauran. Les régions limitrophes produisent du grain en abondance; mais les moyens de transport font défaut. Un peu de vigne, un peu d'olivier, dont le produit est acheté pour les savonneries d'Egypte, et c'est, avec le mûrier, toute la culture du Liban. La production du cocon, pendant quelques années, n'a cessé d'augmenter, tandis que celle de la soie diminuait. Ce n'est pas que le cocon de Syrie ne soit de bonne qualité : il peut être comparé au meilleur cocon de France ou d'Italie, et s'écoulerait facilement, soit à Marseille, soit à Milan. Mais la main-d'œuvre indigène est peu productive; la filature a fait en France et en Italie des progrès que celle du Liban ne peut pas suivre. Si l'on ajoute que l'argent en Syrie est rare et fort cher, et que le prix de vente de la soie est peu rémunérateur, on comprendra les causes de la crise actuelle. Au début, les Libanais avaient planté du mûrier partout où ils avaient pu : aujourd'hui, sur plusieurs points, ils commencent à l'arracher. Parmi les filateurs français établis en Syrie, il convient DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 233 de citer : la maisou Guérin, de Lyon, dont les filatures passent pour des modèles, les maisons Portalis, Malpertuis et Bourgue. Les Sœurs de Charité ont à Tripoli un petit atelier; on trouve enfin dans le Liban un certain nombre de filatures indigènes. Les fabriques d'étoffes de soie de Beyrouth et de Damas sont de médiocre importance : il n'en sort guère que des articles assez grossiers, à l'usage exclusif des gens du pays. L'opinion la plus générale est que la culture du ver à soie ne peut atteindre dans le Liban qu'un développement très limité; quelques-uns même esti- ment qu'elle est déjà sur son déclin. Quant aux richesses que contiendrait le sous-sol du Liban, il est impossible de les évaluer, même d'une manière approximative. Quelques petits gisements de charbon sont exploités par les indigènes; on parle de mines d'antimoine, de plomb argentifère et de manganèse. Mais jusqu'à pré- sent, aucune faculté d'exploitation n'a été concédée. Emigration. — Les Libanais, découragés par la pau- vreté du sol, et par les procédés vcxatoires de l'adminis- tration, émigrent en grand nombre, soit en Egypte, soit en Amérique. Cette émigration a pour conséquence de diminuer encore les forces économiques du pays. Cer- taines parties du territoire, qui pourraient être cultivées, ne le sont plus. Plusieurs grands villages de la montagne ne sont plus habités que par des femmes, des enfants et des vieillards : tous les hommes capables de travailler ont quitté la montagne. Ils y reviennent quelquefois, et, s'ils rapportent quelque argent, leur exemple entraine de nouvelles défections. Dans les villages du Liban, les écoles anglaises et amé- ricaines sont de plus en plus fréquentées : dans celles que dirigent nos religieux, l'anglais est étudié autant et peut- être plus que le franf*ais : tous les parents veulent mettre 234 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE leurs enfants en état d'aller gagner leur vie aux États- Unis ou en Egypte. Notre influence et notre prestige dimi- nuent d'autant, tandis que la langue et l'influence de l'An- gleterre font de rapides progrès. On entend les Libanais vanter, comme un bienfait de l'Angleterre, la très large tolérance religieuse dont jouissent en Egypte les émi- grants de toute race et de toute confession. On ne dis- tingue guère, dans la montagne, entre l'Angleterre et l'A- mérique, et lorsque des émigrants reviennent au pays avec quelques épargnes, on admire la richesse de l'Angleterre. Vœux du Patriarche maronite. — Le Patriarche maro- nite, lors de la visite que je lui ai faite (29 juin 1912), m'a prié de transmettre au Comité les demandes suivantes. Il désire : 1^ qu'une chapelle soit afl'ectée au culte maro- nite à Paris. La chapelle du Petit-Luxembourg, qui avait été réservée aux Maronites, leur a été retirée il y a déjà quelque temps ; 2*^ Qu'on rétablisse les bourses que le gouvernement français avait autrefois attribuées aux Maronites pour le Séminaire de Saint-Sulpice , en les affectant à d'autres établissements du même genre; 3° Qu'on institue au Consulat français de Beyrouth un drognian maronite, qui assure entre le Patriarcat et ce Consulat des relations directes et continues. Le Patriarche, qui témoigne des sentiments très favo- rables à l'égard de la France, a fort insisté pour qu'il fût fait droit à ses demandes. Les banques étrangères en Syrie. — X^d. Banque Ottomane, jusqu'à ces dernières années, n'avait pas ren- contré en Syrie de concurrence sérieuse. On trouve aujour- d'hui à Beyrouth une succursale de la Deutsche Palaestina Bank et un comptoir de Y Anglo-Palestine Bank; la Banque de Salonique a ouvert aussi une succursale à Bey- DES INTERETS FRANÇAIS EN ORIENT. 235 roiith. J^a concurrence ainsi créée a eu pour résultat un abaissement du taux de l'escompte, dont le commerce local a profité. Les ports syriens. — Le port de Beyrouth est de dimension restreinte. Si son commerce de développait, il serait indispensable de l'agrandir. Mais il y a peu d'ap- parence que cette nécessité s'impose. La position même de Beyrouth est défavorable : les marchandises de l'inté- rieur doivent traverser deux hautes chaînes de montagne, l'Anti-Liban et le Liban, pour atteindre le port; aussi déri- veront-elles naturellement soit vers Gailfa, soit vers Alexan- drette. Le gouvernement français a demandé récemment la concession des deux ports de Caïffa et de Tripoli. Tous deux peuvent avoir quelque avenir. Le port de Tripoli, relié au chemin de fer Reyak-Alep par Tembranchement Tripoli-Homs, serait un débouché assez naturel pour les marchandises provenant de Mésopotamie, Homs étant encore aujourd'hui le point de départ et d'aboutissement de nombreuses caravanes. Reste à savoir dans quelle mesure l'ouverture de la ligne du « Bagdad » modifiera cette situation. Mais le port le plus important de toute la côte, celui vers lequel afflueront les marchandises de la Syrie et de la Mésopotamie, c'est Alexandrette. Ce n'est pas ici le lieu de rappeler par quelle série de manœuvres les Alle- mands se sont rapprochés d'abord, puis emparés de ce point de la côte syrienne, qu'ils convoitaient depuis si longtemps. On ne peut que déplorer la légèreté avec la- quelle nous les avons laissés faire. x\lexandrette nous était nécessaire; nous avons commis une grande faute en per- mettant à d'autres de s'y installer. C'était un spectacle d'une ironie bien amère, pour un Français, que l'inau- 236 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE guration des travaux du port d'Alexandrette : les trois discours de Tingénieur allemand, du gouverneur et du délégué ottoman furent prononcés dans notre langue, la seule qui permît aux orateurs de se faire entendre des assistants ! Les travaux présentent de grandes difficultés. Les ter- rains voisins de la côte sont marécageux et malsains. On a dû les assécher et les empierrer sur une étendue consi- dérable. L'établissement du port sera coûteux et pénible; mais les Allemands seront dédommagés largement de leur dépense et de leur peine. Alexandrette, reliée à Alep par Toprak-Kaleh et Osmaniéh, deviendra en peu de temps le premier port méditerranéen de la Turquie d'Asie. Son importance actuelle est déjà considérable : en 1911, 890 ba- teaux y sont entrés, représentant un total de 556. 94-0 tonnes. Dans ce mouvement la France figure avec 26 vapeurs (60.155 t.), l'Autriche avec 55 (105.086 t.), la Russie avec 95 (127.288t.) etrAngleterreavec 133 bâtiments (161.371 1.). Les chemins de fer syriens. — Il serait trop long d'énumérer ici toutes les fautes que nous avons commises en Syrie, en ce qui concerne les demandes de concession, la construction et l'exploitation des voies ferrées. Je me bornerai à en indiquer quelques-unes, dont les conséquences m'ont plus particulièrement frappé. La ligne Beyrouth-Damas a été établie suivant un projet mal conçu, mal étudié et déterminé par de fâcheuses influences. De Beyrouth à Damas, la ligne est à crémail- lère et à voie étroite; les marchandises qui proviennent d'Alep ou qui y sont destinées doivent être transbordées à Reyak. Les machines les plus puissantes ne peuvent traîner sur la ligne à crémaillère qu'un tout petit nombre de wagons. Le service est insuffisant : les marchandises s'accumulent à Reyak, au risque de se détériorer et de DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 237 se perdre. Pour ol)tenir de la gare de Beyrouth quelques wagons nécessaires au transport du charbon, il faut les demander un mois à l'avance. On voudrait recourir au roulage. Mais la route Damas-Beyrouth, rétrocédée au gouvernement ottoman depuis l'ouverture- du chemin de fer, n'est presque plus entretenue et ne peut servir aux transports. La contrée n'a plus de route carrossable, et elle est très insuffisamment desservie par la voie ferrée. Les populations mécontentes attribuent tout le mal à la Compagnie du chemin de fer, et, en lin de compte, c'est l'influence française, c'est le prestige de la France qui sont atteints dans cette affaire et qui en sortent diminués. Le prolongement de la ligne Alep-Beyak jusqu'à Caïffa, à travers la plaine de la Béka, remédiera en partie à cette fâcheuse situation. L'embranchement Homs-Tripoli en a déjà atténué quelque peu les inconvénients et les atténuera davantage, lorsque le port de Tripoli sera cons- truit. Resterait à joindre par une voie ferrée Tripoli et Bey- routh. La concession a été accordée il y a longtemps. Un tramway a été établi, partant de Beyrouth : 20 kilomètres restent à construire pour qu'il aboutisse à Tripoli. On ne les construit pas, et Ton met en action toutes les influences dont on dispose à Constantinople, pour obtenir des délais ou même l'autorisation de ne pas achever la ligne dont on a obtenu la concession. Il en a été de même autrefois pour la ligne Reyak-Hamah; pour construire la ligne Homs- Tripoli, dont nous avions obtenu, puis abandonné la con- cession, il a fallu payer aux Allemands une indemnité d'un million. La ligne Reyak-Biredjik, demandée et obte- nue par une société française, était ensuite rétrocédée par elle en partie aune compagnie allemande. « En Syrie, — me disait quelqu'un qui suit depuis longtemps notre poli- 238 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE tique, — les Français usent leur temps, leur argent et leur influence à empêcher les choses de se faire ». L'entreprise française des routes. — L'histoire de l'entreprise des routes offre encore quelques preuves à l'appui de cette assertion. Il y a quelques années, se cons- tituait à Paris un vaste consortium sous le nom de « So- ciété générale d'entreprises dans l'Empire ottoman ». La « Banque française pour le commerce et l'industrie », la maison Giros et Loucheur, la « Société des Grands Tra- vaux » de Marseille étaient entrées dans cette affaire. L' « entreprise des routes » en forme un département. Dans le neuvième lot étaient comprises certaines routes de Syrie et de Mésopotamie, que la Société devait réparer ou construire : Route d'Alep à Alexandrette, par Beïlan : 153 kilom. Route de Payas vers Adana. ...... 30 — Route de Killis - Aïntab- Biredjik - Orfa- Suerek 25i — Route d'Alep-Zor-Aboukemal-Hit-Ramadi- Feloudja-Bagdad 873 — Total 1.310 kilom. Le haut personnel de l'entreprise est exclusivement fran- çais; le personnel auxiliaire est recruté parmi les indi- gènes. L'entreprise a installé à Alep, siège de la division, de grands bureaux et de vastes magasins : l'installation et le matériel représentent une valeur de plus de 200.000 fr. La main-d'œuvre indigène est bien traitée par le person- nel; on ne signale ni plaintes ni bagarres, et les chantiers français offrent un heureux contraste avec les chantiers allemands de la Bagdadbahn. Le personnel entreprend en 1910 les études de la route d' Alexandrette. Un hiver très rigoureux et les exigences DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 239 d'un contrôle peu bienveillant retardent les travaux. Bientôt on s'aperçoit que le personnel a été recruté un peu légèrement, et qu'il n'a point l'expérience suffisante. L'ingénieur en chef le licencie et le remplace par un per- sonnel plus compétent. Les travaux sont poussés plus activement, et, au mois de juin 1912, les études étaient faites jusque vers Beïlan (km. 125). Le 10 juin, on com- mençait les travaux de construction. Malheureusement, l'hostilité du contrôle allait en s'accentuant ; des rivalités éclataient entre les ingénieurs de l'entreprise et l'ingénieur français adjoint à l'ingénieur en chef du vilayet, lequel est ottoman , et la construction de la route d'Alexan- drette subit des retards considérables. Tout le monde était d'accord sur l'utilité de la route projetée entre Alep et Bagdad par la vallée de l'Euphrate. Les études en sont poursuivies à grands frais. Un ingénieur français s'établit à Biredjik et y séjourne pendant de longs mois, pour déterminer les conditions du pont sur lequel la route doit franchir l'Euphrate. La présence d'ingénieurs français dans cette région, où déjà les ingé- nieurs allemands ont prétendu s'établir en maîtres, pro- duit le meilleur efïet sur les indigènes. Tout à coup, on apprend que les travaux sont arrêtés, — provisoirement suspendus, déclarent officiellement les directeurs de l'en- treprise, — abandonnés définitivement, assurent des per- sonnes bien informées. Cependant la route Alep-Bagdad devait desservir le long de l'Euphrate de nombreux et importants villages privés de toute voie de communication; on prévoyait que, longtemps encore après l'ouverture du chemin de fer de Bagdad, elle serait sillonnée par les caravanes qui assurent le transport des marchandises entre Bagdad et la côte syrienne. Déjà l'on parlait d'établir sur cette route un service de voitures automobiles, qui. 240 RAPPORT AU COMITE DE DÉFENSE, ETC pour le transport des voyageurs, eût fait au chemin de fer une sérieuse concurrence. A Feloudja, à Ramadi, à Hit, à Anah, à Meskené, j'ai entendu des indigènes se féliciter de ce projet et en souhaiter la prompte exécution : en repas- sant par Alep, j'ai appris qu'il n'en était plus question. Les conclusions que la population intéressée aura tirées du brusque abandon d'une entreprise, qui avait déjà coûté tant d'efforts et fait naître tant d'espérances, n au- ront sans doute pas été à l'avantage de notre influence et de notre prestige. CHAPITRE VI ASIE MINEURE INTÉRÊTS EN ORIENT, 16 ADANA Établissement des Jésuites. — L'établissement des Jésuites comprend : 1° Un collège, où l'enseignement secondaire moderne est donné par i8 professeurs : jésuites, maristes, indigènes laïques et ecclésiastiques. Les élèves sont tenus d'apprendre, outre le français, leur langue maternelle : le turc, l'arménien, le grec ou l'arabe. Les cours d'allemand et d'anglais sont facultatifs. 328 élèves, dont 261 non catholiques. 2"* Une école gratuite, où 105 élèves, dont 80 Arméniens grégoriens, reçoivent une bonne instruction primaire en français, en arménien et en turc. Établissement des Sœurs de Saint-Joseph de Lyon. — A V école payante, les jeunes filles suivent les programmes du brevet simple et du brevet supérieur français. L'enseignement est excellent : 3 élèves ont été reçues au brevet supérieur en 1912. L'école est fréquen- tée par les filles des principaux fonctionnaires ottomans. On enseigne le français, l'arabe, l'arménien, Titalien, l'allemand, l'anglais, le grec ancien et le grec moderne. — 248 élèves dont 182 non catholiques. A Y externat gratuit, les programmes sont ceux du certi- ficat d'études primaires. Les locaux sont trop étroits, et chaque année on refuse des élèves. En 1912, l'affluence RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 243 des demandes a été particulièrement considérable. — 149 élèves, dont 128 non catholiques. A Vécole maternelle, on refuse aussi des élèves. — 115 enfants, presque toutes Arméniennes grégoriennes. V orphelinat compte 118 petites filles auxquelles on fournit gratuitement les livres, les vêtements, le linge, les chaussures. 60 d'entre elles sont nourries à midi. Le dispensaire^ bien installé et pourvu d'une pharmacie très complète, est fréquenté par un grand nombre de malades, chrétiens ou musulmans. Quatre médecins, dont un oculiste, y donnent gratuitement des consultations. On soigne en moyenne 50 malades par jour. \J hôpital, ouvert le 17 avril 1909, compte ik lits; il est dirigé par un médecin-chirurgien, assisté de trois reli- gieuses infirmières. Depuis l'ouverture jusqu'en 1912, on a reçu 1.033 malades. En 1911, on a fait 2.700 pansements. Il conviendrait de construire, pour Thôpital français, un local plus vaste et mieux aménagé, avant que le projet d'un hôpital allemand n'ait été mis à exécution. Écoles arméniennes-catholiques. — Les bâti- ments scolaires ont été détruits lors des massacres, et les écoles sont installées provisoirement dans l'édifice qui contient l'église et l'archevêché. L'évêque, qui porte aux écoles le plus grand intérêt, se propose de leur réserver entièrement l'édifice dont elles occupent en ce moment une partie, et de reconstruire ailleurs une église et un archevêché. Les deux écoles de garçons comptent ensemble 150 élèves. Les deux écoles de filles en ont ensemble 200. Partout le français est enseigné. Le directeur des études et l'un des professeurs sont d'anciens élèves du Séminaire français de Constantinople. 244 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. Depuis les massacres, les enfants turcs ne fréquentent plus les écoles arméniennes. Les écoles turques sont nombreuses à Adana, et comp- tent parmi les meilleures de l'empire. Il faut signaler, outre le lycée, une école d'arts et métiers, fondée en 1900, et une école d'agriculture^ récemment organisée par Djemal Bey, l'ancien vali, et qui a déjà donné de bons résultats. Établissements étrangers. — La mission amé- ricaine entretient à Adana un hôpital, plusieurs dispen- saires, et des écoles de garçons et de filles. La mission allemande y avait un hôpital qui vient d'être transporté non loin d'Osmaniéh, au pied du mont Amanus, pour subvenir aux besoins des ouvriers du chemin de fer. On parle de construire à Adana un nouvel hôpital. Les Russes subventionnent probablement les écoles grecques orthodoxes. MERSINA Etablissement des Capucins. — Il a été fondé eu 1886 et comprend : 1" un collège d'enseignement secondaire, où l'on prépare les élèves au baccalauréat; â** une école gratuite. On enseigne l'arabe, le français, un peu de turc et un peu d'anglais . Le niveau des études est satisfaisant. 190 élèves, dont 90 sont reçus gratuitement. L'établisse- ment est médiocrement installé et les élèves sont fort à l'étroit. Établissement des Sœurs de Saint-Joseph de l'Apparition. — Un pensionnat^ un externat payant et un externat gratuit comptent ensemble 200 élèves, dont 125 non catholiques. L'enseignement secondaire et l'enseignement primaire sont donnés en français selon d'excellentes méthodes. Les classes sont installées dans des locaux vastes et bien aérés, mais le mobilier scolaire est insuffisant. Le dispensaire est ouvert tous les jours : on y soigne gratuitement environ 4.000 malades par an; il faudrait assurer quelques ressources à ce dispensaire, qui est fort dépourvu. Établissements étrangers — La mission amé- ricaine dionxavi une petite école, qui, jusqu'à présent, a donné de médiocres résultats. 246 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. Les écoles grecques orthodoxes étaient florissantes, jus- qu'au jour où des divisions ont éclaté au sein de la com- munauté. L'école française des Sœurs de Saint-Joseph a profité de cette circonstance, par suite de laquelle le nombre de ses élèves a sensiblement augmenté. TARSOUS Écoles des Capucins. — Vécole payante compte 60 élèves dont 24 musulmans. On y enseigne le français, le turc, l'arabe et le persan, l'histoire générale et la géo- graphie de rOrient, la grammaire et les éléments des sciences. Vécole gratuite a 57 élèves : on fait la classe en turc et en arménien ; il y a un petit cours de français. Écoles des Sœurs de la Sainte-Famille. — L'établissement manque de ressources; les locaux sont insuffisants, et il n'y a pour ainsi dire pas de matériel scolaire. Cependant les Sœurs trouvent le moyen d'ensei- gner notre langue à 200 enfants, dont 125 sont reçues gratuitement. Elles ont un petit pensionnat (6 élèves), une école gratuite et un asile enfantin. Dans leur dispensaire^ elles soignent gratuitement de ko à 60 malades par jour. Elles avaient sollicité par l'inter- médiaire du Consul la visite hebdomadaire d'un médecin. Leur demande n'a pas été accueillie. Établissements étrangers. — La mission an- glaise entretient à Mersina un collège, pour les garçons et pour les filles, un dispensaire et un hôpital. Ces établisse- ments sont bien installés et disposent de ressources abondantes. AMASSIA Écoles des Jésuites. — Les Jésuites ont à Amassia \m collège et une école gratuite. Par collège, il faut enten- dre ici une école payante, dont renseignement correspond à peu près à celui des écoles idadié des vilayets ottomans. Les élèves y font une étude complète du français, du turc, de l'arménien et quelquefois du grec. On leur enseigne les éléments des sciences, de la littérature, de l'histoire et de la philosophie. Le diplôme de fin d'études, reconnu jusqu'à présent par le gouvernement ottoman, permet aux élèves qui en sont munis d'entrer dans les écoles supé- rieures de Constantiûople. Les anciens élèves des collèges des Jésuites s'y classent ordinairement à de bons rangs. Le collège d' Amassia compte 108 élèves, V école gratuite 196. — Total = 304. Écoles de filles des Sœurs de Saint-Joseph de Lyon. — L'eco/e payante compte 113 élèves, l'école gratuite en a 317. — Total = 430. GÉSARÉE Écoles des Jésuites. — Collège : 129 élèves; école gratuite : 97 élèves. — Total = 226. Écoles des Filles (Sœurs de Saint- Joseph). — École payante : 90 élèves; école gratuite : 322 élèves. — Total = 422. RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 249 Écoles des Jésuites. — Collège : 128 élèves ; école gratuite : 23*2. — Total =:= 360. Écoles de filles des Oblates de l'Assomption. — École payante : 77 élèves; école gratuite : 306. — Total =: 383. SIVAS Écoles des Jésuites. — Collège : 152 élèves; école gratuite : 518. — Total = 670. Écoles de filles des Sœurs de Saint- Joseph. — École payante : 93 élèves; école gratuite : 473. Total = 516. La population de Sivas demande aux Pères Jésuites d'ou- vrir uç hôpital. Il conviendrait de mettre les religieux français en mesure de répondre favorablement à cette demande. TOKAT Écoles des Jésuites. — Collège : 120 élèves ; école gratuite ; 193. — Total =313. Ainsi, dans leur mission d'Anatolie et de Petite-Armé- nie, les Jésuites donnent l'instruction à 2.306 garçons, dont 305 seulement sont catholiques ; 2.815 filles (dont359 catho- liques) fréquentent les écoles où. enseignent les religieuses françaises sous la direction des Jésuites. Le personnel en- seignant comprend : 40 jésuites, 4 maristes et 74 maîtres laïques pour les écoles de garçons; 77 sœurs de Saint- Joseph de Lyon, 20 Oblates de l'Assomption, et 30 mai- tresses laïques pour les écoles de filles. ÉCOLES DE VILLAGE DES JÉSUITES Les populations d'Anatolie et de Petite-Arménie, qui ont la plus grande confiance dans les missionnaires français et 250 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE qui ont assez généralement l'ambition de voir entrer leurs enfants dans les administrations des chemins de fer ou autres travaux publics, où la connaissance du français est indispensable, demandent aux Jésuites d'ouvrir dans les villages des écoles où notre langue soit enseignée. En 1912, cinq écoles avaient été fondées, à Mondjoucoum, Tchepni, Dendil, Tchat et Seghei'. De ces cinq écoles, deux seule- ment étaient officiellement reconnues. L'installation d'une école à Tchat avait d'autant plus d'intérêt, que la mis- sion américaine n'y est pas encore établie. Cette position, sohdement occupée, permettrait à nos missionnaires d'éten- dre leur action jusqu'à Yezgat, au centre d'un pays chré- tien, fermé jusqu'à présent à toute influence étrangère, mais qui ne manquera pas de s'ouvrir, lorsque sera cons- truite la ligne de chemin de fer Angora-Sivas. Pour ouvrir dans cette région une école qui puisse être reconnue, nos missionnaires doivent d'abord constituer une communauté arménienne catholique ayant son prêtre et son église, puis construire un local scolaire : aussi les frais de premier établissement sont-ils assez élevés. Les Jésuites ont ou- vert à Césarée deux écoles pour la formation des prêtres, des maîtres et des maîtresses : la préparation des maîtres- ses est confiée aux Sœurs de Saint-Joseph de Lyon. Dans les villages où ils ouvrent des écoles, les Jésuites organisent pour leurs anciens élèves des cercles d'études et des patronages, œuvres post-scolaires destinées à entre- tenir chez les jeunes gens la connaissance de notre langue. DISPENSAIRES ET HOPITAUX Dans les principaux centres où ils sont établis , les Jésuites ont créé des dispensaii^es ; les malades y sont reçus le matin; le soir, on les visite à domicile. En 1911-1912, le DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 251 dispensaire d'Adana a reçu 18.000 malades; celui d'Amas- sia, 15.000; celui de Césarée, 21.000; celui de Marsivan, 11.000; celui de Sivas, 21.000; celui de Tokat, 10.000. Lors de l'épidémie de choléra, les religieux et les reli- gieuses françaises ont fait preuve d'un dévouement admi- rable. La médaille d'or a été attribuée aux supérieurs et aux supérieures des communautés de Sivas et de Tokat. La mission des Jésuites, pour répondre aux vœux des populations, voudrait créer des hôpitaux français à Sivas et à Amassia. On espère que l'entreprise du chemin de fer Samsoun- Sivas contribuera aux dépenses nécessitées par cette création. Pour subvenir, en attendant, aux besoins d'une popula- tion privée de tout secours médical, les Jésuites et les religieuses organisent des tournées dans le pays ; on s'ins- talle dans un village pour quelques semaines ; on vaccine les enfants, on les soigne, on apprend à lire aux garçons, on apprend à coudre aux filles et on visite les malades. L'absence de diplôme médical a causé bien des ennuis à nos religieux; mais ils continuent à exercer partout où ils le peuvent leur ministère de charité. La concurrence la plus redoutable pour eux est celle de la mission américaine, qui a profité des massacres pour développer son influence dans le pays en ouvrant des orphelinats, des écoles, des hôpitaux et des dispensaires. Son principal établissement d'assistance est Vhôpital de Marsivan. SAMSOUN École de garçons des Maristes. — Les Maristes ont à Samsoun une J)onne école primaire et primaire supérieure, qui compte 135 élèves. La paroisse latine de Samsoun est dirigée par un Capucin de VInstitut d'Orient. ERZEROUM École de garçons des Capucins. — Les Capucins de l'Institut d'Orient ont à Erzeroum une école primaire. — 107 élèves. École de filles. — Les Sœurs arméniennes-catholiques de l'Immaculée Conception dirigent une école de filles, où notre langue est enseignée. — 114 élèves. TRÉBIZONDE Les Capucins de l'Institut d'Orient dirigent les paroisses latines de Trébizonde et de Kerazoun. Je n'ai pas pu savoir s'ils y avaient ouvert, ou non, des écoles paroissiales. V école des filles, à Trébizonde, est dirigée par les Sœurs de Saint-Joseph de l'Apparition. — 90 élèves. VInstitut d'Orient, fondé en 1883, a été placé d'abord sous la dépendance du Père général des Capucins. Son pre- mier soin fut d'organiser à Boudja, près de Smyrne, un séminaire, pour subvenir aux besoins des mission d'Asie Mineure. En 1908, l'Institut fut incorporé à la province de RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 253 Venise, et l'influence italienne y devint prépondérante. Mais en 1911, à la faveur de la guerre italo-turque, l'Ins- titut s'est libéré de cette dépendance ; il est devenu auto- nome et français d'esprit et de direction : c'est le gouver- nement français qui désormais en assume officiellement la protection. Toutefois il est à craindre que l'autorité romaine ne fasse bientôt subir à l'Institut d'Orient une nou- velle transformation qui serait tout à l'avantage du gou- vernement italien ^ ARABKIR Le curé arménien catholique d'Arabkir, ancien élève du Séminaire français de Gonstantinople, a fondé deux écoles primaires de garçons et de filles où notre langue est ensei- gnée, et que soutient la section de l'Alliance française de Gonstantinople. V école des garçons a trois professeurs et 71 élèves, dont 35 reçus gratuitement ; V école des filles a cinq maîtresses et 170 élèves, dont 88 sont reçus gratuitement. Le curé d'Arabkir lutte contre plusieurs influences étran- gères. La mission américaine entretient deux écoles à Arabkir. Les Arméniens grégoriens, qui ne nous sont pas favorables dans ce pays, ont un collège et quatre jardins d'enfants. Une société allemande vient d'acheter un terrain pour construire des écoles. ANGORA École de garçons, dirig4e par les Frères de la Doc- trine chrétienne : environ 200 élèves. École de filles, dirigée par les Sœurs arméniennes catholiques : environ 100 élèves. 1. La transformation que l'on craignait est aujourd'hui un fait accompli. 26 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE ESKI-CHEHIR Eski-Chehir est une ville de 31.000 habitants, dont 25.000 sont des musulmans fort pauvres. C'est une des stations les plus importantes du chemin de fer d'Anatolie. École de garçons des Assomptionnistes. — Elle a été fondée en 1891 et comprend six classes, dont une réservée aux enfants qui ignorent absolument notre langue. L'enseignement est donné en français ; l'étude du turc est obligatoire. — 132 élèves. Écoles de filles des Oblates de l'Assomption. — Les Oblates dirigent un pensionnat et deux externats, dont l'un est fréquenté aussi par les petits garçons. Le niveau des études est assez élevé : on prépare au brevet. On enseigne le français, le turc et les autres langues usitées dans le pays. — 112 élèves. Établissements étrangers. — V école allemande est favorisée par le comité Union et Progrès, qui a facilité l'organisation d'un cours d'allemand pour les adultes. Les écoles arméniennes ^r(?^or^e/^^^e.y subissent l'influence de la mission américaine. Les trois écoles de la communauté grecque entretiennent de bons rapports avec l'élément français. Les meilleurs élèves des écoles grecques viennent achever leurs études au collège des Assomptionnistes. Les religieux français placent très facilement leurs anciens élèves dans les banques, dans les maisons de com- merce ou au chemin de ffer d'Anatolie. Cinq ou six étu- dient actuellement la médecine à la faculté française de Beyrouth. Comme la place leur manquait, les Assomption- nistes ont construit une école dans le quartier de la gare. A cet effet, ils ont contracté un emprunt. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 255 OUGHAK C'est un gros village industriel, sur la ligne d'Afioum- Karahissar à Smyrne : on y fabrique des tapis renommés. L'archevêché de Smyrne y fonda en 1898 une mission catholique, desservie par des prêtres séculiers. Cette mis- sion a été cédée en 1904 aux Frères des écoles chrétiennes. École de garçons des Frères. — Elle comptait VO élèves en 1908 ; elle en a aujourd'hui 68, répartis en trois classes. On leur enseigne le français, le turc et le grec. Les élèves sont placés de préférence, à leur sortie d'école, dans les services du chemin de fer français Smyrne-Cassaba. L'école est fréquentée par de nombreux musulmans. KONIAH École de garçons des Assomptionnistes. — C'est une très bonne école primaire et primaire supé- rieure. Il faudrait agrandir l'établisement devenu trop étroit par suite de la grande affluence d'élèves. 175 élèves en 1912, dont 132 arméniens-grégoriens et 13 musulmans. Depuis douze ans, 220 élèves sont sortis de l'école fran- çaise : les deux tiers sont entrés dans les services du chemin de fer d'Anatolie. L'enseignement est donné en français; le turc est obligatoire; on donne aux élèves quelques notions de commerce et de comptabilité. Une classe préparatoire est réservée aux enfants qui ignorent absolument notre langue. Un grand nombre d'élèves sont reçus gratui- tement ou à prix très réduit. École de filles des Oblates de l'Assomption. — 131 élèves y reçoivent une excellente instruction en français. L'école est devenue trop étroite et les religieuses voudraient construire un nouveau local. 256 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. Au dispensaire, 5.500 malades sont soignés gratuite- ment chaque année. NEW-GHEHIR Les Assomptionnistes soutiennent dans cette localité, située entre Koniah et Césarée de Cappadoce, une petite communauté grecque-catholique. L'école qu'ils ont ou- verte et où ils enseignent le français, compte environ 30 élèves. ZONGOULDAGH (Mer Noire) Les Assomptionnistes, qui étaient chargés de la paroisse latine, avaient ouvert àZongouldagh une petite école. Elle fut détruite lors de la terrible inondation de 1905, où un religieux français trouva la mort. La Société française qui exploite les mines de la région de Zongouldagh a fait venir les Frère.9 de la Doctrine chré- tienne et les a installés à ses frais au centre même de l'exploitation. Les Frères ont ouvert une école, qui rem- place celle des Assomptionnistes. Au même moment, les Oblates de F Assomption ont cédé V école de filles et V hôpital qu'elles avaient fondés aux Sœurs de Saint-Joseph de Lyon, qui dirigent aujourd'hui ces deux établissements. SMYRNE ÉTABLISSEMENTS FRANÇAIS Collège des Lazaristes. — Les élèves y reçoivent renseignement secondaire classique et moderne; ils s'y préparent au baccalauréat : 4 ont été reçus en 1911, un en 1912, Le collège est bien achalandé. On y a observé pourtant, dans ces dernières années, un certain laisser- aller et un fléchissement dans le niveau des études. Mais le collège pourrait aisément faire de nouveaux progrès. Le directeur attribue Tactuelle diminution du nombre des élèves à plusieurs causes : les subventions ont été réduites ; le recrutement des professeurs est devenu très difficile. Aujourd'hui, sur 20 Lazaristes qui enseignent au collège de Sniyrne, 8 sont étrangers. Néanmoins la mission des Laza- ristes continue d'être à Smyrne un des meilleurs instru- ments de notre influence : les religieux, qui ont ouvert leur première école en 1783, sont en relation avec toutes les classes de la société et jouissent de l'estime univer- selle. — li7 élèves en 191*2. Écoles des Frères de la Doctrine chrétienne. — Collège Saint-Joseph. — Cet établissement, fondé en 1880, comprend un cours d'enseignement secondaire mo- derne et un cours d'enseignement commercial. On y prépare les élèves au baccalauréat. On enseigne le turc, le grec, l'arménien, l'anglais et Fallemand. Une classe pré- paratoire de français est réservée aux arriérés. INTÉRÊTS EX ORIENT. 17 258 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE V enseignement commercial comprend trois années et un cours spécial : les programmes sont ceux des écoles supérieures de Paris. On délivre aux élèves un diplôme d'études commerciales^ après examen passé devant un jury que préside le Consul général de France. — 246 élèves en 1912. Succursale de Gueuz-Tépé. — Elle a été ouverte dans un faubourg populeux de Smyrne en 1901. C'est une bonne école primaire fréquentée surtout par des Turcs. — Ik élèves. École Saint-Jean. — Cette école primaire gratuite à été fondée en 1841. Elle compte aujourd'hui 208 élèves. Écoles de La Pointe. — Dans des bâtiments vieux et incommodes, les Frères ont installé deux écoles. Le terrain qu'ils possèdent se prêterait à de vastes constructions. V école payante compte 102 élèves, V école gratuite en a 186. Dans toutes deux, un bon enseignement primaire est donné en français. École de Cordelio. — C'est une école primaire payante, où quelques élèves sont reçus gratuitement. — 156 élèves. Cette école, très fréquentée, est installée dans un local insuffisant. Les Frères ont acquis un terrain et cherchent les fonds nécessaires pour une nouvelle cons- truction, qui s'impose d'autant plus qu'on va prochaine- ment ouvrir à Cordelio une école italienne et une école anglaise. École de l'Alliance française. — Cette école, à peu près gratuite, est installée dans un local dont l'Al- liance française de Smyrne paye le loyer. — 73 élèves. Collège des Pères de Sion. — C'est un excellent établissement d'enseignement secondaire classique. Récem- ment fondé, il s'est développé très rapidement, et refuse aujourd'hui des élèves. On voudrait construire de non- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 259 veaux locaux. On demande des cartes (^^ autres que celles de la collection Niox, qu'on possède déjà), et des instruments de physique. Les élèves étudient le français, l'allemand, l'anglais, le latin et le grec ancien. — 65 élèves dont 10 sont admis gratuitement. Écoles de l'Alliance Israélite. — V école de garçons compte 337 élèves; V école de filles en a 370; Y école populaire y 225; la classe enfantine (mixte), 152; \ orphelinat réunit V75 enfants. Au total, 1.559 enfants des deux sexes sont fort bien instruits dans notre langue. Tous parlent couramment le français. Dans les hautes classes, le niveau des études est un peu inférieur à celui des écoles de Bagdad. En outre, T Alliance Israélite exerce une active surveil- lance sur plusieurs écoles privées où le français est en- seigné : école Gerson : 160 élèves ; école Cohanime : 170 élèves; eco/e commerciale : 163 élèves; école Amiel : 150 élèves : soit 643 enfants qui s'ajoutent encore aux 1.559 précédemment indiqués : ce qui donne un total de 2.202 élèves à qui notre langue est enseignée dans les écoles Israélites de Smyrne. École paroissiale de garçons des Capucins. — L'enseignement est donné en italien. Les Capucins de Smyrne, bien que leur église et leur école paroissiales soient placées sous le protectorat de la France, font ou- vertement cause commune avec les Salésiens italiens. On aperçoit très nettement à Smyrne les fâcheux résultats de l'accord franco-italien de 1905. École de filles des Dames de Sion. — L'éta- blissement, fort en vogue, comprend un pensionnat et un externat. Linstallation en est parfaite et les études y sont excellentes. On prépare les élèves aux brevets, on leur enseigne le français, l'anglais, l'allemand, le grec et l'ar- 260 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE ménien. — 110 élèves, dont 30 sont admises gratuitement. On demande des instruments de physique, des livres pour la bibliothèque scolaire. On voudrait acquérir un terrain formant enclave et se débarrasser ainsi d'un voi- sinage incommode. Écoles de filles des Dames de Sion, à Gorde- lio. — L'école payante est fréquentée par 82 élèves, qui y reçoivent l'enseignement primaire complet, en français : on les prépare au brevet élémentaire, on leur enseigne l'anglais et l'arménien, les ouvrages d'aiguille et les soins du ménage. 12 jeunes fdles sont admises gratuitement à cette école. Vécole gratuite compte, suivant la saison, de 50 à' 70 élèves; 15 petites filles reçoivent chaque année du linge et des vêtements. École de filles des Sœurs de Saint-Joseph, à Gordelio. — Cette petite école, fondée en 1905, donne de très bons résultats et mérite qu'on favorise son déve- loppement. Les Sœurs, qui font la classe en français, soi- gnent aussi les malades à domicile et sont très bien vues de la population. 12i élèves, qui toutes apprennent notre langue. On demande des tableaux de lecture, des ta- bleaux d'histoire naturelle et des fournitures pour l'école gratuite. Établissements des Filles de la Charité. — La Providence. — Fondée en 1839, cette maison com- prend : 1^ des écoles de filles fort bien organisées : on y conduit les élèves jusqu'au brevet supérieur. i88 enfants en 1912; 60 sont nourries chaque jour à midi; 100 sont vêtues aux frais de la maison ; 2° des ouvroirs très fré- quentés; ^^"^ wn orphelinat ; les enfants, admises gratui- tement pour la plupart, sont élevées jusqu'à l'âge de 21 ans ; 'i-^ un asile d'enfants trouvés : une vingtaine d'en- DES INTERETS FRANÇAIS EN ORIENT. 261 fants sont recueillis et mis en nourrice; 5° un dispensaire où -200 malades reçoivent chaque joui* gratuitement des consultations, des pansements et des remèdes. Ce dispen- saire est installé dans un local trop exigu (3 m. sur 3", 50), et l'on craint que la municipalité n'en exige la fermeture. Les Sœurs ont, moyennant un emprunt, acheté un nou- veau terrain; mais elles manquent d'argent pour cons- truire. École de filles de l'Hôpital français. — On y prépare les élèves au brevet élémentaire : \ ont été reçues en 1912. Une classe est réservée aux petits garçons. — 420 élèves. La maison comprend, outre les écoles, des ouvroirs : les jeunes filles suivent chaque dimanche un cours de français; une bibliothèque; un home qui abrite une quin- zaine de jeunes filles à la recherche d'une condition; un dispensaire où l'on soigne gratuitement de 70 à 90 malades par jour. Les malades indigents sont visités à domicile. Ecole de fdles de Boudja. — 93 élèves y reçoivent ren- seignement primaire en français. École de filles de Bournabat. — 69 élèves. École de filles de Gueuz-Tépé. — IV* élèves, dont 18 musulmanes et 53 israélites. Hôpital français (Filles de la Charité). — Le vieil établissement, qui servait autrefois d'hôpital de la Marine, est devenu très insuffisant. Le nouvel hôpital, cons- truit à l'aide des subventions accordées par le gouverne- ment français, sur un terrain qui appartient à l'État fran- çais, est un joli bâtiment, spacieux, propre, bien installé; on n'y saurait guère critiquer que l'exiguïté des chambres particulières. Mais il est ordinairement vide. La supérieure le trouve incommode et se plaint de ce qu'il exige un trop grand entretien et un service trop nombreux. A la 262 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE vérité, l'hôpital ne dispose pas de ressources proportion- nées à son installation; il y faudrait un mobilier plus complet; il n'existe pas de salle d'opérations. C'est pour- quoi les Français eux-mêmes préfèrent se faire soigner à l'hôpital Saint-Antoine, qui est international. La supé- rieure reçoit gratuitement, à ses frais, un certain nombre d'indigents, qui forment à peu près toute la cKentèle de l'hôpital. Il convient d'améliorer au plus tôt une situation défectueuse, qui nuit à nos intérêts et à notre prestige. Asile de vieillards des Petites-Sœurs des Pauvres. — Fondé le iï septembre 1909, dans un local mis pour cinq ans à la disposition des sœurs par la Société de Saint- Vincent de Paul , cet établissement, unique à Smyrne, est admirablement organisé, mais de dimensions insuffisantes. Les Sœurs donnent asile à 26 vieillards, tout ce que la maison peut contenir. Elles sont résolues à établir un asile pour cent vieillards. Le terrain est acheté et les premiers fonds réunis; mais il manque encore de l'argent. La dépense totale est évaluée à liO.OOO francs. Il faut sou- haiter qu'elle soit rapidement couverte : car cette œuvre est de celles que nos religieuses sont seules à entreprendre et qui contribuent le plus à rendre la France populaire en Orient. Orphelinat de Koula. — Il abrite aujourd'hui 134 enfants, dont les Filles de la Charité dirigent l'ins- truction et l'éducation. La maison est bien organisée; mais elle a été construite en 1858 et aurait grand besoin d'être réparée. Ses murs délabrés font un constraste pé- nible avec l'édifice somptueux que les Anglais ont cons- truit à Boudja pour y recevoir les orphelins. Cité ouvrière de Mortakia. — Un Français établi à Smyrne, M. Cousinery, fit don, en 1805, à Tarchevêché de Smyrne et au Consulat de France, d'un vaste terrain, DES INTERETS FRANÇAIS EN ORIENT. 263 qui devait servir à créer un abri pour les familles indi- gentes. Pendant de longues années, le Consul de France et l'archevêque latin ont dirigé de concert cette œuvre charitable. Depuis .peu, le consulat français en a assumé la direction exclusive. 69 chambres ou petits appartements abritent 89 familles, qui comptent ensemble 250 personnes. Les familles ap- partiennent à diverses nationalités : 34 sont ottomanes, 3 seulement sont françaises. Il n'est perçu ni loyer ni redevance. Les parents sont tenus d'envoyer leurs enfants à l'école française installée dans la Cité. L'école, dirigée par les Sœurs de Saint-Joseph, compte environ 80 enfants. Grâce à des améliorations récentes, les appartements sont aujourd'hui installés selon toutes les règles de l'hygiène. Cette œuvre intéressante ne dispose malheureusement d'aucune ressource assurée : on va constituer une société des Amis de Mortakia, pour subvenir à l'entrelien de la « Cité ouvrière ». Hôtel des Institutions françaises. — Diffé- rentes œuvres françaises ont été fort bien installées dans l'ancien hôtel du consulat de France. La Chambre de com- merce occupe une partie du local; la Société de Bienfai- sance en occupe une autre. Une vaste salle de conférences est destinée aux Cours du soir, que l'Alliance française a organisés à ses frais et qui sont très fréquentés : 179 élè- ves en 1912. Projet d'un établissement de la mission laïque. — La mission laïque entretenait jusqu'à présent un professeur de français dans un collège grec : Yécole Aroni. Cette organisation n'a pas donné les bons résultats qu'on en attendait, et la mission laïque songe à ouvrir une école pour son propre compte. Reconnaissant d'une part la 264 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE nécessité de respecter le sentiment religieux sous ses di- verses formes, d'autre part, le goût très vif de la jeunesse symrniote pour les études scientifiques pratiques, elle a formé le projet d'ouvrir une école .professionnelle où seraient admis, comme élèves externes, des jeunes gens de 12 à 14 ans ayant déjà reçu une première instruction dans les écoles confessionnelles. On leur donnerait un enseigne- ment commercial, industriel et agricole aussi pratique que possible. Tout le pays, autour de Smyrne, tend à se trans- former; de plus en plus, on cherche à traiter sur place les matières premières que le sol peut fournir. Les grands propriétaires introduisent dans leurs tchifliks (grosses fermes) la culture industrielle. Il faut des chefs d'atelier et des régisseurs. C'est à ce besoin que répondrait la nou- velle école, qui offrirait aux familles la double garantie d'une compétence reconnue et d'une parfaite neutralité religieuse. ÉTABLISSEMENTS ÉTRANGERS Écoles grecques. — V école Êvangéligiie^ qui compte 1.200 élèves, fait au français une place dans ses programmes. Mais les résultats obtenus sont des plus mé- diocres. U école Aroni, qu'on appelle aussi lycée gréco- français, n'offre pas beaucoup plus d'intérêt, au point de vue qui nous occupe. Elle compte 227 élèves. A V école lanikir, qui est un lycée gréco-allemand, le français est enseigné. Il l'est aussi dans plusieurs écoles grecques particulières. Dans les écoles primaires grecques, l'enseignement du français peut être considéré comme nul. Écoles allemandes et autrichiennes. — Une DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 265 école laïque allemande, fondée en 1895, est subventionnée par le gouvernement impérial. L'étude du français y est obligatoire. — 70 élèves. Vécole des Méchitaristes (arméno-autrichienne) compte 110 élèves. Le nombre des élèves a doublé depuis que le français est enseigné dans cette école. Vécole des Diaconesses, subventionnée par le gouverne- ment allemand, compte de 350 à 400 élèves. Les israélites allemands sionistes ont décidé de créer en Orient 10 écoles, dont une doit être ouverte à Smyrne. Écoles anglaises et américaines. — Vbiter- national Collège, fondé par la mission américaine en 1889, réunit i50 garçons et 800 filles. Les élèves étudient, à leur choix, le français ou le turc, comme langue accessoire. Le diplôme commercial et le diplôme littéraire du collège sont reconnus aux États-Unis et à la faculté américaine de Beyrouth. VEnglish commercial School est très prospère : envi- ron 200 élèves. L'étude du français y est obligatoire. A Vécole anglaise de Boudja, renseignement est donné moitié en anglais et moitié en français. Fondé en 1905, cet établissement s'est développé rapidement; il dispose d'abondantes ressources. Vécole anglaise de Cordelio, ouverte en 1910, en est encore à ses débuts; elle donne déjà des résultats satisfai- sants. Vécole de la mission écossaise compte 600 élèves : 500 filles et 100 garçons. Le français y est enseigné de façon très médiocre. Écoles italiennes. — Vécole des Salésiens, subven- tionnée par le gouvernement de Rome et par l'Association nationale des Missions, a aujourd'hui 350 élèves. Les Salé- siens ont relevé très rapidement l'ancienne école laïque 266 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE qui périclitait et qui leur a été cédée en 1905. Ils ont décidé de construire un nouveau local, et ont déjà à cet effet acheté des maisons pour une somme de 6.000 L. T. (envi- ron 138.000 fr.). V école de filles des Sœurs d'ivrée est installée depuis peu dans un local magnifique. Elle recrute surtout ses élèves dans les milieux levantins pauvres. — Environ 600 élèves. Je signale ici pour mémoire un collège franco-anglais, créé en 1911 par un Français, M. Demoize, et qui compte actuellement 80 élèves. En résumé, toutes les écoles étrangères réunissent en- semble un peu plus de 5.000 enfants. Les nôtres comptent à elles seules 5.000 élèves. Ces chiffres sont assez rassu- rants. Cependant le développement de nos écoles se heurte à deux graves obstacles : le nombre insuffisant des maîtres, et l'effort toujours croissant de la concurrence italienne. L'enseignement donné dans nos écoles passe pour le meil- leur; les écoles étrangères en sont réduites, pour avoir des élèves, à introduire dans leurs programmes Tétude de notre langue. Elles nous combattent moins efficacement par la compétence ou Tactivité de leur personnel ensei- gnant, que par Torganisation confortable ou même somp- tueuse des édifices scolaires. Auprès des écoles étran- gères, la plupart des nôtres ont un aspect modeste ou même délabré, qui ne manque pas de produire un mauvais effet sur la population. Hôpitaux étrangers. — Les indigènes sont soignés à Y hôpital turc (250 lits), à Y hôpital arménien, ou à Y hôpi- tal israélite. Vhôpital anglais est alimenté par une taxe que paye chaque bateau anglais en entrant dans le port de Smyrne. Cette taxe est proportionnée au tonnage du bâtiment. V hôpital hollandais attire surtout la clientèle riche. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 267 Une souscription ouverte aux Pays-Bas et qui a produit 80.000 francs, a permis d'en renouveler complètement l'installation. Vhôpital catholique Saint-Antoine est placé sous la protection de TAutriche-Hong-rie et administré par une so- ciété internationale. Ce sont les Filles de la Charité (fran- çaises) qui en assurent la direction. Il comprend des cham- bres payantes et un service gratuit pour les indigents. AIDIN (ET VILAYEï) V Alliance Israélite entretient dans le vilayet d'Aïdin les écoles suivantes, où le français est enseigné : Aïdin : écoles de garçons et de filles : 340 élèves. Axar — — — 85 — Cassaba — — — 124 — Magnésie — — — 350 — Melassa — — — 120 — Menemen — — — 75 — Nazili — — — 90 — Pergame — — — 100 — Tire h — . — — 295 — * Voiirla — — — 95 — Au total : 1.674 élèves. École mixte des Filles de la Charité. — Elle compte une centaine d'enfants, garçons et filles. Les Frères de la Doctrine chrétienne ont le projet d'ou- vrir une école à Aïdin; on ne saurait trop les y encou- rager. MAGNÉSIE Projet d'école de filles (Franciscaines de Marie). — Les Franciscaines de Marie ont acheté un terrain et sont toutes prêtes à ouvrir une école. Mais le gouvernement ot- toman a mis obstacle à leurs projets. Et, jusqu'à présent, malgré les efTorts de l'ambassade de France, l'autorisation nécessaire n'a pas été obtenue. RHODES Collège des Frères de la Doctrine chré- tienne. — Il compte 145 élèves, dont 35 internes. Le français y est fort bien enseigné et, grâce aux efforts des Frères, notre langue a désormais pris dans Fîle la place qu'y occupait autrefois la langue italienne. V École normale des Frères, ou Scolasticat, fondé vers 1902, compte une vingtaine d'élèves, destinés à enseigner dans les écoles d'Orient. Pensionnat des Sœurs Franciscaines. — 64 élèves. — Le gouvernement italien a offert une alloca- tion aux Sœurs Franciscaines, pour qu'elles établissent un externat gratuit, où l'italien fût enseigné. Cette tentative a eu peu de succès : une cinquantaine de jeunes filles sont venues apprendre auprès des sœurs la couture et la broderie, plutôt que la langue italienne. Écoles de l'Alliance Israélite. — Les deux écoles de garçons et de filles réunissent environ 400 élèves. Établissements étrangers. — Les Grecs ont à Rhodes un gymnase et une école. Les Italiens y entretien- nent plusieurs écoles. Néanmoins notre langue est aujour- d'hui Ja plus répandue des langues étrangères, nos écoles sont réputées les meilleures et les plus fréquentées. La langue italienne a perdu, en vingt ans, tout le terrain que la nôtre a gagné. 270 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE METELIN École de garçons des Maristes. — 82 élèves. École de Filles des Franciscaines de Marie. — hk élèves. Les Grecs ont dans File 107 écoles primaires, 7 écoles enfantines, et 45 écoles secondaires. Le gouvernement otto- man entretient 43 écoles primaires turques, 3 écoles enfan- tines et une école secondaire. Le gouvernement italien cherche à installer à Mételin les Sœurs d'Ivrée. GHIO École des Frères de la Doctrine chrétienne. — Cette école payante, fondée en 1903, compte 73 élèves. École de Filles des Sœurs de Saint-Joseph. — 105 élèves, dont 19 musulmanes. Les Sœurs ont ouvert un dispensaire, où les médicaments sont vendus à prix réduits. Cet établissement, unique dans l'île, rend de grands services. Les Grecs ont deux lycées de garçons et de fdles, tous deux très prospères (environ 930 élèves) . On a organisé au lycée un cours commercial, et, depuis l'ouverture de l'é- cole des Frères, un cours de français. Les Grecs entretien- nent aussi dans l'île un hôpital et une léproserie. SAMOS École des Pères des Missions africaines. — 26 élèves, tous ottomans. École de filles des Sœurs de Saint- Joseph. — 72 élèves, dont 5i orthodoxes. DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 271 Le français est également enseigné au gymnase grec de Vathy, et à V école grecque de commerce. Des maîtresses françaises enseignent notre langue dans deux écoles privées de jeunes filles. Depuis vingt ans, le français a fait dans l'île d'incontestables progrès. Aucune concurrence étran- gère sérieuse n'est à signaler. DARDANELLES École mixte des Sœurs Géorgiennes. — En- viron 80 élèves. Écoles de l'Alliance israélite. — École de gar- çons : 213 élèves. École de filles : 159 élèves. Asile mixte : 115 élèves. BROUSSE École laïque de M. Benoît. — Cette école, fondée en 1893, reçoit du gouvernement français une très impor- tante subvention. Elle compte 170 élèves. Collège des Assomptionnistes. — Créé en 1885, il comprend un externat et un pensionnat : au total 109 élèves. Pour organiser un pensionnat convenable, les religieux ont dû contracter un emprunt à la Banque Otto- mane, qui le leur a consenti à des conditions de faveur. École des Filles de la Charité. — L'externat et le pensionnat comptent ensemble 200 élèves. Écoles de l'Alliance Israélite. — L'école des garçons a 110 élèves, celle des filles en a 160. Toutes ces œuvres contribuent utilement à répandre notre langue et notre influence, et vivent ensemble en parfaite intelligence. ISMIDT Collège de garçons des Assomptionnistes. — On y donne en français l'enseignement primaire, primaire supérieur et commiercial à 79 élèves. Les Assomp- tionnistes ont demandé et obtenu le firman en vue de construire une nouvelle école ; mais ils manquent des res- sources nécessaires. École de filles des Oblates de l'Assomption. RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 273 — Les programmes sont ceux des écoles primaires de la ville de Paris. On prépare les élèves au certificat d'études primaires. Le français est enseigné par six religieuses françaises. Les jeunes filles suivent en outre des cours de coupe et de couture. 100 élèves, dont 97 sont ottomanes. INTÉRÊTS EN ORIENT. 18 OBSERVATIONS RELATIVES A L'INFLUENCE ET AUX INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ASIE MINEURE Nos établissements sont plus nombreux en Asie Mineure, et notre influence y est plus considérable qu'on ne se l'imagine ordinairement en France. La b'gnc qui s'étend entre l'Anatolie et l'Arménie, d'Adana à Samsoun, est occupée sur toute sa longueur par les missions que les Pères Jésuites ont créées et qu'il ne tiendrait qu'à nous de développer. C'est le mérite des religieux Augustins de l'Assomption d'avoir peuplé d'écoles et de collèges fran- çais la région traversée par le cbemin de fer d'Anatolie. La voie ferrée n'est malheureusement pas française; mais les trois quarts des fonctionnaires et des employés supérieurs qui en assurent l'exploitation sortent de nos écoles : les deux langues officiellement admises par la direction du chemin de fer et pratiquement en usage sur tout le parcours sont le turc et le français ; l'allemand eût été impossible à introduire. Dans les îles ottomanes de la mer Egée, notre langue et notre influence ont fait depuis vingt ans d'im- menses progrès. Enfin nous occupons à Smyrne une posi- tion considérable. Le français est encore aujourd'hui à Smyrne la langue officielle du commerce. Toute la correspondance commer- ciale se fait en français; dans les grandes maisons, la con- naissance de notre langue est exigée de tous les employés; le français est la seule langue admise aux tribunaux consu- RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. 275 laires et au tribunal de commerce ottoman en matière d'intérêts étrangers. On compte à Smyrne k journaux turcs, 10 journaux grecs, 2 journaux israélites, un journal armé- nien, et 5 journaux français, dont un quotidien; mais on prévoyait, lors de mon passage, la création prochaine d'un journal italien. La colonie italienne de Smyrne est très importante, et les Italiens font de grands efforts pour accroître leur influence aux dépens de la nôtre : c'est de ce côté-là qu'est pour nous le danger. Jusqu'à présent pourtant le nombre des élèves n'a cessé d'augmenter dans nos écoles. Des personnes compétentes et impartiales m'ont fait observer que ce progrès de nos écoles, qui cependant sont presque toutes dirigées par des congréganistes, coïn- cide avec un déclin du catholicisme à Smyrne et dans l'Ar- chipel. Les conclusions qu'on pourrait tirer de ce double fait infirmeraient singulièrement certains arguments qu'on invoquait naguère contre l'utilité de nos écoles religieuses en Orient. L'industrie et le commerce français à Smyrne. — La principale société française de Smyrne est la Société des Quais, qui exploite aussi la ligne de tramway du port. C'est, dans l'empire ottoman, une des rares sociétés françaises qui n'ait pas consenti à modifier sa constitution et à se laisser « ottomaniser » . Le commerce français est représenté par un petit nombre de maisons : on peut citer MM. Salzani, Pagie et Brianta; Ce dernier, qui, avant la guerre italo-turque, correspon- dait surtout avec l'Italie, s'adresse aujourd'hui aux maisons françaises. A Smyrne, comme dans tout l'Orient, les com- merçants se plaignent de la difficulté qu'ils éprouvent à obtenir en France l'article à bon marché. L'exportation des figues fait à Smyrne l'objet d'un trust. L'orge, produite en abondance dans la campagne envi- 276 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE ronnante, est achetée par les grandes brasseries d'Angle- terre. Une maison anglaise extrait sur place le tanin des glands de chêne et écoule elle-même le produit. Il est remarquable que le sucre de Marseille, qui pénètre dans les pays arabes, à Bagdad et en Perse, n ait pu être introduit à Smyrne, où le prix en est jugé trop élevé. La guerre italo-turque a gêné nos commerçants plutôt qu'elle ne les a servis. En ce qui concerne le commerce des tissus, la place occupée précédemment par Fltalie a été prise par l'Espagne. D'une manière générale, l'arrêt des affaires a été très sensible en 1912 ; mais on n'a pas vu diminuer la fureur de spéculation, qui, depuis quel- ques années, entrave singulièrement à Smyrne le dévelop- pement du commerce. Entreprise agricole française dans la plaine d' Adana. — Une société française s'est récemment cons- tituée pour exploiter le vaste domaine de Djihan (ancien- nement Hamidié), qui faisait autrefois partie des biens du sultan Abdul-Hamid. La société a passé avec l'État otto- man un contrat d'association, aux termes duquel le droit d'exploiter ce domaine lui est concédé pour 99 ans, à charge par elle de créer et d'entretenir une école pratique d'agriculture. Les élèves de l'école et les ouvriers employés à l'exploitation du domaine doivent être ottomans; les professeurs et les ingénieurs seront français. La contenance du domaine est d'environ 25.000 hectares. La plaine d'Adana est très fertile. Le gouvernement otto- man songe aujourd'hui à y établir une partie des réfugiés provenant de la Turquie d'Europe. La création de grandes entreprises agricoles dans cette contrée est désormais à prévoir. Il serait désirable que d'autres sociétés françaises suivissent l'exemple de celle qui vient de s'établir à Hamidié : ce serait pour nous le meilleur moyen d'imposer DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 277 quelque limite à l'influence allemande, qui tend à devenir prépondérante dans la région d'Adana. Entreprise d'irrigation dans la plaine de Koniah. — Une société allemande, la « Gesellschaft fiir die Bewàsserung der Koniah-Ebene » ou « Holzmanns Ge- sellschaft », a entrepris en 1909 d'importants travaux en vue d'irriguer la plaine de Koniah. Cette société se ratta- che à celle du chemin de fer d'Anatolie; les capitaux dont elle dispose ont été procurés par la Deutsche Bank. Les tra- vaux, exécutés avec beaucoup de soin, doivent être au- jourd'hui terminés. Ils s'étendent sur une longueur de 92 kilomètres, de Bey-Chehir à Koniah. On a utilisé la lac et la rivière de Bey-Chehir, creusé un canal qui réunit cette rivière au lac de Karaviran; la ligne emprunte en- suite le cours du fleuve Tcharchambou et se termine par un canal distributeur qui aboutit à k kilomètres de la ville de Koniah. La différence de niveau entre le lac de Bey- Chehir et la plaine de Koniah est d'environ 100 mètres. 50.000 hectares doivent être ainsi mis en valeur. Les premiers essais dexploitatioa ont été difficiles : on s'est heurté au mauvais vouloir des paysans, qui refusaient obstinément de payer l'eau qui leur était distribuée. Le gouvernement ottoman a le projet d'établir dans la plaine de Koniah un grand nombre de réfugiés provenant de la Turquie d'Europe. Il faut s'attendre à ce que d'autres conces- sions soient prochainement attribuées dans cette région à des sociétés étrangères. Les chemins de fer français en Asie Mi- neure. — Des lignes de chemin de fer construites en Asie Mineure, la seule qui soit exploitée aujourd'hui par une société française (Bégie générale des chemins de fer) est la ligne « Smyrne-Cassaba-prolongements ». Un nouvel embranchement de cette ligne a été récemment ouvert : 278 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE, ETC. l'embranchement de Magnésie à Soma et à Panderma. La traversée de la mer de Marmara étant assurée par un ser- vice rapide, on peut désormais se rendre en quatorze heures de Smyrne àConstantinople. La société a mis depuis à l'étude les projets de quelques embranchements nouveaux ; mais le développement des voies ferrées dans cette partie de l'Asie Mineure est néces- sairement limité. On sait que le gouvernement français a demandé, le 24 février 1913, entre autres concessions, celle d'une ligne de chemin de fer en Arménie. La ligne Samsoun-Sivas- Kharpout-Diarbékir devrait être concédée définitivement (en régie) à une société française, et ce tracé serait com- plété par la ligne Diarbékir-Erzeroum-Trébizonde. La Rus- sie, sans le consentement de laquelle la Turquie ne peut entreprendre la construction d'aucune voie ferrée dans le voisinage de la mer Noire, ne fait pas d'objection à ce pro- jet; peut-être demandera-t-elle cependant que le chemin de fer, au lieu de pénétrer jusqu'à Erzeroum, au cœur de l'Arménie, ne dépasse point Erzinian. On ne saurait trop attirer rattention sur l'importance de ce projet, dont la réalisation ouvrira l'Arménie à des influences qui jusqu'à présent ne pouvaient l'atteindre, et favorisera le dévelop- pement économique d'une région dont les ressources naturelles sont considérables et encore à peu près inex- ploitées. OBSERVATIONS GÉNÉRALES Utilité de nos œuvres en Orient. — Si, après avoir parcouru le Levant et visité la plupart des établis- sements que la France y entretient, je devais résumer mon impression en deux mots, je dirais que toutes nos missions en Orient font œuvre utile à notre pays, et qu'elles feraient œuvre plus utile encore, si nous savions tirer meil- leur parti des avanta.^es qu'elles nous procurent. Toutes nos missions font œuvre utile, qu'elles soient laïques ou religieuses. Loin de se faire concurrence entre elles, elles exercent les unes sur les autres une action réciproque d'é- mulation et de modération, qui tourne au bénéfice com- mun. iNi la mission laïque ne fait une propagande anti- religieuse en Orient, ni les congrégations n'y font une propagande catholique : voilà la règle très générale, dont quelques rares exceptions, d'une part ou de l'autre, n'in- firment point la valeur. Le plus large esprit de tolérance m'a paru régner dans tous les établissements français : ceux qui les dirigent s'efforcent de favoriser le développe- ment de notre langue et de notre influence; et, avant tout, ils ont conscience d'accomplir une œuvre d'humanité et de civilisation. C'est même ce dernier sentiment qui, en leur assurant les sympathies très marquées des populations parmi lesquelles ils vivent et travaillent, constitue la supé- riorité de leurs œuvres sur celles des missions étrangères, qui poursuivent ouvertement, tantôt un dessein de propa- 280 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE gaiide religieuse, tantôt un but politique. « Les autres Européens travaillent et dépensent pour eux, — m'a-t-on répété souvent en Orient, — seuls les Français travaillent et dépensent pour nous ». Nos œuvres et nos intérêts. — Mais peut-être poussons-nous trop loin ce désintéressement auquel les Orientaux se plaisent à rendre hommage. Par nos œuvres d'enseignement, par nos œuvres d'assistance, nou^ appre- nons aux populations du Levant à connaître notre langue et nos idées, à respecter la grandeur et la puissance de notre pays et à bénir sa générosité. Nous créons ainsi à notre profit une situation avantageuse, et pour ainsi dire privilégiée : mais les avantages, les privilèges qui résultent de cette situation que nous avons acquise au prix de longs et pénibles efforts, nous négligeons trop souvent d'en tirer parti. Nous n'en faisons profiter ni notre commerce, ni notre industrie. Bien plus, nous laissons nos concurrents et nos adversaires tirer eux-mêmes avantage des conditions que nous avons crées à nos frais. On pourrait croire que, dans certaines régions, nous n'avons instruit, élevé, civilisé les indigènes que pour permettre à d'autres de les exploiter plus facilement et avec plus de profit. II serait trop long d'énumérer ici des exemples, qui se présenteront naturel- lement à tous les esprits. Autant il serait malséant, con- traire aux traditions et au génie de notre race, de donner à notre œuvre en Orient un caractère d'entreprise utili- taire et immédiatement intéressée, autant il serait naturel et il pourrait sembler opportun que nous nous assurions à nous-mêmes le bénéfice des efforts accomplis par nos nationaux, avec l'encouragement et les subsides de notre gouvernement, plutôt que de laisser à d'autres toute liberté de se l'approprier, à notre plus grand détriment. Importance des œuvres d'assistance. — J'ai DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 281 déjà insisté à plusieurs reprises, au cours de cette étude, sur rimportance des œuvres d'assistance que nos missions ont instituées on Orient. On ne saurait trop se persuader que les hôpitaux, les asiles, les crèches et les dispensaires ont contribué autant et peut-être plus que les écoles à nous gagner la sympathie et le respect des populations orien- tales et à élever noire prestige au-dessus de celui des autres nations. La vérité est que les œuvres d'enseignement et les œuvres d'assistance se complètent admirablement et ne devraient jamais être séparées. C'est ce que les mission- naires congréganistes ont fort bien compris. lisse sont fait une règle de n'établir nulle part un collège ou une école payante, sans ouvrir en même temps une école gratuite. Dans les établissements des Lazaristes, des Dominicains, des Frères de la Doctrine chrétienne, dans ceux de la plu- part des religieuses, l'école gratuite est organisée aussi soi- gneusement que l'école payante ; les enfants des riches et ceux des pauvres sont entourés de la même sollicitude. On fournit gratuitement les cahiers et les livres à ceux qui ne peuvent pas lés payer. Beaucoup d'enfants trouvent à Té- cole le repas de midi ; à l'entrée de la mauvaise saison, les plus assidus et les plus misérables reçoivent des vêtements et des chaussures; et souvent le succès de l'école gratuite, assuré par de tels moyens, entraînece lui de l'école payante ou du collège. Dans les villages, une même maison abrite le plus sou- vent l'école et le dispensaire. Dans les villes, nos religieux s'ingénient à soulager toutes les misères : ils ouvrent des asiles pour les vieillards, pour les infirmes, pour les sourds-muets, pour les aveugles; les enfants abandonnés, les orphelins sont recueillis et élevés. L'assistance accor- dée aux enfants et aux vieillards suscite tout particulière- ment l'admiration des Orientaux. Notre pitié les touche 282 RAPPORT AU COMITE DE DÉFENSE plus profondément que notre culture. Aussi ne faut-il point s'étonner si, malgré la compétence et le zèle des maîtres, nos écoles laïques ne se développent pas en Orient aussi rapidement que nos écoles religieuses. Ce qui man- que à celles-là, et ce que celles-ci possèdent, c'est Tim- mense prestige que donne la charité. Utilité d'un enseignement pratique et pro- fessionnel. — Toutes nos institutions d'enseignement, facultés, lycées, collèges, écoles, asiles d'enfants, contri- buent à développer notre influence. iMais il est aisé de constater et d'ailleurs facile à comprendre que les établis- sements qui répondent le mieux aux besoins des popula- tions orientales sont aussi ceux qui nous rendent à nous- mêmes les plus grands services. Or, — si l'on excepte les « séminaires orientaux » , où les religieux français forment selon nos méthodes et pénètrent de notre esprit des jeunes gens qui, soit comme prêtres, soit comme professeurs, et souvent dans ces deux qualités ensemble, s'emploieront à répandre l'influence française dans les pays d'Orient, — nos institutions d'enseignement supérieur et d'enseignement se- condaire sont loin de donner des résultats proportionnés aux sacrifices qu'ils exigent. Dans les lycées et dans les collèges, les classes prépara- toires sont très fréquentées, mais les classes supérieures n'ont pas d'élèves . Plus l'enseignement donné présente un caractère pratique et pour ainsi dire utilitaire, et plus il a de succès. La philosophie, la rhétorique, l'histoire de la littérature française ou européenne, et même Thistoire propremeïit dite laissent la plupart des jeunes gens in- difl'érents; au contraire, ils étudient avec passion le com- merce, la banque, la comptabilité, et ils s'intéressent vi- vement aux sciences, pour peu qu'on leur en montre les applications à l'industrie, à l'agriculture, en un mot à la DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 283 vie pratique. Nous ne pouvons pas ne pas tenir compte de ces préférences et des aptitudes qu'elles révèlent. Tous les eftbrts que nous ferons pour transporter dans un pays fort différent du nôtre un enseignement secondaire ou supé- rieur qui répond à notre culture, à nos traditions et à nos besoins particuliers seront toujours fort coûteux et à peu près inutiles. La « culture générale » d'un Oriental ne peut pas être identique A celle d'un Français, et il ne nous servirait de rien qu'elle le fût. Mais nous favoriserons tout ensemble les intérêts de ces pays et les nôtres, en développant l'enseignement pratique des sciences, et en multipliant les écoles professionnelles. Enfin, nous n'aurons pas fait un mauvais calcul, si nous demandons la plus grande somme de résultats et si nous consacrons la meilleure part de nos ressources au déve- loppement et au perfectionnement de l'instruction élémen- taire. Avant de créer une faculté ou un lycée dans le Le- vant, il faudrait toujours se demander combien d'écoles primaires pourraient être fondées et entretenues avec l'ar- gent que coûtera le lycée ou la faculté. Enseignement des langues indigènes. — L'un des plus grands progrès accomplis dans ces dernières années par nos institutions consiste dans l'introduction d'un enseignement complet des langues indigènes. Il n'y a plus aujourd'hui une école française en Orient où ne soient enseignées, en même temps que le français, les principales langues du pays : le turc, l'arabe, l'arménien, le chaldéen, suivant les régions. Même dans les provinces où la langue turque n'est pas généralement parlée par la population, elle est enseignée aux élèves de nos écoles, comme étant la langue officielle de l'empire. Dans les écoles supérieures, l'enseignement des littératures orien- tales, de l'histoire et de la géographie de l'Orient est 284 RAPPORT AU COMITE DE DEFENSE donné avec un soin tout particulier. Les directeurs de nos établissements d'instruction ne pouvaient pas mieux répondre à l'objection que le gouvernement ottoman avait naguère soulevée : on contestait l'utilité et la raison d'être des écoles françaises, dans les régions où il n'y a pas de Français. Il était indispensable que l'école française offrît aux jeunes Ottomans un enseignement organisé sui- vant nos méthodes, mais fondé sur leur culture nationale et répondant à leurs besoins les plus naturels. Nos mission- naires ont donné ainsi la preuve la meilleure et la plus opportune du désintéressement et de la tolérance dont leur œuvre est inspirée. On verra, en parcourant les statis- tiques, combien est variée la population de nos écoles, comment toutes les races et toutes les religions s'y ren- contrent, comment les musulmans y voisinent avec les chrétiens de tous les rites, qu'ils soient unis à l'Église Romaine ou qu'ils en soient séparés. Il suffira d'examiner les tableaux où les élèves de nos écoles sont répartis par confession, pour comprendre à quel point est injuste le reproche adressé parfois aux missionnaires français congré- ganistes de ne consacrer leurs soins qu'à leurs coreligion- naires et de ne travailler que pour l'Église catholique. Recrutement des maîtres indigènes, la ques- tion des écoles normales. — Dans la plupart de nos écoles, l'enseignement des langues orientales est confié à des maîtres indigènes; dans un grand nombre de nos missions, surtout dans celles de l'intérieur, nos religieux, qui ne peuvent diriger eux-mêmes toutes leurs écoles, sont obligés de se faire assister par des maîtres auxiliaires qu'ils choisissent autant que possible parmi leurs anciens élèves. Le recrutement de ces maîtres indigènes est souvent fort difficile. Les missions françaises, faute de ressources DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 285 suffisantes, ne peuvent offrir aux maîtres que des ti'aite- ments très modestes, notablement inférieurs à ceux que leur assurent certaines missions étrangères. Une autre difficulté provient des conditions imposées par le gouver- nement de Constantinople aux maitres qui enseignent dans les établissements étrangers : nous y reviendrons plus loin. Plus nos écoles se multiplient, et plus le rôle des auxiliaires indigènes augmente d'importance. Il ne faut pas trop compter sur le sentiment de reconnaissance qui peut quelquefois retenir les anciens élèves au service de l'école où ils ont eux-mêmes reçu l'instruction : en fait, les jeunes gens qui sont devenus capables d'enseigner, avec leur propre langue, un peu de français, acceptent tout naturellement les propositions les plus avantageuses, et c'est ainsi qu'un grand nombre d'indigènes, formés dans nos écoles, passent au service de nos concurrents et deviennent d'excellents instruments de rinfluence étran- gère. Cet inconvénient subsistera aussi longtemps que nos missionnaires n'auront pas été mis en mesure d'offrir à leurs auxiliaires indigènes une rétribution plus conve- nable. Dans d'autres missions, ce n'est pas le nombre des maî- tres qui est insuffisant, c'est leur qualité. L'école est ouverte sous le patronage de la France; on doit y ensei- gner la langue du pays et la langue française. Mais, en réalité, le maître ne connaît pas assez bien le français pour l'enseigner; le nombre des élèves inscrits au cours de fran- çais diminue rapidement; bientôt ce cours n'existe plus que sur le prôgamme, et l'école, au point de vue de l'in- fluence française, ne donne aucun résultat. Il en est ainsi, par exemple, de plusieurs de nos écoles du Liban. Le pro- blème se pose dans les termes les plus pressants ; il faut, ou fermer nos écoles, ou leur assurer un personnel capable 286 RAPPORT AU COMITE DE DEFENSE de les faire servir à l'usage pour lequel elles ont été créées. C'est pourquoi la création d'écoles normales d'instituteurs et d'institutrices doit être considérée comme absolument nécessaire. Deux systèmes sont en présence : celui que l'Alliance israélite universelle a adopté, et celui qui est actuellement pratiqué par la Société russe de Palestine. L'Alliance israé- lite envoie les meilleurs élèves de ses écoles d'Orient dans un institut spécial, admirablement organisé : l'Ecole nor- male d'Auteuil. Là les futurs maîtres, sans négliger d'ap- profondir l'étude de leur propre langue et leur culture nationale, se perfectionnent dans la langue française, apprennent à enseigner suivant des méthodes soigneuse- ment élaborées à leur usage et à l'usage des enfants orien- taux qu'ils sont appelés à instruire. Leur préparation ache- vée, ils rentrent dans leur pays, et vont enseigner dans les écoles de l'Alliance. Le principal avantage de ce système m'a paru être que, la formation de tous les maîtres étant identique et les méthodes invariablement fixées, les élèves n'ont jamais à souffrir des changements qui peuvent sub- venir dans le personnel enseignant ; ils font sans effort inutile des progrès continus ; leur instruction ne présente point de lacune. J'ai déjà dit avec quelle perfection notre langue est enseignée dans les écoles de l'Alliance israélite : les résultats obtenus témoignent assez de la qualité des maîtres et de l'excellence de leur formation. La Société russe de Palestine a assuré le recrutement de son personnel en fondant deux écoles normales au centre même de la région où sont situés ses établissements : l'école d'instituteurs est établie à Nazareth, celle d'insti- tutrices à Beit-Djala (v. plus haut). On n'éloigne pas les futurs maîtres du pays où ils sont nés et où ils doivent enseigner : on se contente de les placer pendant quelques DES INTÉRÊTS FRANÇAIS DE DÉFENSE. 287 années sous la direction de bons professeurs russes, qui les forment à leurs propres méthodes. Aucun engagement n'est exigé des élèves : l'engagement ne constituerait point une garantie. Dans la pratique, la plupart des élèves en- trent et restent au service de la Société, et lui donnent une entière satisfaction. Il n'y a pas à tenir grand compte d'un essai malheureux de la Société allemande de Cologne. L'école normale ouverte par cette société à Jérusalem, dans les locaux de l'hospice Saint-Pierre, n'a donné aucun résultat : les élèves, recrutés à Jérusalem, c'est-à-dire dans un milieu composite de nomades et de déracinés, profitaient de leur séjour à l'école pour apprendre gratuitement les langues européennes; après quoi ils allaient se placer comme por- tiers d'hôtel ou comme interprètes en Syrie ou en Egypte. Cette expérience prouve que c'est dans les villages qu'il faut recruter de préférence les jeunes gens destinés à diriger des écoles de villages; les Russes l'ont fort bien compris. Le système adopté par la Société russe me paraît être de tous le plus économique et le plus avantageux : l'école normale est établie dans le pays ; on ne dépayse pas les futurs maîtres; six années d'étude et d'apprentissage, sous la direction de professeurs éprouvés, suffisent à donner à ces jeunes gens la formation intellectuelle et pédagogique spéciale qui les rend aptes à remplir la mission pour laquelle on les destine. Ce qui importerait surtout, c'est que nos écoles normales d'instituteurs et d'institutrices fussent dirigées par d'excel- lents professeurs français, ayant non seulement une com- pétence pédagogique, mais encore une expérience profonde du caractère oriental. J'ai signalé plus haut le projet d'école normale élaboré par l'archevêque grec-catholique 288 RAPPORT AU COMITE DE DÉFENSE de Caïffa et soumis par lui à l'examen du ministère fran- çais des Affaires étrangères. Ce prélat s'offre à fournir gra- tuitement un terrain pour la construction de l'école; par contre, il se réserverait un droit de contrôle sur les pro- grammes et sur les professeurs. Ce plan répond aux besoins particuliers de l'archevêque de Caïffa et de ses écoles ; il mérite notre intérêt dans la mesure où ces écoles servent à répandre notre influence ; mais il est loin de satisfaire à nos propres besoins. Les écoles normales dans lesquelles nous formerons nos maitres indigènes doivent être exclusivement françaises, dirigées par des professeurs français indépendants de tout contrôle ou de toute influence indigène. Étant donné l'étendue et la diversité des régions sur lesquelles s'exerce notre action, nous devons prévoir la création de plusieurs écoles normales, dont les unes seront destinées aux pays de langue turque, les autres aux pays de langue arabe, etc., etc.. Il faudra tenir compte des essais et des projets de nos missionnaires qui, depuis quel- ques années, ont fait de grands efforts pour former des maitres indigènes qui soient à la hauteur de leur tâche. Les supérieurs de mission ont fait preuve, le plus sou- vent, d'une grande expérience, mise au service d'un zèle admirable; mais ils manquent de moyens financiers. Si l'on recommande en principe le recrutement ré- gional et la formation sur place des maitres indigènes, on ne méconnaît pourtant pas l'utilité qu'il y aurait à préparer en France quelques bons directeurs d'école pour l'Orient. -L'Allemagne s'est depuis longtemps préoccupée d'une telle entreprise : elle forme des maîtres et des professeurs, non seulement pour ses propres écoles, mais aussi pour les écoles ottomanes. Aux maîtres qu'il envoie ou délègue en Orient, le gouvernement allemand accorde des faveurs DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 289 considérables : exemption de deux années de service mili- taire, années comptées doubles pour la retraite, augmen- tation du traitement, etc. Si la France était en mesure de fournir au gouvernement ottoman pour ses écoles des professeurs spécialement préparés à cet effet, elle s'as- surerait un moyen d'influence dont TAllemagne n'a pas manqué de se servir. Recrutement des missionnaires congréga- nistes. — Nos missionnaires congréganistes n'ont été amenés à s'associer un si grand nombre d'auxiliaires indi- gènes, qu'en raison de la difficulté qu'ils éprouvent eux- mêmes à se recruter. Dans plusieurs de nos missions, et je parle des plus anciennes et des plus florissantes, on pré- voit déjà le jour où le personnel français ne suffira plus à as- surer le fonctionnement des œuvres d'instruction et d'assis- tance actuellement existantes. Nos missionnaires se verront contraints, ou de restreindre leur activité et d'abandonner une partie de leurs entreprises, ou d'appeler à leur aide des religieux de nationalité non française, ce qui compro- mettrait le caractère de leur œuvre et diminuerait fort le profit que nous en retirons. Les Maristes français, qui sont d'excellents éducateurs et dont on réclame le concours dans un grand nombre de missions, ne trouvent plus à se recruter en France depuis 1903. L'année 1911 leur a donné trois sujets, alors qu'il leur en eut fallu dix, rien que pour combler les vides faits par la maladie, les congés en France et le service militaire. Le supérieur des missions d'Orient avait besoin de quarante frères en 1912; on lui en a envoyé quatre. Les Frères de la Doctrine chrétienne en sont réduits à vivre sur leurs réserves. Les noviciats qu'ils ont établis en Italie (à Favaria . Canavese, pour l'Egypte et la Syrie, à Rival ta Torinese pour le reste de la Turquie) ne remplacent que très désavantage usement ceux INTÉRLTS EN OlilEXT. 19 290 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE qu'ils possédaient autrefois en France. Les parents français hésitent à laisser partir leurs jeunes enfants pour l'étran- ger. Aussi a-t-on diî recruter des novices en Allemagne et en Italie. Sui- 91 sujets que comptait en 1911 le noviciat de Rivalta, il y avait 8 Allemands, 1 Luxembourgeois et 12 Ita- liens. On se demande jusqu'à quel point ces étrangers chargés d'enseigner dans les écoles françaises d'Orient pourront remplacer des maîtres français, et s'ils se sou- cieront beaucoup d'inculquer à leurs élèves l'amour d'une patrie qui n'est pas la leur. Les Frères de la Doctrine chré- tienne calculent que, dans ces dernières années, un quart seulement des novices qui étaient rentrés en France pour accomplir leur service militaire, sont revenus ensuite au noviciat. Il en va à peu près de même pour toutes les autres congrégations qui fournissent des missionnaires à l'Orient. Les noviciats installés à l'étranger sont de plus en plus désertés par les Français ; on comble les vides avec des Belges, des Allemands et des Italiens. On parvient ainsi tant bien que mal à assurer le nombre nécessaire : mais la qualité? Nos concurrents en Orient connaissent cet état de choses ; la diminution croissante du nombre de nos missionnaires est une des raisons qu'ils invoquent le plus volontiers pour justifier leurs entreprises et pour fonder leurs calculs. On peut prévoir le moment où certaines missions du Levant, qui ont été créées et développées par des religieux français, passeront aux mains des étrangers, faute d'un personnel français assez nombreux pour les desservir. C'est avec une tristesse profonde que les supérieurs de quelques-unes de nos missions m'ont confié leurs appréhensions et avoué leur impuissance. Je ne puis que signaler ici le grave dan- ger qui menace nos œuvres et notre influence en Orient : il ne m'appartient pas de rechercher quels moyens seraient DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 291 propres à Técarter. Les missionnaires congréganistes ont été de tout temps les meilleurs ouvriers de Tinfluence française dans le Levant : ils en sont encore aujourd'hui les instruments les plus efficaces, les mieux appropriés et les moins coûteux. Quelle qu'ait pu être à leur égard l'atti- tude des pouvoirs publics, ni le zèle de nos religieux n'a diminué, ni leur dévouement à la France. Quant au pres- tige dont ils jouissent dans ces pays, où leur charité s'est exercée depuis des siècles sous tant de formes utiles et où un respect particulier s'attache à tout ce qui est religieux, c'est peu de dire qu'il est demeuré intact : il n'a pas cessé d'augmenter. On ne voit pas que des laïques, si bien pré- parés et si entièrement dévoués qu'ils soient à leur mission, puissent reprendre en Orient la place que les congre- ganistes y occupent. La conclusion qui s'impose, c'est que l'avenir de notre action et de notre influence dans les pays du Levant est, pour une très grande part, entre les mains de nos religieux. Si nous ne voulons pas condamner nous-mêmes notre œuvre à un déclin rapide et à une ruine irréparable, il faut donner à ceux qui la soutiennent et qui la développent les moyens de renouveler régulière- ment leurs forces, et de recruter en France des éléments assez nombreux pour que toutes nos missions puissent conserver, sinon étendre leur champ d'action, sans faire appel au concours étranger. Subventions attribuées aux œuvres d' Orient. — Si considérables que soient les suljventions accordées par le gouvernement français à nos missions d'Orient, elles paraissent encore très insuffisantes, si l'on songe au nombre des établissements dont il faut assurer l'entretien et si l'on compare les ressources dont disposent les mis- sions françaises à celles qui sont attribuées aux missions étrangères, soit par les gouvernements soit par les sociétés 292 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE privées. Si le Comité d'Orient, suivant l'exemple de quelques organisations étrangères, entreprenait d'assurer à nos missions du Levant un supplément de ressources, peut-être devrait-il tenir compte des observations suivantes. Les subventions annuelles accordées par le gouverne- ment français à chacun de nos établissements sont géné- ralement très faibles et ne produisent qu'un effet utile très limité. Une somme importante^, attribuée tout d'une fois, en vue de répondre à un besoin déterminé (construction ou agrandissement d'une école ou d'un hôpital) permettrait d'obtenir, sur certains points, des résultats plus tangibles et plus décisifs, à condition que l'emploi en fût toujours rigoureusement contrôlé. La plupart de nos supérieurs de mission demandent que les subventions, au lieu d'être distribuées directement à chaque établissement, soient attribuées à la mission elle- même, pour être ensuite réparties entre les œuvres qui en dépendent. Les supérieurs de mission s'engageraient d'ail- leurs à respecter les attributions particulières qui leur seraient indiquées. Là encore, un contrôle minutieux serait de rigueur. L'importance des subventions accordées aux divers éta- blissements devrait être mesurée à celle des services que ces établissements rendent ou sont susceptibles de rendre à notre influence. Il ne convient pas, du moins en règle générale, de faire entrer en ligne de compte d'autres con- sidérations. Sous prétexte de tenir la balance égale entre les œuvres laïques et les œuvres congréganistes, nous avons parfois dépensé en pure perte des sommes considé- rables. Si l'école laïque n'a que cinquante élèves, tandis que l'école religieuse en a cinq cents, ou inversement, il n'y a aucune raison d'attribuer à la première une subven- tion égale à celle qu'on accorde à la seconde. Le premier DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 293 soin doit être de reconnaître ce qu'on peut attendre de chaque établissement, à quels besoins il répond, en quoi il est utile : on jugera par là, et par là seulement, s'il y a lieu d'en favoriser le développement, par quels moyens, et dans quelle mesure. A défaut de subvention en argent, qu'il n'est pas toujours possible d'accorder, certaines subventions en nature témoi- gneraient fort utilement de l'intérêt que nous portons à nos missions d'Orient. V Alliance française l'a bien com- pris et nous oiïre à cet égard un exemple à suivre. Plu- sieurs des sections orientales de l'Alliance française ont organisé des « magasins » de livres, de tableaux de lecture et de fournitures scolaires pour les écoles les plus dépour- vues, et, dans la mesure de leurs ressources, répondent par des envois aux demandes qui leur sont adressées. Lors- qu'on songe à l'énorme quantité de manuels scolaires que les changements de programme ont mis hors d'usage, qui s'accumulent dans les réserves ou se vendent au poids du papier, et qu'on voit là-bas les maîtres d'école grouper les élèves par cinq ou par six, pour qu'ils suivent sur le même livre la leçon de français, on est bien obligé d'avouer, que, si notre langue n'est pas mieux enseignée et mieux connue dans les pays d'Orient, la faute en est à notre négligence et à notre mauvaise organisation. Il m'a été pénible de voir, accrochés aux murs de petites écoles françaises, des cartes et des tableaux imprimés en italien, dus à la géné- rosité avisée de l'Association nationale de Turin. « On nous les a offerts gratuitement, me disait le maître ; nous n'en avions pas, nous avons accepté ». Dans la classe supérieure d'une école arménienne, à Constantinople, j'avais admiré l'étendue et la précision des connaissances littéraires que les élèves avaient montrées par leurs réponses, et je de- mandai à l'un d'eux de lire à haute voix une scène de 294 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE notre théâtre classique, à laquelle il avait lui-même fait allusion. Il y eut dans la classe un visible embarras; le professeur y mit fin en m' expliquant à voix basse qu'il était seul à posséder un « Théâtre classique », et qu'il le pas- sait à tour de rôle à chacun de ses élèves : plus d'un insistait pour garder le livre plus longtemps qu'il n'était convenu. J'ai vu des écoles de village où, en dehors de deux ou trois syllabaires à l'usage des tout petits, il n'y avait pas un seul livre français. Dans la plupart de nos collèges, les bibliothèques scolaires sont insuffisantes; il en est de même dans les cercles de jeunes gens organisés par nos missions : et pourtant, quel meilleur moyen d'en- tretenir les anciens élèves de nos écoles dans la connais- sance du français, que de leur faire trouver, au cercle où ils viennent le soir ou le dimanche, quelques ouvrages français attrayants, quelques revues ou quelques journaux bien choisis? La plupart de nos missions n'arrivent qu'à grand'peine à pourvoir leurs écoles des livres et des fournitures stricte- ment nécessaires; c'est dire qu'elles n'ont pas le moyen d'acheter des livres de lecture, de s'abonner à des revues ou à des journaux français. Mais serait-il si difficile de leur venir en aide? Sans parler de l'immense service que le ministère de l'Instruction publique pourrait rendre à nos établissements scolaires du Levant^ en disposant en leur faveur des livres et manuels qui ne sont plus en usage dans nos écoles de France, n'obtiendrions-nous pas aisément des grands éditeurs d'ouvrages classiques qu'ils cédassent à bon compte ou même gratuitement aux écoles françaises d'Orient leurs stocks inutilisés? quel directeur de magazine ou de journal refuserait de contribuer à l'expansion de notre langue et de notre influence en consentant à nos collèges, à nos cercles, à nos œuvres postscolaires quel- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 295 ques abonnements gratuits où à prix très réduit? En ce qui concerne les livres, le prix d'achat en est souvent plus que doublé par les frais d'expédition. Les Compagnies fran- çaises de navigation et de chemin de fer feraient œuvre utile et méritoire, en consentant à transporter gratuite- ment chaque année quelques tonnes de fournitures scolai- res, à destination de nos établissements d'Orient. Au prix de très minces sacrifices, on assurerait ainsi des bénéfices considérables. Ce qui importe surtout, c'est que tous les collaborateurs de l'œuvre française en Orient, si humbles qu'ils soient, obtiennent de nous quelque marque d'intérêt et de recon- naissance, qu'ils soient persuadés que la nation pour la- quelle ils travaillent et se dévouent n'ignore point leurs efforts. Un prix d'une valeur de quelques francs, attribué chaque année à Félève connaissant le mieux le français, suffirait souvent à prouver aux maîtres et aux élèves que nous savons qu'ils existent, que nous nous intéressons à eux, et à produire dans ces milieux simples et impressionnables les plus favorables effets. Combien de petites écoles grec- ques, arméniennes, israélites, qui ne figurent pas sur nos listes officielles et dans lesquelles pourtant notre langue est enseignée, seraient heureuses de recevoir de nous, à défaut d'un secours pécuniaire que souvent elles ne deman- dent môme pas, un encouragement moral, témoignage de notre attention et de notre reconnaissance ! Les intérêts français en Orient et le gouver- nement ottoman. — Je n'ai pas à rapporter ici en détail les nombreuses conversations que j'ai eues sur ce sujet, soit à Constantinople avec des membres du gou7 vernement ou du parlement, soit au cours de mon voyage en Turquie d'Asie avec les hauts fonctionnaires otto- mans ; il n'y a point place dans cette étude pour les ques- 296 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE tions d'ordre purement politique. Cependant, avant d'ex- poser quelques remarques sur l'attitude du gouvernement ottoman à l'égard de nos œuvres d'enseignement, je vou- drais caractériser, à un point de vue plus général, les dis- positions des milieux officiels, en rapportant les termes essentiels d'un entretien que j'eus à Constantinople avec un personnage très autorisé. <( La France, me disait-il, bénéficie en Orient d'une si- tuation considérable et acquise depuis longtemps. Tout ce que nous valons^ tout ce que nous sommes, c'est à la France que nous le devons. Ses intérêts en Orient, nous les connaissons et nous entendons les respecter. Nous sommes tout disposés à faire appel au concours des Fran- çais pour de nombreuses entreprises. Aujourd'hui, comme autrefois, c'est sur la France que nous comptons, ou que nous voudrions pouvoir compter. Mais nous lui demandons de nous envoyer des hommes qui nous aident et qui nous conseillent, qui ne se soucient pas seulement de leurs affaires, mais aussi des nôtres, qui sachent concilier les intérêts français et les intérêts ottomans. (( La France a chez nous une immense réputation à sou- tenir : cette réputation, tous les Français qni viennent tra- vailler en Orient ne contribuent pas également à la sau- vegarder... Nous voulons bien que la Turquie soit traitée par vous en pays d'influence, mais non pas en pays de co- lonisation ou d^ exploitation. Avec les meilleures intentions du monde, quelques-uns des fonctionnaires que nous vous avons empruntés ont voulu appliquer à nos maladies particulières et invétérées des remèdes tout faits, que notre organisation n'est pas assez forte pour supporter. Les remèdes n'ont point agi, et on a attribué l'échec à notre mauvaise volonté. On oublie trop, lorsqu'on nous juge, les conditions de notre pays, et les difficultés inhé- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 297 rentes à une organisation encore imparfaite. » Ces propos, qui m'étaient tenus avant la guerre turco-balkanique, n'ont assurément rien perdu de leur valeur : j'ai pensé qu'entre tant d'autres il convenait de les retenir. En ce qui concerne plus particulièrement nos écoles, les dispositions du gouvernement ottoman, depuis la révo- lution, sont devenues moins favorables qu'elles n'étaient autrefois. Jusqu'en 1908, nous n'avions aucune difficulté à ouvrir des écoles : on sollicitait le firman indispensable, on l'obtenait après l'accomplissement de quelques forma- lités, et tout était dit. Nos établissements scolaires étaient exempts d'impôts; les maîtres indigènes qui y ensei- gnaient étaient dispensés du service militaire ; le gouver- nement n'exerçait aucun contrôle ni sur les livres ni sur les programmes, et reconnaissait les diplômes délivrés par les directeurs de nos institutions. Lorsque les Jeunes-Turcs sont arrivés au pouvoir, un de leurs premiers soins a été de soumettre les écoles étran- gères aux impôts établis sur la propriété bâtie; puis ils ont cherché, par divers moyens, à empêcher les étrangers d'ouvrir de nouvelles écoles sur le territoire de l'empire ottoman. D'une part, ils voient d'un mauvais œil la France protéger et subventionner dans l'empire des écoles grecques et arméniennes, et contribuer ainsi à retarder la réalisa- tion de cette « unité nationale » qu'ils ont rêvée. D'autre part, ils admettent moins aisément l'utilité d'un enseigne- ment qui développe chez les enfants ottomans la connais- sance d'une langue étrangère, et leur inspire un certain attachement pour un pays étranger, pour ses œuvres, pour ses idées et son esprit. Le gouvernement a invoqué l'article 9 de la loi de 1869 sur l'instruction publique, — article que les missions étrangères avaient alors refusé de reconnaître, — pour 298 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE requérir un certain nombre de conditions restrictives de nos anciens droits : les maîtres européens devront être mu- nis des mêmes diplômes qu'on exige d'eux dans leur pays d'origine pour leur permettre d'ouvrir une école ; le gou- vernement ottoman se réserve le droit de contrôler les livres et les programmes et d'inspecter les écoles. Faute de se soumettre à ces conditions, les écoles nouvellement ou- vertes ne sont pas officiellement reconnues; on les con- sidère comme des écoles privées; les diplômes qu'elles délivrent n'ont aucune valeur officielle et ne donnent point accès aux écoles supérieures du gouvernement; les élèves ne peuvent obtenir aucune dispense, aucun sursis pour le service militaire; les maîtres indigènes sont soumis aux prescriptions ordinaires de la loi sur le recrutement. Jusqu'à présent, les rapports personnels des consuls fran- çais avec les fonctionnaires ottomans ont permis, dans un certain nombre de cas, de tourner ou d'aplanir les difficultés. Mais la situation n'en reste pas moins très cri- tique pour l'avenir. Les autres puissances étrangères ont accepté, sinon officiellement, du moins en pratique, les nouvelles condi- tions imposées par le gouvernement. Il est possible d'ail- leurs que quelques-unes ne se soient montrées si dociles, que pour aggraver l'embarras de notre situation. L'Alle- magne, qui ne fonde guère en Turquie que des écoles « ottomanes » , n'a éprouvé aucune gêne à se plier aux nouvelles exigences de la Porte. Nous avions au contraire de fort bonnes raisons pour nous y opposer. Parmi les demandes que notre ambassadeur à Gonstantinople a pré- sentées récemment au grand vizir, il y en a une qui con- cerne le régime des écoles françaises : notre gouverne- ment exprime le désir que les firmans qui permettent l'ouverture de certaines écoles et de certains autres établis- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 299 semcnts actuellement en instance d'autorisation, « soient délivrés suivant les principes établis par l'accord franco- ottoman de 1901 ». Il faut espérer que le gouvernement ottoman s'empressera de faire droit à ce légitime désir, ou que, dans le cas contraire, nous ne négligerons aucun moyen pour vaincre sa résistance. Parmi les missions françaises, seules, jusqu'à présent, quelques missions protestantes et Israélites se sont décla- rées prêtes à accepter les conditions du gouvernement ottoman; la mission laïque, comme les missions catho- liques, s'y opposent très énergiquement. Et voici quelques- unes des raisons qui justifient leur résistance. Tout d'a- bord il s'agit, pour la France, de maintenir un privilège traditionnel et bien établi. En second lieu, un consente- ment facile encouragerait fort mal à propos le gouver- nement turc, qui, jusqu'à présent, hésite à appliquer le nouveau règlement. Enfin il y a un réel danger à ad- mettre le contrôle des autorités ottomanes sur nos pro- grammes, sur nos livres et sur l'enseignement de nos pro- fesseurs. Les fonctionnaires turcs sont souvent incompé- tents, ils peuvent être quelquefois mal intentionnés. On ne voit pas bien sur quels principes et sur quelle expé- rience se fonderaient des inspecteurs ottomans pour re- viser les programmes d'enseignement ou pour critiquer les méthodes d'éducation en usage dans nos institutions de jeunes filles. Les congréganistes français, et, en particulier le supé- rieur des Lazaristes et le supérieur des Jésuites, estiment que, si l'on peut, à la rigueur, céder sur la question des impôts, il serait très dangereux d'admettre les prétentions relatives au contrôle et à l'inspection. La présence du Consul de France à côté de l'inspecteur ottoman, lors de la visite, ne serait une garantie que pour les écoles établies 300 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE dans les grandes villes : dans les centres moins impor- tants, l'agent consulaire, qui est le plus souvent un indi- gène, serait exposé à subir lïnfluence du fonctionnaire ottoman; dans les villages, l'arbitraire de ce dernier ne rencontrerait aucune résistance. Mais, en même temps, nos congréganistes sentent la nécessité de répondre à certaines objections des Jeunes- Turcs contre l'utilité et la raison d'être des écoles étran- gères. C'est pourquoi, non contents d'enseigner à leurs élèves les langues usitées dans le pays, ils s'efforcent de rendre l'étude de la langue turque obligatoire dans toutes leurs écoles. Ainsi les Jésuites, dans leurs missions d'Arménie, font enseigner le turc, langue officielle, au même titre que l'arménien, langue nationale, et par- viennent à se concilier par ce moyen les bonnes grâces des autorités ottomanes. Le maintien des privilèges de nos écoles est d'une im- portance considérable pour l'avenir de notre action et de notre influence en Orient. La question présente peut-être un moindre intérêt pour Gonstantinople, où le nombre des écoles existantes suffit aux besoins de la population et où nos établissements ne font que rarement appel au con- cours de maîtres indigènes. Mais elle est très grave en ce qui concerne nos missions de l'intérieur, et en particulier celles de la Turquie d'Asie; le jour où le gouvernement ottoman, ne reconnaissant point nos écoles, refuserait aux maîtres qui y enseignent la dispense du service militaire, le recrutement de ces maîtres deviendrait presque impos- sible ; et le nombre de nos élèves diminuerait très rapide- ment, si le diplôme qu'on leur délivre à la fin de leurs études était privé de toute valeur officielle. Nos efforts doivent donc tendre, non seulement à maintenir l'ancien état de choses eu faveur des écoles actuellement existantes, DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 301 mais encore à en faire étendre le bénéfice à toutes celles qu'il nous conviendrait de créer à l'avenir. Cependant, dans des conjonctures aussi incertaines, nous ne devrons pas négliger de favoriser les écoles grec- ques e tarméniennes où notre langue est enseignée, et même de contribuer à leur création dans les régions où, pour le moment, nous ne pourrions pas sans difficulté ou- vrir nous-mêmes des écoles nouvelles. Les intérêts français en Orient et le Saint- Siège. — On a souvent agité en France, dans les milieux politiques et dans les journaux, la question de savoir quelles avaient été, au point de vue de notre situation en Orient, les conséquences de la loi de séparation, et il me semble que les faits que j'ai pu observer ne justifient pas entièrement certaines des conclusions qu'une partie de l'opinion française a admises sans les discuter. Les mesures législatives qui ont eu la répercussion la plus directe et la plus fâcheuse sur le développement de notre action dans le Levant, ce sont celles qui ont été prises contre les congrégations. En obligeant toutes les congrégations françaises à se dissoudre, et à transporter hors de France leurs maisons d'études et leurs noviciats, en leur ôtant toute possibilité pratique de se recruter en France, nous avons tari nous-mêmes la source qui alimen- tait depuis si longtemps la plupart, pour ne pas dire toutes nos missions d'Orient ; nous avons laissé le champ libre aux entreprises de nos concurrents; nous avons dégarni, comme pour les leur rendre plus accessibles, des positions acquises au prix d'immenses efforts. Il faudra réparer cette erreur, en offrant aux ordres religieux qui nous fournissent des missionnaires les moyens de recru- ter, pour leurs œuvres d'Orient, des contingents français. Il le faudra, ou bien renoncer définitivement à main- 302 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE tenir dans le Levant notre situation et notre influence. Les conséquences de la loi de Séparation ont été beau- coup moins graves, et même on n'en aperçoit que d'indi- rectes, qu'il eût été facile d'éviter si, tout en dénonçant le Concordat et en poursuivant l'établissement d'un nou- veau régime pour les Églises, nous avions eu soin de maintenir des relations normales avec le Saint-Siège. La Séparation n'a nullement ralenti le zèle de nos religieux ; elle n'a nullement altéré leur dévouement à la cause et aux intérêts de leur patrie. Mais la rupture des relations diplomatiques entre la France et le Vatican a été pour eux la source d'embarras considérables. Maintes fois, au cours de cette étude, j'ai été amené à signaler l'hostilité des agents pontificaux à l'égard de nos œuvres etr de nos ouvriers. A Gonstantinople, en Egypte, en Palestine, en Syrie, nous nous heurtons au mauvais vouloir de l'autorité romaine ou de ses représentants locaux. Les Délégués et les Vicaires apostoliques , le Custode de Terre Sainte disposent en Orient d'une influence considérable. Le moins qu'on puisse dire est qu'ils n'en usent point en notre faveur. Officiellement, le Saint-Siège continue de reconnaître nos titres et nos privilèges; il lui serait d'ailleurs fort difficile, et nullement avantageux, de les contester; pratiquement, il ne nous aide point à les maintenir, encore moins à les exercer. Les représentants de l'autorité romaine portent-ils à nos droits quelque atteinte, usent-ils de mauvais procédés à l'égard de nos religieux? nous n'avons aucun moyen efficace de nous faire rendre justice ou de provoquer à l'adresse du fonc- tionnaire maladroit ou malveillant un blâme ou un désa- veu. Les religieux français, pris entre les devoirs d'obéis- sance que leur impose leur état et les devoirs de patriotisme que leur dictent leurs sentiments, sont gênés et troublés DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 303 dans leur action. Ils hésitent à dénoncer certaines intri- gues, dont ils souffrent, et qu'en d'autres temps le gouvernement français eut connues, contre lesquelles il eût protesté, par des voies régulières. Ils hésitent de même à garder, vis-à-vis d'ordres injustes, une attitude de passivité ou de résistance, parce qu'ils ne se sentent point soutenus. Le plus souvent ils en sont réduits à s'incliner et à se taire, de peur d'aggraver encore le mal qu'ils n'ont point, à eux seuls, le pouvoir d'empê- cher. Si l'autorité romaine et ses représentants dans le Le- vant se bornaient à n'exercer aucune action en notre fa- veur, notre position et celle de nos religieux seraient encore soutenables. Mais ce n'est plus un secret pour per- sonne que, dans ces dernières années, les agents du gou- vernement italien et les représentants du Saint-Siège se prêtent en Orient un mutuel appui; on observe dans les démarches et dans les entreprises des uns et des autres un merveilleux accord, et c'est naturellement contre nous que cet accord est dirigé. Partout les religieux italiens. Fran- ciscains, Salésiens, Sœurs d'Ivrée, forts de la protection du gouvernement de Rome et de l'appui du Vatican, font aux missionnaires français une concurrence acharnée. Ils <> bénéficient tout à la fois des subventions de leur gouverne- ment, de celles que leur accordent des sociétés laïques, comme l'Association nationale de Turin et la Société Dante Alighieri, et des faveurs particulières de l'autorité ecclé- siastique ou de ses agents en Orient. Le Vatican et la Propagande ignorent officiellement, en raison de leur caractère anticlérical ou maçonnique, les sociétés qui subventionnent ou même, dans certains cas, prennent à leur service les missionnaires italiens; en pratique ils entretiennent avec elles des rapports constants, sont tenus 304 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE au courant de toutes leurs entreprises et contribuent volontiers à en assurer le succès. Ce fut de notre part une première faute, que de ne pas prévoir ces « combinaisons « ; c'en fut une seconde, plus lourde encore que la première, de les favoriser nous- mêmes en concluant avec l'Italie le déplorable arrange- ment d'août 1905. Désormais il est devenu très facile au gouvernement de Rome d'obtenir que, dans une mission dont il a intérêt à se servir, l'élément italien, dûment ren- forcé, l'emporte sur l'élément français. Les religieux sol- licitent alors pour leur établissement la protection ita- lienne, et le gouvernement de Rome s'empresse de faire droit à leur demande. Il est vrai qu'il est tenu de s'en- tendre préalablement avec le gouvernement français; mais .cette entente préalable est une simple formabté, et l'on ne voit pas que jusqu'à présent la. France ait jamais refusé son consentement. Trente-trois établissements ont ainsi abandonné l'un après l'autre notre protectorat; la plus récente défection est celle des Carmes de Syrie : ce ne sera sans doute pas la dernière. Il n'importe guère aux religieux italiens que la France ait fait tous les frais de leurs établissements, qu'elle les ait protégés dans des cir- constances difficiles : ceux que nous avions naguère le plus largement obligés ne sont pas aujourd'hui les moins ardents à nous combattre, et leur ingratitude a indigné jusqu'aux indigènes. Cependant, en Orient, on interprète ces changements dans le sens le plus défavorable à notre prestige : si les religieux étrangers recherchent une autre protection, n'est-ce point que la nôtre ne leur parait plus suffisamment efficace? et l'on conclut tout naturellement au déclin, à la déchéance de la nation française. Il n'y avait dans le Levant, avant 1905, qu'un seul « protecto- rat » : le protectorat français. Nous avons inventé nous- DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 305 mêmes un « protectorat italien » qui, officiellement, ' n'existe pas. L'Église catholique n'a pas cessé d'avoir besoin de notre appui en Orient, et nous n'avons pas cessé de le lui accor- der. Aujourd'hui encore la Fmnce est, de toutes les nations du monde, celle qui contribue le plus à soutenir les mis- sions catholiques du Levant; elle met à leur disposition, dans une large mesure, ses ressources financières et son influence politique. Il est de toute justice que de tels ser- vices soient reconnus. Puisque le Saint-Siège les accepte, et même les sollicite, nous sommes en droit d'attendre de lui et de tous ceux qui dépendent de lui, qu'ils ne con- trarient point notre action dans un pays où nous favorisons la leur. Nous ne songeons nullement à interrompre une tradition glorieuse; mais nous ne pouvons oublier que cette tradition repose sur des bienfaits réciproques et im- plique un accord entre les intérêts. Le jour où les relations diplomatiques ont été rompues entre la France et le Saint- Siège, la France a continué, pour sa part, à remplir scru- puleusement en Orient toutes les obligations que comporte le protectorat; mais elle a renoncé aux moyens dont elle disposait pour obtenir du Saint-Siège les bons offices et les égards particuliers dus à la puissance protectrice. Le Saint-Siège s'en est lui-même aisément dispensé. Il n'a rien perdu à un changement qui n'était fatal qu'à nos intérêts. Rôle des sociétés privées. — L'action de la France en Orient s'exerce sur une immense étendue de territoire : l'énumération qui précède suffira peut-être à donner une idée du nombre et de l'importance des œuvres que nous avons créées et développées dans toutes les contrées du Levant; encore n'a-t-il guère été question ici que des œuvres d'enseignement et d'assistance ; c'est à peine si l'on INTKRÈTS EIV OIUENT. 20 306 RAPPORT AU COMITÉ DE DÉFENSE a mentionné les entreprises françaises d'un autre ordre : banques et maisons de commerce, exploitations minières et agricoles, routes et chemins de fer. On souhaiterait du moins que l'opinion française, au lieu d'admettre sans contrôle les limites qu'une certaine opinion étrangère assigne fort arbitrairement à notre influence, voulût se persuader qu'en Orient la France a travaillé partout, que partout elle a répandu ses bienfaits, comme partout aussi elle a engagé ses intérêts. On constate nos efforts, on aper- çoit les résultats de notre action en Mésopotamie et en Asie iVIioeure, aussi bien qu'en Palestine et en Syrie. Nulle part nous ne devons abandonner l'œuvre entreprise, nulle part nous ne pouvons renoncer aux droits soigneusement conservés, aux avantages laborieusement acquis. Les ré- gions que l'on comprend d'ordinaire dans notre « zone d'influence » ne sont pas les seules où nous ayons exercé notre activité; ce ne sont peut-être pas non plus celles où nous avons le plus d'intérêt à maintenir notre action et à la développer. Quand nous nous serons bien pénétrés de l'immensité de l'effort accompli par la France en Orient, nous tolérerons moins aisément qu'on affecte ailleurs d'en méconnaître ou d'en restreindre l'importance. Nous comprendrons aussi qu'il n'appartient pas seule- ment au gouvernement de soutenir une si vaste entre- prise, mais que tous les Français ont le devoir d'y con- courir. J'ai pu me rendre compte, au cours de mon voyage, de l'aide efficace qu'apportent aux gouverne- ments étrangers certaines sociétés privées, et j'ai déjà eu l'occasion, dans les pages qui précèdent, d'expliquer le rôle et les moyens d'action de quelques-unes d'entre elles. Le gouvernement français consacre annuellement à nos œuvres du Levant environ un million de francs. C'est moins que ne dépensent pour leurs œuvres particulières DES INTÉRÊTS FRANÇAIS EN ORIENT. 307 plusieurs sociétés allemandes, russes, anglaises ou améri- caines. Chaque année, des dons importants, que sollicite une ingénieuse propagande, viennent augmenter les res- sources de la Société russe de Palestine, de l'Association italienne de Turin, de la Société allemande de Cologne, du « Palaestina Verein » et des nombreuses sociétés pro- testantes de Grande-Bretagne ou d'Amérique. On pourrait consacrer utilement tout un livre à décrire l'organisation de ces sociétés, leurs rapports avec les gouvernements, les moyens qu'elles mettent en œuvre pour accroître leurs ressources et la manière dont elles les emploient. Sans entrer ici dans tant de détails, je me bornerai à ob- server que la plupart d'entre elles tiennent le plus grand compte des conditions de la politique et de l'activité mo- dernes. Elles ne se contentent pas de construire des écoles et des hôpitaux : elles acquièrent de vastes domaines, les exploitent, et en appliquent les revenus à leurs œuvres de bienfaisance. Elles n'admettent pas que des commerçants, des industriels, des actionnaires de banques ou de compa- gnies de chemins de fer puissent tirer proHt des avan- tages qu'elles leur procurent, en leur ouvrant des débou- chés, en leur préparant des consommateurs, des clients et des ouvriers, sans avoir contribué eux-mêmes aux dé- penses que nécessitent cette pénétration et cette prépara- tion. Lorsque la société allemande '< Palaestina Verein » a dressé la liste des écoles et des hospices qu'elle se pro- pose de créer l'année suivante dans une région déterminée, elle dresse aussitôt une liste complémentaire : celle des maisons allemandes qui possèdent des intérêts dans cette même région, ou qui trouveront leur avantage à ce que la langue et l'influence allemandes y pénètrent ou y ga- gnent du terrain; et c'est à ces maisons de banque ou de commerce, à ces compagnies agricoles ou industrielles 308 RAPPORT AU COMITÉ DE DEFENSE; ETC. que la société demande de subvenir aux nouvelles exi- gences de son budget. Il est trop facile d'invoquer, pour se soustraire à cer- taines obligations, les changements survenus dans les conditions politiques et économiques du monde et dans les rapports que les difTérents peuples entretiennent entre eux. En ce qui concerne la France, on ne prétend pas que son action en Orient doive encore s'exercer aujourd'hui par les moyens qu'elle y employait autrefois et par ces moyens seulement. Aux intérêts moraux sont venus s'a- jouter des intérêts matériels, économiques, financiers ou politiques. Ces divers intérêts ne s'excluent point les uns les autres; ils se complètent, et le développement des seconds est étroitement lié à celui des premiers. Notre eObrt doit tendre à établir entre les intérêts moraux et les intérêts matériels que la France possède dans le Le- vant des liens multiples et tangibles; notre devoir nous commande de ne les jamais séparer les uns des autres, qu'il s'agisse de les défendre contre les entreprises de nos rivaux, ou d'en favoriser le progrès par quelque initia- tive nouvelle. Tous ces intérêts ensemble forment en Orient le patrimoine d'une nation, qui, tout en cherchant à accroître sa puissance et sa richesse, aspire encore à répandre ses idées, son esprit et son influence bienfai- sante, et qui ne s'est jamais résignée à ne travailler que pour elle. TABLEAUX REPRÉSENTANT LES ÉLÈVES DES ÉCOLES FRANÇAISES ' RÉPARTIS PAR NATIONALITÉ ET PAR RKLIGION. \^. B. — Dans ces tableaux, comme dans l'étude qui précède, on comprend sous e d'écoles françaises, avec les établissements proprement français, ceux que la e protège ou subventionne, et ceux dans lesquels le français est la langue officielle aseignement (écoles de l'Alliance Israélite universelle). 310 I. — GONSTANTINOPLE ET ENVIRONS LIEU FERA MODA PÉRA STAMBOUL . . . PÉRA CADI-KEUI . . . FERI-KEUI . . . PANCALDL . . . PERA KOUM-KAPOU. . SCUTARI . . . . GALATA PÉRA CHICHLI PANCALDL. . . HAYDAË-PACHA KOUM-KAPOU. . GALATA BÉBEK SCUTARI . . . . TCHOLKOUR-BOSTAN. CHICHLI ETABLISSEMENT NATIONALITE 53 Lycée J. Faiire | . 166 Lycée J. Faure |. 85 Lycée Vatelot Cours du soir Collège des Capucins Grand Séminaire ! • • • Collège des Lazaristes \. 328 Collège arménien catholique. .!. 135 s ( École Saint-Joseph j. 524 École de Chalcédoine. • . .'. 37 École Saint-Jean ' . 80 École du Saint-Esprit. . . .j. 118 École Saint-Michel .106 École des Assomptionnistes. . ! 120 École des Maristes J. 196 Alliance Israélite I . • . Lycée de M""^ Devaux. . . . École de M. Magnus École de N.-D. de Sion . . . — (école gratuite). Ecole des Oblates Ecole des Oblates École de la Providence. Asile 73 88 150 34 323 196 Maison Saint- Vincent . Maison Saint-Joseph. . École de filles Asile Orphelinat de filles . . Orphelinat de garçons. Externat et asile. . . . Z 64 13 36 . 148 135 31 90 72 124 12 58 40 80 100 106 99 Total des tllèves (garçons et fille I. — CONSTANTINOPLE ET ENVIRONS 311 KELIGIO.X TOTAUX ATHO ITINS LIQUES ORIEN- TAUX UNIS II il il 'S < ce en Z i Z C/2 1 . 128 . 28 91 . 10 . 4 . . 4 . 50 . 9 . 32 . 55 . . 245 . . 103 . . 92 . . 756 . . 146 . 1.100 10 . 47 . 8 . 41 . 71 )8 . . . . . 57 8 . . 16 170 . H . 3 . 122 . . 1 . . 1^ 3 . 29 . 61 ^ . . 6 . . . . 6 . . 2 . 28 . 68 . 134 . 269 . . 530 . . 135 . . 693 . . 71 . 7n . . . 38 . 4 . 30 . . 180 . . 200 . 2( . 14 K) 11 . . 7 9 . . 35 . 27 . 64 . . 252 . . 132 . . 201 . . 520 . 29 . . . 30 . 38 . 19 . 32 . 16 . . . 35 . 80 . 45 . . . 44 . 10 . 38 40 34 . 35 . 17 . . 4 . . 3 . 10 . 34 . 41 . 34 . . 130 . 1-^ . U 10 1 . . . . 271 . . 141 8 ^ 1 . 61 . 71 . 43 . 85 . . 4 . . 3 . 106 . 107 . 75 . . 429 . 66 . . . . 300 . . 204 . 10 4 . . ion ~ ' 4 . . . 110 . . 304 . 27 . 4 ■) 6 . . 176 . . 442 7 . . * 71 . . 118 1 . . . . . . 176 . 9 . . ... 26 . . 35 . . 180 . . 165 . . 101 . . . . . . Total génér ^onstuntinople et environs al. . . 4.793 ^~ 8^ 3.632 49^ • 1 312 II. EGYPTE ALEXANDRIE ÏANTAH. . MANSOURAH ZAGAZIG. LE CAIRE ETABLISSEMENT Lycée français de garçons. . . — ^ filles . . . . Ecoles de l'Alliance Israélite (g;ir- çons et filles) Ecole primaire laïque Collège des Jésuites Collège Sainte-Catherine, . . . École gratuite Ecole Saint- Joseph Ecole Saint-Louis ... . . Ecole Saint-Michel École de Ramleh École de Moharrem-Hey . . Ecole d'Ibrahimieh École professionnelle. . . . Institution Girard Institution Jacot Pensionnat de la Mère de Dieu . Pensionnat de N.-D.-de-Sion . . Id. École gratuite Écoles des Filles de la Charité . Orphelinat (id.) Externat Saint-Joseph (id.). . . Collège Saint-Louis p]cole de filles . Écoles de l'Alliance Israélite . . Collège Saint-Louis Ecole de filles Ecole des Fr. de la Doctr. chrét. École de Droit Lycée de garçons Lycée de filles Collège Esnault . . Cours de commerce NATIONALITE 64 82 108 189 118 78 91 29 GO 311 143 40 319 144 II. — EGYPTE 313 RELIGION TOTAUX CATHOI ATINS .IQUES ORIEN- TAUX UNIS - g a C < r^ , r- < 5 -r. ■r. p_ . . 4 4 . . . 67 . 16 . 1.: \ . 178 . 19 . . 268 . . 82 . . 5 . . ■ . 242 . . . 113 . . 1^4 125 315 129 . 88 . 42 . . c ) . 40 . 10 174 . 85 . 175 . 1^ > . 90 . 30 566 347 . 92 . 46 •^ > . . 7 . 17 511 26 . 42 . 52 . . 9 . 59 . 37 225 10 . 11 . 110 . 18 . 39 . 19 . . ] . 30 . 17 79 255 50 . 30 95 . 77 . 42 . 13 ^ I . 28 . 42 301 37 . 12 . . 4 . 40 . . ] . 89 . 14 197 45 . 10 . 16 . . 4 . 1] . . 9 . 95 95 . 71 . 35 . . 6 . 10 . 17 234 17 . 41 . . 4 . . . . . ] . 13 . 19 95 . . 127 a4 45 . 36 . . 3 . 26 . 16 . . 160 . . 93 . . 53 ( ) . 16 . 23 . . 194 . . 61 . . . 23 l . . 8 . . . 93 984 . . 257 . 40 . 180 . 44 123 280 440 . 331 . 1.542 172 . 14 35 . 97 . 77 . 35 [ î . 41 . 43 29 77 . 88 34 ( > 20 68 . . 320 . 92 . 378 . . 116 30 . 75 . 53 . 77 t 2 . 51 . 90 14 103 . 35 . 21 . 9 8 . 29 77 . . 153 . . 20 . . . 35 . 4 . 10 . . • . 403 . 178 . . 93 . . 19 . . . 28 . 19 . . 168 . 32 . 261 . . . . 402 314 II. — EGYPTE {Suite) LIEU LE CAIRE SUEZ. . . PORT-TEWFIK ETABLISSEMENT Collège Jeanne-d'Arc École Oiianducci École Garrivier-Millerey ... Collège des Jésuites , /■ Collège Saint-Joseph . . . , Collège J.-B. de la Salle . , École gratuite Saint-Vincent Collège d'Ismaïlieh Collège Saint-Paul École de la Sainte Famille . École Saint-Antoine . . . . École Saint-Marc Ecole d'Héliopolis Collège maronite École de l'Alliance Israélite. . . Externat de la Mère de Dieu. . École gratuite (id.) École de Ghéziréh (id.) Ecole du Bon-Pasteur Orphelinat (id.j Mousky (id.) Sœurs de Besançon ...... N.-D. de la Délivrande École gratuite (id.^ N.-D. des Apôtres ■^^( École d'Abdine '^J< École gratuite g"; Orphelinat Sacré-Cœur : Pensionnat .... Id. École gratuite Id. Héliopolis École des Frères. . Sœurs du Bon-Pasteur École des Frères. ... NATIONALITE 114 70 32 224 215 536 246 41 199 146 . 7 113 22 160 27 44 35 113 65 142 120 15 44 75 . 5 20 22 . 2 II. EGYPTE [Suite 315 RELIGION 1 1 TOTAUX THO riiNS LigUES ORIEN- TAUX UNIS V. ce ^ H ^ ^ " — f: u: 5 il •r. r- JL Z ■w r. r. Z o o- K C X . 34 . . . 44 . . 7 . 86 . 10 . . 30 . . 150 . 39 . . . 66 . . 5 . . 8 . . 2 22 . . 98 . 75 . . . 34 . 18 . 60 . 10 25 . . 175 . 203 . . . 68 . . 6 . 28 . 33 338 . 159 . . . 94 . . 8 . 54 . 35 350 . 387 . . . 193 . 20 . 187 . 70 869 . 202 . . . 52 . 13 . . 8 . . 8 283 . 134 . . . 43 . . 6 . 62 . 40 285 . 242 . . . 76 . 22 . 19 . 32 391 . 224 . . . 26 . . 8 . 34 . 12 304 . 83 . . . 19 . 10 . . 1 . 5 118 . 81 . . . 14 . . 4 . . 9 . 9 117 . 32 . . . 16 . . 5 . 11 . 12 76 . 160 . . . . . • • • • 160 322 . . 109 . 104 . . . 35 . . 9 . . 7 . 41 196 . 78 . . . 12 . 90 . 35 . . . 10 . 11 . . 5 . 17 78 . 102 . . . 70 . 12 . 13 . 43 240 . 124 . . . 18 . . 6 2 4 154 . 158 . . . 60 . 16 . 143 . 15 392 . 40 . . . 25 . 15 . 112 . 8 200 . 116 . . . 66 . . . 9 . 9 200 . 130 . . r ' * ... 1 • 130 200 358 . 405 . 43 . . . 14 2 . 2 . 6 . 38 . . . 14 2 . • 54 . 47 . . . 37 , . 84 . . 6 . . . . 5 . . 1 . 1 12 . 56 . . . 21 . 4 . 13 94 II . 77 . . . 40 . 4 . 8 . 17 1. . . . . . . 146 II 48 . . . 27 . . . 1 1. 7( 3 II 316 II. — EGYPTE (Suite) PORT-TEWFIK ISMAILIA PORT-SAÏD MINIER . MELLAOUI TAHTA. . ASSIOUT. ETABLISSEMENT Filles de la Charité ... École Calas Pères de Terre Sainte .... Filles de la Charité Lycées (garçons et filles). . . Collège des Frères Ecole gratuite des Frères. . . Pères de Terre Sainte .... Pensionnat du Bon-Pasteur . École gratuite (id.) . . . ._. Orphelinat (id.) École arabe (id.j |. 00 NATIONALITÉ o 5 14 3 22 38 42 . 6 S2 Ecole des Frères. École des Jésuilcs École des Frères. École des Frères. École des Jésuites École des Frères. École des Jésuites 92 482 78 189 789 171 299 60 16 72 61 83 112 173 126 . 7 25 Total des Élèves (garçons et JAFFA RAMLEH JERUSALEM III PALESTINE ^ { Collège Saint-Joseph . . ^ 1 École gratuite S.-J.-B. . "^ ( École gratuite S. -Antoine Sœurs de Saint-Joseph .... Alliance Israélite Pères de Terre Sainte .... Sœurs de Saint-Joseph .... Sainte-Anne : Séminaire . . . Séminaire des Lazaristes. . . 489 i. 48 \ 394 28 . 25 [I. - ÉGYI *TE (Suite) 317 RELIGION 1 1 TOTAUX ^TIR TINS LIQUES ORIEN- TAUX UNIS si o H S. m h- C/3 E < •3 C < C -9 . 64 . . . 14 . . 1 . . 3 . . 82 i 24 . . . 30 . . 112 74 . . . . 2 . . 80 76 . . . 15 . 16 . . 4 . . 1 .116.. . 23 . 14 . 32 . 14 . . 129 . . 70 . 111 . . . 52 . . 2 . 15 . . 180 . 175 . . . 34 . . 9 . . 6 . . 224 132 . . 132 . . 143 . . 167 . . 81 . . 60 . 67 . . . 10 . 21 . . 100 150 . . . 164 . 39 . 38 . 68 . 22 . . 1 . . 482 . . 81 . . 191 . 20 . . . 152 . . . 407 . . . 363 . 99 . 19 . 43 . . 789 . . 198 . 47 . . . . 9 117 . . 174 . 8 . . 299 ' ■ Total général. . 13.114 7.255 en Egypte •. III. - PALESTINE 20.369 41 . 15 . 41 . 6 . . 27 . 82 . . 212 99 . 25 34 . 80 . 137 . 208 . . 1 . 11 . . 139 . . 189 . 419 18 73 ;" . 5 . . 27 . 250 . 104 . . 150 . . 100 15 . . 100 . 125 9ft 125 . 28 318 III. — PALESTINE [Suite) LIEU ÉTABLISSEMENT NAl z o TONAL Z ■ < ITÉ Z JÉRUSALEM . . — ^ . . BETHLÉEM . . RAMALLAH . . CAIFFA . . . . S*-JEAN-D'ACRE Séminaire Syrien ci i Collèffe . 20 c«-" ^ Ecole gratuite Orphelinat Saint-Pierre de Sion . Ail israél * Érole nrofess^'*' ■ ' ■ — Ecole de ararcons — Ecole de filles — Asile enfantin N -D de Sion ■ Ornhelinat — Pensionnat. . . Second Pensionnat . 38 . 25 . . 4 . . 7 N.-D. de Sion : Extern, musiil. . — Orphelinat Saint-Jean. Sœurs de Saint- Joseph : école. Id, Ecole paroissiale . . 70 . 50 Orphelinat grec . . Sœurs du Ros. (21 éc. de village). Orphelinat de filles de la Charité. École des Frères. ... . . . Sœurs de Saint-Joseph : école. — École gratuite et asile. Externat de Files de la Charité, Orphelinat et Crèche Sœurs de Saint-Joseph .... École des Frères. Alliance israélite ... , ' . . . . Collège melchite 250 École maronite. . . . 20 Dames de Nazareth Tertiaires du Carmel. . Filles de la Charité École melchite . 60 Pères de Terre Sainte . Dames de Nazareth . . III . — PALESTINE [Suite] 319 RELIGIOxN TOTAUX ;atho VTINS LIQUES ORIEN- TAUX UNIS 1 ARMENIENS (3RÉG0RIENS 1 r. Ci) J os . 20 20 . 262 150 206 42 . 28 • • 14 . . . . 85 . . 60 310 95 70 39 . 23 . . 4 • . 5 . . 7 10 . . 8 . 14 . . 9 . . 4 . 29 5 . . . 12 . . 1 . . 7 . . 1 . 62 . 15 . 70 . . 1 . 16 . 43 15 . . . . 33 . . 70 34 1 . . 50 . . 237 9 30 . 250 . 15 . 185 . . 15 758 . . 3 18 . . . 72 . . . . 144 . 1.577 101 . . 81 . . 168 500 •^0 )0 . 15 . 17 35 119 5( . 15 . . 2 . 10 65 96 . 70 44 . 114 . 35 . . 2 374 . 43 . . 241 210 . . 164 . . 270 . 250 . 20 . 195 . 68 . 178 . 60 . . 250 20 8 . 17 . . 7 90 . . 2 . . 3 . . 120 60 . 35 . 72 . . 200 . . 60 . . 145 . . 94 . 50 10 . 48 . 12 _ . 24 320 III — PALESTINE [Suite LIEU TIBERIADE NAZARETH ORFA. . . MAMOURET-UL-AZIZ KARPOUT . MARDINE. . MALATIA. . DIARBÉKIH iMOSSOUL ETABLISSEMENT NATIONALITE Alliance Israélite . . . École melchite Ecole des Frères. . . . École melchite Pères de Terre Sainte . Orphelinat de Salésiens Dames de Nazareth. . . Sœurs de Saint-Joseph . 30 124 130 , < Total des Elèves (garçons et fille IV. — MÉSOPOTAMIE Ecole des Capucins . . . 150 1 Ecole des Franciscaines .... . 300 Collège des Capucins . . 217 Ecole de filles 55 Asile d'enfants. . 116 École de villages. . . 125 Ecole des Capucins ...... 235 École des Capucins . . . . 990 Ecole des Capucins . 350 École de garçons . . 108 École de filles . 235 Écoles arméniennes . 270 École chaldéenne. . . 130 Collège du Progrès 180 Séminaire syro-chaldéen .... Séminaire du Patriarcat .... École Saint-Dominique . 37 . 14 . 206 p]cole des filles 216 Salle d'asile .... 290 Alliance Israélite . 339 i III. — PALESTINE 'SuUe": 321 RELIGION TOTAUX 1 ATIU» lTINS .IQUES ttRlEN- TAUX UNIS ■y: a - os = ( ARMENIENS (IRÉGORIENS 1 ■y) ce •y; ï ! i 5' 1 . 307 . . 106 30 . . 261 254 . 30 . 50 130 39 . 25 2 . . . 8 . . . i . . 124 130 . li dO . . 150 U . • • • 34 74 1, 54 1 7 . 28 . 163 • • • en Palestin Total général . . e ... 3.425 9 . . 150 5.577 002 . . 300 r\ r. — ] VIÉSO POT^ LMIE 32 16 . 19 . . 9 . 11 . 154 . 23 . 80 . . 8 . 7 . . . . . 4 . . 217 . . 55 17 . . 4 . . 4 • • • . . . . . 116 . . 75 . . 50 . . 170 . . 838 . . 200 . . 235 . . 120 . . 216 . . 96 . . 65 i. . 152 . . . . . . 1 j. . 150 7 . 12 . 71 . 270 . 130 . 82 . 131 7 \ . . 108 13 . 17 2 . . . . i 1. . 150 '. . 130 . 180 !. . 180 . 37 . 14 . 175 . 183 . 250 . . 37 • • ■ . . 14 .) 10 0 . 20 . 17 . 31 . . 6 . . 6 . . 206 !. . 290 . 334 . . 5 ;. . 243 INTÉRÊTS FRANÇAIS. 21 322 IV. — MÉSOPOTAMIE [Suite] MOSSOUL DJEZIREH-IBX-OMAR MAR-YACOUB . SEERT. . AIN-SALIB VAN. . . AIDJl-OGHLOU. CLORTAR BAGDAD. HILLE. . HANIKMÉ AMARAH . BASSORAH ETABLISSEMENT NATIONALITE Écoles syriennes Ecoles chaldéennes , Ecoles de village École des Dominicains Pensionnat de garçons .... Écoles de village Iicole de garçons École de filles et asile .... École de filles et asile .... Écoles de village École de garçons , École de filles Asile École arménienne École arménienne École de villages Collège de Carmes École chaldéenne École arménienne École chiite Alliance Israélite Sœurs de la Présentation. . . Alliance Israélite Alliance Israélite Écoles des Carmes Alliance Israélite École des S. de la Présentation . 160 . 280 1.465 . 160 . 17 . 199 . 108 . 121 . 123 . 97 . 128 . 221 41 80 190 70 310 o c o Total des Élèves (garçons et fil IV - - MÉSOPOTAMIE [Suite] 323 —l RELIGION TOTAUX ;atho ATINS LIQUES ORIEN- TAUX UNIS z ^ W ± 5 -S Z H à a- Z S 5= Z o a: d . 160 . 280 160 . . 100 . . 995 . . 75 . . 120 121 180 470 . 85 . . 17 79 . 72 . 18 . . 8 . 20 . . 108 . . 123 . . 97 . . 221 . 31 . 96 . . 128 . . 160 . . 950 . . 714 . . 60 . . 80 25 . . 129 . 29 . 30 . 69 . 11 . . 98 . . 41 . . 80 ?0 . 266 . 182 . . . . . 3 . 18 . 3 . . 307 . . 190 5 • ^0 . . 70 . 310 . . 310 . 1.400 24 . 790 . . 8 . 18 . . 130 . . 175 . . 120 . . 30 . . 178 10 . 119 . . 9 . 10 . 15 . . 25 Total en Mésopotamie . généra 1. . . . . . . 6.921 12 5.993 r9H 324 V. - SYRIE LIEU ÉTABUSSEMENT NATIONAI ■^. /^ i H .ITÉ 'J' i BEYROUTH. . ANTOURA . . JOUNIÉH. . . BATROUN . . AMCHIT . . . GEBAIL . . . BAABDAH . . ZOUK .... . Faculté de médecine Université Saint-Joseph. 1 . Séminaire oriental . 33 . 49 f . . 8 . 11 . Collège des Frères . Mission laïque : garçons .... — filles . 463 . 138 . Collège maronite . Collège melchite. ....... . Alliance Israélite . 315 . 192 2 . . ? . Écoles gratuites des Jésuites . 1 { École Saint-Vincent .... . S l École Saint-Jean-Baptiste. . . École des Capucins . 210 198 . . 4 . École Saint-Sauveur . École syrienne catholique . . . Dames de Nazareth . 216 . 64 i . Sœurs de Saint-Joseph . Sainte-Famille. ........ . 357 . . 6 1 . 1 / Raz- Beyrouth . i V La Quarantaine — < Maison centrale ... . 492 . 427 . . 8 . . 4 - -■ . . 6 . . 4 . f / Orphelinat (garçons). . . . i ( Orphelinat (filles) . 184 . 300 . 16 ' 1 . Cours de M"e Plassat. . . Collège des Lazaristes . École des Maristes Sainte-Famille . 300 . 258 . 276 . 60 . 30 . 120 . 60 . 159 . 170 . 200 . École des Maristes . École des Mariamettes École maronite . École des Maristes ....... . École des Maristes ' . Sainte-Famille. . ^ ■ . Filles de la Charité ! Vi 1 V SYRIE 325 RELIGION TOTAUX ATIU» ITINS JQUKS ORIEN- TA rX INIS II 5- •a es tu O ■y. 60 22 13 4 . 217 . 45 . 211 . 14 . . 7 . 300 . 102 . . 5 . . 5 . 13 0 . . . 80 . 149 . 46 . . 9 . 12 . 31 . . 3 . 24 . 16 . 21 . 38 . . 5 . . 1 . 484 . 22 . 35 . 95 .. 68 . 13 . . 3 . 59 . 16 . . 243 . . 459 . . 45 . . 504 . . 198 38 . 3 . . 315 . . 196 . . 280 . . 387 . . 220 586 ., . 127 . 146 . 40 . 177 . 64 . 488 . 235 . 289 . 342 . 375 . 46 . 19 :^ . . 210 . 2 . 4 . 25 1 . . 202 40 . 28 . . . 1 11 1 216 . . 64 . . i ^0 . . . 45 . 80 . 35 . 52 . . 3 . . 3 . 35 . 28 . 72 . .3 . 7.3 7 . 363 25 10 8 .... 1 . . . 400 . . 506 435 !" . 150 . . 622 . . 300 200 . 300 . . 16 . 200 . 234 . 255 . . ( 50 . . . 20 . 20 . 40 1 . . 300 . . 260 . . 276 60 . . 30 . . 120 . . 60 !. . 159 . . 170 ... II. . 80 . . 120 326 V. — SYRIE iSuite) NATIONALITÉ LIEU ÉTABLISSEMENT ■/. § 5 7'. < GHAZIR .... Collège maronite . 90 BAABDETH. . . BROUMMANA. . BEIT-MÉRY. . . HAMMAXA . . . Sœurs de Besançon Filles de la Charité Ecole Kazier ........ . 125 . 210 . 55 • .A i Sœurs du Bon-Pasteur . 108 . . 9 LE KREYE. . . Sœurs de Besançon . 100 1 BIK-FAYA . . . SGORTA. . . . Sainte-Faniille. . . . . . 48 Filles de la Charité ...... . 350 f HATROUN . . . DEIREL-KAMAR Filles de la Charité Sœurs de Saint-Joseph . 215 . 265 École des Maristes . 240 BESKINTA. . . ENY. DE BEYROITH. Sœurs de Besançon Collège Saint-Jean Maron. . . . . 89 . 120 ZAHLÉ TANAIL . . . . Collège melchite. 218 . Écoles melchites 1.399 Orphelinat agricole . 50 LIBAN Ecoles des Jésuites Écoles des Capucins . . SAIDA Ecoles des Lazaristes. École des Maristes ... . 125 . 10 Ecoles melchites 1 071 Sœurs de Saint- Joseph . 265 SOUR Sœurs de Saint-Joseph . 244 LATTAQUIE . . TRIPOLI. . . . (et environs) BCHERRÉ . [ [ Ecole des Frères. . 159 ' ■ Sainte-Famille , . . 131 Filles de la Charité 1.700 Ecole des Frères. . École de M'"^ Rahmé . 140 DAMAS Collège des Lazaristes . . Écoles des Lazaristes . — Collège melchite . 280 — Alliance Israélite. . Filles de la Charité . 630 1 SYRIE [Suite) 327 RELIGION TOTAUX 3ATH01 ATINS JQUES ORIEN- TAUX UNIS — — GRECS ' ORTHODOXES <: 1 z < < ■/. 90 19P» . . . . . . . . 30 55 . . 180 110 . I( 3 . . 2 100 48 350 215 3 . 260 9 265 . . 240 . 89 . 120 . 218 1.399 . 50 . 120 . 4.963 . . 275 244 218 1.399 50 5 424 1.350 . . . . 6.200 . . 125 1 071 119 . 124 . 221 . 24 . 63 . 16 2 . 14 . . 9 . 12 . 7 . . 5 . 110 . 68 . 7 . . 159 131 750 . . 950 140 480 . 110 ■ 10 . 85 . . 205 385 . . 244 . . 525 . 240 27 . . . 10 . 30 . . 1 . . 8 . . 280 . . 260 . . 115 . . 5 ' . . 2 . 90 . . 5 328 SYRIE Suites LIEU DAMAS ALEP ALEXANDRETTE BEYLAN. . . . ANTIOCHE. . . KODERBEK. . . VI ADANA. . MERSINA TARSOUS AMASSIA. CÉSARÉE ETABLISSEMENT Filles de la Charité, au Midan Franciscaines de Marie. . . . Collège des Franciscains. . . Écoles arméniennes : garçons - filles. . gratuite garçons . . filles . . . Écoles melchites Écoles syriennes garçons filles . Alliance Israélite. . . Sœurs de Saint-Joseph. Sœurs de Saint-Joseph, École arménienne. . École des Capucins . . Sœurs de Saint- Joseph. Ecoles des Capucins . . NATIONALITE •270 114 261 138 150 229 71 184 162 645 183 90 60 100 230 5 ?^ :- C 10 20 |i Total des Élèves (garçons et fîll ASIE MINEURE ET ARCHIPEL Écoles des Jésuites Sœurs de S. -Joseph : pensionnat. Id. École gratuite Id. École maternelle Écoles arméniennes Écoles des Capucins Sœurs de Saint-Joseph École des Capucins Sainte-Famille Écoles des Jésuites Écoles des Jésuites 433 207 . 27 . 10 148 . . 1 235 . . . 350 . . . 170 . 20 210 117 200 734 . . 648 V. — SYRIE [Suilej 329 RELIGION CATHOLIQUES \TINS ORIEN- TAUX UNIS .01. . 25 31 10 5 232 126 170 112 150 200 63 182 145 528 100 90 en Syrie si •w 5 7i «S K 2 32 . 5 40 60 17 17 . 8 . 2 12 72 84 Total général H >r. H < ^ U tri h3 S 79 2i 18 . 1 12 24 15 TOTAUX 228 261 150 229 184 905 60 60 140 270 125 138 71 162 195 645 206 30 100 90 25.801 15.198 40.099 VI ASIE MINEURE ET ARCHIPEL 92 . 341 . 129 . 124 . 163 3 12 . . 433 . 66 . . . 21 . . 33 . . 4 . . 2 . . 2 . . 1 . . 4 . . 207 . . 149 50 . . 20 . . 235 . . 1. 350 . . 150 . . 200 90 . . 65 . 127 . 39 . 100 7 . . 8 . . 6 1. . 170 75 . . 2 . . 210 12 . 24 . 90 . 18 24 j. . 117 . . 304 . 10 . . 200 . . 430 . . 226 . . 422 330 VI. — ASIE MINEURE ET ARCHIPEL [Suile) LIEU MARSIVAN. SI VAS. . . TOKAT. . . SAMSOUN . ERZEROUiM. ARABKIR. . ANGORA. . ESKI-CHEHIR OUCHAK KONIAH SMYRNE ETABLISSEMENT Écoles des Jésuites Ecoles des Jésuites Ecoles des Jésuites Ecole des Maristes Ecole des Capucins .... École de Filles Écoles arméniennes .... École des Frères École de Filles École des Assomptionistes . École des Filles École des Parères École des Assomptionistes . École des Filles Collège des Lazaristes . . . Collège Saint-Joseph . . École de Gueuz-Tépé . . École Saint-Jean .... École de la Pointe . . . Id. gratuite École de Cordelio École de l'Alliance française Collège de Sion Alliance Israélite Dames de Sion Id. à Cordelio Sœurs de Saint-Joseph . . . ^ / p]coles de la Providence. J i Écoles de l'Hôpital . . . « j École de Boudja .... ■s 1 École de Bournabat . M I École de Gueuz-Tépé . . *" ' Orphelinat de Koula . . École de Mortakia NATIONALITE 745 118G 313 135 107 114 241 200 100 117 88 58 153 97 75 104 64 70 18 29 81 49 10 30 71 84 172 91 49 01 97 z I < o o O 15 22 . 7 20 31 47 105 . 7 129 75 150 G9 21 41 94 58 38 286 284 37 m 38 I VI. — ASIE MINEURE ET ARCHIPEL {Suite) 331 RELIGION TOTAUX CVTHO LATINS LIQUES ^ ORIEN- .g TAUX 1 UNIS < O O il C/3 . Z (/3 m •S ce W3 Z D (73 Z o 5 ! . ... i • . 360 . . 383 . 664 . . 4410 . 48 . 41 . . 670 . . 516 . . . . . . . (. 313 * . . . . 135 . 107 . . 114 . 241 . ." 71 200 . . 170 . 100 . . . 100 *. . 51 . . 1 . . 75 . 3 . 3 . 132 . 50 . . . 43 . 2 5 . ■. . . . 112 . 13 . . . 11 22 . . 22 . 68 . 57 . . . 132 . 3 . 13 . 175 . 47 . . . . 58 3 . 23 . . . . 131 . 83 . . . 26 . 21 . . 2 . 11 . . 4 . 147 . 142 . . . 18 . 43 . . 3 . 24 . 16 . 246 . 12 . . . 4 . 12 . . 26 . 20 . 74 . 1G6 . . . 6 . 28 . . . 8 208 . 64 . . . 8 . 26 2 2 . . 102 . 169 . . . . 17 . . . 186 . 72 . . . 24 . 46 . . 1 7 4 . . 156 . 20 . . . 2 . 37 . . 1 13 . . 73 . 55 . . . 10 65 1.205 . . 997 . 69 . . . 21 . 15 . . 1 2 3 . . 110 . 56 . . . 40 . 28 . . 2 4 4 . 136 . 5J . . . . 57 . . 9 7 . . . . 124 488 . 315 . . . . 105 . . 20 400 . 26 . . . . 86 . ^93 . 94 . . . . 31 . 7 2 . . 134 . 25 . . . . 48 53 18 . . 144 1 . . . 134 il - . 1 1 . . 80 1 332 VI ASIE MINEURE ET ARCHIPEL {Suiie SMVRNE. AIDIN . . Vilayet d'AIDlX RHODES. METELIN CHIO . . SAMOS. . DARDANELLES. BROUSSE NEW-CHEHIR. ZONGOULDAGH ISMIDT ETABLISSEMENT Alliance franc., cours du soir. Alliance Israélite Filles de la Charité Alliance Israélite École des Frères École normale Sœurs Franciscaines Alliance Israélite Ecole des Maristes Sœurs Franciscaines École des Frères Sœurs de Saint-Joseph . . . . Pères des Missions africaines. Sœurs de Saint- Joseph . . . . Alliance Israélite Sœurs Géorgiennes École Benoît Collège des Assomptionnistes , Filles de la Charité. ...... Alliance israélite École des Assomptionnistes. , École des Frères Sœurs de l'Assomption. . . , Collège des Assomptionistes École de Filles NATIONALITE 1^ I .. < r- C 131 *38 75 38 38 46 . 4 49 18 4 4 35 57 22 21 . 7 21 10 Total des Élèves (garçons et fill VI ASIE MINEURE ET ARCHIPEL (Suite) 333 RELIGION TOTAUX ( \-niu LATINS LigUES ORIEN- TAUX UNIS K 2 a: •A (73 < O . . 179 . . 110 . . 100 . . 362 . . 64 . . 193 . . 44 ■ . . 232 • ■ • . . 1087 . . 17 . . . 104 . 14 . 10 . . 145 . . 21 . . 27 . . • . 27 . . 6 . . 4 . . 246 . . 11 . . 8 _ . 65 . 30 . 28 . 43 . 21 . 54 . . 6 6 . . 82 . . 30 . . 22 . . . 4 . . . . 17 . . . . <) . 21 . . 6 . 19 . . 1 . . 1 . . 73 . . 26 . . 263 . . 105 • . . 72 • • 224 . 80 . . 170 200 ■ • - 4 . . . . . . 82 . . 3 . . 109 110 . . 30 . . 160 . . 35 i . . 50 ■ ■ i . . 9 . . . . 15 . . . 2G 57 . 19 10 . . 6 . 18 îl. . . :-i9i . . 79 . . 100 . i en Asie Mineure et dans 1 Total irénéra Archipe 1 . . . 9.249 17 S. 054 303 334 RÉCAPITULATION TABLEAU RÉCAPITULATIF Constantinople et environs ^ Egypte 2( Palestine \ Mésopotamie \: Syrie 4( Asie Mineure et Archipel V Total des élèves fréquentant les écoles françaises 10^ TABLE DES MATIERES Pages. Introduction v Chapitre I". — Constantinople 1 Établissements français 2 Établissements étrangers 23 Observations. L'enseignement du français dans les écoles grec- ques 27 L'enseignement du français dans les écoles ar- méniennes 28 L'enseignement du français dans les écoles mili- taires ottomanes 29 Écoles laïques et écoles congréganistes 30 Enseignement primaire et enseignement secon- daire 31 Enseignement et assistance 31 La question arménienne-catholique 32 Le Délégué apostolique et les intérêts français 33 Agents français et agents étrangers à Constan- tinople 34 Chapitre II. — Egypte 37 Alexandrie 38 Tanlah, Mansourah, Zagazig 49 Le Caire 52 Suez, Port-Tewfik, Ismaïlia 65 Port-Saïd 68 Haute-Egypte 73 Observations. L'enseignement français en Egypte 73 , La question de l'École de Droit du Caire 76 Chambres de commerce françaises en Egypte 77 Le commerce français en Egypte 78 Industrie et travaux publics 79 Finances 80 336 TABLE DES MATIERES. Pages Navigation, transports 81 Intérêts politiques. Relations franco-anglaises 82 Compagnie du Canal de Suez 82 La Délégation apostolique d'Alexandrie et Ws, inté- rêts français 83 Les Franciscains de Terre Sainte et les intérêts fran- çais 84 Vœux exprimés 85 Chapitre III. — Palestiive 87 JaflTa 88 Roule de Jaffa à Jérusalem : Mikweh-Israël, Ram- leh, El-Atroun, Abou-Gosch 90 Jérusalem . '. 93 Bethléem, Beit-Djala, Jéricho 105 Roule de Jérusalem à CaïfTa : Ramallah, Naplouse. 108 Caïfl'a 112 Saint-Jean d'Acre, Tibériade 115 Nazareth, Chefa-Amr 116 Observatwns. L'influence française en Palestine ". 123 Les écoles françaises 125 Les hôpitaux français 127 La Custodie de Terre Sainte et les intérêts français. 128 Le Patriarche latin de Jérusalem et les intérêts fran- çais 129 La question juive en Palestine et les intérêts fran- çais 130 L'Alliance française 131 Le commerce français à Jérusalem et en Palestine. 131 Jéricho et la vallée du Jourdain 132 Les ports de Jaffa et de Caïffa 133 Consulats français et consulats étrangers en Pales- tine 133 Chapitre IV. — Mésopotamie 135 Région d'Or fa. Orfa 136 Mamouret-ul-Aziz 137 Karpout 139 Mar.lin 139 Malatia 139 Diarbekir 139 Établissements étrangers dans la région d'Orla 141 Région de Mossoul. Mossoul 146 Djéziréh-ibn-Omar 150 Mar-Yacoub, Secrt, Van , 150 TABLE DES MATIÈRES. ' 337 Fugof. Adji-Oghlou, Clortar, Achithâ 152 Établissements étrangers dans la région de Mos- soul 152 Région de Bagdad. Bagdad 155 Hillé, Hanikmé, Amarah 158 Bassorah, Mohamarrah, Bouchir 159 Établissements étrangers dans la région de Bagdad. 160 Observations. L'œuvre des Dominicains et l'influence française à Mossoul 162 Commerce, agriculture, travaux publics à Bagdad. . 164 Missions archéologiques en Mésopotamie 165 Les entreprises de la Société française des Routes. . 167 Le chemin de fer de Bagdad 168 L'irrigation de la Mésopotamie 172 Chapitre V. — Svrœ 175 Beyrouth 176 Le Liban et la côte de Syrie. Anioura 192 Jouniéh, Batroun, Gebaïl, Amchit, Baabdah, Zouk, Ghazir 193 Baabdeth, Phannès, Broummana, Beit-Méry 195 Hammana, le Kreye, Bikfaja 198 Sgorta, Hasroun, Deir-el-Kamar, Beskinta 199 Zahlé, Tanaïl, Ksara 199 Gezzine, Sour, Saida 201 Laltaquiéh 203 Tripoli de Syrie 20i Bcherré, Enféh 205 Damas 206 Homs 212 Alep 214 Alexandrette, Beylan, Aniioche, Koderbek 219 Observations. Influence française et influences étrangères en Syrie 223 Culture littéraire et enseignement scientifique en Syrie 226 Projet d'une école de droit à Beyrouth 227 La question d'un journal français en Syrie 228 Les émigrants algériens en Syrie 230 Questions libanaises 231 Les banques étrangères en Syrie 23 i Les ports syriens 235 Les chemins de fer syriens 236 L'entreprise française des Routes 237 INTÉRKTS EN ORIENT. 22 338' TABLE DES MATIÈRES. Pages. Chapitre VI. — Asie Mineure 241 Adana, Mersina, Tarsoiis 242 Amassia, Césarée, Sivas, Tokal 248 Samsoun, Erzeroum, Trébizonde 2.52 Arabkir, Angora ' 353 Eski-Chehir, Ouchak * 254 Koniali 255 New-Chehir, Zongouldagh 256 Sniyrne 257 Aïdin et vilayet, Magnésie 268 Rhodes, Mételin, Chio, Samos 269 Dardanelles 271 Brousse, Ismidt 272 Observations. L'industrie et le commerce français à Smyrne 275 Entreprise agricole française dans la plaine d'Adana. 276 Entreprise d'irrigation dans la plaine de Koniah... 277 Les chemins de fer français en Asie Mineure 277 Observations générales. Utilité de nos œuvres en Orient 279 Nos œuvres et nos intérêts 280 Importance des œuvres d'assistance 280 Utilité d'un enseignement pratique et professionnel. 282 Enseignement des langues indigènes 283 Recrutement des maîtres indigènes, la question des écoles normales 284 Recrutement des missionnaires congréganistes 289 Subventions attribuées aux œuvres d'Orient 291 Les intérêts français en Orient et le gouvernement ottoman 295 Les intérêts français et le Saint-Siège 301 Rôle des sociétés privées 305 Tableaux représentant les élèves des établissements français d'Orient répartis par nationalité et par religion 309 ô5 6) 325.344 P425R c.1 Pernot # Rapport sur un vovaqe d'étude a Constant 0) 3 0005 02042850 7 3^5.344 P425R Pernot Rapport sur un voyage d'étude a Constantinople, en Egypte et en Turquie d'Asie Janvier- Août 1912 325.344 P425R Pernot I r\^\ I / / Rapport sur un voyage d'étude a Constantinople j en Egypte et en Turquie d'Asie Janvier- Août 1912